Project Gutenberg's Trait� �l�mentaire de la peinture, by L�onard de Vinci This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included with this eBook or online at www.gutenberg.org Title: Trait� �l�mentaire de la peinture Author: L�onard de Vinci Illustrator: le Poussin Release Date: April 26, 2011 [EBook #35971] Language: French Character set encoding: ISO-8859-1 *** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK TRAIT� �L�MENTAIRE DE LA PEINTURE *** Produced by Claudine Corbasson and the Online Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This file was produced from images generously made available by The Internet Archive/American Libraries.) Au lecteur Cette version �lectronique reproduit dans son int�gralit� la version originale. La ponctuation n'a pas �t� modifi�e hormis quelques corrections mineures. L'orthographe a �t� conserv�e. Seuls quelques mots ont �t� modifi�s. La liste des modifications se trouve � la fin du texte. TRAIT� �L�MENTAIRE DE LA PEINTURE. [Illustration n� 1: LEONARD DE VINCI SUR LA PEINTURE] TRAIT� �L�MENTAIRE DE LA PEINTURE, PAR L�ONARD DE VINCI; Avec 58 figures d'apr�s les dessins originaux de le POUSSIN, dont 34 en taille-douce. Nouvelle �dition, revue, corrig�e et augment�e de la Vie de l'Auteur. A PARIS, Chez DETERVILLE, Libraire, rue du Battoir, n�. 16. AN XI--1803. PR�FACE. L�onard de Vinci a toujours �t� regard� comme le plus savant dans toutes les parties de la Peinture; c'�toit le sentiment du c�l�bre Poussin, qui avoit si fort �tudi� les principes et les r�gles de son art, et il a souvent avou� � ses amis qu'il avoit tir� des ouvrages de L�onard les connoissances qu'il avoit acquises. Apr�s cela ne doit-on pas �tre surpris que le Trait� de L�onard de Vinci sur la Peinture n'ait paru pour la premi�re fois qu'en 1651? Les Italiens, qui sont si jaloux de la gloire de leur nation, l'avoient entre les mains, et il seroit encore enseveli dans la poussi�re de quelque cabinet, si les Fran�ois ne l'avoient fait imprimer; il le fut en 1651, en italien et en fran�ois. M. Du Fr�ne joignit � l'�dition italienne qu'il en fit, la Vie de L�onard qu'il avoit compos�e en italien: celle que je donne en fran�ois n'en est, pour ainsi dire, que la traduction: j'y ai seulement ajout� ce qui se trouve sur L�onard dans Vasari, dans F�libien, et dans ceux qui ont �crit sur la Vie et les Ouvrages des Peintres. J'ai tir� beaucoup de choses d'un manuscrit qui m'a �t� pr�t� par un curieux: ce sont des M�moires en italien pour servir � l'histoire de L�onard de Vinci. L'auteur de ces M�moires est le p�re Mazzenta, barnabite Milanois, qui a eu entre les mains les papiers de L�onard, c'est-�-dire, les Trait�s qu'il a compos�s, et les dessins qu'il a faits. Les figures de l'�dition que je donne au public sont grav�es d'apr�s les dessins originaux du Poussin, qui sont � la fin du manuscrit dont je viens de parler. J'ai cru que ces figures ne d�voient �tre qu'au simple trait; on en voit mieux le contour; des dessins finis auroient rendu le livre plus cher, et n'auroient �t� d'aucun secours; ils ne sont n�cessaires que lorsqu'il faut donner du relief aux figures, ou lorsqu'on veut exprimer par la gravure la diminution des teintes, la nature des corps qu'on repr�sente, et la qualit� des �toffes qui forment les draperies; et je n'ai donn� des dessins finis qu'en ces occasions. On doit regarder cette �dition comme une r�impression de la version en fran�ois que M. de Chambray avoit donn�e en 1651, du Trait� de la Peinture de L�onard de Vinci: j'avoue cependant que j'ai �t� oblig� d'y changer beaucoup de choses; il y a plus de soixante-dix ans qu'elle est faite, et en bien des endroits elle ne seroit pas aujourd'hui supportable. D'ailleurs, soit m�prise de la part de l'Auteur de la Traduction, soit inadvertance de la part de l'Imprimeur, il y a quelquefois dans la version en fran�ois de 1651, des choses diff�rentes de ce qui est dans l'original italien, et ces diff�rences �tablissent des choses fausses et contraires � la pens�e et au dessein de L�onard de Vinci. LA VIE DE L�ONARD DE VINCI. L�onard de Vinci naquit au ch�teau de Vinci, situ� dans le Val d'Arno, assez pr�s et au-dessous de Florence. Son p�re, Pierre de Vinci, qui �toit peu favoris� de la fortune, l'ayant vu souvent dessiner lorsqu'il n'�toit encore qu'enfant, r�solut d'aider l'inclination qu'il avoit pour la Peinture; il le mena � Florence, et le mit sous la conduite d'Andr� Verocchio, son ami, qui avoit quelque r�putation parmi les Peintres de Florence. Andr� promit d'�lever avec soin et de former son nouveau disciple, et il y fut engag� autant � cause des belles dispositions qu'il remarqua dans le jeune L�onard, que par l'amiti� qu'il avoit pour son p�re. En effet, L�onard faisoit d�j� paro�tre une vivacit� et une politesse fort au-dessus de son �ge et de sa naissance. Il trouva chez son ma�tre de quoi contenter la forte inclination qu'il avoit pour tous les arts qui d�pendent du dessin; car Andr� n'�toit pas seulement peintre, il �toit aussi sculpteur, architecte, graveur et orf�vre. L�onard profita si bien des le�ons de Verocchio, et fit de si grands progr�s sous sa conduite, qu'il le surpassa lui-m�me. Cela parut, pour la premi�re fois, dans un tableau du Bapt�me de Notre-Seigneur, qu'Andr� avoit entrepris pour les religieux de Valombreuse, qui sont hors de la ville de Florence; il voulut que son �l�ve l'aid�t � le faire, et il lui donna � peindre la figure d'un ange qui tient des draperies; mais il s'en repentit bient�t, car la figure que L�onard avoit peinte effa�oit toutes celles du tableau. Andr� en eut tant de chagrin, que, quittant d�s-lors la palette et les couleurs, il ne se m�la plus de peinture. L�onard crut alors n'avoir plus besoin de ma�tre; il sortit de chez Andr� et se mit � travailler seul; il fit quantit� de tableaux qu'on voit � Florence. Il fit aussi, pour le roi de Portugal, un carton pour des tapisseries o� il avoit repr�sent� Adam et Eve dans le paradis terrestre; le paysage �toit d'une grande beaut�, et les moindres parties en �toient finies avec beaucoup de soin. Son p�re lui demanda dans le m�me temps un tableau pour un de ses amis du bourg de Vinci; L�onard r�solut de faire quelque chose d'extraordinaire; pour cela il repr�senta les animaux dont on a le plus d'horreur; il les agroupa si bien et les mit dans des attitudes si bizarres, que je ne crois pas que la t�te de M�duse, dont les po�tes ont tant parl�, eut des effets plus surprenans, tant on �toit effray� en voyant le tableau de L�onard. Son p�re qui comprit qu'une aussi belle pi�ce n'�toit pas un pr�sent � faire � un homme de la campagne, vendit ce tableau � des marchands, desquels le duc de Milan l'acheta trois cents florins. L�onard fit ensuite deux tableaux qui sont fort estim�s. Dans le premier il a repr�sent� une Vierge; ce tableau est d'une grande beaut�: on y voit un vase plein d'eau dans lequel il y a des fleurs; le Peintre y a r�pandu, par des reflets, une foible couleur rouge que la lumi�re en tombant sur les fleurs porte sur l'eau. Cl�ment VII a eu ce tableau. Le second est un dessin qu'il fit pour Antoine Segni son ami; il y a repr�sent� Neptune sur un char tra�n� par des chevaux marins, entour�s de tritons et de divinit�s de la mer. Le ciel paro�t rempli de nuages que les vents poussent de tous c�t�s, les flots sont agit�s et la mer est en furie. Ce dessin est tout-�-fait dans le go�t et le caract�re de L�onard, car il avoit l'esprit vaste et l'imagination vive; et quoiqu'il s�t bien que la justesse des proportions est la source de la v�ritable beaut�, il aimoit � la folie les choses extraordinaires et bizarres: de sorte que s'il rencontroit par hasard quelqu'un qui e�t quelque chose de ridicule ou d'affreux dans son air et dans ses mani�res, il le suivoit jusqu'� ce qu'il e�t l'imagination bien remplie de l'objet qu'il consid�roit; alors il se retiroit chez lui, et en faisoit une esquisse. Paul Lomazzo, dans son Trait� de la Peinture, dit qu'Aurelo Lovino avoit un livre de Dessins de la main de L�onard, qui �toient tous dans ce go�t-l�. Ce caract�re se remarque dans un tableau de L�onard qui est chez le roi. Il y a peint deux cavaliers qui combattent, et dont l'un veut arracher un drapeau � l'autre; la col�re et la rage sont si bien peintes sur le visage des deux combattans, l'air paro�t si agit�, les draperies sont jet�es d'une mani�re si irr�guli�re, mais cependant si convenable au sujet, qu'on est saisi d'horreur en voyant ce tableau, comme si la chose se passoit en effet devant les yeux. Je ne parle point d'un tableau o� il peignit la t�te de M�duse, ni d'un autre o� il repr�sente l'Adoration des Rois, parce qu'il ne les a point finis, quoiqu'il y ait de belles t�tes dans le dernier; mais il avoit l'esprit si vif, qu'il a commenc� beaucoup d'ouvrages qu'il n'a point achev�s. Il avoit d'ailleurs une si haute id�e de la Peinture, et une si grande connoissance de toutes les parties de cet art, que malgr� son feu et sa vivacit�, il lui falloit beaucoup de temps pour finir ses ouvrages. Jamais Peintre n'a peut-�tre mieux su la th�orie de son art que L�onard. Il �toit savant dans l'anatomie, il avoit bien �tudi� l'optique et la g�om�trie; il faisoit continuellement des observations sur tout ce que la nature pr�sente aux yeux. Tant d'�tudes et tant de r�flexions lui acquirent toutes les connoissances qu'un grand Peintre peut avoir, et en firent le plus savant qui ait �t� dans cet art. Il ne se contenta pas n�anmoins de ces connoissances; comme il avoit un esprit universel et du go�t pour tous les beaux-arts, il les apprit tous, et y excella. Il �toit bon architecte, sculpteur habile, intelligent dans les m�caniques: il avoit la voix belle, savoit la musique, et chantoit fort bien. S'il avoit v�cu dans les temps fabuleux, les Grecs auroient sans doute publi� qu'il �toit fils d'Apollon, le dieu des Beaux-Arts; ils n'auroient pas manqu� d'appuyer leur opinion sur ce que L�onard faisoit bien des vers, et qu'il avoit lui seul tous les talens que les enfans et les disciples d'Apollon partageoient entre eux. Il ne reste qu'un seul Sonnet de L�onard, que voici; ses autres po�sies se sont perdues. SONETTO MORALE. Chi non pu� quel che vuol, quel che pu� voglia, Che quel che non si pu� folle � volere. Adunque saggio � l'huomo da tenere, Che da quel che non pu� suo voler toglia. Pero ch'ogni diletto nostro e doglia St� insi e no saper voler potere, Adunque quel sol pu� che co'l dovere Ne trahe la ragion fuor di sua soglia. Ne sempre � da voler quel che l'huom puote, Spesso par dolce quel che torna amaro. Piansi gi� quel ch'io volsi poi ch'io l'hebbi, Adunque tu, Lettor, di queste note, S'a te vuoi esset buono, e a gl'altri caro, Vogli semper poter quel che tu debbi. Ce qui doit surprendre davantage, c'est que L�onard se plaisoit � des exercices qui paroissent fort �loign�s de son art; il manioit bien un cheval et se plaisoit � paro�tre bien mont�; il faisoit fort bien des armes, et l'on ne voyoit gu�re de son temps de cavalier qui e�t meilleur air que lui. Tant de belles qualit�s, jointes � des mani�res fort polies, une conversation charmante, un ton de voix agr�able, en faisoient un homme des plus accomplis: on recherchoit avec empressement sa conversation, et on ne se lassoit jamais de l'entendre. Je crois aussi que tant d'exercices diff�rens qui partageoient son temps, l'ont emp�ch� de finir plusieurs de ses ouvrages, autant que son humeur prompte et vive, et que son habilet� m�me, qui ne lui permettoit pas de se contenter du m�diocre. La r�putation de L�onard se r�pandit bient�t dans toute l'Italie, o� il �toit regard� comme le premier homme de son si�cle, pour la connoissance des beaux-arts. Le duc de Milan, Louis Sforce, surnomm� le More, le fit venir � la cour, et lui donna 500 �cus de pension. Ce prince, qui venoit d'�tablir une acad�mie d'Architecture, voulut que L�onard y entr�t, et ce fut le plus grand bien que le duc p�t faire � cette soci�t�. L�onard en bannit les mani�res gothiques que les architectes de l'ancienne acad�mie, �tablie cent ans auparavant sous Michelino, conservoient encore, et il ramena tout aux r�gles du bon go�t, que les Grecs et les Romains avoient si heureusement mises en pratique. Ce fut alors que le duc Louis le More forma le dessein de faire un nouveau canal pour conduire de l'eau � Milan: L�onard fut charg� de l'ex�cution de ce projet, et il s'en acquitta avec un succ�s qui surpassa tout ce qu'on pouvoit attendre. Ce canal est celui qu'on appelle le Canal de Mortesana; sa longueur est de plus de deux cents milles; il passe par la Valteline et par la vall�e de Chiavenna, portant jusques sous les murs de Milan les eaux de l'Adda, et avec elles la fertilit� dans les campagnes et l'abondance dans la ville, par le commerce du P� et de la mer. L�onard eut bien d'autres difficult�s � vaincre en faisant ce canal, que celles qu'on avoit rencontr�es en travaillant � l'ancien canal qui porte les eaux du Tesin de l'autre c�t� de la ville, et qui avoit �t� fait deux cents ans auparavant, du temps de la R�publique; mais malgr� tous les obstacles, il trouva moyen de faire monter et descendre des bateaux par-dessus les montagnes et dans les vall�es. Pour ex�cuter son dessein, L�onard s'�toit retir� � Vaverola, o� messieurs Melzi avoient une maison; il y avoit pass� quelques ann�es occup� de l'�tude de la philosophie et des math�matiques, et il s'�toit fort appliqu� aux parties qui pouvoient lui donner des lumi�res sur l'ouvrage qu'il entreprenoit. A l'�tude de la philosophie, il joignit les recherches de l'antiquit� et de l'histoire: en l'�tudiant il remarqua comment les Ptolom�es avoient conduit l'eau du Nil en diff�rens endroits de l'�gypte, et de quelle mani�re Trajan �tablit un grand commerce � Nicom�die, en rendant navigables les lacs et les rivi�res qui sont entre cette ville et la mer. Apr�s que L�onard eut travaill� pour la commodit� de la ville de Milan, il s'occupa par les ordres du duc � l'embellir et � l'orner de ses peintures. Le prince lui proposa de faire un tableau de la C�ne de Notre-Seigneur pour le r�fectoire des Dominicains de Notre-Dame de la Grace. L�onard se surpassa lui-m�me dans cet ouvrage, o� l'on voit toutes les beaut�s de son art r�pandues d'une mani�re qui surprend; le dessin est grand et correct, l'expression belle et noble, le coloris charmant et pr�cieux, les airs de t�tes y sont bien vari�s: on admire sur-tout les t�tes des deux saints Jacques; car celle du Christ n'est point achev�e. L�onard avoit une si haute id�e de l'humanit� sainte, qu'il crut ne pouvoir jamais exprimer l'id�e qu'il s'en �toit form�e. Lorsque L�onard travailloit � ce tableau, le prieur du couvent des Dominicains lui faisoit souvent des plaintes de ce qu'il ne le finissoit point, et il osa m�me en parler au duc, qui fit venir L�onard, et lui demanda o� en �toit son ouvrage. L�onard dit au prince qu'il ne lui restoit plus que deux t�tes � faire, celle du Sauveur et celle de Judas; qu'il ne comptoit point finir celle du Christ, parce qu'il ne croyoit point pouvoir exprimer avec le pinceau les perfections de son humanit�; mais que celle de Judas, il la finiroit bient�t, parce que pour exprimer le caract�re de l'avarice, il n'avoit qu'� repr�senter le prieur des Dominicains, qui r�compensoit si mal la peine qu'il prenoit � finir ce tableau. Cet ouvrage a toujours �t� regard� comme le plus beau qui soit sorti des mains de L�onard. Le moment qu'il a choisi de l'histoire qu'il a peinte, est celui o� J�sus-Christ d�clare � ses Ap�tres qu'un d'eux le trahira: les sentimens qui durent na�tre dans l'ame des Ap�tres, sont bien repr�sent�s, et les expressions de douleur, de crainte, d'inqui�tude, sont admirables: on remarque dans Judas tous les traits qui peuvent faire conno�tre un sc�l�rat et un homme d�vou� au crime: aussi l'expression �toit de toutes les parties de la Peinture celle dans laquelle excelloit L�onard. Fran�ois Ier trouva ce tableau si beau lorsqu'il le vit � Milan, qu'il voulut l'avoir, et le faire porter en France; mais cela ne put se faire, parce que cette histoire est peinte sur un mur, et occupe un espace de plus de trente pieds en hauteur et en largeur. On croit que la copie de ce tableau, qui se voit � Paris � S. Germain-l'Auxerrois, a �t� faite par ordre de Fran�ois Ier. Lomazzo, disciple de L�onard, en a fait aussi une copie en grand: elle est � Milan, � S. Barnab�. Ces deux copies donneront dans la suite aux Peintres et aux curieux une id�e des beaut�s de l'original: car il est aujourd'hui enti�rement g�t�, L�onard l'ayant peint � l'huile sur un mur qui n'�toit pas bien sec, et dont l'humidit� a effac� les couleurs. On voit, dans le m�me r�fectoire des Dominicains, un tableau o� L�onard a peint le duc Louis le More, et la duchesse B�atrix sa femme: ces deux figures sont � genoux; d'un c�t� on voit leurs enfans, et de l'autre un Christ � la croix. Il peignit encore environ dans le m�me temps une Nativit� de Notre-Seigneur pour le duc Louis: elle est aujourd'hui dans le cabinet de l'Empereur. Il ne faut pas s'�tonner que les tableaux de L�onard fussent si estim�s et si recherch�s, il leur donnoit beaucoup de force par une �tude particuli�re qu'il avoit faite de l'anatomie; et pour conno�tre � fond cette partie de la Peinture, si n�cessaire � ceux qui veulent dessiner correctement, il avoit eu souvent des conf�rences avec Marc-Antoine de la Tour, professeur d'anatomie � Pavie, et qui �crivoit sur l'anatomie. Il fit m�me un livre entier de Dessins, rempli de figures dessin�es d'apr�s le naturel, que Fran�ois Melzi, son disciple, a eu; et un autre pour Gentil Borrom�e, ma�tre d'armes: ce livre ne contenoit que des combats d'hommes � pied et � cheval, et L�onard avoit eu soin d'y donner des exemples de toutes les r�gles de l'art, et de les r�duire pour ainsi dire en pratique dans les combats qu'il avoit repr�sent�s. Il composa aussi divers Trait�s pour les Peintres de l'acad�mie de Milan, dont il �toit directeur; et ce fut par ses soins et par ses �tudes qu'elle devint bient�t florissante. Apr�s la mort de L�onard, ses ouvrages furent abandonn�s, et demeur�rent long-temps chez messieurs Melzi, dans leur maison de Vaverola, et ensuite ils furent dispers�s de tous c�t�s, comme je le dirai dans la suite. L�onard de Vinci se retiroit souvent � Vaverola chez messieurs Melzi, pour �tudier plus tranquillement, sans �tre interrompu par les visites de ses amis et par les soins de l'acad�mie; et ce fut durant le s�jour de plusieurs ann�es qu'il y fit, qu'il composa la plupart de ses ouvrages. Mais les guerres d'Italie troubl�rent son repos, et ruin�rent l'acad�mie de Milan. Tous les Peintres que L�onard avoit form�s ont si bien imit� sa mani�re, qu'on prend souvent leurs ouvrages pour ceux de L�onard m�me; ils se dissip�rent apr�s la d�faite du duc Louis le More, l'an 1500, qui fut amen� prisonnier en France, o� il mourut au ch�teau de Loches. L'Italie enti�re profita de cette disgrace; car les disciples de L�onard, qui �toient eux-m�mes fort habiles, se r�pandirent de tous c�t�s. Il avoit form� des Peintres, des Sculpteurs, des Architectes, des Graveurs, qui savoient fort bien tailler le cristal et toutes sortes de pierres pr�cieuses, des ouvriers fort entendus dans la fonte des m�taux. On vit sortir de l'�cole de Milan, Fran�ois Melzi, C�sar Sesto, gentilhomme Milanois, Bernard Lovino, Andr� Salaino, Marc-Uggioni, Antoine Boltraffio, Gobbo, tr�s-bon Peintre et habile Sculpteur, Bernazzano, excellent paysagiste, Paul Lomazzo et plusieurs autres. Sesto et Lovino, sont ceux qui ont eu le plus de r�putation, mais Lomazzo les auroit surpass� tous, s'il n'avoit perdu la vue � la fleur de son �ge: depuis cet accident, ne pouvant plus travailler de peinture, il composa des Livres des le�ons qu'il avoit re�ues de L�onard, et il les propose comme un mod�le accompli � ceux qui veulent exceller dans la peinture. Annibal Fontana, qui savoit si bien polir le marbre, et tailler les pierres pr�cieuses, avouoit que ce qu'il savoit, il l'avoit appris de L�onard. D�s le commencement de la guerre du Milanois, et avant la d�faite du duc Louis, L�onard �toit venu � Milan; les principaux de la ville le pri�rent de faire quelque chose pour l'entr�e du roi Louis XII; il y consentit, et fit une machine fort curieuse; c'�toit un lion dont le corps �toit rempli de ressorts, par le moyen desquels cet automate s'avan�a au-devant du roi dans la salle du palais, puis s'�tant dress� sur ses pieds de derri�re, il ouvrit son estomac et fit voir un �cusson rempli de fleurs de lis. Lomazzo s'est tromp� quand il a dit que cela avoit �t� fait pour Fran�ois Ier, car ce prince ne vint � Milan qu'en 1515, et L�onard �toit alors � Rome. Les troubles du Milanois oblig�rent L�onard de se retirer � Florence; rien ne l'attachoit plus � Milan, le duc Louis son protecteur �toit mort, et l'acad�mie de Milan s'�toit dissip�e. Florence jouissoit du repos n�cessaire pour faire fleurir les beaux arts. La magnificence des M�dicis, et le bon go�t des principaux de la ville, engag�rent L�onard encore plus que l'amour de la patrie � s'y retirer. Le premier ouvrage qu'il y fit, fut un dessin de tableau pour le grand autel de l'Annonciade: on y voyoit une Vierge avec le petit J�sus, sainte Anne et saint Jean. Toute la ville de Florence vit ce dessin, et l'admira. L�onard, quelques ann�es apr�s, le porta en France, et Fran�ois Ier vouloit qu'il le m�t en couleur. Mais le tableau qu'il peignit avec plus de soin et d'amour, fut le portrait de Lise, appel�e commun�ment la Joconde, du nom de Fran�ois Joconde son �poux. Fran�ois Ier voulut avoir ce portrait, et il en donna quatre mille �cus: on le voit aujourd'hui dans le cabinet du roi. On dit que L�onard employa quatre ans entiers � finir cet ouvrage, et que pendant qu'il peignoit cette dame, il y avoit toujours aupr�s d'elle des personnes qui chantoient ou qui jouoient de quelque instrument pour la divertir, et l'emp�cher de faire paro�tre une certaine m�lancolie o� l'on ne manque gu�re de tomber quand on est sans action. L�onard fit encore le portrait d'une marquise de Mantoue, qui a �t� apport� en France, et celui de la fille d'Am�ric Benci; c'�toit une jeune enfant d'une beaut� charmante. Cette Flore qui a un air si noble et si gracieux, fut achev�e en ce temps-l�: elle est aujourd'hui � Paris. L'an 1503, ceux de Florence voulurent faire peindre au palais la salle du Conseil, et L�onard fut charg� par un d�cret de la conduite de l'ouvrage; il l'avoit d�j� fort avanc� d'un c�t� de la salle, lorsqu'il s'apper�ut que ses couleurs ne tenoient point, et qu'elles se d�tachoient de la muraille � mesure qu'elles s�choient. Michel Ange peignoit en concurrence de L�onard un autre c�t� de la salle, quoiqu'il n'eut encore que vingt-neuf ans; il �toit savant, et avoit d�j� acquis une grande r�putation; il pr�tendoit m�me l'emporter sur L�onard qui �toit �g� de plus de soixante ans: chacun avoit ses amis, qui, bien loin de les raccommoder, les aigrirent tellement l'un contre l'autre, en donnant la pr�f�rence � celui pour qui ils se d�claroient, que L�onard et Michel Ange en devinrent ennemis. Rapha�l fut le seul qui sut profiter des d�m�l�s de ces deux grands hommes, la r�putation de L�onard l'avoit fait venir � Florence; il fut surpris en voyant ses ouvrages, et quitta bient�t la mani�re s�che et dure de Pierre P�rugin son ma�tre, pour donner � ses ouvrages cette douceur et cette tendresse que les Italiens appellent _Morbidezza_, en quoi il a surpass� tous les Peintres. L�onard travailla toujours � Florence jusqu'en 1513; ce qu'il fit de plus consid�rable, fut un tableau d'une Vierge avec le petit J�sus, et un autre o� il a repr�sent� la t�te de saint Jean-Baptiste; le premier est chez les Botti, et le second chez Camille Albizzi. L�onard n'avoit point encore vu Rome, l'av�nement de L�on X au pontificat, lui donna occasion d'y aller, pour pr�senter ses respects au nouveau Pape, et il auroit �t� estim� dans cette ville autant qu'il le m�ritoit, sans une aventure bizarre qui l'emp�cha d'y travailler. L�on X, en qui la magnificence et l'amour des beaux arts �toient des qualit�s h�r�ditaires, r�solut d'employer L�onard, qui se mit aussi-t�t � distiller des huiles, et � pr�parer des vernis pour couvrir ses tableaux: le Pape en ayant �t� inform�, dit qu'il ne falloit rien attendre d'un homme qui songeoit � finir ses ouvrages avant de les avoir commenc�s. Vasari, z�l� partisan de Michel Ange, dit qu'on donna encore � Rome bien d'autres mortifications � L�onard, par les discours injurieux qu'on r�pandoit contre lui, et par la pr�f�rence qu'on donnoit en tout � Michel Ange. Ainsi Rome ne sut point profiter des talens de L�onard, qui se rebuta enfin, et qui se voyant appel� par Fran�ois Ier, passa en France, o� il trouva dans la bont� de ce prince de quoi se d�dommager des chagrins qu'il avoit re�us � Rome. Il avoit plus de soixante et dix ans quand il entreprit le voyage; mais l'honneur de servir un si grand roi, le soutenoit et sembloit lui donner des forces. La cour �toit � Fontainebleau, lorsque L�onard alla saluer le roi; ce prince lui fit mille caresses, et lui donna toujours des marques d'estime et de bont�, quoiqu'il ne p�t gu�re l'employer � cause de son grand �ge. Il y a apparence que les fatigues du voyage et le changement de climat contribu�rent � la maladie dont L�onard mourut; il languit durant quelques mois � Fontainebleau, pendant lesquels le roi lui fit l'honneur de l'aller voir plusieurs fois. Il arriva un jour que ce prince y �tant all�, L�onard voulut s'avancer et s'asseoir sur son lit, pour remercier le roi; dans ce moment il lui prit une foiblesse qui l'emporta: il expira entre les bras du roi, qui avoit bien voulu le soutenir pour le soulager. L�onard de Vinci mourut �g� de plus de soixante et quinze ans, regrett� de ceux qui aimoient les beaux arts, et honor� de l'estime d'un grand roi. Jamais il n'y eut d'homme en qui la nature eut r�pandu plus lib�ralement tous ses dons, car il avoit toutes les qualit�s d'esprit et de corps qui peuvent faire un homme accompli. Il �toit beau et bien fait, sa force �toit surprenante, il faisoit bien tous les exercices du corps; mais les talens de son esprit �toient encore au-dessus des autres qualit�s qu'il avoit. Il joignoit la douceur et la politesse des moeurs � une force et une grande �l�vation d'esprit, une vivacit� surprenante � une grande application � l'�tude, une �rudition assez grande � une conversation agr�able. L�onard de Vinci ne voulut point se marier pour travailler avec plus de libert�: sur quoi un de ses amis disoit qu'il n'avoit point voulu avoir d'autre �pouse que la Peinture, ni d'autres enfans que les ouvrages qu'il faisoit. Au sortir de sa jeunesse il laissa cro�tre ses cheveux et sa barbe, de sorte qu'il ressembloit � quelque vieux Druide, ou � un solitaire de la Th�ba�de. La plus grande partie des tableaux de L�onard sont � Florence chez le Grand-Duc, ou en France; il s'en trouve plusieurs en diff�rens pays, chez les princes et chez les curieux. Outre ceux dont j'ai parl�, Lomazzo dit qu'il fit un tableau de la Conception de la sainte Vierge pour l'�glise de Saint Fran�ois de Milan. On en voit en France plusieurs qui sont certainement de lui; comme la Vierge avec sainte Anne et le petit J�sus, qui �toit au palais Cardinal; une H�rodiade d'une grande beaut�, qui �toit chez le cardinal de Richelieu; un tableau de la Vierge, avec le petit J�sus, saint Jean et un Ange; un autre tableau de la Vierge, qu'avoit eu le marquis de Sourdis. M. de Charmois avoit un tableau de la Vierge avec le petit J�sus, Ste Anne et S. Michel; et un autre o� L�onard avoit peint Joseph qui fuit, et que la femme de Putifar veut arr�ter; la douceur et la modestie de l'un, et l'impudence de l'autre �toient admirablement bien repr�sent�es. Pour ce qui est des ouvrages que L�onard avoit compos�s, et des dessins qu'il avoit faits, ceux qui les ont r�unis les conservent sans en vouloir faire part au public. Apr�s la mort de L�onard on les mit en treize volumes, ils �toient �crits � rebours comme les livres h�bra�ques, et d'un caract�re fort menu, apparemment afin que toute sorte de personnes ne pussent pas les lire. Voici quel a �t� le sort de ces pr�cieux restes des �tudes de L�onard. Lelio Gavardi d'Asola, pr�v�t de Saint-Zenon de Pavie, et proche parent des Manuces, �toit professeur d'Humanit�s; il avoit appris les belles-lettres � messieurs Melzi, et cela lui avoit donn� occasion d'aller souvent � leur maison de campagne: il y trouva les treize volumes des ouvrages de L�onard, qu'il demanda; on les lui donna, et il les porta � Florence, dans l'esp�rance d'en tirer beaucoup d'argent du Grand-Duc; mais ce prince �tant venu � mourir, Gavardi porta ses livres � Pise, o� il rencontra Ambroise Mazzenta, gentilhomme du Milanois, qui lui fit scrupule d'avoir tir� les papiers de L�onard de messieurs Melzi, qui n'en connoissoient pas le prix. Gavardi, touch� de ce qu'on lui avoit dit, rendit � Horace Melzi, chef de sa maison, les livres de L�onard. Comme Melzi �toit un fort bon homme, il reconnut l'attention que Mazzenta avoit eu � lui faire plaisir, et lui fit pr�sent des treize volumes des papiers de L�onard. Ils rest�rent chez les Mazzenta, qui parloient par-tout du pr�sent qu'on leur avoit fait. Alors Pomp�e Leoni, statuaire du roi d'Espagne, fit conno�tre � Melzi ce que valoient les papiers et les dessins de L�onard; il lui fit esp�rer des charges dans Milan, s'il pouvoit les retirer pour les donner au roi d'Espagne. L'envie de s'avancer et de s'enrichir fit sur l'esprit de Melzi des impressions que l'amour de la vertu et des beaux arts n'y avoit point faites; il court chez les Mazzenta, et � force de pri�res il en obtint sept volumes. Des six autres, le cardinal Borrom�e en eut un, qui est aujourd'hui dans la biblioth�que Ambrosienne. Ambroise Figgini en eut un, qui a pass� � Hercule Bianchi son h�ritier. Le duc de Savoie, Charles-Emmanuel, en eut un, et Pomp�e Leoni les trois autres, que Cleodore Calchi son h�ritier a vendu au seigneur Galeas Lonato. Parmi les papiers de L�onard, il y avoit des Dessins et des Trait�s: les Trait�s dont on a connoissance sont ceux qui suivent: Un Trait� de la nature, de l'�quilibre, et du mouvement de l'eau; cet ouvrage est rempli de dessins de machines pour conduire, �lever et soutenir les eaux. Ce fut l'entreprise du canal de Mortesana, qui lui donna occasion de le composer. Un Trait� d'anatomie, dont j'ai parl�; cet ouvrage �toit accompagn� d'une grande quantit� de dessins, faits avec beaucoup de soin. L�onard en parle au Chapitre XXII de la Peinture. Un Trait� d'anatomie et de figures de chevaux; L�onard les dessinoit bien, et en faisoit de fort beaux mod�les: il avoit fait ce Trait� pour servir � ceux qui veulent peindre des batailles et des combats. Vasari, Borghini, Lomazzo en parlent. Un Trait� de la perspective, divis� en plusieurs livres; c'est apparemment celui dont Lomazzo parle dans le Chapitre IV. L�onard donne dans ce Trait� des r�gles pour repr�senter des figures plus grandes que le naturel. Un Trait� de la lumi�re et des ombres, qui est aujourd'hui dans la biblioth�que Ambrosienne; c'est un volume couvert de velours rouge, que le sieur Mazzenta donna au cardinal Borrom�e. L�onard y traite son sujet en philosophe, en math�maticien et en peintre; il en parle au Chapitre CCLXXVIII du Trait� de la Peinture. Cet ouvrage doit �tre d'une grande beaut�, car L�onard �toit admirable dans cette partie de la Peinture; et il entendoit si bien les effets de la lumi�re et des couleurs, qu'il repr�sente les choses avec un caract�re de v�rit� qu'on ne remarque point dans les tableaux des autres Peintres. L�onard promet dans son Trait� de la Peinture, deux autres ouvrages; l'un est un Trait� du mouvement des corps, l'autre est un Trait� de l'�quilibre des corps. On peut voir les Chapitres CXII, CXXVIII et CCLXVIII du Trait� de la Peinture. C'est ce Trait� qu'on donne ici en fran�ois. Un Peintre du Milanois, passant par Florence, avoit dit � Vasari en lui montrant cet ouvrage, qu'il le feroit imprimer � Rome; mais il ne tint pas parole. Ce que les Italiens n'ont pas voulu faire pour la perfection de la Peinture, les Fran�ois l'ont fait en mettant au jour ce beau Trait� de L�onard de Vinci en italien, apr�s avoir consult� et confront� plusieurs manuscrits. M. de Charmois, qui avoit une si grande connoissance des Beaux-Arts, l'a traduit en fran�ois: c'est la version que je donne ici, mais plus correcte qu'elle n'a paru la premi�re fois. On peut juger par la lecture de ce Trait�, de l'avantage qu'on retireroit, si les princes et les curieux qui ont les autres ouvrages de L�onard de Vinci, les donnoient au Public. TABLE DES CHAPITRES. CHAPITRE page CHAP. I. Quelle est la premi�re �tude que doit faire un jeune Peintre. 1 CHAP. II. A quelle sorte d'�tude un jeune Peintre se doit principalement appliquer. 2 CHAP. III. De la m�thode qu'il faut donner aux jeunes gens pour apprendre � peindre. _ibid._ CHAP. IV. Comment on conno�t l'inclination qu'on a pour la Peinture, quoiqu'on n'y ait point de disposition. 4 CHAP. V. Qu'un Peintre doit �tre universel, et ne se point borner � une seule chose. _ibid._ CHAP. VI. De quelle mani�re un jeune Peintre doit se comporter dans ses �tudes. 5 CHAP. VII. De la mani�re d'�tudier. _ibid._ CHAP. VIII. Ce que doit faire un Peintre qui veut �tre universel. 6 CHAP. IX. Avis sur le m�me sujet. _ibid._ CHAP. X. Comment un Peintre se doit rendre universel. 7 CHAP. XI. Comment on conno�t le progr�s qu'on fait dans la Peinture. 8 CHAP. XII. De la mani�re d'apprendre � dessiner. 9 CHAP. XIII. Comment il faut esquisser les compositions d'histoires, et les figures. _ibid._ CHAP. XIV. Qu'il faut corriger les fautes dans ses ouvrages, quand on les d�couvre. 10 CHAP. XV. Du jugement qu'on doit porter de ses propres ouvrages. 11 CHAP. XVI. Moyen d'exciter l'esprit et l'imagination � inventer plusieurs choses. _ibid._ CHAP. XVII. Qu'il est utile de repasser durant la nuit dans son esprit les choses qu'on a �tudi�es. 12 CHAP. XVIII. Qu'il faut s'accoutumer � travailler avec patience, et � finir ce que l'on fait, devant que de prendre une mani�re prompte et hardie. 13 CHAP. XIX. Qu'un Peintre doit souhaiter d'apprendre les diff�rens jugemens qu'on fait de ses ouvrages. 14 CHAP. XX. Qu'un Peintre ne doit pas tellement se fier aux id�es qu'il s'est form� des choses, qu'il n�glige de voir le naturel. _ibid._ CHAP. XXI. De la vari�t� des proportions dans les figures. 15 CHAP. XXII. Comment on peut �tre universel. _ibid._ CHAP. XXIII. De ceux qui s'adonnent � la pratique avant que d'avoir appris la th�orie. 16 CHAP. XXIV. Qu'il ne faut pas qu'un Peintre en imite servilement un autre. 17 CHAP. XXV. Comment il faut dessiner d'apr�s le naturel. _ibid._ CHAP. XXVI. Remarque sur les jours et sur les ombres. 18 CHAP. XXVII. De quel c�t� il faut prendre le jour et � quelle hauteur on doit prendre son point de lumi�re, pour dessiner d'apr�s le naturel. _ibid._ CHAP. XXVIII. Des jours et des ombres qu'il faut donner aux figures qu'on dessine d'apr�s les bosses et les figures de relief. 19 CHAP. XXIX. Quel jour il faut prendre pour travailler d'apr�s le naturel, ou d'apr�s la bosse. 21 CHAP. XXX. Comment il faut dessiner le nu. 22 CHAP. XXXI. De la mani�re de dessiner d'apr�s la bosse, ou d'apr�s le naturel. 23 CHAP. XXXII. Mani�re de dessiner un paysage d'apr�s le naturel, ou de faire un plan exact de quelque campagne. _ibid._ CHAP. XXXIII. Comment il faut dessiner les paysages. 24 CHAP. XXXIV. Comment il faut dessiner � la lumi�re de la chandelle. _ibid._ CHAP. XXXV. De quelle mani�re on pourra peindre une t�te, et lui donner de la grace avec les ombres et les lumi�res convenables. 25 CHAP. XXXVI. Quelle lumi�re on doit choisir pour peindre les portraits, et g�n�ralement toutes les carnations. 26 CHAP. XXXVII. Comment un Peintre doit voir et dessiner les figures qu'il veut faire entrer dans la composition d'une histoire. _ibid._ CHAP. XXXVIII. Moyen pour dessiner avec justesse d'apr�s le naturel quelque figure que ce soit. 27 CHAP. XXXIX. Mesure ou division d'une statue. _ibid._ CHAP. XL. Comment un Peintre se doit placer � l'�gard du jour qui �claire son mod�le. 28 CHAP. XLI. Quelle lumi�re est avantageuse pour faire paro�tre les objets. _ibid._ CHAP. XLII. D'o� vient que les peintres se trompent souvent dans le jugement qu'ils font de la beaut� des parties du corps, et de la justesse de leurs proportions. 29 CHAP. XLIII. Qu'il est n�cessaire de savoir l'anatomie, et de conno�tre l'assemblage des parties de l'homme. 30 CHAP. XLIV. Du d�faut de ressemblance et de r�p�tition dans un m�me tableau. _ibid._ CHAP. XLV. Ce qu'un Peintre doit faire pour ne se point tromper dans le choix qu'il fait d'un mod�le. 31 CHAP. XLVI. De la faute que font les Peintres qui font entrer dans la composition d'un tableau des figures qu'ils ont dessin�es � une lumi�re diff�rente de celle dont ils supposent que leur tableau est �clair�. 32 CHAP. XLVII. Division de la Peinture. 33 CHAP. XLVIII. Division du dessin. _ibid._ CHAP. XLIX. De la proportion des membres. _ibid._ CHAP. L. Du mouvement et de l'expression des figures. 34 CHAP. LI. Qu'il faut �viter la duret� des contours. 35 CHAP. LII. Que les d�fauts ne sont pas si remarquables dans les petites choses que dans les grandes. 36 CHAP. LIII. D'o� vient que les choses peintes ne peuvent jamais avoir le m�me relief que les choses naturelles. 37 CHAP. LIV. Qu'il faut �viter de peindre divers tableaux d'histoire l'un sur l'autre dans une m�me fa�ade. 39 CHAP. LV. De quelle lumi�re un Peintre se doit servir pour donner � ses figures un plus grand relief. 41 CHAP. LVI. Lequel est plus excellent et plus n�cessaire de savoir donner les jours et les ombres aux figures, ou de les bien contourner. 42 CHAP. LVII. De quelle sorte il faut �tudier. _ibid._ CHAP. LVIII. Remarque sur l'expression et sur les attitudes. 43 CHAP. LIX. Que la Peinture ne doit �tre vue que d'un seul endroit. _ibid._ CHAP. LX. Remarque sur les ombres. 44 CHAP. LXI. Comment il faut repr�senter les petits enfans. _ibid._ CHAP. LXII. Comment on doit repr�senter les vieillards. 45 CHAP. LXIII. Comment on doit repr�senter les vieilles. _ibid._ CHAP. LXIV. Comment on doit peindre les femmes. _ibid._ CHAP. LXV. Comment on doit repr�senter une nuit. 46 CHAP. LXVI. Comment il faut repr�senter une temp�te. 47 CHAP. LXVII. Comme on doit repr�senter aujourd'hui une bataille. 50 CHAP. LXVIII. Comment il faut peindre un lointain. 55 CHAP. LXIX. Que l'air qui est pr�s de la terre, doit paro�tre plus �clair� que celui qui en est loin. 56 CHAP. LXX. Comment on peut donner un grand relief aux figures, et faire qu'elles se d�tachent du fond du tableau. 57 CHAP. LXXI. Comment on doit repr�senter la grandeur des objets que l'on peint. 58 CHAP. LXXII. Quelles choses doivent �tre plus finies, et quelles choses doivent l'�tre moins. 60 CHAP. LXXIII. Que les figures s�par�es ne doivent point paro�tre se toucher et �tre jointes ensemble. _ibid._ CHAP. LXXIV. Si le jour se doit prendre en face ou de c�t�, et lequel des deux donne plus de grace. 61 CHAP. LXXV. De la r�verb�ration, ou des reflets de lumi�re. 62 CHAP. LXXVI. Des endroits o� la lumi�re ne peut �tre r�fl�chie. _ibid._ CHAP. LXXVII. Des reflets. 63 CHAP. LXXVIII. Des reflets de lumi�re qui sont port�s sur des ombres. 64 CHAP. LXXIX. Des endroits o� les reflets de lumi�re paroissent davantage, et de ceux o� ils paroissent moins. 65 CHAP. LXXX. Quelle partie du reflet doit �tre plus claire. _ibid._ CHAP. LXXXI. Des reflets du coloris de la carnation. 67 CHAP. LXXXII. En quels endroits les reflets sont plus sensibles. 68 CHAP. LXXXIII. Des reflets doubles et triples. _ibid._ CHAP. LXXXIV. Que la couleur d'un reflet n'est pas simple, mais m�l�e de deux ou de plusieurs couleurs. 70 CHAP. LXXXV. Que les reflets sont rarement de la couleur du corps d'o� ils partent, ou de la couleur du corps o� ils sont port�s. 71 CHAP. LXXXVI. En quel endroit un reflet est plus �clatant et plus sensible. 72 CHAP. LXXXVII. Des couleurs r�fl�chies. 73 CHAP. LXXXVIII. Des termes de reflets, ou de la projection des lumi�res r�fl�chies. 74 CHAP. LXXXIX. De la position des figures. _ibid._ CHAP. XC. Comment on peut apprendre � bien agroupper les figures dans un tableau d'histoire. 75 CHAP. XCI. Quelle proportion il faut donner � la hauteur de la premi�re figure d'un tableau d'histoire. 76 CHAP. XCII. Du relief des figures qui entrent dans la composition d'une histoire. 77 CHAP. XCIII. Du raccourcissement des figures d'un tableau. 78 CHAP. XCIV. De la diversit� des figures dans une histoire. 78 CHAP. XCV. Comment il faut �tudier les mouvemens du corps humain. 79 CHAP. XCVI. De quelle sorte il faut �tudier la composition des histoires, et y travailler. 81 CHAP. XCVII. De la vari�t� n�cessaire dans les histoires. 82 CHAP. XCVIII. Qu'il faut dans les histoires �viter la ressemblance des visages, et diversifier les airs de t�te. 83 CHAP. XCIX. Comment il faut assortir les couleurs, pour qu'elles se donnent de la grace les unes aux autres. 84 CHAP. C. Comment on peut rendre les couleurs vives et belles. 85 CHAP. CI. De la couleur que doivent avoir les ombres des couleurs. 86 CHAP. CII. De la vari�t� qui se remarque dans les couleurs, selon qu'elles sont plus �loign�es ou plus proches. _ibid._ CHAP. CIII. A quelle distance de la vue les couleurs des choses se perdent enti�rement. 87 CHAP. CIV. De la couleur de l'ombre du blanc. 88 CHAP. CV. Quelle couleur produit l'ombre la plus obscure et la plus noire. _ibid._ CHAP. CVI. De la couleur qui ne re�oit point de vari�t� (c'est-�-dire, qui paro�t toujours de m�me force sans alt�ration) quoique plac�e en un air plus ou moins �pais, ou en diverses distances. 89 CHAP. CVII. De la perspective des couleurs. 93 CHAP. CVIII. Comment il se pourra faire qu'une couleur ne re�oive aucune alt�ration, �tant plac�e en divers lieux o� l'air sera diff�rent. 95 CHAP. CIX. Si des couleurs diff�rentes peuvent perdre �galement leurs teintes quand elles sont dans l'obscurit� ou dans l'ombre. 96 CHAP. CX. Pourquoi on ne peut distinguer la couleur et la figure des corps qui sont dans un lieu qui paro�t n'�tre point �clair�, quoiqu'il le soit. 97 CHAP. CXI. Qu'aucune chose ne montre point sa v�ritable couleur, si elle n'est �clair�e d'une autre couleur semblable. 98 CHAP. CXII. Que les couleurs re�oivent quelques changemens par l'opposition du champ sur lequel elles sont. 99 CHAP. CXIII. Du changement des couleurs transparentes couch�es sur d'autres couleurs, et du m�lange des couleurs. _ibid._ CHAP. CXIV. Du degr� de teinte o� chaque couleur paro�t davantage. 100 CHAP. CXV. Que toute couleur qui n'a point de lustre, est plus belle dans ses parties �clair�es que dans les ombres. 101 CHAP. CXVI. De l'apparence des couleurs. 102 CHAP. CXVII. Quelle partie de la couleur doit �tre plus belle. _ibid._ CHAP. CXVIII. Que ce qu'il y a de plus beau dans une couleur doit �tre plac� dans les lumi�res. 103 CHAP. CXIX. De la couleur verte qui se fait de rouille de cuivre, et qu'on appelle vert-de-gris. _ibid._ CHAP. CXX. Comment on peut augmenter la beaut� du vert-de-gris. 104 CHAP. CXXI. Du m�lange des couleurs l'une avec l'autre. 105 CHAP. CXXII. De la surface des corps qui ne sont pas lumineux. 107 CHAP. CXXIII. Quelle est la superficie plus propre � recevoir les couleurs. 107 CHAP. CXXIV. Quelle partie d'un corps participe davantage � la couleur de son objet, c'est-�-dire, du corps qui l'�claire. 108 CHAP. CXXV. En quel endroit la superficie des corps paro�tra d'une plus belle couleur. 109 CHAP. CXXVI. De la carnation des t�tes. _ibid._ CHAP. CXXVII. Mani�re de dessiner d'apr�s la bosse, et d'appr�ter du papier propre pour cela. 110 CHAP. CXXVIII. Des changemens qui se remarquent dans une couleur, selon qu'elle est ou plus ou moins �loign�e de l'oeil. _ibid._ CHAP. CXXIX. De la verdure qui paro�t � la campagne. 111 CHAP. CXXX. Quelle verdure tirera plus sur le bleu. _ibid._ CHAP. CXXXI. Quelle est celle de toutes les superficies qui montre moins sa v�ritable couleur. 112 CHAP. CXXXII. Quel corps laisse mieux voir sa couleur v�ritable et naturelle. _ibid._ CHAP. CXXXIII. De la lumi�re des paysages. 113 CHAP. CXXXIV. De la perspective a�rienne, et de la diminution des couleurs caus�e par une grande distance. _ibid._ CHAP. CXXXV. Des objets qui paroissent � la campagne dans l'eau comme dans un miroir, et premi�rement de l'air. 115 CHAP. CXXXVI. De la diminution des couleurs, caus�e par quelque corps qui est entre elles et l'oeil. 116 CHAP. CXXXVII. Du champ ou du fond qui convient � chaque ombre et � chaque lumi�re. _ibid._ CHAP. CXXXVIII. Quel rem�de il faut apporter lorsque le blanc sert de champ � un autre blanc, ou qu'une couleur obscure sert de fond � une autre qui est aussi obscure. 117 CHAP. CXXXIX. De l'effet des couleurs qui servent de champ au blanc. _ibid._ CHAP. CXL. Du champ des figures. 118 CHAP. CXLI. Des fonds convenables aux choses peintes. 119 CHAP. CXLII. De ceux qui peignant une campagne donnent aux objets plus �loign�s une teinte plus obscure. 120 CHAP. CXLIII. Des couleurs des choses qui sont �loign�es de l'oeil. _ibid._ CHAP. CXLIV. Des degr�s de teintes dans la Peinture. 121 CHAP. CXLV. Des changemens qui arrivent aux couleurs de l'eau de la mer, selon les divers aspects d'o� elle est vue. 122 CHAP. CXLVI. Des effets des diff�rentes couleurs oppos�es les unes aux autres. 123 CHAP. CXLVII. De la couleur des ombres de tous les corps. _ibid._ CHAP. CXLVIII. De la diminution des couleurs dans les lieux obscurs. 124 CHAP. CXLIX. De la perspective des couleurs. _ibid._ CHAP. CL. Des couleurs. 125 CHAP. CLI. D'o� vient � l'air la couleur d'azur. _ibid._ CHAP. CLII. Des couleurs. 126 CHAP. CLIII. Des couleurs qui sont dans l'ombre. _ibid._ CHAP. CLIV. Du champ des figures des corps peints. 127 CHAP. CLV. Pourquoi le blanc n'est point compt� entre les couleurs. 128 CHAP. CLVI. Des couleurs. 129 CHAP. CLVII. Des couleurs des lumi�res incidentes et r�fl�chies. 130 CHAP. CLVIII. Des couleurs des ombres. 131 CHAP. CLIX. Des choses peintes dans un champ clair, et en quelles occasions cela fait bien en peinture. 132 CHAP. CLX. Du champ des figures. 133 CHAP. CLXI. Des couleurs qui sont produites par le m�lange des autres couleurs. 134 CHAP. CLXII. Des couleurs. 135 CHAP. CLXIII. De la couleur des montagnes. 138 CHAP. CLXIV. Comment un Peintre doit mettre en pratique la perspective des couleurs. 139 CHAP. CLXV. De la perspective a�rienne. 140 CHAP. CLXVI. Des mouvemens du corps de l'homme, des changemens qui y arrivent, et des proportions des membres. 142 CHAP. CLXVII. Des changemens de mesures qui arrivent au corps de l'homme depuis sa naissance jusqu'� ce qu'il ait la hauteur naturelle qu'il doit avoir. _ibid._ CHAP. CLXVIII. Que les petits enfans ont les jointures des membres toutes contraires � celles des hommes, en ce qui regarde la grosseur. 143 CHAP. CLXIX. De la diff�rence des mesures entre les petits enfans et les hommes faits. 144 CHAP. CLXX. Des jointures des doigts. 145 CHAP. CLXXI. De l'embo�tement des �paules, et de leurs jointures. _ibid._ CHAP. CLXXII. Des mouvemens des �paules. 146 CHAP. CLXXIII. Des mesures universelles des corps. _ibid._ CHAP. CLXXIV. Des mesures du corps humain et des plis des membres. 147 CHAP. CLXXV. De la proportion des membres. 148 CHAP. CLXXVI. De la jointure des mains avec les bras. 149 CHAP. CLXXVII. Des jointures des pieds, de leur renflement, et de leur diminution. 150 CHAP. CLXXVIII. Des membres qui diminuent quand ils se plient, et qui croissent quand ils s'�tendent. _ibid._ CHAP. CLXXIX. Des membres qui grossissent dans leur jointure quand ils sont pli�s. 151 CHAP. CLXXX. Des membres nus des hommes. _ibid._ CHAP. CLXXXI. Des mouvemens violens des membres de l'homme. _ibid._ CHAP. CLXXXII. Du mouvement de l'homme. 152 CHAP. CLXXXIII. Des attitudes et des mouvemens du corps, et de ses membres. 154 CHAP. CLXXXIV. Des jointures des membres. 156 CHAP. CLXXXV. De la proportion des membres de l'homme. 157 CHAP. CLXXXVI. Des mouvemens des membres de l'homme. _ibid._ CHAP. CLXXXVII. Du mouvement des parties du visage. 158 CHAP. CLXXXVIII. Observations pour dessiner les portraits. 159 CHAP. CLXXXIX. Moyen de retenir les traits d'un homme, et de faire son portrait, quoiqu'on ne l'ait vu qu'une seule fois. 161 CHAP. CXC. Moyen pour se souvenir de la forme d'un visage. 162 CHAP. CXCI. De la beaut� des visages. 163 CHAP. CXCII. De la position et de l'�quilibre des figures. 164 CHAP. CXCIII. Que les mouvemens qu'on attribue aux figures, doivent exprimer leurs actions, et les sentimens qu'on suppose qu'elles ont. 164 CHAP. CXCIV. De la mani�re de toucher les muscles sur les membres nus. 165 CHAP. CXCV. Du mouvement et de la course de l'homme et des autres animaux. _ibid._ CHAP. CXCVI. De la diff�rence de hauteur d'�paules qui se remarque dans les figures dans les diff�rentes actions qu'elles font. 166 CHAP. CXCVII. Objection. _ibid._ CHAP. CXCVIII. Comment un homme qui retire son bras �tendu, change l'�quilibre qu'il avoit quand son bras �toit �tendu. 167 CHAP. CXCIX. De l'homme, et des autres animaux, lesquels dans leurs mouvemens lents, n'ont pas le centre de gravit� beaucoup �loign� du centre de leur soutien. 168 CHAP. CC. De l'homme qui porte un fardeau sur ses �paules. _ibid._ CHAP. CCI. De l'�quilibre du corps de l'homme, lorsqu'il est sur ses pieds. 169 CHAP. CCII. De l'homme qui marche. 170 CHAP. CCIII. De l'�quilibre du poids de quelque animal que ce soit pendant qu'il demeure arr�t� sur ses jambes. _ibid._ CHAP. CCIV. Des plis et des d�tours que fait l'homme dans les mouvemens de ses membres. _ibid._ CHAP. CCV. Des plis des membres. 171 CHAP. CCVI. De l'�quilibre ou du contrepoids du corps. _ibid._ CHAP. CCVII. Du mouvement de l'homme. 172 CHAP. CCVIII. Du mouvement qui est produit par la perte de l'�quilibre. 173 CHAP. CCIX. De l'�quilibre des figures. 173 CHAP. CCX. De la bonne grace des membres. 174 CHAP. CCXI. De la libert� des membres, et de leur facilit� � se mouvoir. 175 CHAP. CCXII. D'une figure seule hors de la composition d'une histoire. 177 CHAP. CCXIII. Quelles sont les principales et les plus importantes choses qu'il faut observer dans une figure. 178 CHAP. CCXIV. Que l'�quilibre d'un poids doit se trouver sur le centre, ou plut�t autour du centre de la gravit� des corps. _ibid._ CHAP. CCXV. De la figure qui doit remuer ou �lever quelque poids. 179 CHAP. CCXVI. De l'attitude des hommes. _ibid._ CHAP. CCXVII. Diff�rences d'attitudes. _ibid._ CHAP. CCXVIII. Des attitudes des figures. 180 CHAP. CCXIX. Des actions de ceux qui se trouvent pr�sens � quelque accident consid�rable. 181 CHAP. CCXX. De la mani�re de peindre le nu. 182 CHAP. CCXXI. D'o� vient que les muscles sont gros et courts. _ibid._ CHAP. CCXXII. Que les personnes grasses n'ont pas de gros muscles. 183 CHAP. CCXXIII. Quels sont les muscles qui disparoissent selon les divers mouvemens de l'homme. _ibid._ CHAP. CCXXIV. Des muscles. 184 CHAP. CCXXV. Que le nu o� l'on verra distinctement tous les muscles, ne doit point faire de mouvement. 185 CHAP. CCXXVI. Que dans les figures nues il ne faut pas que tous les muscles soient enti�rement et �galement marqu�s. _ibid._ CHAP. CCXXVII. De l'extension et du raccourcissement des muscles. 186 CHAP. CCXXVIII. En quelle partie du corps de l'homme se trouve un ligament sans muscle. _ibid._ CHAP. CCXXIX. Des huit osselets qui sont au milieu des ligamens, en diverses jointures du corps de l'homme. 187 CHAP. CCXXX. Du muscle qui est entre les mamelles et le petit ventre. 188 CHAP. CCXXXI. De la plus grande contorsion que le corps de l'homme puisse faire en se tournant en arri�re. 189 CHAP. CCXXXII. Combien un bras se peut approcher de l'autre bras derri�re le dos. _ibid._ CHAP. CCXXXIII. De la disposition des membres de l'homme, qui se pr�pare � frapper de toute sa force. 190 CHAP. CCXXXIV. De la force compos�e de l'homme, et premi�rement de celle des bras. 191 CHAP. CCXXXV. En quelle action l'homme a plus de force, ou lorsqu'il tire � soi ou lorsqu'il pousse. 192 CHAP. CCXXXVI. Des membres plians, et de ce que fait la chair autour de la jointure o� ils se plient. 193 CHAP. CCXXXVII. Si l'on peut tourner la jambe sans tourner aussi la cuisse. 194 CHAP. CCXXXVIII. Des plis de la chair. 195 CHAP. CCXXXIX. Du mouvement simple de l'homme. 196 CHAP. CCXL. Du mouvement compos�. _ibid._ CHAP. CCXLI. Des mouvemens propres du sujet, et qui conviennent � l'intention et aux actions des figures. 197 CHAP. CCXLII. Du mouvement des figures. _ibid._ CHAP. CCXLIII. Des actions et des gestes qu'on fait quand on montre quelque chose. 198 CHAP. CCXLIV. De la vari�t� des visages. 199 CHAP. CCXLV. Des mouvemens convenables � l'intention de la figure qui agit. _ibid._ CHAP. CCXLVI. Comment les actions de l'esprit et les sentimens de l'ame font agir le corps par des mouvemens faciles et commodes au premier degr�. 200 CHAP. CCXLVII. Du mouvement qui part de l'esprit � la vue d'un objet qu'on a devant les yeux. 201 CHAP. CCXLVIII. Des mouvemens communs. _ibid._ CHAP. CCXLIX. Du mouvement des animaux. 202 CHAP. CCL. Que chaque membre doit �tre proportionn� � tout le corps dont il fait partie. _ibid._ CHAP. CCLI. De l'observation des biens�ances. 203 CHAP. CCLII. Du m�lange des figures selon leur �ge et leur condition. 204 CHAP. CCLIII. Du caract�re des hommes qui doivent entrer dans la composition de chaque histoire. _ibid._ CHAP. CCLIV. Comment il faut repr�senter une personne qui parle � plusieurs autres. 205 CHAP. CCLV. Comment il faut repr�senter une personne qui est fort en col�re. 207 CHAP. CCLVI. Comment on peut peindre un d�sesp�r�. 207 CHAP. CCLVII. Des mouvemens qu'on fait en riant et en pleurant, et de leur diff�rence. 208 CHAP. CCLVIII. De la position des figures d'enfans et de vieillards. 209 CHAP. CCLIX. De la position des figures de femmes et de jeunes gens. _ibid._ CHAP. CCLX. De ceux qui sautent. 210 CHAP. CCLXI. De l'homme qui veut jeter quelque chose bien loin avec beaucoup d'imp�tuosit�. 211 CHAP. CCLXII. Pourquoi celui qui veut tirer quelque chose de terre en se retirant, ou l'y ficher, hausse la jambe oppos�e � la main qui agit, et la tient pli�e. 212 CHAP. CCLXIII. De l'�quilibre des corps qui se tiennent en repos sans se mouvoir. _ibid._ CHAP. CCLXIV. De l'homme qui est debout sur ses pieds, et qui se soutient davantage sur l'un que sur l'autre. 213 CHAP. CCLXV. De la position des figures. 214 CHAP. CCLXVI. De l'�quilibre de l'homme qui s'arr�te sur ses pieds. 215 CHAP. CCLXVII. Du mouvement local plus ou moins v�te. 216 CHAP. CCLXVIII. Des animaux � quatre pieds, et comment ils marchent. _ibid._ CHAP. CCLXIX. Du rapport et de la correspondance qui est entre une moiti� de la grosseur du corps de l'homme et l'autre moiti�. 217 CHAP. CCLXX. Comment il se trouve trois mouvemens dans les sauts que l'homme fait en haut. _ibid._ CHAP. CCLXXI. Qu'il est impossible de retenir tous les aspects et tous les changemens des membres qui sont en mouvement. 218 CHAP. CCLXXII. De la bonne pratique qu'un Peintre doit t�cher d'acqu�rir. 219 CHAP. CCLXXIII. Du jugement qu'un Peintre fait de ses ouvrages et de ceux des autres. _ibid._ CHAP. CCLXXIV. Comment un Peintre doit examiner lui-m�me son propre ouvrage, et en porter son jugement. 220 CHAP. CCLXXV. De l'usage qu'on doit faire d'un miroir en peignant. 221 CHAP. CCLXXVI. Quelle peinture est la plus parfaite. 223 CHAP. CCLXXVII. Quel doit �tre le premier objet et la principale intention d'un Peintre. 224 CHAP. CCLXXVIII. Quel est le plus important dans la Peinture de savoir donner les ombres � propos, ou de savoir dessiner correctement. _ibid._ CHAP. CCLXXIX. Comment on doit donner le jour aux figures. 225 CHAP. CCLXXX. En quel lieu doit �tre plac� celui qui regarde une peinture. 227 CHAP. CCLXXXI. A quelle hauteur on doit mettre le point de vue. 228 CHAP. CCLXXXII. Qu'il est contre la raison de faire les petites figures trop finies. 228 CHAP. CCLXXXIII. Quel champ un Peintre doit donner � ses figures. 229 CHAP. CCLXXXIV. Des ombres et des jours, et en particulier des ombres des carnations. 230 CHAP. CCLXXXV. De la repr�sentation d'un lieu champ�tre. 231 CHAP. CCLXXXVI. Comment on doit composer un animal feint et chim�rique. _ibid._ CHAP. CCLXXXVII. Ce qu'il faut faire pour que les visages aient du relief et de la grace. 232 CHAP. CCLXXXVIII. Ce qu'il faut faire pour d�tacher et faire sortir les figures hors de leur champ. 234 CHAP. CCLXXXIX. De la diff�rence des lumi�res selon leur diverse position. _ibid._ CHAP. CCXC. Qu'il faut garder les proportions jusques dans les moindres parties d'un tableau. 235 CHAP. CCXCI. Des termes ou extr�mit�s des corps qu'on appelle profilures ou contours. 236 CHAP. CCXCII. Effet de l'�loignement des objets par rapport au dessin. _ibid._ CHAP. CCXCIII. Effet de l'�loignement des objets, par rapport au coloris. 237 CHAP. CCXCIV. De la nature des contours des corps sur les autres corps. _ibid._ CHAP. CCXCV. Des figures qui marchent contre le vent. 238 CHAP. CCXCVI. De la fen�tre par o� vient le jour sur la figure. 238 CHAP. CCXCVII. Pourquoi apr�s avoir mesur� un visage et l'avoir peint de la grandeur m�me de sa mesure, il paro�t plus grand que le naturel. 239 CHAP. CCXCVIII. Si la superficie de tout corps opaque participe � la couleur de son objet. 240 CHAP. CCXCIX. Du mouvement des animaux et de leur course. 242 CHAP. CCC. Faire qu'une figure paroisse avoir quarante brasses de haut dans un espace de vingt brasses, et qu'elle ait ses membres proportionn�s et se tienne droite. 244 CHAP. CCCI. Dessiner sur un mur de douze brasses une figure qui paroisse avoir vingt-quatre brasses de hauteur. 245 CHAP. CCCII. Avertissement touchant les lumi�res et les ombres. 246 CHAP. CCCIII. Comment il faut r�pandre sur les corps la lumi�re universelle de l'air. 248 CHAP. CCCIV. De la convenance du fond des tableaux avec les figures peintes dessus, et premi�rement des superficies plates d'une couleur uniforme. 249 CHAP. CCCV. De la diff�rence qu'il y a par rapport � la peinture entre une superficie et un corps solide. 250 CHAP. CCCVI. En peinture la premi�re chose qui commence � disparo�tre est la partie du corps laquelle a moins de densit�. 251 CHAP. CCCVII. D'o� vient qu'une m�me campagne paro�t quelquefois plus grande ou plus petite qu'elle n'est en effet. 252 CHAP. CCCVIII. Diverses observations sur la perspective et sur les couleurs. 253 CHAP. CCCIX. Des villes et des autres choses qui sont vues dans un air �pais. 254 CHAP. CCCX. Des rayons du soleil qui passent entre diff�rens nuages. 256 CHAP. CCCXI. Des choses que l'oeil voit confus�ment au-dessous de lui, m�l�es parmi un brouillard et dans un air �pais. _ibid._ CHAP. CCCXII. Des b�timens vus au travers d'un air �pais. 257 CHAP. CCCXIII. Des choses qui se voient de loin. _ibid._ CHAP. CCCXIV. De quelle sorte paro�t une ville dans un air �pais. 258 CHAP. CCCXV. Des termes ou extr�mit�s inf�rieures des corps �loign�s. _ibid._ CHAP. CCCXVI. Des choses qu'on voit de loin. 260 CHAP. CCCXVII. De l'azur dont les paysages paroissent color�s dans le lointain. _ibid._ CHAP. CCCXVIII. Quelles sont les parties des corps qui commencent les premi�res � disparo�tre dans l'�loignement. 261 CHAP. CCCXIX. Pourquoi � mesure que les objets s'�loignent de l'oeil ils deviennent moins connoissables. 262 CHAP. CCCXX. Pourquoi les visages vus de loin paroissent obscurs. _ibid._ CHAP. CCCXXI. Dans les objets qui s'�loignent de l'oeil, quelles parties disparoissent les premi�res, et quelles autres parties disparoissent les derni�res. 263 CHAP. CCCXXII. De la perspective lin�ale. 264 CHAP. CCCXXIII. Des corps qui sont vus dans un brouillard. 265 CHAP. CCCXXIV. De la hauteur des �difices qui sont vus dans un brouillard. 266 CHAP. CCCXXV. Des villes et autres semblables �difices qu'on voit sur le soir ou vers le matin, au travers d'un brouillard. 267 CHAP. CCCXXVI. Pourquoi les objets plus �lev�s sont plus obscurs dans l'�loignement que les autres qui sont plus bas, quoique le brouillard soit uniforme et �galement �pais. _ibid._ CHAP. CCCXXVII. Des ombres qui se remarquent dans les corps qu'on voit de loin. 268 CHAP. CCCXXVIII. Pourquoi sur la fin du jour les ombres des corps produites sur un mur blanc sont de couleur bleue. 270 CHAP. CCCXXIX. En quel endroit la fum�e paro�t plus claire. 271 CHAP. CCCXXX. De la poussi�re. 272 CHAP. CCCXXXI. De la fum�e. _ibid._ CHAP. CCCXXXII. Divers pr�ceptes touchant la Peinture. 273 CHAP. CCCXXXIII. Une chose peinte qu'on suppose � une certaine distance ne paro�t jamais si �loign�e qu'une chose r�elle qui est � cette distance, quoiqu'elles viennent toutes deux � l'oeil sous la m�me ouverture d'angle. 282 CHAP. CCCXXXIV. Du champ des tableaux. 283 CHAP. CCCXXXV. Du jugement qu'on doit faire des ouvrages d'un Peintre. 284 CHAP. CCCXXXVI. Du relief des figures qui sont �loign�es de l'oeil. 285 CHAP. CCCXXXVII. Des contours des membres du c�t� du jour. 286 CHAP. CCCXXXVIII. Des termes ou extr�mit�s des corps. _ibid._ CHAP. CCCXXXIX. De la carnation et des figures �loign�es de l'oeil. 287 CHAP. CCCXL. Divers pr�ceptes de la Peinture. 288 CHAP. CCCXLI. Pourquoi les choses imit�es parfaitement d'apr�s le naturel, ne paroissent pas avoir le m�me relief que le naturel. 290 CHAP. CCCXLII. De la mani�re de faire paro�tre les choses comme en saillie et d�tach�es de leur champ, c'est-�-dire, du lieu o� elles sont peintes. 292 CHAP. CCCXLIII. Quel jour donne plus de grace aux figures. 293 CHAP. CCCXLIV. Que dans les paysages il faut avoir �gard aux diff�rens climats et aux qualit�s des lieux que l'on repr�sente. _ibid._ CHAP. CCCXLV. Ce qu'il faut observer dans la repr�sentation des quatre saisons de l'ann�e, selon qu'elles sont plus ou moins avanc�es. 294 CHAP. CCCXLVI. De la mani�re de peindre ce qui arrive lorsqu'il y a du vent. 295 CHAP. CCCXLVII. Du commencement d'une pluie. _ibid._ CHAP. CCCXLVIII. De l'ombre des ponts sur la surface de l'eau qui est au-dessous. 296 CHAP. CCCXLIX. Usage de la perspective dans la Peinture. 297 CHAP. CCCL. De l'�quilibre des figures. _ibid._ CHAP. CCCLI. Pratique pour �baucher une statue. 298 CHAP. CCCLII. Comment on peut faire une peinture qui sera presque �ternelle et paro�tra toujours fra�che. 299 CHAP. CCCLIII. Mani�re d'appliquer les couleurs sur la toile. 300 CHAP. CCCLIV. Usage de la perspective dans la Peinture. 302 CHAP. CCCLV. De l'effet de la distance des objets. 303 CHAP. CCCLVI. De l'affoiblissement des couleurs et de la diminution apparente des corps. _ibid._ CHAP. CCCLVII. Des corps transparens qui sont entre l'oeil et son objet. _ibid._ CHAP. CCCLVIII. Des draperies qui couvrent les figures, et de la mani�re de jeter les plis. 304 CHAP. CCCLIX. De la nature et de la vari�t� des plis des draperies. 306 CHAP. CCCLX. Comment on doit ajuster les plis des draperies. _ibid._ CHAP. CCCLXI. Comment on doit ajuster les plis des draperies. 308 CHAP. CCCLXII. Des plis des draperies des membres qui sont vus en raccourci. 309 CHAP. CCCLXIII. De quelle sorte l'oeil voit les plis des draperies qui sont autour des membres du corps de l'homme. _ibid._ CHAP. CCCLXIV. Des plis des draperies. 310 CHAP. CCCLXV. De l'horizon qui paro�t dans l'eau. 311 FIN DE LA TABLE DES CHAPITRES. TRAIT� DE LA PEINTURE. CHAPITRE PREMIER. _Quelle est la premi�re �tude que doit faire un jeune Peintre._ La perspective est la premi�re chose qu'un jeune Peintre doit apprendre pour savoir mettre chaque chose � sa place, et pour lui donner la juste mesure qu'elle doit avoir dans le lieu o� elle est: ensuite il choisira un bon ma�tre qui lui fasse conno�tre les beaux contours des figures, et de qui il puisse prendre une bonne mani�re de dessiner. Apr�s cela il verra le naturel, pour se confirmer par des exemples sensibles dans tout ce que les le�ons qu'on lui aura donn�es et les �tudes qu'il aura faites, lui auront appris: enfin il emploiera quelque temps � consid�rer les ouvrages des grands ma�tres et � les imiter, afin d'acqu�rir la pratique de peindre et d'ex�cuter avec succ�s tout ce qu'il entreprendra. CHAPITRE II. _A quelle sorte d'�tude un jeune Peintre se doit principalement appliquer._ Les jeunes gens qui veulent faire un grand progr�s dans la science qui apprend � imiter et � repr�senter tous les ouvrages de la nature, doivent s'appliquer principalement � bien dessiner, et � donner les lumi�res et les ombres � leurs figures, selon le jour qu'elles re�oivent et le lieu o� elles sont plac�es. CHAPITRE III. _De la m�thode qu'il faut donner aux jeunes gens pour apprendre � peindre._ Nous connoissons clairement que de toutes les op�rations naturelles, il n'y en a point de plus prompte que la vue; elle d�couvre en un instant une infinit� d'objets, mais elle ne les voit que confus�ment, et elle n'en peut discerner plus d'un � la fois. Par exemple, si on regarde d'un coup-d'oeil une feuille de papier �crite, on verra bien incontinent qu'elle est remplie de diverses lettres; mais on ne pourra conno�tre dans ce moment-l� quelles sont ces lettres, ni savoir ce qu'elles veulent dire: de sorte que pour l'apprendre, il est absolument n�cessaire de les consid�rer l'une apr�s l'autre, et d'en former des mots et des phrases. De m�me encore, si l'on veut monter au haut de quelque b�timent, il faut y aller de degr� en degr�, autrement il ne sera pas possible d'y arriver. Ainsi, quand la nature a donn� � quelqu'un de l'inclination et des dispositions pour la Peinture, s'il veut apprendre � bien repr�senter les choses, il doit commencer par dessiner leurs parties en d�tail et les prendre par ordre, sans passer � la seconde avant que d'avoir bien entendu et pratiqu� la premi�re; car autrement on perd tout son temps, ou du moins on n'avance gu�res. De plus, il faut remarquer qu'on doit s'attacher � travailler avec patience et � finir ce que l'on fait, devant que de se faire une mani�re prompte et hardie de dessiner et de peindre. CHAPITRE IV. _Comment on conno�t l'inclination qu'on a pour la Peinture, quoiqu'on n'y ait point de disposition._ On voit beaucoup de personnes qui ont un grand desir d'apprendre le dessin et qui l'aiment passionn�ment, mais qui n'y ont aucune disposition naturelle: cela se peut conno�tre dans les enfans qui dessinent tout � la h�te et au simple trait, sans finir jamais aucune chose avec les ombres. CHAPITRE V. _Qu'un Peintre doit �tre universel, et ne se point borner � une seule chose._ Ce n'est pas �tre fort habile homme parmi les Peintres, que de ne r�ussir qu'� une chose; comme � bien faire le nud, � peindre une t�te ou les draperies, � repr�senter des animaux, ou des paysages, ou d'autres choses particuli�res; car il n'y a point d'esprit si grossier qui ne puisse avec le temps, en s'appliquant � une seule chose et la mettant continuellement en pratique, venir � bout de la bien faire. CHAPITRE VI. _De quelle mani�re un jeune Peintre doit se comporter dans ses �tudes._ L'esprit d'un Peintre doit agir continuellement, et faire autant de raisonnemens et de r�flexions, qu'il rencontre de figures et d'objets dignes d'�tre remarqu�s: il doit m�me s'arr�ter, pour les voir mieux, et les consid�rer avec plus d'attention, et ensuite former des r�gles g�n�rales de ce qu'il a remarqu� sur les lumi�res et les ombres, le lieu et les circonstances o� sont les objets. CHAPITRE VII. _De la mani�re d'�tudier._ Etudiez premi�rement la th�orie devant que d'en venir � la pratique, qui est un effet de la science. Un Peintre doit �tudier avec ordre et avec m�thode. Il ne doit rien voir de ce qui m�rite d'�tre remarqu�, qu'il n'en fasse quelque esquisse pour s'en souvenir, et il aura soin d'observer dans les membres de l'homme et des animaux, leurs contours et leurs jointures. CHAPITRE VIII. _Ce que doit faire un Peintre qui veut �tre universel._ Un Peintre doit �tre universel. Il faut qu'il �tudie tout ce qu'il rencontre, c'est-�-dire, qu'il le consid�re attentivement, et que par de s�rieuses r�flexions, il cherche la raison de ce qu'il voit; mais il ne doit s'attacher qu'� ce qu'il y a de plus excellent et de plus parfait dans chaque chose. Ainsi, comme un miroir repr�sente tous les objets avec leurs couleurs et leurs caract�res particuliers, l'imagination d'un Peintre accoutum� � r�fl�chir, lui repr�sentera sans peine tout ce qu'il y a de plus beau dans la nature. CHAPITRE IX. _Avis sur le m�me sujet._ Si un Peintre n'aime �galement toutes les parties de la peinture, il ne pourra jamais �tre universel: par exemple, si quelqu'un ne se pla�t point aux paysages, s'il croit que c'est trop peu de chose pour m�riter qu'on s'y applique, il sera toujours au-dessous des grands Peintres. Boticello, notre ami, avoit ce d�faut; il disoit quelquefois qu'il ne falloit que jeter contre un mur une palette remplie de diverses couleurs, et que le m�lange bizarre de ces couleurs repr�senteroit infailliblement un paysage. Il est bien vrai que si on regarde attentivement une muraille couverte de poussi�re, et qu'on veuille y d�couvrir quelque chose, on s'imaginera voir des figures qui ressemblent � des t�tes d'hommes, ou � des animaux, ou qui repr�sentent des batailles, des rochers, des mers, des nuages, des bosquets, et mille autres choses semblables: il en est �-peu-pr�s de ces murailles salies par la poussi�re, comme du son des cloches, auxquelles on fait dire tout ce que l'on veut. Ces murailles peuvent bien �chauffer l'imagination, et faire inventer quelque chose, mais elles n'apprennent point � finir ce qu'elles font inventer. On l'a vu dans le Peintre dont je viens de parler, qui fut toute sa vie un tr�s-mauvais paysagiste. CHAPITRE X. _Comment un Peintre se doit rendre universel._ Un Peintre qui veut paro�tre universel, et plaire � plusieurs personnes de diff�rens go�ts, doit faire entrer dans la composition d'un m�me tableau, des choses dont quelques-unes soient touch�es d'ombres tr�s-fortes, et quelques autres touch�es d'ombres plus douces; mais il faut qu'on connoisse la raison qu'il a eue d'en user ainsi, et qu'on voie pourquoi il a mis cette vari�t� dans les jours et les ombres des diff�rentes parties de son tableau. CHAPITRE XI. _Comment on conno�t le progr�s qu'on fait dans la Peinture._ Un Peintre qui n'a presque point de doutes dans les �tudes qu'il fait, n'avance gu�res dans son art. Quand tout paro�t ais�, c'est une marque infaillible que l'ouvrier est peu habile, et que l'ouvrage est au-dessus de sa port�e: mais lorsqu'un Peintre, par la force et par l'�tendue de son esprit, conno�t toute la difficult� de son ouvrage, alors il le rend plus parfait de jour en jour � mesure qu'il fait de nouvelles r�flexions, � moins que quelque raison ne l'oblige de le finir en peu de temps. CHAPITRE XII. _De la mani�re d'apprendre � dessiner._ Un �l�ve doit premi�rement s'accoutumer la main � copier les dessins des bons ma�tres, et � les imiter parfaitement, et quand il en a acquis l'habitude, il faut que, suivant le conseil de celui qui le conduit, il dessine d'apr�s des bosses qui soient de bon go�t, selon la m�thode que je donnerai pour les figures de relief. CHAPITRE XIII. _Comment il faut esquisser les compositions d'histoires, et les figures._ Il faut faire promptement et l�g�rement la premi�re esquisse d'une histoire, sans s'arr�ter beaucoup � former les membres et � finir les figures, ayant seulement �gard � la justesse de leur position sur le plan, apr�s quoi le Peintre ayant arr�t� l'ordonnance de son tableau, il pourra les finir � loisir quand il lui plaira. CHAPITRE XIV. _Qu'il faut corriger les fautes dans ses ouvrages, quand on les d�couvre._ Lorsque vous d�couvrirez quelques fautes dans vos ouvrages, ou qu'on vous y en fera remarquer, corrigez-les aussi-t�t, de peur qu'exposant vos tableaux aux yeux du public, au lieu de vous faire estimer, vous ne fassiez conno�tre votre ignorance; et ne dites point qu'� la premi�re occasion vous r�parerez la perte que vous avez faite de votre r�putation: car il n'en est pas de la Peinture comme de la musique, qui passe en un instant, et qui meurt, pour ainsi dire, aussi-t�t qu'elle est produite; mais un tableau dure long-temps apr�s qu'on l'a fait, et le v�tre seroit un t�moin qui vous reprocheroit continuellement votre ignorance. N'all�guez pas non plus pour excuse votre pauvret�, qui ne vous permet pas d'�tudier et de vous rendre habile: l'�tude de la vertu sert de nourriture au corps aussi-bien qu'� l'ame. Combien a-t-on vu de philosophes, qui, �tant n�s au milieu des richesses, les ont abandonn�es, de peur qu'elles ne les d�tournassent de l'�tude et de la vertu! CHAPITRE XV. _Du jugement qu'on doit porter de ses propres ouvrages._ Il n'y a rien plus sujet � se tromper que l'homme, dans l'estime qu'il a pour ses ouvrages et dans le jugement qu'il en porte. La critique de ses ennemis lui sert plus que l'approbation et les louanges que lui donnent ses amis; ils ne sont qu'une m�me chose avec lui; et comme il se trompe lui-m�me, ils peuvent aussi le tromper par complaisance, sans y penser. CHAPITRE XVI. _Moyen d'exciter l'esprit et l'imagination � inventer plusieurs choses._ Je ne ferai point difficult� de mettre ici parmi les pr�ceptes que je donne, une nouvelle mani�re d'inventer; c'est peu de chose en apparence, et peut-�tre passera-t-elle pour ridicule: n�anmoins elle peut beaucoup servir � ouvrir l'esprit, et � le rendre f�cond en inventions. Voici ce que c'est. Si vous regardez quelque vieille muraille couverte de poussi�re, ou les figures bizarres de certaines pierres jasp�es, vous y verrez des choses fort semblables � ce qui entre dans la composition des tableaux; comme des paysages, des batailles, des nuages, des attitudes hardies, des airs de t�te extraordinaires, des draperies, et beaucoup d'autres choses pareilles. Cet amas de tant d'objets est d'un grand secours � l'esprit; il lui fournit quantit� de dessins, et des sujets tout nouveaux. CHAPITRE XVII. _Qu'il est utile de repasser durant la nuit dans son esprit les choses qu'on a �tudi�es._ J'ai encore �prouv� qu'il est fort utile, lorsqu'on est au lit, dans le silence de la nuit, de rappeler les id�es des choses qu'on a �tudi�es et dessin�es, de retracer les contours des figures qui demandent plus de r�flexion et d'application; par ce moyen, on rend les images des objets plus vives, on fortifie et on conserve plus long-temps l'impression qu'elles ont faite. CHAPITRE XVIII. _Qu'il faut s'accoutumer � travailler avec patience, et � finir ce que l'on fait, devant que de prendre une mani�re prompte et hardie._ Si vous voulez profiter beaucoup et faire de bonnes �tudes, ayez soin de ne dessiner jamais � la h�te ni � la l�g�re. A l'�gard des lumi�res, consid�rez bien quelles parties sont �clair�es du jour le plus grand; et entre les ombres, remarquez celles qui sont les plus fortes, comment elles se m�lent ensemble, et en quelle quantit�, les comparant l'une avec l'autre. Pour ce qui est des contours, observez bien vers quelle partie ils doivent tourner, et entre leurs termes, quelle quantit� il s'y rencontre d'ombre et de lumi�re, et o� elles sont plus ou moins fortes, plus larges et plus �troites; et sur-tout ayez soin que vos ombres et vos lumi�res ne soient point tranch�es, mais qu'elles se noient ensemble, et se perdent insensiblement comme la fum�e; et lorsque vous vous serez fait une habitude de cette mani�re exacte de dessiner, vous acquerrez tout d'un coup et sans peine, la facilit� des praticiens. CHAPITRE XIX. _Qu'un Peintre doit souhaiter d'apprendre les diff�rens jugemens qu'on fait de ses ouvrages._ C'est une maxime certaine qu'un Peintre, lorsqu'il travaille au dessin ou � la peinture, ne doit jamais refuser d'entendre les diff�rens sentimens qu'on a de son ouvrage; il doit m�me en �tre bien aise, pour en profiter; car, quoiqu'un homme ne soit pas peintre, il sait cependant bien quelle est la forme d'un homme; il verra bien s'il est bossu ou boiteux, s'il a la jambe trop grosse, la main trop grande, ou quelque autre d�faut semblable. Pourquoi donc les hommes ne remarqueroient-ils pas des d�fauts dans les ouvrages de l'art, puisqu'ils en remarquent dans ceux de la nature? CHAPITRE XX. _Qu'un Peintre ne doit pas tellement se fier aux id�es qu'il s'est form�es des choses, qu'il n�glige de voir le naturel._ C'est une pr�somption ridicule de croire qu'on peut se ressouvenir de tout ce qu'on a vu dans la nature; la m�moire n'a ni assez de force, ni assez d'�tendue pour cela; ainsi, le plus s�r est de travailler, autant que l'on peut, d'apr�s le naturel. CHAPITRE XXI. _De la vari�t� des proportions dans les figures._ Un Peintre doit faire tous ses efforts pour se rendre universel, parce que, s'il ne fait bien qu'une seule chose, il ne se fera jamais beaucoup estimer. Il y en a, par exemple, qui s'appliquent � bien dessiner le nud; mais c'est toujours avec les m�mes proportions, sans y mettre jamais de vari�t�: cependant il se peut faire qu'un homme soit bien proportionn�, soit qu'il soit gros et court, soit qu'il ait le corps d�li�, soit qu'il ait la taille m�diocre, soit enfin qu'elle soit haute et avantageuse. Ceux qui n'ont point d'�gard � cette diversit� de proportions, semblent former toutes leurs figures dans le m�me moule: ce qui est fort bl�mable. CHAPITRE XXII. _Comment on peut �tre universel._ Un Peintre savant dans la th�orie de son art, peut, sans beaucoup de difficult�, devenir universel, parce que les animaux terrestres ont tous cette ressemblance et cette conformit� de membres, qu'ils sont toujours compos�s de muscles, de nerfs et d'os, et ils ne diff�rent qu'en longueur ou en grosseur, comme on verra dans les d�monstrations de l'anatomie. Pour ce qui est des animaux aquatiques, parmi lesquels il y a une grande quantit� d'esp�ces diff�rentes, je ne conseillerai point au Peintre de s'y amuser. CHAPITRE XXIII. _De ceux qui s'adonnent � la pratique avant que d'avoir appris la th�orie._ Ceux qui s'abandonnent � une pratique prompte et l�g�re avant que d'avoir appris la th�orie, ou l'art de finir leurs figures, ressemblent � des matelots qui se mettent en mer sur un vaisseau qui n'a ni gouvernail ni boussole: ils ne savent quelle route ils doivent tenir. La pratique doit toujours �tre fond�e sur une bonne th�orie, dont la perspective est le guide et la porte; car sans elle on ne sauroit r�ussir en aucune chose dans la peinture, ni dans les autres arts qui d�pendent du dessin. CHAPITRE XXIV. _Qu'il ne faut pas qu'un Peintre en imite servilement un autre._ Un Peintre ne doit jamais s'attacher servilement � la mani�re d'un autre Peintre, parce qu'il ne doit pas repr�senter les ouvrages des hommes, mais ceux de la nature; laquelle est d'ailleurs si abondante et si f�conde en ses productions, qu'on doit plut�t recourir � elle-m�me qu'aux Peintres qui ne sont que ses disciples, et qui donnent toujours des id�es de la nature moins belles, moins vives, et moins vari�es que celles qu'elle en donne elle-m�me, quand elle se pr�sente � nos yeux. CHAPITRE XXV. _Comment il faut dessiner d'apr�s le naturel._ Quand vous voulez dessiner d'apr�s le naturel, soyez �loign� de l'objet que vous imitez trois fois autant qu'il est grand; et prenez bien garde, en dessinant, � chaque trait que vous formez, d'observer par tout le corps de votre mod�le, quelles parties se rencontrent sous la ligne principale ou perpendiculaire. CHAPITRE XXVI. _Remarque sur les jours et sur les ombres._ Lorsque vous dessinerez, remarquez bien que les ombres des objets ne sont pas toujours simples et unies, et qu'outre la principale, il y en a encore d'autres qu'on n'apper�oit presque point, parce qu'elles sont comme une fum�e ou une vapeur l�g�re r�pandue sur la principale ombre: remarquez aussi que ses diff�rentes ombres ne se portent pas toutes du m�me c�t�. L'exp�rience montre ce que je dis � ceux qui veulent l'observer, et la perspective en donne la raison, lorsqu'elle nous apprend que les globes ou les corps convexes re�oivent autant de diff�rentes lumi�res et de diff�rentes ombres, qu'il y a de diff�rens corps qui les environnent. CHAPITRE XXVII. _De quel c�t� il faut prendre le jour, et � quelle hauteur on doit prendre son point de lumi�re, pour dessiner d'apr�s le naturel._ Le vrai jour pour travailler d'apr�s le naturel, doit �tre prix du c�t� du septentrion, afin qu'il ne change point: mais si votre chambre �toit perc�e au midi, ayez des chassis huil�s aux fen�tres, afin que par ce moyen la lumi�re du soleil, qui y sera durant presque toute la journ�e, �tant adoucie, se r�pande �galement par-tout sans aucun changement sensible. La hauteur de la lumi�re doit �tre prise de telle sorte, que la longueur de la projection des ombres de chaque corps sur le plan, soit �gale � leur hauteur. CHAPITRE XXVIII. _Des jours et des ombres qu'il faut donner aux figures qu'on dessine d'apr�s les bosses et les figures de relief._ Pour bien repr�senter les figures de quelque corps que ce soit, il faut leur donner des lumi�res convenables au jour qu'elles re�oivent et au lieu o� elles sont repr�sent�es; c'est-�-dire, que si vous supposez qu'elles sont � la campagne et au grand air, le soleil �tant couvert, elles doivent �tre environn�es d'une lumi�re presque universelle; mais si le soleil �claire ces figures, il faut que leurs ombres soient fort obscures, en comparaison des autres parties qui re�oivent le jour, et toutes les ombres, tant primitives que d�riv�es, auront leurs extr�mit�s nettes et tranch�es, et ces ombres doivent �tre accompagn�es de peu de lumi�re, parce que l'air qui donne par r�flexion � ces figures le peu de lumi�re qu'elles re�oivent de ce c�t� l�, communique en m�me temps sa teinte � la partie qu'il regarde, et affoiblit la lumi�re qu'il envoie, en y m�lant sa couleur d'azur. Ce que je viens de dire se voit tous les jours aux objets blancs, dont la partie qui est �clair�e du soleil, montre qu'elle participe � la couleur de cet astre; mais cela paro�t encore davantage lorsque le soleil se couche entre des nuages qu'il �claire de ses rayons, et qu'un rouge vif et �clatant fait paro�tre tout enflamm�s; car alors ces nuages teignent et colorent de leur rouge tout ce qui prend sa lumi�re d'eux, et l'autre partie des corps qui n'est point tourn�e du c�t� de ces nuages paro�t obscure et teinte de l'azur de l'air. Alors si quelqu'un voit cet objet si diversement �clair�, il s'imagine qu'il est de deux couleurs. C'est donc une maxime constante, fond�e sur ce qu'on sait de la nature et de la cause de ces ombres et de ces lumi�res, que pour les bien repr�senter il faut qu'elles participent � leur origine, et qu'elles en tiennent quelque chose, sans quoi l'on n'imiteroit qu'imparfaitement la nature. Mais si vous supposez que la figure que vous repr�sentez est dans une chambre peu �clair�e, et que vous la voyiez de dehors, �tant plac�e sur la ligne par o� vient le jour, il faudra que cette figure ait des ombres fort douces, et soyez s�r qu'elle aura beaucoup de grace, et qu'elle fera honneur au Peintre, parce qu'elle aura beaucoup de relief, quoique les ombres en soient fort douces, sur-tout du c�t� que la chambre est le plus �clair�e, car les ombres y sont presque insensibles. J'apporterai la raison de ceci dans la suite. CHAPITRE XXIX. _Quel jour il faut prendre pour travailler d'apr�s le naturel ou d'apr�s la bosse._ La lumi�re qui est tranch�e par les ombres avec trop de duret�, fait un tr�s-mauvais effet: de sorte que pour �viter cet inconv�nient, si vous faites vos figures en pleine campagne, il ne leur faut pas donner un jour de soleil, mais feindre un temps couvert, et faire paro�tre quelques nuages transparens entre le soleil et vos figures, enfin qu'�tant �clair�es plus foiblement, l'extr�mit� de leurs ombres se m�le insensiblement avec la lumi�re et s'y perde. CHAPITRE XXX. _Comment il faut dessiner le nud._ Lorsque vous dessinerez le nud, donnez toujours � votre figure enti�re tout son contour, puis vous choisirez la partie qui vous plaira davantage; et apr�s lui avoir donn� une belle proportion avec les autres, vous travaillerez � la bien finir; car autrement vous n'apprendrez jamais � bien mettre ensemble tous les membres. Enfin, pour donner de la grace � vos figures, observez de ne point tourner la t�te d'une figure du m�me c�t� que l'estomac, et de ne point donner au bras et � la jambe de mouvement qui les porte du m�me c�t�; et si la t�te se tourne vers l'�paule droite, faites qu'elle penche un peu du c�t� gauche, et si l'estomac avance en dehors, faites que la t�te se tournant au c�t� gauche, les parties du c�t� droit soient plus hautes que celles du gauche. CHAPITRE XXXI. _De la mani�re de dessiner d'apr�s la bosse, ou d'apr�s le naturel._ Celui qui dessine d'apr�s des figures en bosse ou de relief, doit se placer de telle sorte, que son oeil soit au niveau de celui de la figure qu'il imite. CHAPITRE XXXII. _Mani�re de dessiner un paysage d'apr�s le naturel, ou de faire un plan exact de quelque campagne._ Ayez un carreau de verre bien droit, de la grandeur d'une demi-feuille de grand papier, et le posez bien � plomb et ferme entre votre vue et la chose que vous voulez dessiner, puis �loignez-vous du verre � la distance des deux tiers de votre bras, c'est-�-dire, d'environ un pied et demi, et par le moyen de quelque instrument, tenez votre t�te si ferme, qu'elle ne puisse recevoir aucun mouvement; apr�s, couvrez-vous un oeil ou le fermez, et avec la pointe d'un pinceau ou d'un crayon, marquez sur le verre ce que vous verrez au travers, et contretirez au jour sur du papier ce qui est trac� sur le verre; enfin calquez ce dessin qui est sur le papier, pour en tirer un autre plus net sur un nouveau papier, vous pourrez mettre en couleur ce dernier dessein, si vous voulez; mais ne manquez pas d'y observer la perspective a�rienne. CHAPITRE XXXIII. _Comment il faut dessiner les paysages._ Les paysages doivent �tre peints de mani�re que les arbres soient demi-�clair�s et demi-ombr�s; mais le meilleur temps qu'on puisse prendre pour y travailler, est quand le soleil se trouve � moiti� couvert de nuages; car alors les arbres re�oivent d'un c�t� une lumi�re universelle de l'air, et de l'autre une ombre universelle de la terre, et les parties de ces arbres sont d'autant plus sombres, qu'elles sont plus pr�s de terre. CHAPITRE XXXIV. _Comment il faut dessiner � la lumi�re de la chandelle._ Quand vous n'aurez point d'autre lumi�re que celle dont on se sert la nuit, il faudra que vous mettiez entre la lumi�re et la figure que vous imitez un chassis de toile, ou bien de papier huil�, ou m�me un papier tout simple sans �tre huil�, pourvu qu'il soit foible et fin; les ombres �tant adoucies par ce moyen l�, ne paro�tront point tranch�es d'une mani�re trop dure. CHAPITRE XXXV. _De quelle mani�re on pourra peindre une t�te, et lui donner de la grace avec les ombres et les lumi�res convenables._ La force des jours et des ombres donne beaucoup de grace au visage des personnes qui sont assises � l'entr�e d'un lieu obscur; tout le monde sera frapp� en les voyant, si les lumi�res et les ombres y sont bien distribu�es; mais les connoisseurs p�n�treront plus avant que les autres, et ils remarqueront que le c�t� du visage qui est ombr�, est encore obscurci par l'ombre du lieu vers lequel il est tourn�, et que le c�t� qui est �clair� re�oit encore de l'�clat de l'air dont la lumi�re est r�pandue par-tout, ce qui fait que les ombres sont presque insensibles de ce c�t� l�. C'est cette augmentation de lumi�re et d'ombre qui donne aux figures, et un grand relief, et une grande beaut�. CHAPITRE XXXVI. _Quelle lumi�re on doit choisir pour peindre les portraits, et g�n�ralement toutes les carnations._ Il faut pour cela avoir une chambre expos�e � l'air et d�couverte, et dont les murailles auront �t� mises en couleur de carnation. Le temps qu'il faut prendre pour peindre, c'est l'�t�, lorsque le soleil est couvert de nuages l�gers; mais si l'on craint qu'il ne se d�couvre, il faut que la muraille de la chambre soit tellement �lev�e du c�t� du midi, que les rayons du soleil ne puissent donner sur la muraille qui est du c�t� du septentrion; car, par leurs reflets, ils feroient de faux jours, et g�teroient les ombres. CHAPITRE XXXVII. _Comment un Peintre doit voir et dessiner les figures qu'il veut faire entrer dans la composition d'une histoire._ Il faut qu'un Peintre consid�re toujours dans le lieu o� son tableau doit �tre pos�, la hauteur du plan sur lequel il veut placer les figures, et tout ce qui doit entrer dans la composition de son tableau, et qu'ensuite la hauteur de sa vue se trouve autant au-dessous de la chose qu'il dessine, que le lieu o� son tableau sera expos� est plus �lev� que l'oeil de celui qui le regardera. Sans cette attention un tableau sera plein de fautes, et fera un fort mauvais effet. CHAPITRE XXXVIII. _Moyen pour dessiner avec justesse, d'apr�s le naturel, quelque figure que ce soit._ Il faut tenir de la main un fil avec un plomb suspendu pour voir les parties qui se rencontrent sur une m�me ligne perpendiculaire. CHAPITRE XXXIX. _Mesure ou division d'une statue._ Divisez la t�te en douze degr�s, et chaque degr� en douze points, chaque point en douze minutes, et les minutes en secondes, et ainsi de suite, jusqu'� ce que vous ayez trouv� une mesure �gale aux plus petites parties de votre figure. CHAPITRE XL. _Comment un Peintre se doit placer � l'�gard du jour qui �claire son mod�le._ Que A B soit la fen�tre par o� vient le jour, et M le centre de la lumi�re. Je dis que le Peintre sera bien plac� en quelque endroit qu'il se mette, pourvu que son oeil se trouve entre la partie ombr�e de son mod�le et celle qui est �clair�e, et il trouvera ce lieu en se mettant entre le point M et le point du mod�le o� il cesse d'�tre �clair� et o� il commence � �tre ombr�. [Illustration] CHAPITRE XLI. _Quelle lumi�re est avantageuse pour faire paro�tre les objets._ Une lumi�re haute r�pandue �galement, et qui n'est pas trop �clatante et trop vive, est fort avantageuse pour faire paro�tre avec grace jusques aux moindres parties d'un objet. CHAPITRE XLII. _D'o� vient que les Peintres se trompent souvent dans le jugement qu'ils font de la beaut� des parties du corps et de la justesse de leurs proportions._ Un Peintre qui aura quelque partie de son corps moins belle et moins bien proportionn�e qu'elle ne doit �tre pour plaire, sera sujet � faire mal la m�me partie dans ses ouvrages; cela se remarque principalement dans les mains, que nous avons continuellement devant les yeux. Il faut donc qu'un Peintre corrige, par une attention particuli�re, l'impression que fait sur son imagination un objet qui se pr�sente toujours � lui, et lorsqu'il a remarqu� dans sa personne quelque partie d�fectueuse, il doit se d�fier de l'amour-propre et de l'inclination naturelle qui nous porte � trouver belles les choses qui nous ressemblent. CHAPITRE XLIII. _Qu'il est n�cessaire de savoir l'anatomie et de conno�tre l'assemblage des parties de l'homme._ Un Peintre qui aura une connoissance exacte des nerfs, des muscles et des tendons, saura bien, dans le mouvement d'un membre, combien de nerfs y concourent, et de quelle sorte et quel muscle venant � s'enfler, est cause qu'un nerf se retire, et quels tendons et quels ligamens se ramassent autour d'un muscle pour le faire agir; et il ne fera pas comme plusieurs Peintres ignorans, lesquels, dans toutes sortes d'attitudes, font toujours paro�tre les m�mes muscles aux bras, au dos, � l'estomac et aux autres parties. CHAPITRE XLIV. _Du d�faut de ressemblance et de r�p�tition dans un m�me tableau._ C'est un grand d�faut, et n�anmoins assez ordinaire, que de r�p�ter dans un m�me tableau, les m�mes attitudes et les m�mes plis de draperies, et faire que toutes les t�tes se ressemblent et paroissent dessin�es d'apr�s le m�me mod�le. CHAPITRE XLV. _Ce qu'un Peintre doit faire pour ne se point tromper dans le choix qu'il fait d'un mod�le._ Il faut premi�rement qu'un Peintre dessine sa figure sur le mod�le d'un corps naturel, dont la proportion soit g�n�ralement reconnue pour belle; ensuite il se fera mesurer lui-m�me, pour voir en quelle partie de sa personne il se trouvera diff�rent de son mod�le, et combien cette diff�rence est grande; et quand il l'aura une fois observ�, il doit �viter avec soin dans ses figures, les d�fauts qu'il aura remarqu�s en sa personne. Un Peintre ne sauroit faire trop d'attention � ce que je dis; car, comme il n'y a point d'objet qui nous soit plus pr�sent ni plus uni que notre corps, les d�fauts qui s'y rencontrent ne nous paroissent pas �tre des d�fauts, parce que nous sommes accoutum�s � les voir, souvent m�me ils nous plaisent, et notre ame prend plaisir � voir des choses qui ressemblent au corps qu'elle anime. C'est peut-�tre pour cette raison qu'il n'y a point de femme, quelque mal faite qu'elle soit, qui ne trouve quelqu'un qui la recherche. CHAPITRE XLVI. _De la faute que font les Peintres qui font entrer dans la composition d'un tableau, des figures qu'ils ont dessin�es � une lumi�re diff�rente de celle dont ils supposent que leur tableau est �clair�._ Un Peintre aura dessin� en particulier une figure avec une grande force de jour et d'ombres, et ensuite par ignorance, ou par inadvertance, il fait entrer la m�me figure dans la composition d'un tableau o� l'action repr�sent�e se passe � la campagne, et demande une lumi�re qui se r�pande �galement de tous c�t�s, et fasse voir toutes les parties des objets. Il arrive, au contraire, dans l'exemple dont nous parlons, que, contre les r�gles du clair-obscur, on voit des ombres fortes o� il n'y en peut avoir, ou du moins o� elles sont presque insensibles, et des reflets o� il est impossible qu'il y en ait. CHAPITRE XLVII. _Division de la Peinture._ La Peinture se divise en deux parties principales. La premi�re est le dessin, c'est-�-dire, le simple trait ou le contour qui termine les corps et leurs parties, et qui en marque la figure: la seconde est le coloris, qui comprend les couleurs que renferme le contour des corps. CHAPITRE XLVIII. _Division du Dessin._ Le dessin se divise aussi en deux parties, qui sont la proportion des parties entre elles, par rapport au tout qu'elles doivent former, et l'attitude qui doit �tre propre du sujet, et convenir � l'intention et aux sentimens qu'on suppose dans la figure qu'on repr�sente. CHAPITRE XLIX. _De la proportion des membres._ Il faut observer trois choses dans les proportions; la justesse, la convenance et le mouvement. La justesse comprend la mesure exacte des parties consid�r�es par rapport les unes aux autres, et au tout qu'elles composent. Par la convenance on entend le caract�re propre des personnages selon leur �ge, leur �tat, et leur condition; ensorte que dans une m�me figure on ne voie point en m�me temps des membres d'un jeune homme et d'un vieillard, ni dans un homme ceux d'une femme; qu'un beau corps n'ait que de belles parties. Enfin le mouvement, qui n'est autre chose que l'attitude et l'expression des sentimens de l'ame, demande dans chaque figure une disposition qui exprime ce qu'elle fait, et la mani�re dont elle le doit faire; car il faut bien remarquer qu'un vieillard ne doit point faire paro�tre tant de vivacit� qu'un jeune homme, ni tant de force qu'un homme robuste; que les femmes n'ont pas le m�me air que les hommes; qu'enfin les mouvemens d'un corps doivent faire voir ce qu'il a de force ou de d�licatesse. CHAPITRE L. _Du mouvement et de l'expression des figures._ Toutes les figures d'un tableau doivent �tre dans une attitude convenable au sujet qu'elles repr�sentent, de sorte qu'en les voyant on puisse conno�tre ce qu'elles pensent et ce qu'elles veulent dire. Pour imaginer sans peine ces attitudes convenables, il n'y a qu'� consid�rer attentivement les gestes que font les muets, lesquels expriment leurs pens�es par les mouvemens des yeux, des mains, et de tout le corps. Au reste, vous ne devez point �tre surpris que je vous propose un ma�tre sans langue pour vous enseigner un art qu'il ne sait pas lui-m�me, puisque l'exp�rience peut vous faire conno�tre qu'il vous en apprendra plus par ses actions que tous les autres avec leurs paroles et leurs le�ons. Il faut donc qu'un Peintre, de quelque �cole qu'il soit, avant que d'arr�ter son dessin, consid�re attentivement la qualit� de ceux qui parlent, et la nature de la chose dont il s'agit, afin d'appliquer � propos � son sujet l'exemple d'un muet que je propose. CHAPITRE LI. _Qu'il faut �viter la duret� des contours._ Ne faites point les contours de vos figures d'une autre teinte que de celle du champ o� elles se trouvent, c'est-�-dire, qu'il ne les faut point profiler d'aucun trait obscur qui soit d'une couleur diff�rente de celle du champ, et de celle de la figure. CHAPITRE LII. _Que les d�fauts ne sont pas si remarquables dans les petites choses que dans les grandes._ On ne peut pas remarquer dans les petites figures aussi ais�ment que dans les grandes, les d�fauts qui s'y rencontrent; cela vient de la grande diminution des parties des petites figures, qui ne permet pas d'en remarquer exactement les proportions: de sorte qu'il est impossible de marquer en quoi ces parties sont d�fectueuses. Par exemple, si vous regardez un homme �loign� de vous de trois cents pas, et que vous vouliez examiner les traits de son visage et remarquer s'il est beau, ou mal fait, ou seulement d'une apparence ordinaire, quelque attention que vous y apportiez, il vous sera impossible de le faire: cela vient sans doute de la diminution apparente des parties de l'objet que vous regardez, caus�e par son grand �loignement; et si vous doutez que l'�loignement diminue les objets, vous pourrez vous en assurer par la pratique suivante: Tenez la main � quelque distance de votre visage, de sorte qu'ayant un doigt �lev� et dress�, le bout de ce doigt r�ponde au haut de la t�te de celui que vous regardez, et vous verrez que votre doigt couvre non-seulement son visage en longueur, mais m�me une partie de son corps; ce qui est une preuve �vidente de la diminution apparente de l'objet. CHAPITRE LIII. _D'o� vient que les choses peintes ne peuvent jamais avoir le m�me relief que les choses naturelles._ Les Peintres assez souvent se d�pitent contre leur ouvrage, et se f�chent de ce que, t�chant d'imiter le naturel, ils trouvent que leurs peintures n'ont pas le m�me relief, ni la m�me force que les choses qui se voient dans un miroir; ils s'en prennent aux couleurs, et disent que leur �clat et la force des ombres surpassent de beaucoup la force des jours et des ombres de la chose qui est repr�sent�e dans le miroir; quelquefois ils s'en prennent � eux-m�mes, et attribuent � leur ignorance un effet purement naturel, dont ils ne connoissent pas la cause. Il est impossible que la peinture paroisse d'aussi grand relief que les choses vues dans un miroir (bien que l'une et l'autre ne soient que superficielles), � moins qu'on ne les regarde qu'avec un oeil: en voici la raison: les deux yeux A B voyant les objets N M l'un derri�re l'autre, M ne peut pas �tre enti�rement occup� par N, parce que la base des rayons visuels est si large, qu'apr�s le second objet elle voit encore le premier; mais si vous vous servez seulement d'un oeil, comme dans la figure S, l'objet F, occupera toute l'�tendue de R, parce que la pyramide des rayons visuels partant d'un seul point, elle a pour base le premier corps F, tellement que le second R qui est de m�me grandeur, ne pourra jamais �tre vu[1]. [1] L�onard de Vinci est fort obscur dans ce chapitre, et peut-�tre s'est-il tromp�: celui qui l'a traduit la premi�re fois ne l'a ni expliqu� ni corrig�. Voici ce qu'on peut dire sur la mati�re qui est ici trait�e. Tout tableau est une perspective, et l'art peut faire paro�tre les figures d'un tableau avec autant de relief qu'en ont les figures naturelles. Mais un tableau ne repr�sente que des figures plates autour desquelles on ne sauroit tourner pour en voir les diff�rens c�t�s; il n'a proprement qu'un point de vue d'o� on puisse les bien voir, au lieu qu'on peut voir de tous c�t�s les figures naturelles, et elles paro�tront toujours avec le relief qu'elles ont. [Illustration] CHAPITRE LIV. _Qu'il faut �viter de peindre divers tableaux d'histoire l'une sur l'autre dans une m�me fa�ade._ Ce que je bl�me ici est un abus universel et une faute que tous les Peintres font quand ils peignent des fa�ades de chapelles: car, apr�s avoir peint sur un plan une histoire, avec son paysage et des b�timens, ils en peignent plusieurs autres au-dessus et � c�t� de la premi�re sur autant de plans diff�rens, en changeant chaque fois de point perspectif, de sorte que la m�me fa�ade se trouve peinte avec plusieurs points de vue diff�rens, ce qui est une grande b�vue pour des Peintres, d'ailleurs habiles, puisque le point de vue d'un tableau repr�sente l'oeil de celui qui le regarde. Et si vous me demandez comment on pourra donc peindre sur une m�me fa�ade la vie d'un saint, divis�e en plusieurs sujets d'histoire; � cela je vous r�ponds qu'il faut placer votre premier plan avec son point perspectif � une hauteur de vue convenable � ceux qui verront votre tableau, et sur ce premier plan repr�senter votre principale histoire en grand, et puis aller diminuant les figures et les b�timens de la suite de votre sujet, selon les diverses situations des lieux. Et dans le reste de la fa�ade, vers le haut, vous y pourrez faire du paysage avec des arbres d'une grandeur proportionn�e aux figures, ou des anges, si le sujet de l'histoire le demande, ou bien des oiseaux, ou simplement un ciel avec des nuages, et semblables choses; autrement, n'entreprenez point de peindre ces sortes de tableaux, car tout votre ouvrage seroit faux, et contre les r�gles de l'optique. CHAPITRE LV. _De quelle lumi�re un Peintre se doit servir pour donner � ses figures un plus grand relief._ Les figures qui prennent leur jour de quelque lumi�re particuli�re, montrent un plus grand relief que celles qui sont �clair�es de la lumi�re universelle, parce qu'une lumi�re particuli�re produit des reflets qui d�tachent les figures du champ du tableau; ces reflets naissent des lumi�res d'une figure, et rejaillissent sur les ombres de la figure oppos�e, et lui donnent comme une foible lumi�re; mais une figure expos�e � une lumi�re particuli�re, en quelque lieu vaste et obscur, ne re�oit aucun reflet, tellement qu'on n'en peut voir que la partie qui est �clair�e; aussi cela se pratique seulement dans les tableaux o� l'on peint des nuits avec une lumi�re particuli�re et petite. CHAPITRE LVI. _Lequel est plus excellent et plus n�cessaire de savoir donner les jours et les ombres aux figures, ou de les bien contourner._ Les contours des figures font paro�tre une plus grande connoissance du dessin que les lumi�res et les ombres: la premi�re de ces deux choses demande plus de force d'esprit, et la seconde plus d'�tendue; car les membres ne peuvent faire qu'un certain nombre de mouvemens; mais les projections des ombres, les qualit�s des lumi�res, leurs d�gradations, sont infinies. CHAPITRE LVII. _De quelle sorte il faut �tudier._ Mettez par �crit quels sont les muscles et les tendons, qui, selon les diff�rentes attitudes et les diff�rens mouvemens, se d�couvrent ou se cachent en chaque membre, ou bien qui ne font ni l'un ni l'autre; et vous souvenez que cette �tude est tr�s-importante aux Peintres et aux Sculpteurs, que leur profession oblige de conno�tre les muscles, leurs fonctions, leur usage. Au reste, il faut faire ces remarques sur le corps de l'homme consid�r� dans tous les �ges, depuis l'enfance jusqu'� la plus grande vieillesse, et observer les changemens qui arrivent � chaque membre durant la vie; par exemple, s'il devient plus gras ou plus maigre, quel est l'effet des jointures, &c. CHAPITRE LVIII. _Remarque sur l'expression et sur les attitudes._ Dans les actions naturelles que les hommes font sans r�flexion, il faut qu'un Peintre observe les premiers effets, qui partent d'une forte inclination et du premier mouvement des passions, et qu'il fasse des esquisses de ce qu'il aura remarqu�, pour s'en servir dans l'occasion, en posant dans la m�me attitude un mod�le qui lui fasse voir quelles parties du corps travaillent dans l'action qu'il veut repr�senter. CHAPITRE LIX. _Que la Peinture ne doit �tre vue que d'un seul endroit._ La peinture ne doit �tre vue que d'un seul endroit, comme on en peut juger par cet exemple. Si vous voulez repr�senter en quelque lieu �lev� une boule ronde, il faut n�cessairement que vous lui donniez un contour d'ovale en forme d'oeuf, et vous retirer en arri�re jusqu'� ce qu'elle paroisse ronde. CHAPITRE LX. _Remarque sur les ombres._ Quand apr�s avoir examin� les ombres de quelque corps, vous ne pouvez conno�tre jusqu'o� elles s'�tendent, s'il arrive que vous les imitiez et que vous en peigniez de semblables dans un tableau, ayez soin de ne les point trop finir, afin de faire conno�tre par cette n�gligence ing�nieuse, qui n'est que l'effet de vos r�flexions, que vous imitez parfaitement la nature. CHAPITRE LXI. _Comment il faut repr�senter les petits enfans._ Si les enfans que vous voulez repr�senter sont assis, il faut qu'ils fassent paro�tre des mouvemens fort prompts, et m�me des contorsions de corps; mais s'ils sont debout, ils doivent, au contraire, paro�tre timides et saisis de crainte. CHAPITRE LXII. _Comment on doit repr�senter les vieillards._ Les vieillards, lorsqu'ils sont debout, doivent �tre repr�sent�s dans une attitude paresseuse, avec des mouvemens lents, les genoux un peu pli�s, les pieds � c�t� l'un de l'autre, mais �cart�s, le dos courb�, la t�te pench�e sur le devant, et les bras plut�t serr�s que trop �tendus. CHAPITRE LXIII. _Comment on doit repr�senter les vieilles._ Les vieilles doivent paro�tre ardentes et col�res, pleines de rage, comme des furies d'enfer; mais ce caract�re doit se faire remarquer dans les airs de t�te et dans l'agitation des bras, plut�t que dans les mouvemens des pieds. CHAPITRE LXIV. _Comment on doit peindre les femmes._ Il faut que les femmes fassent paro�tre dans leur air beaucoup de retenue et de modestie; qu'elles aient les genoux serr�s, les bras crois�s ou approch�s du corps et pli�s sans contrainte sur l'estomac, la t�te doucement inclin�e et un peu pench�e sur le c�t�. CHAPITRE LXV. _Comment on doit repr�senter une nuit._ Une chose qui est enti�rement priv�e de lumi�re n'est rien que t�n�bres. Or, la nuit �tant de cette nature, si vous y voulez repr�senter une histoire, il faut faire ensorte qu'il s'y rencontre quelque grand feu qui �claire les objets �-peu-pr�s de la mani�re que je vais dire. Les choses qui se trouveront plus pr�s du feu tiendront davantage de sa couleur, parce que plus une chose est pr�s d'un objet, plus elle re�oit de sa lumi�re et participe � sa couleur; et comme le feu r�pand une couleur rouge, il faudra que toutes les choses qui en seront �clair�es aient une teinte rouge�tre, et qu'� mesure qu'elles en seront plus �loign�es, cette couleur rouge s'affoiblisse en tirant sur le noir, qui fait la nuit. Pour ce qui est des figures, voici ce que vous y observerez. Celles qui sont entre vous et le feu semblent n'en �tre point �clair�es; car du c�t� que vous les voyez, elles n'ont que la teinte obscure de la nuit, sans recevoir aucune clart� du feu, et celles qui sont aux deux c�t�s doivent �tre d'une teinte demi-rouge et demi-noire; mais les autres qu'on pourra voir au-del� de la flamme, seront toutes �clair�es d'une lumi�re rouge�tre sur un fond noir. Quant aux actions et � l'expression des mouvemens, il faut que les figures qui sont plus proches du feu portent les mains sur le visage, et se couvrent avec leurs manteaux, pour se garantir du trop grand �clat du feu et de sa chaleur, et tournent le visage de l'autre c�t�, comme quand on veut fuir ou s'�loigner de quelque lieu: vous ferez aussi paro�tre, �blouis de la flamme, la plupart de ceux qui sont �loign�s, et ils se couvriront les yeux de leurs mains, pour les parer de la trop grande lumi�re. CHAPITRE LXVI. _Comment il faut repr�senter une temp�te._ Si vous voulez bien repr�senter une temp�te, consid�rez attentivement ses effets. Lorsque le veut souffle sur la mer ou sur la terre, il enl�ve tout ce qui n'est pas fortement attach� � quelque chose, il l'agite confus�ment et l'emporte. Ainsi, pour bien peindre une temp�te, vous repr�senterez les nuages entrecoup�s et port�s avec imp�tuosit� par le vent du c�t� qu'il souffle, l'air tout rempli de tourbillons d'une poussi�re sablonneuse qui s'�l�ve du rivage, des feuilles et m�me des branches d'arbres enlev�es par la violence et la fureur du vent, la campagne toute en d�sordre, par une agitation universelle de tout ce qui s'y rencontre, des corps l�gers et susceptibles de mouvement r�pandus confus�ment dans l'air, les herbes couch�es, quelques arbres arrach�s et renvers�s, les autres se laissant aller au gr� du vent, les branches ou rompues ou courb�es, contre leur situation naturelle, les feuilles toutes repli�es de diff�rentes mani�res et sans ordre; enfin, des hommes qui se trouvent dans la campagne, les uns seront renvers�s et embarras�s dans leurs manteaux, couverts de poussi�re et m�connoissables; les autres qui sont demeur�s debout paro�tront derri�re quelque arbre et l'embrasseront, de peur que l'orage ne les entra�ne; quelques autres se couvrant les yeux de leurs mains pour n'�tre point aveugl�s de la poussi�re, seront courb�s contre terre, avec des draperies volantes et agit�es d'une mani�re irr�guli�re, ou emport�es par le vent. Si la temp�te se fait sentir sur la mer, il faut que les vagues qui s'entre-choquent la couvrent d'�cume, et que le vent en remplisse l'air comme d'une neige �paisse; que dans les vaisseaux qui seront au milieu des flots, on y voie quelques matelots tenant quelques bouts de cordes rompues, des voiles bris�es �trangement agit�es, quelques m�ts rompus et renvers�s sur le vaisseau tout d�labr� au milieu des vagues, des hommes criant se prendre � ce qui leur reste des d�bris de ce vaisseau. On pourra feindre aussi dans l'air des nuages emport�s avec imp�tuosit� par les vents, arr�t�s et repouss�s par les sommets des hautes montagnes se replier sur eux-m�mes, et les environner, comme si c'�toient des vagues rompues contre des �cueils, le jour obscurci d'�paisses t�n�bres, et l'air tout rempli de poudre, de pluie et de gros nuages. CHAPITRE LXVII. _Comme on doit repr�senter aujourd'hui une bataille._ Vous peindrez premi�rement la fum�e de l'artillerie, m�l�e confus�ment dans l'air avec la poussi�re que font les chevaux des combattans, et vous exprimerez ainsi ce m�lange confus. Quoique la poussi�re s'�l�ve facilement en l'air, parce qu'elle est fort menue, n�anmoins parce qu'elle est terrestre et pesante, elle retombe naturellement, et il n'y a que les parties les plus subtiles qui demeurent en l'air. Vous la peindrez donc d'une teinte fort l�g�re et presque semblable � celle de l'air, la fum�e qui se m�le avec l'air et la poussi�re �tant mont�e � une certaine hauteur, elle paro�tra comme des nuages obscurs. Dans la partie la plus �lev�e, on discernera plus clairement la fum�e que la poussi�re, et la fum�e paro�tra d'une couleur une peu azur�e et bleu�tre, mais la poussi�re conservera son coloris naturel du c�t� du jour; ce m�lange d'air, de fum�e et de poussi�re sera beaucoup plus clair sur le haut que vers le bas. Plus les combattans seront enfonc�s dans ce nuage �pais, moins on les pourra discerner, et moins encore on distinguera la diff�rence de leurs lumi�res d'avec leurs ombres. Vous peindrez d'un rouge de feu de visages, les personnes, l'air, les armes, et tout ce qui se trouvera aux environs, et cette rougeur diminuera � mesure qu'elle s'�loigne de son principe, et enfin elle se perdra tout-�-fait. Les figures qui seront dans le lointain, entre vous et la lumi�re, paro�tront obscures sur un champ clair, et leurs jambes seront moins distinctes et moins visibles, parce que pr�s de terre la poussi�re est plus �paisse et plus grossi�re. Si vous repr�sentez hors de la m�l�e quelques cavaliers courant, faites �lever entre eux et derri�re eux de petits nuages de poussi�re, � la distance de chaque mouvement de cheval, et que ces nuages s'affoiblissent et disparoissent � mesure qu'ils seront plus loin du cheval qui les a fait �lever, et m�me que les plus �loign�s soient plus hauts, plus �tendus et plus clairs, et les plus proches plus grossiers, plus sensibles, plus �pais et plus ramass�s. Que l'air paroisse rempli de tra�n�es de feu semblables � des �clairs; que de ces esp�ces d'�clairs que la poudre forme en s'enflammant, les uns tirent en haut, que les autres retombent en bas; que quelques-uns soient port�s en ligne droite, et que les balles des armes � feu laissent apr�s elles une tra�n�e de fum�e. Vous ferez aussi les figures sur le devant couvertes de poudre sur les yeux, sur le visage, sur les cils des yeux, et sur toutes les autres parties sujettes � retenir la poussi�re. Vous ferez voir les vainqueurs courant, ayant les cheveux �pars, agit�s au gr� du vent, aussi-bien que leurs draperies, le visage rid�, les sourcils enfl�s et approch�s l'un de l'autre: que leurs membres fassent un contraste entre eux, c'est-�-dire, si le pied droit marche le premier, que le bras gauche soit aussi le plus avanc�; et si vous repr�sentez quelqu'un tomb� � terre, qu'on le remarque � la trace qui paro�t sur la poussi�re ensanglant�e; et tout autour sur la fange d�tremp�e on verra les pas des hommes et des chevaux qui y ont pass�. Vous ferez encore voir quelques chevaux entra�nant et d�chirant mis�rablement leur ma�tre mort, attach� par les �triers, ensanglantant tout le chemin par o� il passe. Les vaincus mis en d�route, auront le visage p�le, les sourcils hauts et �tonn�s, le front tout rid�, les narines retir�es en arc, et repliss�es depuis la pointe du nez jusqu'aupr�s de l'oeil, la bouche b�ante, et les l�vres retrouss�es, d�couvrant les dents et les desserrant comme pour crier bien haut. Que quelqu'un tomb� par terre et bless�, tienne une main sur ses yeux effar�s, le dedans tourn� vers l'ennemi, et se soutienne de l'autre comme pour se relever; vous en ferez d'autres fuyant et criant � pleine t�te: le champ de bataille sera couvert d'armes de toutes sortes sous les pieds des combattans, de boucliers, de lances, d'�p�es rompues, et d'autres semblables choses; entre les morts on en verra quelques-uns demi-couverts de poussi�re et d'armes rompues, et quelques autres tout couverts et presque enterr�s; la poussi�re et le terrein d�tremp� de sang fera une fange rouge; des ruisseaux de sang sortant des corps, couleront parmi la poussi�re; on en verra d'autres en mourant grincer les dents, rouler les yeux, serrer les poings, et faire diverses contorsions du corps, des bras et des jambes. On pourroit feindre quelqu'un d�sarm� et terrass� par son ennemi, se d�fendre encore avec les dents et les ongles: on pourra repr�senter quelque cheval �chapp�, courant au travers des ennemis, les crins �pars et flottant au vent, faire des ruades et un grand d�sordre parmi eux: on y verra quelque malheureux estropi� tomber par terre, et se couvrir de son bouclier, et son ennemi courb� sur lui, s'effor�ant de lui �ter la vie. On pourroit encore voir quelque troupe d'hommes couch�s p�le-m�le sous un cheval mort; et quelques-uns des vainqueurs sortant du combat et de la presse, s'essuyer avec les mains, les yeux offusqu�s de la poussi�re, et les joues toutes crasseuses et barbouill�es de la fange qui s'�toit faite de leur sueur et des larmes que la poussi�re leur a fait couler des yeux. Vous verrez les escadrons venant au secours, pleins d'une esp�rance m�l�e de circonspection, les sourcils hauts, et se faisant ombre sur les yeux avec la main, pour discerner mieux les ennemis dans la m�l�e et au travers de la poussi�re, et �tre attentifs au commandement du capitaine, et le capitaine le b�ton haut, courant et montrant le lieu o� il faut aller: on y pourra feindre quelque fleuve, et dedans des cavaliers, faisant voler l'eau tout autour d'eux en courant, et blanchir d'�cume tout le chemin par o� ils passent: il ne faut rien voir, dans tout le champ de bataille, qui ne soit rempli de sang et d'un horrible carnage. CHAPITRE LXVIII. _Comment il faut peindre un lointain._ C'est une chose �vidente et connue de tout le monde, que l'air est en quelques endroits plus grossier et plus �pais qu'il n'est en d'autres, principalement quand il est plus proche de terre; et � mesure qu'il s'�l�ve en haut, il est plus subtil, plus pur et plus transparent. Les choses hautes et grandes, desquelles vous vous trouvez �loign�, se verront moins vers les parties basses, parce que le rayon visuel qui les fait voir passe au travers d'une longue masse d'air �pais et obscur; et on prouve que vers le sommet elles sont vues par une ligne, laquelle bien que du c�t� de l'oeil elle commence dans un air grossier, n�anmoins comme elle aboutit au sommet de son objet, elle finit dans un air beaucoup plus subtil que n'est celui des parties basses; et ainsi � mesure que cette ligne ou rayon visuel s'�loigne de l'oeil, elle se subtilise comme par degr�, en passant d'un air pur dans un autre qui l'est davantage: de sorte qu'un Peintre qui a des montagnes � repr�senter dans un paysage, doit observer que de colline en colline le haut en paro�tra toujours plus clair que le bas, et quand la distance de l'une � l'autre sera plus grande, il faut que le haut en soit aussi plus clair � proportion; et plus elles seront �lev�es, plus les teintes claires et l�g�res, en feront mieux remarquer la forme et la couleur. CHAPITRE LXIX. _Que l'air qui est pr�s de la terre, doit paro�tre plus �clair� que celui qui en est loin._ Parce que l'air qui est pr�s de la terre est plus grossier que celui qui en est loin, il re�oit et renvoie beaucoup plus de lumi�re: vous pouvez le remarquer lorsque le soleil se l�ve; car si vous regardez alors du c�t� du couchant, vous verrez de ce c�t�-l� une grande clart�, et vous ne verrez rien de semblable vers le haut du ciel: cela vient de la r�flexion des rayons de lumi�re qui se fait sur la terre et dans l'air grossier; de sorte que si dans un paysage vous repr�sentez un ciel qui se termine sur l'horizon, il faudra que la partie basse du ciel qui re�oit la lumi�re du soleil ait un grand �clat, et que cette blancheur alt�re un peu sa couleur naturelle, qui ne se verra en cet endroit qu'� travers l'air grossier: au contraire, le ciel qui est au-dessus de la t�te, doit moins participer � cette couleur blaffarde, parce que les rayons de lumi�re n'ont pas � p�n�trer tant d'air grossier et rempli de vapeurs. L'air pr�s de terre est quelquefois si �pais, que si vous regardez certains jours le soleil, lorsqu'il se l�ve, vous verrez que ses rayons ne sauroient presque passer au travers de l'air. CHAPITRE LXX. _Comment on peut donner un grand relief aux figures, et faire qu'elles se d�tachent du fond du tableau._ Les figures de quelque corps que ce soit, paro�tront se d�tacher du fond du tableau, et avoir un grand relief, lorsque le champ sur lequel sont les figures, sera m�l� de couleurs claires et obscures, avec la plus grande vari�t� qui sera possible sur les contours des figures, comme je le montrerai en son lieu; mais il faut qu'en l'assortiment de ces couleurs, la d�gradation des teintes, c'est-�-dire, la diminution de clart� dans les blanches, et d'obscurit� dans les noires, y soit judicieusement observ�e. CHAPITRE LXXI. _Comment on doit repr�senter la grandeur des objets que l'on peint._ Pour repr�senter la juste grandeur des choses qui servent d'objet � l'oeil, si le dessin est petit, comme sont ordinairement les ouvrages de miniature, il faut que les premi�res figures qui sont sur le devant soient aussi finies que celles des grands tableaux, parce que les ouvrages de miniature �tant petits, ils doivent �tre vus de pr�s, et les grands tableaux doivent �tre vus de plus loin: d'o� il arrive que les figures qui sont si diff�rentes en grandeur, paro�tront n�anmoins de m�me grandeur. La raison qu'on en apporte ordinairement se prend de la grandeur de l'angle sous lequel l'oeil voit ces figures, et on expose ainsi cette raison. Que le tableau soit B C et l'oeil A, et que D E soit un verre par lequel passe l'image des figures qui sont repr�sent�es en B C. Je dis que l'oeil A demeurant ferme, la grandeur de la copie, ou de la peinture du tableau B C qui se fait sur le verre D E, doit �tre d'autant plus petite, que le verre D E sera plus proche de l'oeil A, et qu'elle doit �tre aussi finie que le tableau m�me, parce qu'elle doit repr�senter parfaitement la distance dans laquelle est le tableau; et si l'on veut faire le tableau B C sur D E, cette figure ne doit pas �tre si achev�e, ni si d�termin�e que la figure B C, et elle doit l'�tre davantage que la figure M N, transport�e sur le tableau F G, parce que si la figure P O �toit aussi achev�e que la figure B C, la perspective de O P se trouveroit fausse; car quoiqu'eu �gard � la diminution de la figure, elle f�t bien, B C �tant diminu� ou raccourci � la grandeur de P O, n�anmoins elle seroit trop finie, ce qui ne s'accorderoit pas bien avec la distance, parce qu'en voulant repr�senter la figure B C tr�s-finie, alors elle ne paro�troit plus �tre en B C, mais en P O ou en F G. [Illustration] CHAPITRE LXXII. _Quelles choses doivent �tre plus finies, et quelles choses doivent l'�tre moins._ Les choses proches, ou qui sont sur le devant du tableau, doivent �tre plus finies et plus termin�es que celles qu'on feint �tre vues dans le lointain, lesquelles il faut toucher plus l�g�rement, et laisser moins finies. CHAPITRE LXXIII. _Que les figures s�par�es ne doivent point paro�tre se toucher, et �tre jointes ensemble._ Faites ensorte que les couleurs que vous donnerez � vos figures soient tellement assorties, qu'elles s'entre-donnent de la grace, et quand une des couleurs sert de champ � l'autre, que ce soit avec une telle discr�tion, qu'elles ne paroissent point unies et attach�es l'une � l'autre, bien qu'elles fussent d'une m�me esp�ce de couleur, mais que la diversit� de leur teinte, foible ou forte, soit proportionn�e � la distance qui les s�pare, et � l'�paisseur de l'air qui est entre-deux, et que par la m�me r�gle, les contours se trouvent aussi proportionn�s, c'est-�-dire, soient plus ou moins termin�s, selon la distance ou la proximit� des figures. CHAPITRE LXXIV. _Si le jour se doit prendre en face ou de c�t�, et lequel des deux donne plus de grace._ Le jour pris en face donnera un grand relief aux visages qui sont plac�s entre des parois obscures et peu �clair�es, et principalement si le jour leur vient d'en haut. La cause de ce relief est, que les parties les plus avanc�es de ces visages sont �clair�es de la lumi�re universelle de l'air qui est devant eux, tellement que ces parties ainsi �clair�es, ont des ombres presque insensibles; et au contraire, les parties plus �loign�es re�oivent de l'ombre et de l'obscurit� des parois, et elles en re�oivent plus � mesure qu'elles sont plus �loign�es des parties avanc�es, et plus enfonc�es dans l'ombre. De plus, remarquez que le jour qui vient d'en haut, n'�claire point toutes les parties du visage, dont quelques-unes sont couvertes par celles qui ont du relief, comme les sourcils qui �tent le jour � l'orbite des yeux, le nez qui l'�te � une partie de la bouche, et le menton qui l'�te � la gorge. CHAPITRE LXXV. _De la r�verb�ration, ou des reflets de lumi�re._ Les reflets de lumi�re viennent des corps clairs et transparens, dont la superficie est polie et m�diocrement �paisse: car ces corps �tant frapp�s de quelque lumi�re, elle rejaillit comme une balle qui fait un bond, et elle se r�fl�chit sur le premier objet qu'elle rencontre du c�t� oppos� � celui d'o� elle vient. CHAPITRE LXXVI. _Des endroits o� la lumi�re ne peut �tre r�fl�chie._ Les superficies des corps �pais sont environn�es de lumi�res et d'ombres qui ont des qualit�s diff�rentes. On distingue deux sortes de lumi�res; l'une qu'on appelle originale, et l'autre qu'on appelle d�riv�e: la lumi�re originale est celle d'un corps, qui ne la re�oit point d'ailleurs, et qui l'a dans lui-m�me, comme le feu, le soleil et m�me l'air, qui en est p�n�tr� de tous c�t�s, quoiqu'il la re�oive du soleil. La lumi�re d�riv�e est une lumi�re r�fl�chie, une lumi�re qu'un corps re�oit d'ailleurs, et qu'il n'a point de lui-m�me. Venons maintenant au sujet de ce chapitre. Je dis qu'un corps ne r�fl�chira point de lumi�re du c�t� qu'il est dans l'ombre, c'est-�-dire, du c�t� qui est tourn� vers quelque lieu sombre, � cause des arbres, des bois, des herbes qui l'emp�chent de recevoir la lumi�re; et quoique chaque branche et chaque feuille re�oive la lumi�re vers laquelle elle est tourn�e, cependant la quantit� de feuilles et de branches forme un corps opaque que la lumi�re ne peut p�n�trer: elle ne peut pas m�me �tre r�fl�chie sur un corps oppos�, � cause de l'in�galit� des surfaces de tant de feuilles et de tant de branches; tellement que ces sortes d'objets ne sont gu�re capables de r�fl�chir la lumi�re et de faire des reflets. CHAPITRE LXXVII. _Des reflets._ Les reflets participeront plus ou moins � la couleur de l'objet sur lequel ils sont produits, et � la couleur de l'objet qui les produit, selon que l'objet qui les re�oit a une surface plus ou moins polie que celui qui les produit. CHAPITRE LXXVIII. _Des reflets de lumi�re qui sont port�s sur des ombres._ Si la lumi�re du jour �clairant quelque corps est r�fl�chie sur les ombres qui l'environnent, elle formera des reflets qui seront plus ou moins clairs, selon la force de leur lumi�re et selon qu'ils sont plus ou moins proche du corps qui renvoie la lumi�re. Il y en a qui n�gligent cette observation que d'autres mettent en pratique, et cette diversit� de sentiment et de pratique partage les Peintres en deux sectes, et chaque secte bl�me celle qui lui est oppos�e. Si vous voulez garder un juste milieu, et n'�tre bl�m� de personne, je vous conseille de ne faire de reflets de lumi�re que lorsque la cause de ces reflets et de leurs teintes sera assez �vidente pour �tre connue de tout le monde. Usez-en de m�me, lorsque vous ne faites point de reflets, et qu'on voie qu'il n'y avoit pas raison d'en faire. CHAPITRE LXXIX. _Des endroits o� les reflets de lumi�re paroissent davantage, et de ceux o� ils paroissent moins._ Les reflets de lumi�re ont plus ou moins de clart�, c'est-�-dire, sont plus ou moins apparens, selon que le champ sur lequel ils se rencontrent est plus ou moins obscur. Si le champ est plus obscur que le reflet, alors le reflet paro�tra fort, et sera sensible � l'oeil, par la grande diff�rence des couleurs du champ et du reflet; mais si le reflet se trouve sur un fond plus clair qu'il n'est lui-m�me, alors ce reflet sera moins �clatant, � cause de la blancheur sur laquelle il se termine; et ainsi il deviendra presque imperceptible. CHAPITRE LXXX. _Quelle partie du reflet doit �tre plus claire._ Le reflet sera plus clair et plus vif dans la partie qui recevra sa lumi�re entre des angles plus �gaux; par exemple, soit le centre de la lumi�re N, et que A B soit la partie �clair�e du corps A B C F E D, de laquelle la lumi�re soit r�fl�chie et renvoy�e tout autour de la concavit� oppos�e du m�me corps, qui n'est point �clair� de ce c�t�-l�. Supposons aussi que cette lumi�re qui se r�fl�chit en F soit port�e entre des angles �gaux, ou �-peu-pr�s �gaux: le reflet E n'aura point les angles si �gaux sur la base que le reflet F, comme on le peut voir par la grande diff�rence qu'il y a entre les angles E A B et E B A. Ainsi le point F recevra plus de lumi�re que le point E, et le reflet F sera plus �clatant que le reflet E, parce que, quoique les angles F et E aient une m�me base, les angles oppos�s au point F sont plus semblables entre eux que les angles oppos�s au point E. D'ailleurs, selon les r�gles de la perspective, le point F doit �tre plus �clair� que le point E, parce qu'il est plus pr�s du corps lumineux A B, dont ils re�oivent la lumi�re. [Illustration] CHAPITRE LXXXI. _Des reflets du coloris de la carnation._ Les reflets de la carnation qui se forment par la r�flexion de la lumi�re sur une autre carnation, sont plus rouges, d'une couleur plus vermeille, et d'un coloris plus vif et plus �clatant qu'aucune autre partie du corps; et cela arrive, parce que la superficie de tout corps opaque participe d'autant plus � la couleur du corps qui l'�claire, que ce corps est plus proche, et d'autant moins qu'il est plus �loign�; elle y participe aussi plus ou moins, selon qu'il est plus ou moins grand, parce qu'un grand objet qui renvoie beaucoup de lumi�re, emp�che que celle que les autres objets voisins envoient n'alt�re la sienne: ce qui arriveroit infailliblement si cet objet �toit petit; car, alors toutes ces lumi�res et tous ces reflets se confondroient, et leurs couleurs se m�leroient ensemble. Il peut cependant arriver qu'un reflet tienne plus de la couleur d'un corps plus petit, dont il est proche, que de la couleur d'un plus grand, dont il est fort �loign�, et qui a des effets moins sensibles, � cause de la grande distance. CHAPITRE LXXXII. _En quels endroits les reflets sont plus sensibles._ De tous les reflets, celui qui a un champ plus obscur doit paro�tre plus termin� et plus sensible; et, au contraire, celui qui a un champ plus clair est moins sensible: cela vient de la diversit� des ombres oppos�es, qui fait que la moins obscure donne de la force � celle qui l'est davantage, et elle la fait paro�tre encore plus obscure qu'elle ne l'est. De m�me les choses qui ont une diff�rente blancheur �tant oppos�es, la plus blanche fait paro�tre l'autre comme ternie et moins blanche qu'elle ne l'est en effet. CHAPITRE LXXXIII. _Des reflets doubles et triples._ Les reflets doubles ont plus de force que les reflets simples, et les lumi�res qui se trouvent entre les lumi�res incidentes et ces reflets, sont fort peu obscures. On appelle reflet simple, celui qui n'est form� que d'un seul corps �clair�, et reflet double, celui qui re�oit la lumi�re de deux corps: on peut juger par-l� de ce que c'est qu'un reflet triple. Venons � la preuve de la proposition. Soit le corps lumineux A, les reflets directs A N A S, les parties �clair�es N et S, les parties de ces m�mes corps qui sont �clair�es par les reflets O et E, le reflet A N E soit le reflet simple, et A N O A S O le reflet double. Le reflet simple E est form� par le corps �clair� B D, et le reflet double O re�oit de la lumi�re des corps �clair� B D et D R, d'o� il arrive que son ombre est fort peu obscure, parce qu'elle se trouve entre la lumi�re d'incidence N et celle du reflet N O S O. [Illustration] CHAPITRE LXXXIV. _Que la couleur d'un reflet n'est pas simple, mais m�l�e de deux ou de plusieurs couleurs._ Un corps qui renvoie la lumi�re sur un autre corps ne lui communique pas sa couleur telle qu'il l'a lui-m�me; mais il se fait un m�lange de plusieurs couleurs, s'il y en a plusieurs qui soient port�s par des reflets dans un m�me endroit. Par exemple, soit la couleur jaune A qui soit r�fl�chie sur la partie O du corps sph�rique C O E; que la couleur bleue B ait son reflet sur la m�me partie O. Par le m�lange de ces deux couleurs dans le point O, il se fera un reflet de couleur verte si le fond est blanc, parce que l'exp�rience fait voir que les couleurs jaunes et bleues, m�l�es ensemble, font un tr�s-beau verd. [Illustration] CHAPITRE LXXXV. _Que les reflets sont rarement de la couleur du corps d'o� ils partent, ou de la couleur du corps o� ils sont port�s._ Il arrive tr�s-rarement que les reflets soient ou de la couleur du corps d'o� ils partent, ou de la couleur du corps sur lequel ils tombent, parce que ces deux couleurs se m�lent ensemble, et en forment une troisi�me. Par exemple, soit le corps sph�rique D F G E de couleur jaune, que l'objet B C qui lui envoie un reflet dans le point H soit de couleur bleue, le point H o� tombe ce reflet prendra une teinte verte, lorsqu'il sera �clair� de la lumi�re du soleil qui est r�pandue dans l'air. [Illustration] CHAPITRE LXXXVI. _En quel endroit un reflet est plus �clatant et plus sensible._ Entre les reflets qui ont la m�me figure, la m�me �tendue et la m�me force, la partie qui paro�tra plus ou moins obscure sera celle qui viendra se terminer sur un champ plus ou moins obscur. Les superficies des corps participent davantage � la couleur des objets qui r�fl�chissent sur elle leur figure sous des angles plus �gaux. Des couleurs que les objets r�fl�chissent sur les superficies des corps oppos�s entre des angles �gaux, celle-l� doit �tre la plus vivement empreinte dont le reflet viendra de plus pr�s. Entre les couleurs des divers objets qui envoient leurs reflets par les m�mes angles, et d'une distance �gale sur la surface des corps oppos�s, celle-l� se r�fl�chira avec plus de force dont la teinte sera plus claire. L'objet qui r�fl�chira plus vivement sa propre couleur sur l'objet qui lui est oppos�, sera celui qui n'aura autour de lui aucune teinte que de son esp�ce. Et le plus confus de tous les reflets est celui qui est produit par un plus grand nombre d'objets de diff�rentes couleurs. La couleur qui sera plus pr�s d'un reflet lui communiquera sa teinte avec plus de force, que les autres couleurs qui en sont plus �loign�es. Enfin un Peintre doit donner aux reflets des figures, la couleur des parties des draperies qui sont plus pr�s des carnations sur lesquelles ces reflets sont port�s; mais il ne faut pas que ces couleurs r�fl�chies soient trop vives ni trop marqu�es, s'il n'y a quelque raison particuli�re qui oblige d'en user autrement. CHAPITRE LXXXVII. _Des couleurs r�fl�chies._ Toutes les couleurs r�fl�chies sont moins vives et ont moins de force que celles qui re�oivent la lumi�re directement; et cette lumi�re directe ou incidente a la m�me proportion avec la lumi�re r�fl�chie, que les objets lumineux qui en sont les causes ont entre eux en force et en clart�. CHAPITRE LXXXVIII. _Des termes des reflets ou de la projection des lumi�res r�fl�chies._ Un reflet qui part d'un corps plus obscur que n'est celui sur lequel il est re�u, sera foible et presque insensible; et au contraire un reflet sera fort sensible, quand le champ sur lequel il est re�u sera plus obscur que le terme d'o� part ce reflet; enfin, il sera plus sensible � proportion que le champ sera plus obscur, ou plus obscur � proportion que le champ sera plus clair. CHAPITRE LXXXIX. _De la position des figures._ Autant que le c�t� gauche de la figure D A diminue � cause de la position de la figure, autant le c�t� oppos� B C qui est le c�t� droit, augmente et s'alonge, c'est-�-dire, qu'� mesure que la partie de la figure qui est depuis l'�paule gauche D jusqu'� la ceinture A du m�me c�t�, la partie oppos�e du c�t� droit, depuis B jusqu'� C augmente; mais le nombril, ou le milieu du corps demeure toujours � la m�me hauteur. Cette diminution des parties du c�t� gauche de la figure, vient de ce qu'elle porte sur le pied gauche, qui devient par cette position le centre de tout le corps. Ainsi le point du milieu qui est sous la gorge entre les deux clavicules, quitte la ligne perpendiculaire du corps quand il est droit, pour en former une autre qui passe par la jambe gauche, et qui va finir au pied du m�me c�t�. Et plus cette ligne s'�loigne du milieu du corps, plus aussi les lignes horizontales qui la traversent, perdent leurs angles droits en penchant du c�t� gauche, qui soutient le corps. [Illustration n� 2: CHAPITRE LXXXIX. _Pag. 74_] CHAPITRE XC. _Comment on peut apprendre � bien agroupper les figures dans un tableau d'histoire._ Quand vous saurez bien la perspective et l'anatomie, et que vous conno�trez suffisamment la forme de chaque corps, appliquez-vous � consid�rer, dans toutes les occasions, l'attitude et les gestes des hommes dans toutes leurs actions. Par exemple, lorsque vous allez � la promenade, et que votre esprit est plus libre, remarquez les mouvemens de ceux que vous voyez, soit qu'ils s'entretiennent famili�rement, soit qu'ils contestent ensemble et se querellent, ou qu'ils en viennent aux mains. Observez ce que font ceux qui sont autour d'eux et qui t�chent de les s�parer, ou qui s'amusent � les regarder, et dessinez sur le champ ce que vous aurez remarqu�. Il faut, pour cela, avoir toujours avec vous un portefeuille ou des tablettes, dont les feuillets soient tellement attach�s, qu'on les puisse �ter sans les d�chirer; car ces recueils d'�tudes doivent �tre conserv�s avec grand soin pour servir dans l'occasion, la m�moire ne pouvant pas conserver les images d'une infinit� de choses qui servent d'objet � la Peinture. CHAPITRE XCI. _Quelle proportion il faut donner � la hauteur de la premi�re figure d'un tableau d'histoire._ La hauteur de la premi�re figure de votre tableau doit �tre moindre que le naturel, � proportion de l'enfoncement que vous lui donnez au-del� de la premi�re ligne du plan du tableau, et les autres diminueront aussi � proportion, suivant la m�me d�gradation ou l'�loignement du plan o� elles sont. CHAPITRE XCII. _Du relief des figures qui entrent dans la composition d'une histoire._ Des figures qui composent une histoire, celle qui sera repr�sent�e plus pr�s de l'oeil doit avoir un plus grand relief; en voici la raison. Cette couleur-l� doit paro�tre plus marqu�e et plus parfaite dans son esp�ce, qui a moins d'air entre elle et l'oeil qui la consid�re; c'est � cause de cela m�me que les ombres qui font paro�tre les corps opaques plus relev�s, paroissent plus fortes et plus obscures de pr�s que de loin, parce que la quantit� d'air qui est entre elles et l'oeil les brouille et les confond avec les couleurs des objets; ce qui n'arrive pas aux ombres voisines de l'oeil, o� elles donnent � chaque corps du relief � proportion qu'elles sont obscures. CHAPITRE XCIII. _Du raccourcissement des figures d'un tableau._ Lorsqu'un Peintre n'a qu'une seule figure � faire dans son tableau, il doit �viter tous les raccourcissemens, tant des membres particuliers que de tout le corps, parce qu'il seroit oblig� de r�pondre � tous momens aux questions de ceux qui n'ont pas l'intelligence de son art; mais aux grandes compositions o� il entre plusieurs figures, il peut en faire avec libert� de toutes sortes, selon le sujet qu'il traite, et sur-tout dans les batailles, o� il se rencontre par n�cessit� un nombre infini de contorsions et de mouvemens de figures qui se battent, et qui sont m�l�es confus�ment ensemble dans les fracas et l'agitation furieuse d'une bataille. CHAPITRE XCIV. _De la diversit� des figures dans une histoire._ Dans les grandes compositions d'histoire, on doit voir des figures de plusieurs sortes, soit pour la complexion, soit pour la taille, soit pour les carnations, soit pour les attitudes. Qu'il y ait des figures grasses et pleines d'embonpoint; qu'il y en ait d'autres qui soient maigres et sveltes; qu'il y en ait de grandes et de courtes, de fortes, de robustes et de foibles, de gaies, de tristes et de m�lancoliques; que quelques-unes aient des cheveux cr�pus, que d'autres les aient plus mols et plus unis; qu'aux uns le poil soit long, et aux autres court; que les mouvemens prompts et vifs de quelques figures contrastent avec les mouvemens doux et lents de quelques autres; enfin il faut qu'il y ait de la vari�t� dans la forme, dans la couleur, dans les plis des draperies, et g�n�ralement dans tout ce qui peut entrer dans la composition d'une histoire. CHAPITRE XCV. _Comment il faut �tudier les mouvemens du corps humain._ Avant que de s'appliquer � l'�tude de l'expression des mouvemens de l'homme, il faut avoir une connoissance g�n�rale de tous les membres du corps et de ses jointures en toutes les positions o� ils peuvent �tre, puis esquisser l�g�rement dans l'occasion l'action des personnes, sans qu'ils sachent que vous les consid�rez; parce que s'ils s'en appercevoient, ils perdroient la force et le caract�re naturel de l'expression avec laquelle ils se portoient � l'action: comme lorsque deux hommes col�res et emport�s contestent ensemble, chacun pr�tendant avoir raison, on les voit remuer avec furie les sourcils, faire des gestes des bras, et de grands mouvemens de toutes les parties du corps, selon l'intention qu'ils ont, et l'impression de la passion qui les agite; ce qu'il seroit impossible de repr�senter par un mod�le auquel on voudroit faire exprimer les effets d'une v�ritable col�re ou de quelqu'autre passion, comme de douleur, d'admiration, de crainte, de joie et de quelqu'autre passion que ce soit. Vous aurez soin de porter toujours sur vous vos tablettes, afin d'y esquisser l�g�rement ces expressions, et en m�me temps aussi, prenez garde � ce que font ceux qui se trouvent pr�sens dans ces occasions, et qui sont spectateurs de ce qui s'y passe, et par ce moyen vous apprendrez � composer les histoires. Et quand vos tablettes seront toutes remplies de ces sortes de dessins, conservez-les bien et les gardez, pour vous en servir dans l'occasion. Un bon Peintre doit soigneusement observer deux choses, qui sont de grande importance dans sa profession; l'une est le juste contour de sa figure, et l'autre l'expression vive de ce qu'il lui faut repr�senter. CHAPITRE XCVI. _De quelle sorte il faut �tudier la composition des histoires, et y travailler._ La premi�re �tude des compositions d'histoires doit commencer par mettre ensemble quelques figures l�g�rement esquiss�es; mais il faut auparavant les savoir bien dessiner de tous les c�t�s, avec les raccourcissemens et les extensions de chaque membre; apr�s on entreprendra de faire un groupe de deux figures qui combattent ensemble avec une hardiesse �gale, et il faudra dessiner ces deux figures en diff�rentes mani�res et en diff�rentes attitudes; ensuite, on pourra repr�senter un autre combat d'un homme g�n�reux avec un homme l�che et timide. En toutes ces compositions, il faut s'�tudier soigneusement � la recherche des accidens et des passions qui peuvent donner de l'expression, et enrichir le sujet qu'on traite. CHAPITRE XCVII. _De la vari�t� n�cessaire dans les histoires._ Dans les compositions d'histoires, un Peintre doit s'�tudier � faire paro�tre son g�nie par l'abondance et la vari�t� de ses inventions, et fuir la r�p�tition d'une m�me chose qu'il ait d�j� faite, afin que la nouveaut� et l'abondance attirent et donnent du plaisir � ceux qui consid�rent son ouvrage. J'estime donc que dans une histoire il est n�cessaire quelquefois, selon le sujet, d'y m�ler des hommes, diff�rens dans l'air, dans l'�ge, dans les habits, agroup�s ensemble p�le-m�le avec des femmes et des enfans, des chiens, des chevaux, des b�timens, des campagnes et des collines, et qu'on puisse remarquer la qualit� et la bonne grace d'un Prince ou d'une personne de qualit�, et la distinguer d'avec le peuple. Il ne faudra pas aussi m�ler dans un m�me groupe ceux qui sont tristes et m�lancoliques avec ceux qui sont gais et qui rient volontiers, parce que les humeurs enjou�es cherchent toujours ceux qui aiment � rire, comme les autres cherchent aussi leurs semblables. CHAPITRE XCVIII. _Qu'il faut, dans les histoires, �viter la ressemblance des visages, et diversifier les airs de t�te._ C'est un d�faut ordinaire aux Peintres Italiens, de mettre dans leurs tableaux des figures enti�res d'empereurs, imit�es de plusieurs statues antiques, ou du moins de donner � leurs figures les airs de t�te qu'on remarque dans les antiques. Pour �viter ce d�faut, ne r�p�tez jamais une m�me chose, et ne donnez point le m�me air de t�te � deux figures dans un tableau, et en g�n�ral, plus vous aurez soin de varier votre dessin, en pla�ant ce qui est laid aupr�s de ce qui est beau, un vieillard aupr�s d'un jeune homme, un homme fort et robuste aupr�s d'un autre qui est foible, plus votre tableau sera agr�able. Mais il arrive souvent qu'un Peintre qui aura dessin� quelque chose en fait servir jusqu'au moindre trait; en quoi il se trompe, car la plupart du temps, les membres de l'animal qu'il a dessin� font des mouvemens peu conformes au sujet et � l'action qu'il repr�sente dans un tableau: ainsi, apr�s avoir contourn� quelque partie avec beaucoup de justesse, et l'avoir fini avec plaisir, il a le chagrin de se voir contraint de l'effacer pour en mettre un autre � la place. CHAPITRE XCIX. _Comment il faut assortir les couleurs pour qu'elles se donnent de la grace les unes aux autres._ Si vous voulez que le voisinage d'une couleur donne de la grace � une autre couleur, imitez la nature, et faites avec le pinceau ce que les rayons du soleil font sur une nu�e lorsqu'ils y forment l'arc-en-ciel; les couleurs s'unissent ensemble doucement, et ne sont point tranch�es d'une mani�re dure et s�che; c'est de cette sorte qu'il faut unir et assortir les couleurs dans un tableau. Prenez garde aussi aux choses suivantes qui regardent les couleurs. 1�. Si vous voulez repr�senter une grande obscurit�, opposez-lui un grand blanc, de m�me que pour relever le blanc et lui donner plus d'�clat, il faut lui opposer une grande obscurit�. 2�. Le rouge aura une couleur plus vive aupr�s du jaune p�le qu'aupr�s du violet. 3�. Il faut bien distinguer, entre les couleurs, celles qui rendent les autres plus vives et plus �clatantes, de celles qui leur donnent seulement de la grace, comme le verd en donne au rouge, tandis qu'il en �te au bleu. 4�. Il y a des couleurs qu'on peut fort bien assortir, parce que leur union les rend plus agr�ables; comme le jaune p�le, ou le blanc et l'azur, et d'autres encore dont nous parlerons ailleurs. CHAPITRE C. _Comment on peut rendre les couleurs vives et belles._ Il faut toujours pr�parer un fond tr�s-blanc aux couleurs que vous voulez faire paro�tre belles, pourvu qu'elles soient transparentes; car, aux autres qui ne le sont pas, un champ clair ne sert de rien; comme l'exp�rience le montre dans les verres color�s, dont les couleurs paroissent extr�mement belles, lorsqu'elles se trouvent entre l'oeil et la lumi�re, et qui n'ont nulle beaut�, lorsqu'elles ont derri�re elles un air �pais et obscur, ou un corps opaque. CHAPITRE CI. _De la couleur que doivent avoir les ombres des couleurs._ La teinte de l'ombre de quelque couleur que ce soit, participe toujours � la couleur de son objet, et cela plus ou moins, selon qu'il est ou plus proche ou plus �loign� de l'ombre, et � proportion aussi de ce qu'il a ou plus ou moins de lumi�re. CHAPITRE CII. _De la vari�t� qui se remarque dans les couleurs, selon qu'elles sont plus �loign�es ou plus proches._ Des choses dont la couleur est plus obscure que l'air, celle qui sera plus �loign�e paro�tra moins obscure; et, au contraire, de celles qui sont plus claires que l'air, celle qui sera plus �loign�e paro�tra moins claire et moins blanche; et, en g�n�ral, toutes les choses qui sont ou plus claires ou plus obscures que l'air, �tant vues dans un grand �loignement, changent, pour ainsi dire, la nature et la qualit� de leur couleur; de sorte que la plus claire paro�t plus obscure, et la plus obscure devient plus claire par l'�loignement. CHAPITRE CIII. _A quelle distance de la vue les couleurs des choses se perdent enti�rement._ Les couleurs des choses se perdent enti�rement dans une distance plus ou moins grande, selon que l'oeil et l'objet sont plus ou moins �lev�s de terre: voici la preuve de cette proposition. L'air est plus ou moins �pais, selon qu'il est plus proche ou plus �loign� de la terre: il s'ensuit de-l� que si l'oeil et l'objet sont pr�s de la terre, l'�paisseur et la grossi�ret� de l'air qui est entre l'oeil et l'objet, sera tr�s-grande, et elle obscurcira beaucoup la couleur de l'objet; mais si l'oeil et l'objet sont fort �loign�s de la terre, l'air qui est entre deux ne changera presque rien � la couleur de l'objet: enfin la vari�t� et la d�gradation des couleurs d'un objet, d�pend non-seulement de la lumi�re qui n'est pas toujours la m�me aux diff�rentes heures du jour, mais aussi de la grossi�ret� et de la subtilit� de l'air, au travers duquel les couleurs des objets sont port�es � l'oeil. CHAPITRE CIV. _De la couleur de l'ombre du blanc._ L'ombre du blanc �clair� par le soleil et par l'air, a sa teinte tirant sur le bleu, et cela vient de ce que le blanc de soi n'est pas proprement une couleur, mais le sujet des autres couleurs; et parce que la superficie de chaque corps participe � la couleur de son objet, il est n�cessaire que cette partie de la superficie blanche participe � la couleur de l'air qui est son objet. CHAPITRE CV. _Quelle couleur produit l'ombre la plus obscure et la plus noire._ L'ombre qui tire davantage sur le noir, est celle qui se r�pand sur une superficie plus blanche, et cette ombre aura une plus grande disposition � la vari�t� qu'aucune autre; cela vient de ce que le blanc n'est pas proprement une couleur, mais une disposition � recevoir toutes les couleurs indiff�remment, et les superficies blanches re�oivent bien mieux les couleurs des autres objets, et elles les rendent bien plus vives que ne feroit une superficie d'une autre couleur, sur-tout si cette couleur est le noir, ou quelque couleur obscure, dont le blanc est plus �loign� par sa nature; c'est pourquoi il paro�t extraordinairement, et il y a une diff�rence tr�s-sensible de ses ombres principales � ses lumi�res. CHAPITRE CVI. _De la couleur qui ne re�oit point de vari�t�, (c'est-�-dire, qui paro�t toujours de m�me force sans alt�ration), quoique plac�e en un air plus ou moins �pais, ou en diverses distances._ Il se peut faire quelquefois que la m�me couleur ne recevra aucun changement, quoiqu'elle soit vue en diff�rentes distances; et ceci arrivera quand la qualit� de l'air et les distances d'o� les couleurs seront vues, auront une m�me proportion. En voici la preuve. A, soit l'oeil, et H, telle couleur que l'on voudra, �loign�e de l'oeil � un degr� de distance en un air �pais de quatre degr�s; mais parce que le second degr� de dessus A M N L est une fois plus subtil, et qu'il a la m�me couleur que le degr� d'air qui est au-dessous, il faut n�cessairement que cette couleur soit deux fois plus loin de l'oeil qu'elle ne l'�toit auparavant; c'est-�-dire, aux deux degr�s de distance A F et F G plus loin de l'oeil, et elle sera la couleur G, laquelle �tant �lev�e ensuite au degr� d'air qui est deux fois plus subtil � la seconde hauteur A M N L, qui sera dans le degr� O M P N, il est n�cessaire de la transporter � la hauteur E, et elle sera distante de l'oeil de toute l'�tendue de la ligne A E, que l'on prouve �tre �quivalente en grosseur d'air � la distance A G, ce qui se d�montre ainsi. Si dans une m�me qualit� d'air la distance A G interpos�e entre l'oeil et la couleur en occupe deux degr�s, et que A E en occupe deux et demi, cette distance suffit pour faire que la couleur G, port�e � la hauteur E, ne re�oive point d'alt�ration; parce que les deux degr�s A C et A F �tant dans la m�me qualit� d'air, sont semblables et �gaux, et le degr� d'air C D, quoique �gal en longueur au degr� F G, ne lui est pas semblable en qualit�, parce qu'il se trouve dans un air deux fois plus �pais que l'air de dessus; ainsi, la couleur est aussi vive � un degr� d'�loignement dans l'air sup�rieur, qu'elle l'est � un demi-degr� d'�loignement dans l'air inf�rieur, parce que l'air sup�rieur est une fois plus subtil que celui de dessous: tellement qu'en calculant premi�rement la grosseur de l'air, puis les distances, vous trouverez les couleurs chang�es de place, sans qu'elles aient re�u d'alt�ration, ni dans leur force, ni dans leur �clat, ni dans la beaut� de leur teinte, et voici comment. Pour le calcul de la qualit� ou de la grossi�ret� de l'air, la couleur H est plac�e dans un air qui a quatre degr�s de grossi�ret�; la couleur G est dans un air qui en a deux, et la couleur E est dans un air qui n'en a qu'un. Voyons maintenant si les distances auront une proportion �galement r�ciproque, mais converse; la couleur E se rencontre �loign�e de l'oeil de deux degr�s et demi de l'oeil, la couleur G est � deux degr�s, et la couleur H � un degr�; mais comme cette distance n'a pas une proportion exacte avec l'�paisseur de l'air, il faut n�cessairement faire un troisi�me calcul, �-peu-pr�s de cette mani�re; le degr� A C, comme je l'ai suppos�, est tout-�-fait semblable, et �gal au degr� A F, et le demi-degr� C B est semblable, mais non pas �gal au degr� A F, parce que c'est seulement un demi-degr� en longueur, lequel vaut autant qu'un degr� entier de la qualit� de l'air de dessus, si bien que par le calcul on satisfait � ce qui avoit �t� propos�; car A C vaut deux degr�s d'�paisseur de l'air de dessus, et le demi-degr� C B en vaut un entier de ce m�me air de dessus, et un qui se trouve encore entre B E, lequel est le quatri�me. De m�me A H a quatre degr�s d'�paisseur d'air; A G en a aussi quatre, c'est-�-dire, A F qui en vaut deux, et F G qui en vaut encore deux, lesquels pris ensemble font quatre; A E en a aussi quatre, parce que A C en contient deux, et C B en contient un, qui est la moiti� de A C, et dans le m�me air; et il y en a dessus un tout entier dans l'air subtil, lesquels ensemble font quatre: de sorte que si la distance A E ne se trouve pas double de la distance A G, ni quadruple de la distance A H, elle est rendue �quivalente d'ailleurs par C B, demi-degr� d'air �pais, qui vaut un degr� entier de l'air subtil qui est au-dessus; et ainsi nous concluons ce qui �toit propos�, c'est-�-dire, que la couleur H G E ne re�oit aucune alt�ration dans ces diff�rentes distances. [Illustration] CHAPITRE CVII. _De la perspective des couleurs._ La m�me couleur �tant pos�e en plusieurs distances et � des hauteurs in�gales, la sensation ou la force de son coloris sera relative � la proportion de la distance qu'il y a de chacune des couleurs jusqu'� l'oeil qui les voit; en voici la preuve. Soit E B C D la m�me couleur divis�e en autant de parties �gales, dont la premi�re E ne soit �loign�e de l'oeil que de deux degr�s. La seconde B en soit distante de quatre degr�s; la troisi�me C soit � six degr�s, et la quatri�me D soit � huit degr�s; comme il paro�t par les cercles qui vont se couper et terminer sur la ligne A R. Ensuite, soit suppos� que l'espace A R S P soit un degr� d'air subtil, et S P E T soit un autre degr� d'air plus �pais; il s'ensuivra que la premi�re couleur E, pour venir � l'oeil, passera par un degr� d'air �pais E S, et par un autre degr� d'air moins �pais S A, et la couleur B enverra son esp�ce ou son image � l'oeil A, par deux degr�s d'air �pais, et par deux autres d'un air plus subtil, et la couleur C la portera par trois degr�s d'air �pais, et par trois de plus subtil, et la couleur D par quatre degr�s de l'air �pais, et par quatre d'un air plus subtil. Ainsi, il est assez prouv� par cet exemple, que la proportion de l'affoiblissement et de la d�gradation des couleurs est telle que celle de leur distance de l'oeil qui les voit; mais cela n'arrive qu'aux couleurs qui sont � notre hauteur, parce qu'� celles dont les hauteurs sont in�gales, la m�me r�gle ne s'y garde pas, �tant situ�es dans les portions d'air, dont la diverse �paisseur les alt�re et les affoiblit diversement. [Illustration] CHAPITRE CVIII. _Comment il se pourra faire qu'une couleur ne re�oive aucune alt�ration, �tant plac�e en divers lieux o� l'air sera diff�rent._ Une couleur ne changera point, quoique transport�e en divers lieux o� l'air a diff�rentes qualit�s, quand la distance et la qualit� de l'air seront r�ciproquement proportionn�es, c'est-�-dire, quand autant que l'une s'affoiblit par l'�loignement de l'oeil, elle est fortifi�e par la puret� et la subtilit� de l'air: en voici la preuve. Si on suppose que le premier air ou le plus bas, ait quatre degr�s de densit� ou d'�paisseur, et que la couleur soit �loign�e d'un degr� de l'oeil, et que le second air, qui est plus haut, ait trois degr�s de densit� seulement, en ayant perdu un degr�, redonnez � la couleur un degr� sur la distance, et quand l'air qui est plus haut aura perdu deux degr�s de sa densit�, et que la couleur aura gagn� deux degr�s sur la distance, alors votre premi�re couleur sera telle que la troisi�me; et pour le dire en un mot, si la couleur est port�e si haut que l'air y soit �pur� de trois degr�s de sa densit� ou de sa grossi�ret�, et que la couleur soit port�e � trois degr�s de distance; alors vous pouvez vous assurer que la couleur qui est �lev�e aura re�u un pareil affoiblissement de teinte que celle d'en bas, qui est plus pr�s, parce que si l'air d'en haut a perdu deux quarts de la densit� de l'air qui est au bas, la couleur en s'�levant, a acquis trois quarts sur la distance de l'�loignement entier, par lequel elle se trouve recul�e de l'oeil, et c'est ce que j'avois dessein de prouver. CHAPITRE CIX. _Si les couleurs diff�rentes peuvent perdre �galement leurs teintes, quand elles sont dans l'obscurit� ou dans l'ombre._ Il n'est pas impossible que les couleurs, telles qu'elles soient, perdent �galement leurs teintes diff�rentes quand elles sont dans l'ombre, et qu'elles aient toutes une couleur obscure d'ombre; c'est ce qui arrive dans les t�n�bres d'une nuit fort obscure, durant laquelle on ne peut distinguer ni la figure ni la couleur de quelque corps que ce soit; et parce que les t�n�bres ne sont rien qu'une simple privation de la lumi�re incidente et r�fl�chie, par le moyen de laquelle on distingue la figure et la couleur des corps, il faut n�cessairement que la cause de la lumi�re �tant �t�e, l'effet aussi vienne � cesser, qui est le discernement de la couleur et de la figure des corps. CHAPITRE CX. _Pourquoi on ne peut distinguer la couleur et la figure des corps qui sont dans un lieu qui paro�t n'�tre point �clair�, quoiqu'il le soit._ Il y a plusieurs endroits �clair�s qui paroissent cependant remplis de t�n�bres, et o� les choses qui s'y rencontrent demeurent priv�es enti�rement et de couleur et de forme: la cause de cet effet se doit rapporter � la lumi�re de l'air venant d'un grand jour, laquelle fait comme un obstacle entre l'oeil et son objet; ce qui se remarque sensiblement aux fen�tres qui sont loin de l'oeil, au-dedans desquelles on ne peut rien discerner qu'une grande obscurit� �gale et uniforme; mais si vous entrez dans ces lieux, vous les verrez fort �clair�s, et vous pourrez distinguer jusques aux moindres choses qu'ils contiennent. Ces deux impressions si diff�rentes se font par la disposition naturelle de l'oeil, dont la foiblesse ne pouvant supporter le trop grand �clat de la lumi�re de l'air, la prunelle se resserre, devient fort petite, et par-l� perd beaucoup de sa force; mais au contraire, dans les lieux sombres, la m�me prunelle s'�largit, et acquiert de la force � proportion de son �tendue: ce qui fait qu'elle re�oit beaucoup de lumi�re, et qu'on peut voir des objets qu'on ne pouvoit distinguer auparavant lorsqu'elle �toit resserr�e. CHAPITRE CXI. _Qu'aucune chose ne montre sa v�ritable couleur, si elle n'est �clair�e d'une autre couleur semblable._ On ne sauroit jamais voir la propre et vraie couleur d'aucune chose, si la lumi�re qui l'�claire n'est enti�rement de sa couleur m�me: cela se remarque sensiblement dans les couleurs des �toffes, dont les plis �clair�s jettant des reflets, ou donnant quelque lumi�re aux autres plis oppos�s, les font paro�tre de leur v�ritable couleur: les feuilles d'or ont le m�me effet, lorsqu'elles se r�fl�chissent r�ciproquement leur jour l'une � l'autre; mais si leur clart� venoit d'une autre couleur, l'effet en seroit bien diff�rent. CHAPITRE CXII. _Que les couleurs re�oivent quelques changemens par l'opposition du champ sur lequel elles sont._ Jamais aucune couleur ne paro�tra uniforme dans ses contours et ses extr�mit�s, si elle ne se termine sur un champ qui soit de sa couleur m�me: cela se voit clairement, lorsque le noir se trouve sur un fond blanc; car pour lors chaque couleur, par l'opposition de son contraire, a plus de force aux extr�mit�s qu'au milieu. CHAPITRE CXIII. _Du changement des couleurs transparentes, couch�es sur d'autres couleurs, et du m�lange des couleurs._ Une couleur transparente �tant couch�e sur une autre d'une teinte diff�rente, il s'en compose une couleur mixte, qui tient de chacune des deux simples qui la composent: cela se remarque dans la fum�e, laquelle passant par le conduit d'une chemin�e, et se rencontrant vis-�-vis du noir de la suie, elle paro�t bleue; mais au sortir de la chemin�e, quand elle s'�l�ve dans l'air qui est de couleur d'azur, elle paro�t rousse ou rouge�tre: de m�me le pourpre appliqu� sur l'azur fait une couleur violette, et l'azur �tant m�l� avec le jaune devient verd; et la couleur de safran couch�e sur le blanc, paro�tra jaune, et le clair avec l'obscur produit l'azur d'une teinte d'autant plus parfaite, que celles du clair et de l'obscur sont elles-m�mes plus parfaites. CHAPITRE CXIV. _Du degr� de teinte o� chaque couleur paro�t davantage._ Il faut remarquer ici pour la peinture quelle est la teinte de chaque couleur o� cette couleur paro�t plus belle, ou celle qui prend la plus vive lumi�re du jour, ou celle qui re�oit la lumi�re simple, ou celle de la demi-teinte, ou l'ombre, ou bien le reflet sur l'ombre, et pour cela il est n�cessaire de savoir en particulier quelle est la couleur dont il s'agit, parce que les couleurs sont bien diff�rentes � cet �gard, et elles n'ont pas toutes leur plus grande beaut� dans le m�me jour; car nous voyons que la perfection du noir est au fort de l'ombre: le blanc au contraire est plus beau dans son plus grand clair et dans une lumi�re �clatante; l'azur et le verd aux demi-teintes, le jaune et le rouge dans leur principale lumi�re; l'or dans les reflets, et la lacque aux demi-teintes. CHAPITRE CXV. _Que toute couleur qui n'a point de lustre est plus belle dans ses parties �clair�es que dans les ombres._ Toute couleur est plus belle dans ses parties �clair�es que dans les ombres; et la raison est, que la lumi�re fait conno�tre l'esp�ce et la qualit� des couleurs, au lieu que l'ombre les �teint, alt�re leur beaut� naturelle, et emp�che qu'on ne les discerne; et si on objecte que le noir est plus parfait dans son ombre que dans sa lumi�re, on r�pondra que le noir n'est pas mis au nombre des couleurs. CHAPITRE CXVI. _De l'apparence des couleurs._ Plus la couleur d'une chose est claire et mieux on la voit de loin, et la couleur la plus obscure a un effet tout contraire. CHAPITRE CXVII. _Quelle partie de la couleur doit �tre plus belle._ Si A est une lumi�re et B un corps �clair� directement par cette m�me lumi�re, E, qui ne peut voir cette lumi�re, voit seulement le corps �clair� que nous supposons �tre rouge: cela �tant, la lumi�re qu'il produit est de cette couleur, le reflet qui en est une partie lui ressemble, et colore de cette teinte la superficie E; et si E �toit d�j� rouge auparavant, il en deviendra beaucoup plus rouge, et sera plus beau que B; mais si E est jaune, il en na�tra une couleur compos�e et changeante, entre le jaune et le rouge. [Illustration] CHAPITRE CXVIII. _Que ce qu'il y a de plus beau dans une couleur, doit �tre plac� dans les lumi�res._ Puisque nous voyons que la qualit� des couleurs est connue par le moyen de la lumi�re, on doit juger qu'o� il y a plus de lumi�re, on discerne mieux la v�ritable couleur du corps �clair�; et qu'o� il y a plus d'obscurit�, la couleur se perd dans celle des ombres: c'est pourquoi le Peintre se souviendra de coucher toujours la plus belle teinte de sa couleur sur les parties �clair�es. CHAPITRE CXIX. _De la couleur verte qui se fait de rouille de cuivre et qu'on appelle vert-de-gris._ La couleur verte qui se fait de rouille de cuivre, quoiqu'elle soit broy�e � l'huile, ne laisse pas de s'en aller en fum�e et de perdre sa beaut�, si incontinent apr�s avoir �t� employ�e, on ne lui donne une couche de vernis; et non-seulement elle s'�vapore et se dissipe en fum�e, mais si on la frotte avec une �ponge mouill�e d'eau simple, elle quittera le fond du tableau, et s'enl�vera comme feroit une couleur � d�trempe, sur-tout par un temps humide; cela vient de ce que le vert-de-gris est une esp�ce de sel, lequel se r�sout facilement lorsque le temps est humide et pluvieux, et particuli�rement lorsqu'il est mouill� et lav� avec une �ponge. CHAPITRE CXX. _Comment on peut augmenter la beaut� du vert-de-gris._ Si avec le vert-de-gris on m�le l'alo�s caballin, ce vert-de-gris sera beaucoup plus beau qu'il n'�toit auparavant, et il feroit mieux encore avec le safran, s'il ne s'�vaporoit point en fum�e. La bont� de l'alo�s caballin se reconno�t lorsqu'il se dissout dans l'eau-de-vie chaude, parce qu'alors elle a plus de force pour dissoudre que quand elle est froide; et si apr�s avoir employ� ce vert-de-gris en quelque ouvrage, on passe dessus l�g�rement une couche de cet alo�s liqu�fi�, alors la couleur deviendra tr�s-belle; et cet alo�s se peut encore broyer � l'huile s�par�ment, ou avec le vert-de-gris, et avec toute autre couleur qu'on voudra. CHAPITRE CXXI. _Du m�lange des couleurs l'une avec l'autre._ Bien que le m�lange des couleurs l'une avec l'autre soit d'une �tendue presque infinie, je ne laisserai pas pour cela d'en toucher ici l�g�rement quelque chose. Etablissant premi�rement un certain nombre de couleurs simples pour servir de fondement, et avec chacune d'elles, m�lant chacune des autres une � une, puis deux � deux, et trois � trois, poursuivant ainsi jusques au m�lange entier de toutes les couleurs ensemble; puis je recommencerai � rem�ler ces couleurs deux avec deux, et trois avec trois, et puis quatre � quatre, continuant ainsi jusqu'� la fin; sur ces deux couleurs on en mettra trois, et � ces trois on y en ajoutera trois, et puis six, allant toujours augmentant avec la m�me proportion: or, j'appelle couleurs simples celles qui ne sont point compos�es, et ne peuvent �tre faites ni suppl��es par aucun m�lange des autres couleurs. Le noir et le blanc ne sont point compt�s entre les couleurs, l'un repr�sentant les t�n�bres, et l'autre le jour; c'est-�-dire, l'un �tant une simple privation de lumi�re, et l'autre la lumi�re m�me, ou primitive ou d�riv�e. Je ne laisserai pas cependant d'en parler, parce que dans la peinture il n'y a rien de plus n�cessaire et qui soit plus d'usage, toute la peinture n'�tant qu'un effet et une composition des ombres et des lumi�res, c'est-�-dire, de clair et d'obscur. Apr�s le noir et le blanc vient l'azur, puis le verd, et le tann�, ou l'ocre de terre d'ombre, apr�s le pourpre ou le rouge, qui font en tout huit couleurs: comme il n'y en a pas davantage dans la nature, je vais parler de leur m�lange. Soient premi�rement m�l�s ensemble le noir et le blanc, puis le noir et le jaune, et le noir et le rouge, ensuite le jaune et le noir, et le jaune et le rouge; mais parce qu'ici le papier me manque, je parlerai fort au long de ce m�lange dans un ouvrage particulier, qui sera tr�s-utile aux Peintres. Je placerai ce trait� entre la pratique et la th�orie. CHAPITRE CXXII. _De la surface des corps qui ne sont pas lumineux._ La superficie de tout corps opaque participe � la couleur du corps qui l'�claire; cela se d�montre �videmment par l'exemple des corps qui ne sont pas lumineux en ce que pas un ne laisse voir sa figure, ni sa couleur, si le milieu qui se trouve entre le corps et la lumi�re n'est �clair�: nous dirons donc que le corps opaque �tant jaune, et celui d'o� vient la lumi�re �tant bleu, il arrivera que la couleur du corps �clair� sera verte, parce que le vert est compos� de jaune et de bleu. CHAPITRE CXXIII. _Quelle est la superficie plus propre � recevoir les couleurs._ Le blanc est plus propre � recevoir quelque couleur que ce soit, qu'aucune autre superficie de tous les corps qui ne sont point transparens; pour prouver ceci, on dit que tout corps vuide est capable de recevoir ce qu'un autre corps qui n'est point vuide ne peut recevoir; et pour cela, nous supposerons que le blanc est vuide, ou, si vous voulez, n'a aucune couleur; tellement qu'�tant �clair� de la lumi�re d'un corps qui ait quelque couleur que ce soit, il participe davantage � cette lumi�re, que ne feroit le noir qui ressemble � un vaisseau bris�, lequel n'est plus en �tat de contenir aucune chose. CHAPITRE CXXIV. _Quelle partie d'un corps participe davantage � la couleur de son objet, c'est-�-dire, du corps qui l'�claire._ La superficie de chaque corps tiendra davantage de la couleur de l'objet qui sera plus pr�s; cela vient de ce que l'objet voisin envoie une quantit� plus grande d'esp�ces, lesquelles venant � la superficie des corps qui sont pr�s, en alt�rent plus la superficie et en changent davantage la couleur, qu'elles ne le feroient si ces corps �toient plus �loign�s: ainsi, la couleur paro�tra plus parfaite dans son esp�ce, et plus vive, que si elle venoit d'un corps plus �loign�. CHAPITRE CXXV. _En quel endroit la superficie des corps paro�tra d'une plus belle couleur._ La superficie d'un corps opaque paro�tra d'une couleur d'autant plus parfaite, qu'elle sera plus pr�s d'un autre corps de m�me couleur. CHAPITRE CXXVI. _De la carnation des t�tes._ La couleur des corps qui se trouvera �tre en plus grande quantit� se conserve davantage dans une grande distance: en effet, dans une distance assez m�diocre, le visage devient obscur, et cela d'autant plus, que la plus grande partie du visage est occup�e par les ombres, et qu'il y a fort peu de lumi�re en comparaison des ombres; c'est pourquoi elle disparo�t incontinent, m�me dans une petite distance, et les clairs, ou les jours �clatans y sont en tr�s-petite quantit�; de-l� vient que les parties plus obscures dominant par-dessus les autres, le visage s'efface aussi-t�t et devient obscur; et il paro�tra encore d'autant plus sombre, qu'il y aura plus de blanc qui lui sera oppos� devant ou derri�re. CHAPITRE CXXVII. _Mani�re de dessiner d'apr�s la bosse, et d'appr�ter du papier propre pour cela._ Les Peintres, pour dessiner d'apr�s le relief, doivent donner une demi-teinte � leur papier, et ensuite, suivant leur contour, placer les ombres les plus obscures et sur la fin, et pour la derni�re main toucher les jours principaux, mais avec m�nagement et avec discr�tion, et ces derni�res touches sont celles qui disparoissent et qui se perdent les premi�res dans les distances m�diocres. CHAPITRE CXXVIII. _Des changemens qui se remarquent dans une couleur, selon qu'elle est ou plus ou moins �loign�e de l'oeil._ Entre les couleurs de m�me nature, celle qui est moins �loign�e de l'oeil re�oit moins de changemens; la preuve de ceci est que l'air qui se trouve entre l'oeil et la chose que l'on voit, l'alt�re toujours en quelque mani�re; et s'il arrive qu'il y ait de l'air en quantit�, pour lors la couleur de l'air fort vive fait une forte impression sur la chose vue; mais quand il n'y a que peu d'air, l'objet en est peu alt�r�. CHAPITRE CXXIX. _De la verdure qui paro�t � la campagne._ Entre les verdures que l'on voit � la campagne de m�me qualit� et de m�me esp�ce, celle des plantes et des arbres doit paro�tre plus obscure, et celle des pr�s plus claire. CHAPITRE CXXX. _Quelle verdure tirera plus sur le bleu._ Les verdures dont la couleur sera plus obscure, approcheront plus du bleu que les autres qui sont plus claires: cela se prouve, parce que le bleu est compos� de clair et d'obscur, vus dans un grand �loignement. CHAPITRE CXXXI. _Quelle est celle de toutes les superficies qui montre moins sa v�ritable couleur._ De toutes les superficies, il n'y en a point dont la v�ritable couleur soit plus difficile � discerner que celles qui sont polies et luisantes: cela se remarque aux herbes des pr�s et aux feuilles des arbres, dont la superficie est lustr�e et polie; car elles prennent le reflet de la couleur o� le soleil bat, ou bien de l'air qui les �claire; de sorte que la partie qui est frapp�e de ces reflets, ne montre point sa couleur naturelle. CHAPITRE CXXXII. _Quel corps laisse mieux voir sa couleur v�ritable et naturelle._ De tous les corps, ceux-l� montrent mieux leur couleur naturelle, qui ont la superficie moins unie et moins polie: cela se voit dans les draps, les toiles, les feuilles des arbres et des herbes qui sont velues, sur lesquelles il ne se peut faire aucun �clat de lumi�re; tellement que, ne pouvant recevoir l'image des objets voisins, elles renvoient seulement � l'oeil leur couleur naturelle, laquelle n'est point m�l�e ni confondue parmi celles d'aucun autre corps qui leur envoie des reflets d'une couleur oppos�e, comme ceux du rouge du soleil, lorsqu'en se couchant il peint les nuages, et tout l'horizon de sa couleur. CHAPITRE CXXXIII. _De la lumi�re des paysages._ Jamais les couleurs, la vivacit� et la lumi�re des paysages peints, n'approcheront de celles des paysages naturels qui sont �clair�s par le soleil, si les tableaux m�mes des paysages peints ne sont aussi �clair�s et expos�s au m�me soleil. CHAPITRE CXXXIV. _De la perspective a�rienne, et de la diminution des couleurs caus�e par une grande distance._ Plus l'air approche de la terre et de l'horizon, moins il paro�t bleu, et plus il en est �loign�, plus il paro�t d'un bleu obscur et fonc�: j'en ai donn� la raison dans mon Trait� de la Perspective, o� j'ai fait voir qu'un corps pur et subtil est moins �clair� du soleil, et renvoie moins de lumi�re, qu'un corps plus grossier et plus �pais. Or il est constant que l'air qui est �loign� de la terre est plus subtil que celui qui en est pr�s, et par cons�quent l'air qui est pr�s de la terre est plus vivement �clair� des rayons du soleil qui le p�n�trent, et qui �clairant en m�me temps une infinit� d'autres petits corps dont il est rempli, le rendent sensible � nos yeux. De sorte que l'air nous doit paro�tre plus blanc, en regardant vers l'horizon, et plus obscur et plus bleu, en regardant en haut vers le ciel, parce qu'il y a plus d'air grossier entre notre oeil et l'horizon, qu'il n'y en a entre notre oeil et la partie du ciel qui est au-dessus de nos t�tes. Par exemple, si l'oeil de celui qui regarde est en P, et qu'il regarde par la ligne P R, puis baissant un peu l'oeil, qu'il regarde par la ligne P S, alors l'air lui paro�tra un peu moins obscur et plus blanc, parce qu'il y a un peu plus d'air grossier dans cette ligne que dans la premi�re; enfin s'il regarde directement l'horizon, il ne verra point cette couleur d'azur qu'il voyoit par la premi�re ligne P R, parce qu'il y a une bien plus grande quantit� d'air grossier dans la ligne horizontale P D, que dans la ligne oblique P S, et dans la ligne perpendiculaire P R. [Illustration] CHAPITRE CXXXV. _Des objets qui paroissent � la campagne dans l'eau comme dans un miroir, et premi�rement de l'air._ Le seul air qu'on pourra voir peint sur la superficie de l'eau, sera celui dont l'image allant frapper la superficie de l'eau, se r�fl�chira vers l'oeil � angles �gaux, c'est-�-dire, tels que l'angle d'incidence soit �gal � l'angle de r�flexion. CHAPITRE CXXXVI. _De la diminution des couleurs, caus�e par quelque corps qui est entre elles et l'oeil._ La couleur naturelle d'un objet visible sera d'autant moins sensible, que le corps qui est entre cet objet et l'oeil sera d'une mati�re plus dense. CHAPITRE CXXXVII. _Du champ ou du fond qui convient � chaque ombre et � chaque lumi�re._ Quand de deux choses il y en a une qui sert de champ � l'autre, de quelque couleur qu'elles soient, soit qu'elles soient dans l'ombre, soit qu'elles soient �clair�es, elles ne paro�tront jamais plus d�tach�es l'une de l'autre, que lorsqu'elles seront dans un degr� diff�rent; c'est-�-dire, qu'il ne faut pas qu'une couleur obscure serve de champ � une autre couleur obscure; mais il en faut choisir pour cela une qui soit fort diff�rente, comme le blanc, ou quelque autre qui tire sur le blanc, pourvu qu'elle soit �teinte, affoiblie et un peu obscure. CHAPITRE CXXXVIII. _Quel rem�de il faut apporter lorsque le blanc sert de champ � un autre blanc, ou qu'une couleur obscure sert de fond � une autre qui est aussi obscure._ Quand un corps blanc a pour fond un autre corps blanc, ces deux blancs compos�s ensemble sont �gaux ou ils ne le sont pas; s'ils sont �gaux, le corps qui est plus proche de celui qui regarde, sera un peu obscur vers le contour qui se termine sur l'autre blanc. Mais si le champ est moins clair que la couleur � laquelle il sert de champ, alors le corps qui est sur le champ se d�tachera de lui-m�me d'avec celui duquel il est diff�rent, sans autre artifice, et sans l'aide d'aucune teinte obscure. CHAPITRE CXXXIX. _De l'effet des couleurs qui servent de champ au blanc._ La couleur blanche paro�tra plus claire selon qu'elle se rencontrera sur un fond plus brun; et au contraire elle paro�tra plus brune � mesure qu'elle aura un fond plus blanc: cela se remarque visiblement aux flocons de neige, qui nous paroissent moins blancs lorsqu'ils sont dans l'air qui est �clair� de tous c�t�s, que lorsqu'ils sont vis-�-vis quelque fen�tre ouverte, o� l'obscurit� du dedans de la maison leur fait un champ obscur; car alors ils paroissent tr�s-blancs. Il faut aussi remarquer que les flocons de neige vus de pr�s, semblent tomber avec v�tesse et en grande quantit�, au lieu que de loin ils paroissent tomber plus lentement et en petite quantit�. CHAPITRE CXL. _Du champ des figures._ Entre les choses qui sont �galement �clair�es, celle qui sera vue sur un fond plus blanc, paro�tra plus claire et plus �clatante, et celle qui se trouvera dans un endroit plus obscur, paro�tra plus blanche; la couleur incarnat deviendra plus p�le sur un fond rouge, et un rouge p�le paro�tra plus vif et plus ardent, �tant vu sur un fond jaune; et pareillement toutes sortes de couleurs auront un oeil diff�rent, et paro�tront autres qu'elles ne sont, selon la teinte du champ qui les environne. CHAPITRE CXLI. _Des fonds convenables aux choses peintes._ C'est une chose de grande importance, et qui m�rite d'�tre bien consid�r�e, de donner des fonds convenables, et de placer avec art les corps opaques, selon leurs ombres et leurs lumi�res, parce qu'ils doivent avoir le c�t� du jour sur un champ obscur, et celui de l'ombre sur un fond clair, comme il est repr�sent� dans la figure suivante. [Illustration] CHAPITRE CXLII. _De ceux qui peignant une campagne, donnent aux objets plus �loign�s une teinte plus obscure._ Plusieurs estiment que dans une campagne d�couverte les figures doivent �tre plus obscures, selon qu'elles sont plus �loign�es de l'oeil: mais ils se trompent; il faut faire tout le contraire, si ce n'est que la chose qu'on repr�sente soit blanche, parce qu'en ce cas il arriveroit ce que nous en allons dire ci-apr�s. CHAPITRE CXLIII. _Des couleurs des choses qui sont �loign�es de l'oeil._ Plus l'air a de corps et d'�tendue, plus il imprime vivement sa teinte sur l'objet qu'il s�pare de l'oeil; de sorte qu'il donne plus de force � la couleur d'un objet, s'il est �loign� de deux mille pas, que s'il ne l'�toit que de mille seulement. Quelqu'un dira peut-�tre que dans les paysages les arbres de m�me esp�ce paroissent plus sombres de loin que de pr�s; mais cela n'est pas vrai lorsque les arbres sont �gaux et espac�s � m�me intervalle; et au contraire cela est vrai, si les premiers arbres sont tellement �cart�s, que de pr�s on voie au travers la clart�, et que les plus �loign�s soient plus pr�s � pr�s, comme il arrive ordinairement sur le rivage et pr�s des eaux, parce qu'alors on ne voit aucun espace ni la verdure des prairies; mais on voit les arbres tous ensemble entass�s, se faisant ombre l'un � l'autre: il arrive encore aux arbres que la partie qui demeure ombr�e est toujours beaucoup plus grande que celle qui est �clair�e, et les apparences de l'ombre se font bien voir de plus loin, joint que la couleur obscure qui domine par la quantit�, conserve mieux son esp�ce et son image que l'autre partie qui est moins obscure; ainsi, l'objet fait une plus forte impression sur l'oeil par les endroits qui ont une couleur plus forte et plus fonc�e, que par ceux qui ont une couleur plus claire. CHAPITRE CXLIV. _Des degr�s de teintes dans la Peinture._ Ce qui est beau n'est pas toujours bon; je dis cela pour certains Peintres, qui donnent tant � la beaut� des couleurs, qu'ils n'y mettent presque point d'ombres, et celles qu'ils mettent sont toujours tr�s-l�g�res et presque insensibles; ces Peintres, au m�pris de notre art, ne font point de cas du relief que les ombres fortes donnent aux figures. Ils sont en cela semblables � ces beaux parleurs, qui ne disent rien qui soit � propos. CHAPITRE CXLV. _Des changemens qui arrivent aux couleurs de l'eau de la mer, selon les divers aspects d'o� elle est vue._ La mer, quand elle est un peu agit�e, n'a point de couleur universelle qui soit la m�me par-tout: car de dessus la terre elle nous paro�t obscure, et vers l'horizon on y voit quelques vagues blanches d'�cume et luisantes qui se remuent lentement, comme des moutons dans un troupeau; ceux qui �tant en haute mer la consid�rent, ils la voient bleu�tre: or, ce qui fait que de terre elle semble obscure, c'est parce qu'elle a l'effet d'un miroir, dans lequel l'obscurit� de la terre est repr�sent�e; et en haute mer l'eau paro�t bleue, parce que nous y voyons l'air qui est de cette couleur, repr�sent� comme dans un miroir. CHAPITRE CXLVI. _Des effets des diff�rentes couleurs oppos�es les unes aux autres._ Les draperies noires font paro�tre les carnations des figures plus blanches qu'elles ne sont; et, au contraire, les habits blancs les font paro�tre plus obscures: ceux qui sont de couleur jaune rel�vent le coloris, et les rouges font paro�tre p�le. CHAPITRE CXLVII. _De la couleur des ombres de tous les corps._ Jamais la couleur de l'ombre d'un corps ne sera pure dans ses propres ombres, si l'objet duquel l'ombre vient n'est de la couleur de celui qui la re�oit: par exemple, si dans un logis il y avoit des murailles qui fussent vertes, je dis que si on y expose du bleu, qui soit �clair� d'un autre bleu, alors le c�t� du jour sera d'un bleu tr�s-parfait; mais celui de l'ombre deviendra d�sagr�able, et ne tiendra point de la beaut� de sa couleur bleue originale, parce qu'elle aura �t� corrompue par le reflet de cette muraille verte, qui auroit encore un pire effet si elle �toit de couleur tann�e. CHAPITRE CXLVIII. _De la diminution des couleurs dans les lieux obscurs._ Dans les lieux clairs qui s'obscurcissent uniform�ment et par degr� jusques aux t�n�bres parfaites, une couleur se perdra peu � peu par une d�gradation insensible de ses teintes, � proportion qu'elle sera plus �loign�e de l'oeil. CHAPITRE CXLIX. _De la perspective des couleurs._ Il faut que les premi�res couleurs soient pures et simples, et que les degr�s de leur affoiblissement et ceux des distances conviennent entre eux r�ciproquement; c'est-�-dire, que les grandeurs des objets participeront plus � la grandeur du point de vue, selon qu'elles en seront plus proches, et les couleurs tiendront aussi plus de la couleur de leur horizon, � mesure qu'elles en approcheront davantage. CHAPITRE CL. _Des couleurs._ La couleur qui est entre la partie ombr�e et la partie �clair�e des corps opaques, sera moins belle que celle qui est enti�rement �clair�e; donc, la premi�re beaut� des couleurs se trouve dans les principales lumi�res. CHAPITRE CLI. _D'o� vient � l'air la couleur d'azur._ L'azur de l'air vient de ce que l'air est un corps tr�s-transparent, �clair� de la lumi�re du soleil, et plac� entre la terre et le ciel qui est un corps opaque, qui n'a point de lumi�re de lui-m�me: l'air, de sa nature, n'a aucune qualit� d'odeur, ni de go�t, ni de couleur; mais il prend fort facilement les qualit�s des choses qui se trouvent autour de lui, et il paro�tra d'azur d'autant plus beau, qu'il aura derri�re lui des t�n�bres plus �paisses, pourvu qu'il y ait une distance convenable, et qu'il ne soit pas trop humide, et qu'on prenne garde que vers les montagnes qui ont plus d'ombre, l'azur y est plus beau dans un grand �loignement, pour la m�me raison qu'aux lieux o� l'air est plus �clair�, on voit davantage la couleur de la montagne que celle de l'azur, duquel elle est color�e par l'air qui se trouve entre l'oeil et elle. CHAPITRE CLII. _Des couleurs._ Entre les couleurs qui ne sont point bleues, celle qui approche plus du noir tire plus sur l'azur dans une grande distance; et au contraire, celle qui aura moins de conformit� avec le noir, conservera mieux sa propre couleur dans une grande distance, il s'en suit donc que le vert, dans les campagnes, se transforme plut�t en azur que le jaune ou le blanc, et par la m�me raison, le blanc et le jaune se changent moins que le rouge ou le vert. CHAPITRE CLIII. _Des couleurs qui sont dans l'ombre._ Les couleurs qui sont m�l�es parmi les ombres, retiendront de leur beaut� naturelle, � proportion que les ombres seront plus ou moins obscures; mais si les couleurs sont couch�es en quelque endroit clair, alors elles paro�tront d'une beaut� d'autant plus exquise, que le lieu o� elles se trouveront aura plus de lumi�re. Quelqu'un pourra objecter qu'il y a une aussi grande vari�t� dans les ombres que dans les couleurs des choses ombr�es; � quoi je r�ponds, que les couleurs qui sont dans l'ombre, montrent d'autant moins de vari�t� entre elles, que les ombres avec lesquelles elles sont m�l�es sont plus obscures; et ceci peut �tre confirm� par ceux qui ont pris garde aux tableaux qu'on voit de dehors sous les portiques des temples obscurs, o� les peintures, quoique diversifi�es de couleurs, semblent �tre n�anmoins toutes de couleur d'ombre. CHAPITRE CLIV. _Du champ des figures des corps peints._ Le champ qui entoure les figures de toutes les choses peintes, doit �tre plus brun que la partie �clair�e, et plus clair que la partie qui est dans l'ombre. CHAPITRE CLV. _Pourquoi le blanc n'est point compt� entre les couleurs._ Le blanc n'est point estim� une couleur, mais une chose capable de recevoir toutes les couleurs; quand il est au grand air de la campagne, toutes ces ombres paroissent bleues, parce que la superficie de tout corps opaque tient de la couleur de l'objet qui l'�claire. Ainsi, le blanc �tant priv� de la lumi�re du soleil, par l'opacit� de quelque objet qui se trouve entre le soleil et ce m�me blanc, demeure sans participer � aucune couleur: le blanc qui voit le soleil et l'air participe � la couleur de l'une et de l'autre, et il a une couleur m�l�e de celle du soleil et de celle de l'air; et la partie qui n'est point vue du soleil, demeure toujours obscure, et participe � la couleur azur�e de l'air; et si ce blanc ne voyoit point la verdure de la campagne jusqu'� l'horizon, et qu'il ne v�t point encore la blancheur du m�me horizon, sans doute ce blanc ne paro�troit simplement que de la couleur de l'air. CHAPITRE CLVI. _Des couleurs._ La lumi�re qui vient du feu, teint en jaune tout ce qu'elle �claire; mais cela ne se trouvera pas vrai, si on ne lui pr�sente quelqu'autre chose qui soit �clair�e de l'air: on peut observer ce que je dis vers la fin du jour, et encore plus distinctement le matin apr�s l'aurore: cela se remarque encore dans une chambre obscure, o� il passera sur l'objet un rayon de jour, ou m�me d'une lumi�re de chandelle; et dans un lieu comme celui-l�, on verra assur�ment leurs diff�rences bien claires et bien marqu�es; mais aussi sans ces deux lumi�res, il sera tr�s-difficile de reconno�tre leur diff�rence, et il ne sera pas possible de la remarquer dans les couleurs qui ont beaucoup de ressemblance, comme le blanc et le jaune, le vert de mer et l'azur, parce que cette lumi�re qui va sur l'azur �tant jaun�tre, fait comme un m�lange de bleu et de jaune, lesquels composent ensemble un beau vert; et si vous y m�lez encore apr�s de la couleur jaune, ce vert deviendra beaucoup plus beau. CHAPITRE CLVII. _Des couleurs des lumi�res incidentes et r�fl�chies._ Quand un corps opaque se trouve entre deux lumi�res, voici ce qui peut arriver. Ou ces deux lumi�res sont �gales en force, ou elles sont in�gales; si elles sont �gales en force, leur clart� pourra �tre encore diversifi�e en deux mani�res; savoir, par l'�galit� ou par l'in�galit� de leur �clat; il sera �gal, lorsque leur distance sera �gale, et in�gal leurs distances �tant in�gales; en des distances �gales, elles se diversifieront encore en deux autres mani�res; savoir, lorsque du c�t� du jour l'objet sera plus foiblement �clair� par des lumi�res �galement �clatantes et �loign�es, que du c�t� oppos� par des lumi�res r�fl�chies, aussi �galement vives et �galement distantes: l'objet plac� � une distance �gale, entre deux lumi�res �gales et en couleur et en �clat, peut �tre �clair� par ces lumi�res en deux sortes; savoir, ou �galement de chaque c�t�, ou bien in�galement; il sera �galement �clair� par ces deux lumi�res, lorsque l'espace qui reste autour de ces lumi�res sera de couleur �gale et en ombre et en clart�, et elles seront in�gales, quand les espaces qui sont autour de ces deux lumi�res se trouveront dans l'obscurit�. CHAPITRE CLVIII. _Des couleurs des ombres._ Souvent il arrive que les ombres dans les corps ombr�s, ne se continuent pas dans la m�me teinte de leurs lumi�res, et que les ombres seront verd�tres et les lumi�res rouge�tres, bien que le corps soit de couleurs �gales et uniformes; ce qui arrive, lorsque la lumi�re venant d'Orient, teindra l'objet de sa couleur m�me, laquelle sera diff�rente de celle du premier objet; tellement qu'avec ses reflets elle rejaillit vers l'Orient, et bat avec ses rayons sur les parties du premier objet qu'elle rencontre, et l� ses rayons s'arr�tent et demeurent fermes, avec leurs couleurs et leurs lumi�res. J'ai souvent remarqu� sur un objet blanc des lumi�res rouges et des ombres bleues; et cela est ordinaire aux montagnes couvertes de neige, lorsque le soleil se couche, et que par l'�clat de ses rayons l'horizon paro�t tout en feu. [Illustration] CHAPITRE CLIX. _Des choses peintes dans un champ clair, et en quelles occasions cela fait bien en peinture._ Quand un corps ombr� se termine sur un fond clair, ce corps paro�t avoir du relief, et �tre d�tach� du fond: cela vient de ce que les corps d'une superficie courbe, s'obscurcissent par n�cessit� vers la partie oppos�e, o� ils ne sont point �clair�s des rayons du jour, cet endroit restant priv� de lumi�re, tellement qu'il est extr�mement diff�rent du fond qui lui sert de champ, et la partie de ce m�me corps qui est �clair�e, ne doit jamais terminer sur un champ clair par les parties �clair�es de son plus grand jour; mais entre le champ et la principale lumi�re du corps �clair�, il faut qu'il se trouve un terme ombr� d'une demi-teinte, qui tienne le milieu entre la couleur du champ et la lumi�re du corps �clair�. CHAPITRE CLX. _Du champ des figures._ Pour qu'une figure paroisse avec avantage, il faut, si elle est claire, la mettre dans un champ obscur, et si elle est obscure, la mettre dans un champ clair; parce que le blanc paro�t davantage aupr�s du noir qu'ailleurs; et en g�n�ral, tous les contraires ont une force toute particuli�re quand ils sont oppos�s � leurs contraires. CHAPITRE CLXI. _Des couleurs qui sont produites par le m�lange des autres couleurs._ Des couleurs simples, la premi�re de toutes est le blanc, quoique entre les philosophes le blanc et le noir ne soient point compt�s parmi les couleurs: parce que l'un en est la cause, l'autre la privation; n�anmoins, parce que le Peintre ne peut s'en passer, nous les mettrons au nombre des couleurs, et nous donnerons la premi�re place au blanc entre les couleurs simples; le jaune aura la seconde, le vert la troisi�me, l'azur la quatri�me, le rouge aura la cinqui�me, et la sixi�me, qui est la derni�re, sera pour le noir: nous �tablirons le blanc comme la lumi�re, sans laquelle nulle couleur ne peut �tre vue; le jaune sera pour repr�senter la terre; le vert pour l'eau, l'azur pour l'air, le rouge pour le feu, et le noir pour les t�n�bres. Si vous voulez voir bient�t la vari�t� de toutes les couleurs compos�es, prenez des carreaux de verre peints, et au travers de ces verres, consid�rez toutes les couleurs de la campagne; par ce moyen vous conno�trez que la couleur de chaque chose qui se trouvera derri�re ce verre, sera falsifi�e et m�l�e avec la teinte qui est sur le verre, et vous pourrez remarquer quelles sont les couleurs qui en re�oivent un changement plus ou moins avantageux; par exemple, si le verre est teint en jaune, la couleur des objets qu'on voit au travers, peut aussi-t�t se g�ter que se perfectionner, et les couleurs qui en recevront plus d'alt�ration, sont particuli�rement l'azur, le noir et le blanc; et celles qui en tireront quelque avantage, sont principalement le jaune et le vert; et ainsi, en parcourant de l'oeil le m�lange de ces couleurs, qui est presque infini, vous choisirez les couleurs dont la composition vous paro�tra plus agr�able et plus nouvelle: vous pourrez faire la m�me chose avec deux verres de diverses teintes, et ainsi de suite avec trois, ou m�me davantage, en continuant la m�me m�thode. CHAPITRE CLXII. _Des couleurs._ L'azur et le vert ne sont pas d'eux-m�mes des couleurs simples, parce que l'azur est compos� de lumi�res et de t�n�bres, c'est-�-dire, d'un noir tr�s-parfait et d'un blanc tr�s-pur, comme il paro�t par l'azur de l'air, le vert se compose d'une couleur simple, et d'une autre compos�e, qui sont l'azur et le jaune. Une chose repr�sent�e dans un miroir, tient toujours de la couleur du corps qui lui sert de miroir, et le miroir r�ciproquement se teint aussi en partie de la couleur qu'il repr�sente, et l'un participe d'autant plus � la couleur de l'autre, que l'objet repr�sent� a plus ou moins de force que la couleur du miroir; et l'objet paro�tra d'une couleur d'autant plus vive et plus forte, qu'il aura plus de conformit� et de ressemblance avec la couleur du miroir. Des couleurs des corps, celle-l� se fera voir de plus loin qui sera d'un blanc plus �clatant; par cons�quent celle qui sera la plus obscure, disparo�tra dans une moindre distance; entre les corps d'�gale blancheur, et �galement �loign�s de l'oeil, celui qui sera environn� d'une plus grande obscurit�, paro�tra le plus blanc; et au contraire, l'obscurit� qui paro�tra la plus grande, sera celle qui sera environn�e d'une blancheur plus �clatante. Entre les couleurs d'une �gale perfection, celle-l� paro�tra plus excellente, qui sera vue aupr�s de la couleur qui lui est directement contraire, comme le rouge, avec ce qui est p�le, le noir avec le blanc (quoique ni l'une ni l'autre de ces deux ne soient au rang des couleurs), le jaune dor� avec l'azur, et le vert avec le rouge; parce que chaque couleur paro�t davantage aupr�s de celle qui lui est contraire, qu'aupr�s de celle qui a de la conformit� avec elle. Une chose blanche qui sera vue dans un air obscur et plein de vapeurs, paro�tra plus grande qu'elle n'est en effet, ce qui arrive, parce que, comme je l'ai dit auparavant, une chose claire semble s'augmenter dans un champ obscur, pour les raisons que j'ai apport�es. L'air qui est entre l'oeil et la chose vue, communique sa propre couleur � cette chose, comme l'air bleu�tre qui fait que les montagnes vues de loin, paroissent de couleur d'azur. Le verre rouge fait que tout ce qu'on regarde au travers paro�t rouge; la lumi�re que font les �toiles autour d'elles, est toute offusqu�e par les t�n�bres de la nuit, qui sont entre l'oeil et ces �toiles. La vraie couleur de toute sorte de corps paro�t dans l'endroit o� il n'y a aucune ombre et aucune lumi�re �clatante. Dans toutes ces couleurs, je dis que les clairs qui viennent terminer avec les ombres, font qu'aux extr�mit�s o� ils se rencontrent, les ombres paroissent plus obscures et plus noires, et les clairs plus blancs et plus �clatans. CHAPITRE CLXIII. _De la couleur des montagnes._ Une montagne qui est �loign�e de l'oeil, si elle est d'une couleur obscure, paro�tra d'un plus bel azur qu'une autre qui sera moins obscure, et la plus obscure sera la plus haute et la plus couverte de bois; parce que sous les grands arbres il s'y trouve encore d'autres petits arbrisseaux qui paroissent obscurs, le jour d'en haut leur �tant �t� par les plus grands; outre que les arbres sauvages des for�ts sont d'eux-m�mes encore plus sombres que les arbres cultiv�s; car les ch�nes, les fouteaux, les sapins, les cypr�s, les pins, et tels autres arbres champ�tres, sont beaucoup plus sombres que les oliviers que nous cultivons. Vers la cime des hautes montagnes o� l'air est plus pur et plus subtil, l'azur paro�tra plus pur et plus noir que vers le pied des montagnes o� l'air est grossier. Une plante paro�t moins d�tach�e de son champ, lorsqu'elle est sur un autre champ, dont la couleur approche de celle de la plante; le contraire arrivera si ces deux couleurs sont contraires l'une � l'autre. Dans un objet blanc, le c�t� qui approchera plus pr�s du noir paro�tra plus blanc; et au contraire, le clair qui sera plus �loign� du noir ou de l'ombre, paro�tra moins blanc, et la partie du noir qui sera plus pr�s du blanc paro�tra plus obscure; et le contraire arrivera, si elle en est �loign�e. CHAPITRE CLXIV. _Comment un Peintre doit mettre en pratique la perspective des couleurs._ Pour bien mettre en pratique cette perspective dans le changement, l'affoiblissement et la d�gradation des couleurs, vous prendrez de cent en cent brasses quelques termes fixes dans la campagne, comme sont des arbres, des maisons, des hommes ou quelque autre lieu remarquable; et si c'est, par exemple, un arbre, vous aurez un verre arr�t� bien ferme, et votre oeil demeurant ferme dans la m�me situation, dessinez sur ce verre un arbre, suivant le contour de celui que vous avez devant les yeux, puis retirez-vous en arri�re jusqu'� ce que l'arbre naturel vienne presqu'� paro�tre �gal � celui que vous avez dessin�; apr�s quoi colorez votre dessin de telle sorte, que par sa couleur et par sa forme il ressemble � l'arbre naturel que vous voyez au travers de votre verre, et que tous les deux, en fermant un oeil, vous paroissent peints, et �galement �loign�s de votre oeil; continuez cette m�me r�gle � l'�gard des autres arbres de la seconde et de la troisi�me distance de cent en cent brasses, d'espace en espace, et que ces �tudes vous servent comme une chose fort utile, � quoi vous devez avoir recours, en travaillant; cela vous sera d'un grand usage pour les lointains: mais je trouve par l'observation que j'en ai faite, que le second objet diminue de 4/5 du premier, lequel en seroit �loign� de vingt brasses. CHAPITRE CLXV. _De la perspective a�rienne._ Il y a une esp�ce de perspective, qu'on nomme a�rienne, qui par les divers degr�s des teintes de l'air, peut faire conno�tre la diff�rence des �loignemens de divers objets, quoiqu'ils soient tous sur une m�me ligne; par exemple, si on voit au-del� de quelque mur plusieurs �difices, qui paroissent tous d'une pareille grandeur au-del� du mur sur une m�me ligne, et que vous ayez dessein de les peindre, ensorte qu'il semble � l'oeil que l'un est plus loin que l'autre, il faudra repr�senter un air un peu plus �pais qu'il n'est ordinairement; car on sait bien que dans cette disposition d'air les choses les plus �loign�es paroissent azur�es, � cause de la grande quantit� d'air qui est entre l'oeil et l'objet; cela se remarque sur-tout aux montagnes. Ceci une fois suppos�, vous ferez l'�difice qui paro�tra le premier au-del� de ce mur, de sa couleur naturelle; celui d'apr�s, qui sera un peu plus �loign�, il le faudra profiler plus l�g�rement, et lui donner une teinte un peu plus azur�e; et � l'autre ensuite, que vous feindrez �tre encore plus loin, donnez-lui � proportion une teinte encore plus azur�e que celle des autres; et si vous voulez qu'un autre paroisse cinq fois plus loin, faites qu'il ait cinq degr�s de plus de la m�me teinte azur�e, et par cette r�gle, vous ferez que les �difices qui sont sur la m�me ligne paro�tront �gaux en grandeur, et n�anmoins on conno�tra fort bien la grandeur et l'�loignement de chacun en particulier. [Illustration n� 3: CHAPITRE CLXV. _Pag. 140_] CHAPITRE CLXVI. _Des mouvemens du corps de l'homme, des changemens qui y arrivent, et des proportions des membres._ Les mesures du corps de l'homme se changent en chaque membre, selon qu'on le plie plus ou moins; et par les divers aspects d'un c�t� elles diminuent ou croissent plus ou moins, � proportion qu'elles croissent ou diminuent de l'autre c�t�. CHAPITRE CLXVII. _Des changemens de mesures qui arrivent au corps de l'homme, depuis sa naissance jusqu'� ce qu'il ait la hauteur naturelle qu'elle doit avoir._ L'homme, dans sa premi�re enfance, a la largeur des �paules �gale � la longueur du visage, et � l'espace du bras qui est depuis l'�paule jusqu'au coude lorsque le bras est pli�: elle est encore pareille � l'espace qui est depuis le gros doigt de la main jusqu'au pli du coude, et pareille encore � l'intervalle qu'il y a de la jointure du genou � celle du pied; mais quand l'homme est parvenu � sa derni�re hauteur, toutes ces mesures doublent en longueur, hormis le visage, lequel, aussi bien que toute la t�te, re�oit peu de changement; et ainsi l'homme qui, apr�s �tre arriv� � son dernier accroissement est d'une taille bien proportionn�e, doit avoir en hauteur dix faces, et la largeur des �paules a deux de ces m�mes faces; et ainsi, toutes les autres parties dont j'ai parl� sont pareillement de deux faces. Pour le reste, nous en traiterons en parlant de toutes les mesures du corps de l'homme. CHAPITRE CLXVIII. _Que les petits enfans ont les jointures des membres toutes contraires � celles des hommes, en ce qui regarde la grosseur._ Les petits enfans ont tous les jointures d�li�es, et les espaces qui sont entre-deux plus gros; cela arrive parce qu'ils n'ont sur les jointures que la peau seule et quelques membranes nerveuses qui attachent et lient les os ensemble, et toute la chair qui est molle, tendre, et pleine de suc, se trouve enferm�e sous la peau entre deux jointures; mais parce que dans les jointures les os sont plus gros qu'ils ne le sont dans l'espace qui est entre les jointures, la chair se d�charge de beaucoup des superfluit�s tandis que l'homme cro�t, et ses membres deviennent � proportion plus d�li�s qu'auparavant; mais il ne se fait point de diminution dans les jointures, parce qu'il n'y a que des os et des cartilages; de sorte que, par ces raisons, les petits enfans sont gras entre les jointures, foibles et d�charn�s aux jointures, comme il paro�t � celles de leurs doigts, de leurs bras, de leurs �paules, qu'ils ont d�li�es et menues; au contraire, un homme fait est gros et nou� par-tout, aux jointures des bras et des jambes; et au lieu que les enfans les ont creuses, les hommes les ont relev�es. CHAPITRE CLXIX. _De la diff�rence des mesures entre les petits enfans et les hommes faits._ Entre les hommes et les enfans je trouve une grande diff�rence de longueur de l'une � l'autre jointure; car l'homme a depuis la jointure des �paules jusqu'au coude, et du coude au bout du pouce, et de l'extr�mit� d'une �paule � l'autre, une mesure de deux t�tes, et � l'enfant, cette mesure n'est que d'une t�te: cela vient apparemment de ce que la nature travaille d'abord � la t�te, qui est la principale partie et le si�ge de l'entendement, et ensuite aux parties moins consid�rables et moins n�cessaires. CHAPITRE CLXX. _Des jointures des doigts._ Les doigts de la main grossissent dans leurs jointures de tous les c�t�s lorsqu'ils se plient, et plus ils se plient, plus ils paroissent; de m�me aussi ils diminuent � mesure qu'ils se redressent: la m�me chose arrive aux doigts des pieds, et il y aura un changement d'autant plus visible, qu'ils seront plus gros et plus charnus. CHAPITRE CLXXI. _De l'embo�tement des �paules, et de leurs jointures._ Les jointures des �paules et des autres membres qui se plient, seront expliqu�es en leur lieu dans le Trait� de l'Anatomie, o� je ferai voir les causes des mouvemens de chaque partie dont le corps de l'homme est compos�. CHAPITRE CLXXII. _Des mouvemens des �paules._ Les mouvemens simples sont les principaux de ceux qui se font � la jointure des �paules: ces mouvemens sont ceux par lesquels le bras se porte en haut et en bas, en devant ou en arri�re: on pourroit dire que ces quatre mouvemens sont en quelque sorte infinis; car si on fait avec le bras une figure circulaire sur un mur, on aura fait tous les mouvemens que l'�paule peut faire, parce que toute quantit� continue se peut diviser � l'infini, et ce cercle est une quantit� continue qui a �t� faite par le mouvement du bras, qui en a trac� et parcouru la circonf�rence: donc ce cercle �tant divisible � l'infini, les mouvemens des �paules sont aussi en quelque sorte infinis. CHAPITRE CLXXIII. _Des mesures universelles des corps._ Je dis que les mesures universelles des corps doivent s'observer dans les longueurs des figures seulement; et non pas dans les largeurs; parce que c'est une chose merveilleuse dans la nature, que de toutes ses productions on n'en voit aucune de quelque esp�ce que ce soit, laquelle consid�r�e en particulier, soit pr�cis�ment semblable � une autre: c'est pourquoi, vous qui �tes imitateur de la nature, consid�rez attentivement la vari�t� des contours; n�anmoins je suis d'avis que vous �vitiez les choses qui sont monstrueuses, comme des jambes trop longues, des corps trop courts, des poitrines �troites et des bras longs: observez donc les mesures des jointures, et les grosseurs dans lesquelles la nature se pla�t � faire paro�tre de la vari�t�, pour faire de m�me � son exemple. [Illustration n� 4: CHAPITRE CLXXIV. _Pag. 147_] CHAPITRE CLXXIV. _Des mesures du corps humain, et des plis des membres._ Les Peintres sont oblig�s d'avoir connoissance de l'Ost�ologie, c'est-�-dire, des ossemens du corps, qui servent de soutien � la chair dont ils sont couverts, et des jointures, qui font que les membres croissent et diminuent quand ils se plient; car la mesure du bras �tendu ne se trouve pas �gale � celle du m�me bras retir�, puisqu'il cro�t ou d�cro�t en s'�tendant et en se pliant, avec la diff�rence d'une huiti�me partie de sa longueur; l'accroissement et le d�croissement du bras par l'effet de l'os qui sort de son embo�ture, est tel que vous le voyez repr�sent� en cette figure A B; son accroissement se fait dans la partie qui vient de l'�paule au coude, lorsque l'angle du coude est plus aigu qu'un angle droit, et l'accroissement augmente � mesure que cet angle diminue; comme au contraire la longueur diminue selon que cet angle devient plus ouvert; l'espace qui est entre l'�paule et le coude, s'accro�t d'autant plus, que l'angle du pli du coude se fait plus petit qu'un angle droit, et d�cro�t � proportion que l'angle est plus grand qu'un droit. CHAPITRE CLXXV. _De la proportion des membres._ Toutes les parties de l'animal doivent avoir du rapport � leur tout; c'est-�-dire, que celui dont la forme totale est courte et grosse, doit avoir aussi chaque membre en particulier court et gros, et celui qui sera long et d�li�, doit avoir les membres longs et menus; et celui qui est d'une taille m�diocre les aura pareillement m�diocres. Ce que je dis ne doit point s'entendre des plantes, parce qu'elles se renouvellent elles-m�mes par les rejetons qu'elles poussent sur leur tronc, et ainsi leur premi�re forme et leur proportion naturelle est alt�r�e et chang�e. CHAPITRE CLXXVI. _De la jointure des mains avec les bras._ Le poignet ou la jointure du bras avec la main devient plus menu, lorsque la main serre quelque chose, et il se grossit lorsqu'on ouvre la main: mais le bras fait tout le contraire de tous les c�t�s, entre le coude et la main; cela vient de ce qu'en ouvrant la main, les muscles qui servent � cet effet s'�tendent et rendent le bras plus d�li� entre le coude et la main; et lorsque la main tient quelque chose serr�e, les muscles se retirent, se grossissent et s'�loignent de l'os, �tant tir�s par le serrement et par la compression de la main. CHAPITRE CLXXVII. _Des jointures des pieds, de leur renflement et de leur diminution._ La diminution et l'accroissement de la jointure du pied se fait seulement du c�t� de sa partie nerveuse D E F, laquelle cro�t lorsque l'angle de cette jointure devient plus aigu, et diminue � proportion que cet angle devient plus ouvert: ce qui doit �tre entendu de la jointure du devant du pied A C B, dont je veux parler. CHAPITRE CLXXVIII. _Des membres qui diminuent quand ils se plient, et qui croissent quand ils s'�tendent._ Entre tous les membres qui se plient � leur jointure, il n'y a que le genou qui, en se pliant, perd de sa grosseur, et qui devient plus gros �tant �tendu. [Illustration n� 5: CHAPITRE CLXXXI. _Pag. 151_] CHAPITRE CLXXIX. _Des membres qui grossissent dans leurs jointures, quand ils sont pli�s._ Tous les membres du corps de l'homme grossissent dans leurs jointures quand ils se plient, hormis en celle de la jambe. CHAPITRE CLXXX. _Des membres nuds des hommes._ Quand des hommes nus travaillent et font quelque mouvement violent, ceux-l� seuls de leurs membres doivent avoir des muscles bien marqu�s, du c�t� desquels ces muscles font mouvoir le membre qui est en action, et les autres membres feront paro�tre plus ou moins leurs muscles � proportion de l'effort et du travail qu'ils font. CHAPITRE CLXXXI. _Des mouvemens violens des membres de l'homme._ Des deux bras celui l� sera pouss� par un mouvement plus grand et plus violent, lequel s'�tant �cart� de sa situation naturelle, sera plus puissamment assist� des autres membres, pour les ramener au lieu o� il veut aller; comme la figure A, qui �tend le bras avec la massue E, et le porte en un sens contraire pour l'en retirer apr�s, aid� et fortifi� de tout le corps, et se porter avec plus de violence en B. CHAPITRE CLXXXII. _Du mouvement de l'homme._ Dans la Peinture, la principale partie consiste � former des compositions heureuses dans quelque sujet que ce puisse �tre; et la seconde partie qui concerne l'expression et les actions des figures, consiste � leur donner de l'attention � ce qu'elles font, et � faire qu'elles agissent avec promptitude et avec vivacit�, selon le degr� d'expression qui leur convient, aussi bien dans les actions lentes et paresseuses, que dans celles qui demandent beaucoup d'activit� et de feu, et que la promptitude et la fiert� soient autant exprim�es que le demande la disposition pr�sente de celui qui est en action; comme quand quelqu'un doit jeter un dard, ou des pierres, ou d'autres choses semblables, qu'il paroisse dans son attitude et dans la disposition de tous ses membres, quelle est son intention; voici deux figures dont la diff�rente attitude montre qu'elles font un effort bien diff�rent: la figure A est celle qui fait paro�tre plus de vigueur et de force, et la figure B en fait paro�tre moins; mais la figure A jettera plus loin le dard qu'elle lance, que la figure B ne jettera la pierre qu'elle tient; parce qu'encore bien que les deux figures paroissent vouloir jeter du m�me c�t� et arriver au m�me but, la figure A fait un plus grand effort: car elle a les pieds tourn�s du c�t� oppos� � celui vers o� elle veut porter ce coup; ce qui fait qu'elle le porte en effet avec beaucoup de force, en pliant et remuant le corps fort v�te et fort commod�ment pour le ramener vers le but o� elle veut tirer. Au contraire, la figure B ayant le corps et les pieds dans une situation naturelle, elle n'agit pas avec tant de facilit�, et elle ne fait pas tant d'efforts, par cons�quent l'effet est foible, et le mouvement peu violent; parce qu'en g�n�ral tout effort, pour avoir un grand effet, doit commencer par des contorsions violentes, et finir par des mouvemens libres, ais�s et commodes; de m�me que si une arbal�te n'est pas band�e avec force, le mouvement de la chose qu'elle doit tirer n'aura pas grand effet, parce qu'o� il n'y a point d'effort et de violence, il n'y a qu'un mouvement foible; ainsi un arc qui n'est point band� ne peut produire de mouvement; et s'il est band�, il ne se d�bandera pas de lui-m�me sans une force �trang�re, par le moyen de laquelle il d�cochera sa fl�che: tout de m�me l'homme qui ne fait aucun effort et aucune contorsion, demeure sans force; quand donc celui qui est repr�sent� par la figure A aura jet� son dard, et qu'il aura �puis� toute sa force dans sa contorsion de corps vers le c�t� o� il a lanc� son dard, en m�me temps il aura acquis une autre nouvelle puissance, mais qui ne lui peut servir qu'� retourner de l'autre c�t�, et � faire un mouvement contraire � celui qu'il a fait. [Illustration n� 6: CHAPITRE CLXXXII. _Pag. 152_] [Illustration n� 7: CHAPITRE CLXXXII. _Pag. 152_] CHAPITRE CLXXXIII. _Des attitudes et des mouvemens du corps, et de ses membres._ Qu'on ne voie point la m�me action r�p�t�e dans une m�me figure, soit dans ses principaux membres, soit dans les petits, comme les mains ou les doigts: il ne faut point aussi r�p�ter plusieurs fois la m�me attitude dans une histoire; et si le sujet de l'histoire demande un grand nombre de figures, comme une bataille ou un combat de gladiateurs, parce qu'il n'y a que trois mani�res de frapper, qui sont d'estoc, de taille et de revers, il faut varier autant qu'on peut ces trois mani�res de porter des coups; par exemple, si l'un se tourne en arri�re, faites qu'un autre soit vu de c�t�, et un autre par-devant, et ainsi diversifiez les m�mes actions par divers aspects, et que tous les mouvemens se rapportent � ces trois principaux dont j'ai parl�: mais dans les batailles, les mouvemens compos�s marquent beaucoup d'art, animent pour ainsi dire le sujet, et y r�pandent un grand feu. On nomme mouvement compos�, celui d'une figure qui fait en m�me temps des mouvemens qui paroissent oppos�s, comme lorsque la m�me figure montre le devant des jambes, et une partie du corps par le profil des �paules. Je parlerai en son lieu de cette esp�ce de mouvement compos�. CHAPITRE CLXXXIV. _Des jointures des membres._ Dans les jointures des membres et dans leurs diff�rens mouvemens, on doit prendre garde de quelle sorte les muscles s'enflent d'un c�t�, s'abaissent et s'allongent de l'autre; et cela se doit observer dans le col des animaux, parce que l� les mouvemens sont de trois esp�ces; deux desquels sont simples, et le troisi�me est compos�, puisqu'il tient quelque chose de l'un et de l'autre des simples, l'un desquels se fait quand l'animal plie le col vers quelqu'une des �paules, ou lorsqu'il hausse ou baisse la t�te; le second se fait quand le col se tourne � droite ou � gauche sans se courber, mais reste tout droit, et que la t�te est tourn�e vers l'une des �paules; le troisi�me mouvement que nous appelons compos�, est lorsque le pli est m�l� de contorsion, comme quand l'oreille se baisse vers quelqu'une des �paules, et que le front est tourn� au m�me endroit ou vers l'autre �paule, et la t�te �lev�e vers le ciel. CHAPITRE CLXXXV. _De la proportion des membres de l'homme._ Prenez sur vous-m�me les mesures de vos membres; et si vous rencontrez quelque partie qui n'ait pas une belle proportion, marquez l�, et prenez bien garde en dessinant des figures de ne pas tomber dans le m�me d�faut, parce qu'ordinairement un Peintre se peint lui-m�me, et se pla�t aux choses qui lui ressemblent. CHAPITRE CLXXXVI. _Des mouvemens des membres de l'homme._ Tous les membres doivent exercer la fonction � laquelle ils ont �t� destin�s; par exemple, il faut que dans les corps morts, ou dans ceux qui dorment, aucun membre ne paroisse vif ou �veill�; de m�me le pied qui porte le poids du corps, doit paro�tre comme affaiss�, et non pas avec des doigts qui paroissent en mouvement ou libres, si ce n'est qu'il s'appuy�t seulement sur le talon. CHAPITRE CLXXXVII. _Du mouvement des parties du visage._ Les mouvemens des parties du visage, caus�s par les agitations subites de l'esprit, sont en grand nombre; les principaux sont, de rire, de pleurer, de crier, de chanter sur les diff�rens tons que la voix peut prendre, de faire paro�tre de l'�tonnement, de la col�re, de la joie, de la tristesse, de la peur, du chagrin, de la douleur, et d'autres semblables mouvemens dont nous parlerons. Premi�rement, les mouvemens qu'on fait quand on rit et quand on pleure, sont fort semblables dans les caract�res qu'ils impriment sur la bouche, sur les joues, et aux paupi�res des yeux; mais ils diff�rent seulement dans les sourcils, et � l'intervalle qui les s�pare, dont nous traiterons plus amplement en son lieu, lorsque nous parlerons des mouvemens qui arrivent au visage, aux mains, et aux autres membres, dans les accidens qui surprennent tout d'un coup: la connoissance de ces mouvemens est fort n�cessaire � un Peintre, et sans elle il ne repr�senteroit que des figures doublement mortes; mais il faut encore qu'il prenne garde que leurs actions et leurs mouvemens ne soient pas si extraordinairement et si bizarrement anim�s, que dans un sujet tranquille il semble peindre quelque bataille, ou bien une bacchanale; et sur-tout que ceux qu'il introduira pr�sens au sujet qu'il traite soient attentifs � ce qui se passe, avec des actions et des contenances d'admiration, de respect, de douleur, de compassion, de d�fiance, de crainte ou de joie, selon qu'il est � propos et convenable au sujet qui a form� l'assembl�e ou le concours de ces figures, et qu'il fasse ensorte que ses histoires ne soient point l'une sur l'autre sur une m�me muraille, avec divers points de vue, comme si c'�toit la boutique d'un marchand qui �tale ses marchandises. CHAPITRE CLXXXVIII. _Observations pour dessiner les portraits._ L'os et le cartilage qui composent le nez qui est �lev� au milieu du visage, peuvent avoir huit formes diff�rentes, qui donnent huit diff�rentes figures de nez; car ou ils sont �galement droits, ou �galement concaves, ou �galement convexes, et c'est la premi�re; ou bien ils sont droits ou concaves, ou convexes in�galement, et c'est la seconde; ou bien leurs parties d'en haut sont droites, et celle d'en bas concaves, qui est la troisi�me sorte; ou celles d'en haut sont droites, et celles de dessous convexes, c'est la quatri�me; ou bien, dessus elles sont concaves, et au-dessous droites, c'est la cinqui�me; ou concaves au-dessus et convexes au-dessous, qui est la sixi�me; ou convexes au-dessus et droites au-dessous, c'est la septi�me; ou enfin, convexes au-dessus et concaves au-dessous, qui est la huiti�me et la derni�re. La jonction du nez avec le sourcil a deux formes diff�rentes; elle est toujours ou creuse, ou concave, ou droite. Le front a trois formes diff�rentes; car, ou il est tout uni, ou il est concave, ou bien il est relev�. La forme pleine et unie se divise encore en plusieurs mani�res; car, ou elle est creuse vers le haut, ou vers la partie d'en bas, ou elle l'est en haut et en bas, ou bien elle est toute pleine et toute unie en haut et en bas. CHAPITRE CLXXXIX. _Moyen de retenir les traits d'un homme, et de faire son portrait, quoiqu'on ne l'ait vu qu'une seule fois._ Il faut, pour cela, se bien souvenir des quatre principales parties du visage, qui sont le menton, la bouche, le front et le nez et premi�rement, � l'�gard du nez, il s'en trouve de trois diff�rentes sortes; de droits, de concaves ou d'enfonc�s, et de convexes ou de relev�s. De ceux qui sont droits, il n'y en a que de quatre diff�rentes formes; savoir de longs, de courts, de relev�s par le bout, et de rabattus; les nez concaves ou camus sont de trois sortes, dont les uns ont leur concavit� ou leur enfoncement au haut, d'autres au milieu, et quelques-uns tout au bas; les nez convexes ou aquilins, sont encore de trois sortes, les uns sont relev�s vers le haut, quelques autres au milieu, et d'autres en bas: enfin ceux dont la partie relev�e est au milieu, peuvent l'avoir droite, ou convexe, ou plate. CHAPITRE CXC. _Moyen pour se souvenir de la forme d'un visage._ Si vous voulez retenir sans peine l'air d'un visage, apprenez premi�rement � bien dessiner plusieurs t�tes, et les parties qui distinguent le plus les hommes dans toutes les formes qu'elles peuvent avoir: ces parties sont la bouche, les yeux, le nez, le menton, le col et les �paules. Par exemple, les nez ont dix figures ou formes diff�rentes; il y en a de droits, de bossus, de creux ou d'enfonc�s, de relev�s plus haut ou plus bas que le milieu, d'aquilins, d'�gaux, de plats ou d'�cras�s, de ronds et d'aigus, qui sont tous propres � �tre vus de profil. Des nez qui sont propres � �tre vus de front, il s'en trouve d'onze formes diff�rentes; d'�gaux, de gros au milieu, de gros par le bout, et d�li�s proche des sourcils, de d�li�s par en bas, et gros par le haut. Les narines et les ouvertures du nez font encore des diff�rences qu'il faut remarquer: il y a des narines larges, d'autres �troites, de hautes, de basses, des ouvertures retrouss�es, d'autres rabattues et couvertes du bout du nez; et ainsi vous trouverez quelques particularit�s dans les moindres parties, qu'il faudra que vous observiez sur le naturel pour en remplir votre imagination; ou bien lorsque vous aurez � peindre un visage, ou quelqu'une de ses parties, portez des tablettes avec vous, o� vous ayez dessin� les diff�rentes parties dont je viens de parler, et apr�s avoir jet� un coup-d'oeil sur le visage de la personne que vous voulez peindre, vous examinerez dans votre recueil � quelle sorte de nez ou de bouche celle que vous voyez ressemble, et vous ferez quelque marque pour le reconno�tre, et le mettre en oeuvre quand vous serez au logis. CHAPITRE CXCI. _De la beaut� des visages._ Il ne faut point faire au visage de muscles trop marqu�s et termin�s durement; mais les lumi�res se doivent perdre insensiblement, et se noyer dans des ombres tendres et douces � l'oeil; car de-l� d�pend toute la grace et la beaut� d'un visage. CHAPITRE CXCII. _De la position et de l'�quilibre des figures._ Le creux de la gorge qui est entre les deux clavicules, doit tomber �-plomb sur le pied qui porte le corps; si on �tend un bras en devant, le creux sort de la ligne perpendiculaire au pied; et si la jambe se jette en arri�re, le creux de la gorge avance en devant, si bien qu'en chaque attitude il change de situation. CHAPITRE CXCIII. _Que les mouvemens qu'on attribue aux figures, doivent exprimer leurs actions, et les sentimens qu'on suppose qu'elles ont._ Une figure dont les mouvemens n'expriment pas les passions et les sentimens qu'elle a, n'agit point naturellement, et ces mouvemens qui ne sont point r�gl�s par la raison, ni conduits avec jugement, font voir que le Peintre n'est pas fort habile. Une figure doit donc, pour agir naturellement, faire paro�tre beaucoup d'attention et d'application � ce qu'elle fait, et avoir des mouvemens si propres � ce qu'ils repr�sentent, qu'on ne puisse les faire servir ni les accommoder � aucun autre sujet. CHAPITRE CXCIV. _De la mani�re de toucher les muscles sur les membres nus._ Aux figures nues les muscles des membres doivent �tre ou plus ou moins d�couverts, et marqu�s selon qu'ils font plus ou moins d'effort; et pour faire plus d'impression sur l'esprit de ceux qui voient votre tableau, et partager moins leur attention, ne faites voir que ceux des membres qui ont le plus de mouvement, et qui sont le plus employ�s � l'action que vous repr�sentez, et que les muscles de ces membres soient mieux prononc�s que ceux des autres membres, et touch�s plus fort � proportion qu'ils travaillent davantage; au contraire, les autres qui n'agissent point doivent �tre lents et mols. CHAPITRE CXCV. _Du mouvement et de la course de l'homme, et des autres animaux._ Quand l'homme se meut avec v�tesse ou lentement, la partie qui se trouve sur la jambe qui soutient le corps, doit toujours �tre plus basse que l'autre. CHAPITRE CXCVI. _De la diff�rence de hauteur d'�paules qui se remarque dans les figures dans les diff�rentes actions qu'elles font._ Les �paules ou les c�t�s de l'homme, ou des autres animaux, auront entre eux une plus grande diff�rence de hauteur, lorsque tout le corps aura un mouvement plus lent; et, au contraire, les parties de l'animal auront moins de diff�rence en leur hauteur, quand le mouvement du corps entier sera plus prompt. Je l'ai prouv� dans mon Trait� du mouvement local par ce principe, que tout grave p�se par la ligne de son mouvement; de sorte qu'un Tout se mouvant vers quelque lieu, la partie qui lui est unie, suit la ligne la plus courte du mouvement de son tout, sans charger en aucune mani�re de son poids les parties collat�rales de ce Tout. CHAPITRE CXCVII. _Objection._ On objecte contre la premi�re partie de ce que j'ai dit, qu'il ne s'ensuit pas n�cessairement qu'un homme arr�t� ou qui marche � pas lents, se trouve toujours dans un continuel �quilibre de ses membres sur le centre de la gravit� qui soutient le poids du corps entier, parce qu'il arrive souvent que l'homme fait tout le contraire, et qu'il se penche quelquefois sur le c�t�, quoique son corps ne porte que sur un pied, et quelquefois il d�charge une partie de son poids sur la jambe qui n'est pas droite, c'est-�-dire, celle dont le genou est pli�, comme il est repr�sent� dans les figures B C. Je r�ponds � cela que ce qui n'a pas �t� fait par les �paules dans la figure C, se trouve fait par les hanches. Ainsi l'�quilibre est toujours gard� de quelque mani�re que ce soit, et mon principe est vrai. [Illustration n� 8: CHAPITRE CXCVII. _Pag. 167_] [Illustration n� 9: CHAPITRE CXCVII. _Pag. 167_] CHAPITRE CXCVIII. _Comment un homme qui retire son bras �tendu, change l'�quilibre qu'il avoit quand son bras �toit �tendu._ Un bras �tendu envoie le centre de l'�quilibre du corps de l'homme sur le pied qui porte le poids entier du corps, comme il paro�t dans ceux qui, avec les bras �tendus, marchent sur la corde sans autre b�ton qui leur serve de contrepoids. CHAPITRE CXCIX. _De l'homme et des autres animaux, lesquels dans leurs mouvemens lents n'ont pas le centre de gravit� beaucoup �loign� du centre de leur soutien._ Tout animal aura le centre des jambes sur lesquelles il se soutient, d'autant plus proche de la perpendiculaire du centre de sa gravit�, qu'il sera plus lent dans son mouvement; et, au contraire, celui-l� aura le centre de son soutien plus �loign� de la perpendiculaire du centre de sa gravit�, qui sera plus prompt dans ses mouvemens. CHAPITRE CC. _De l'homme qui porte un fardeau sur ses �paules._ L'�paule d'un homme qui porte un fardeau est toujours plus haute que l'autre �paule qui n'est point charg�e; cela se voit en la figure suivante, dans laquelle la ligne centrale de toute la pesanteur du corps de l'homme et de son fardeau, passe par la jambe qui soutient tout le poids. Si cela n'�toit ainsi, et si le poids du corps et du fardeau n'�toit partag� pour faire l'�quilibre, il faudroit n�cessairement que l'homme tomb�t � terre; mais la nature dans ces occasions pourvoit � ce qu'une �gale partie de la pesanteur du corps de l'homme, se jette de l'autre c�t� oppos� � celui qui porte le fardeau �tranger, pour lui donner l'�quilibre et le contrepoids; et cela ne se peut faire sans que l'homme se courbe du c�t� qui n'est pas charg�, jusques � ce que, par ce mouvement, il le fasse participer � ce poids accidentel dont il est charg�; et cela ne se peut faire, si l'�paule qui soutient le poids ne se hausse, et si l'�paule qui n'est point charg�e ne s'abaisse: et c'est le moyen que la nature fournit � l'homme pour se soulager dans ces occasions. [Illustration n� 10: CHAPITRE CC. _Pag. 168_] [Illustration n� 11: CHAPITRE CCI. _Pag. 169_] CHAPITRE CCI. _De l'�quilibre du corps de l'homme, lorsqu'il est sur ses pieds._ Le poids de l'homme qui se tient appuy� sur une des jambes seulement, sera toujours �galement partag� des deux c�t�s de la ligne perpendiculaire ou centrale qui le soutient. CHAPITRE CCII. _De l'homme qui marche._ L'homme qui marche aura le centre de sa pesanteur sur le centre de la jambe qui pose � terre. CHAPITRE CCIII. _De l'�quilibre du poids de quelque animal que ce soit, pendant qu'il demeure arr�t� sur ses jambes._ Le repos ou la cessation du mouvement dans un animal, lequel se tient sur ses pieds, vient de l'�galit� ou de la privation d'in�galit� qu'ont entre eux les poids oppos�s, lesquels le faisoient avancer par leur in�galit�, et le tiennent en repos par leur �galit�. CHAPITRE CCIV. _Des plis et des d�tours que fait l'homme dans les mouvemens de ses membres._ La partie du corps sur laquelle l'homme se courbe, re�oit autant de diminution que l'autre partie oppos�e prend d'accroissement, et cette courbure peut enfin venir � �tre en proportion double � la partie qui s'�tend. Je ferai un Trait� particulier sur ce sujet. [Illustration n� 12: CHAPITRE CCII. _Pag.170_] [Illustration n� 13: CHAPITRE CCIII. _Pag. 170_] CHAPITRE CCV. _Des plis des membres._ Autant qu'un des c�t�s des membres qui se plient, s'allonge, autant la partie oppos�e se raccourcit; mais la ligne centrale ext�rieure des c�t�s qui ne se peuvent plier aux membres qui se plient, ne se diminue ni ne s'augmente jamais dans sa longueur. CHAPITRE CCVI. _De l'�quilibre, ou du contrepoids du corps._ Toute figure qui soutient sur soi et sur la ligne centrale de la masse de son corps, le poids de son corps, ou quelqu'autre poids �tranger, doit jeter autant du poids naturel ou accidentel de l'autre c�t� oppos�, qu'il en faudra pour faire un �quilibre parfait autour de la ligne centrale qui part du centre de la partie du pied qui porte la charge, laquelle passe au travers de la masse enti�re du poids, et tombe sur cette partie des pieds qui pose � terre. On voit ordinairement qu'un homme qui l�ve un fardeau avec un des bras, �tend naturellement au-del� de soi l'autre bras, et si cela ne suffit pas pour faire le contrepoids, il y met encore de son propre poids, en courbant le corps autant qu'il faut pour pouvoir soutenir le fardeau dont il est charg�. On voit encore que celui qui va tomber � la renverse �tend toujours un des bras, et le porte vers la partie oppos�e. CHAPITRE CCVII. _Du mouvement de l'homme._ Quand vous voulez faire qu'un homme remue quelque fardeau, consid�rez que les mouvemens doivent �tre faits par diverses lignes; c'est-�-dire, ou de bas en haut, avec un mouvement simple, tel que fait celui qui s'�tant baiss� prend un fardeau qu'il veut hausser en se relevant, ou bien, quand il veut tra�ner quelque chose derri�re lui ou le pousser en devant, ou bien pour tirer en bas avec une corde qui soit pass�e dans une poulie. Il faut ici remarquer que le poids du corps de l'homme tire d'autant plus, que le centre de sa pesanteur est �loign� du centre de l'axe qui le soutient: il faut encore ajouter � cela l'effort que font les jambes et les reins courb�s pour se redresser. Jamais on ne marche, soit en montant, soit en descendant, que le talon du pied de derri�re ne se hausse. [Illustration n� 14: CHAPITRE CCIX. _Pag. 173_] CHAPITRE CCVIII. _Du mouvement qui est produit par la perte de l'�quilibre._ Tout mouvement est produit par la perte de l'�quilibre, c'est-�-dire, de l'�galit�, parce qu'il n'y a aucune chose qui se meuve d'elle-m�me, sans qu'elle sorte de son �quilibre, et le mouvement est d'autant plus prompt et plus violent, que la chose s'�loigne davantage de son �quilibre. CHAPITRE CCIX. _De l'�quilibre des figures._ Si la figure est appuy�e sur un de ses pieds, l'�paule de ce c�t� l� sera toujours plus basse que l'autre, et le creux de la gorge sera perpendiculairement sur le milieu de la jambe qui soutient le corps: il en arrivera de m�me en toute autre ligne, o� nous verrons cette figure lorsqu'elle est sans avoir le bras beaucoup en saillie en dehors, ou sans quelque charge sur le dos, ou dans la main, ou sur l'�paule, ou sans �carter la jambe qui ne soutient pas le corps, ou en devant ou en arri�re. CHAPITRE CCX. _De la bonne grace des membres._ Il faut que les membres soient proportionn�s au corps avec une grace qui puisse exprimer ce que vous voulez repr�senter par votre figure; et si elle doit paro�tre agr�able et noble, vous lui donnerez des membres sveltes et nobles, qui n'aient point de muscles trop marqu�s; vous toucherez m�me l�g�rement et d'une mani�re douce, ceux qu'il est n�cessaire de faire paro�tre, et que les membres, principalement les bras, ne soient point nou�s et roides, c'est-�-dire, qu'aucun membre ne soit �tendu en ligne droite avec le membre qui lui est joint; et s'il se trouve qu'� cause de la position de la figure, la hanche droite soit plus haute que la gauche, vous ferez tomber �-plomb la jointure de l'�paule qui est la plus haute, sur la partie la plus �lev�e du c�t� gauche, et que cette �paule droite soit plus basse que la gauche; que le creux de la gorge soit toujours directement sur le milieu de la jointure du pied qui porte la figure; que la jambe qui ne soutient pas le corps ait son genou plus bas que l'autre genou, et proche de l'autre jambe. Pour ce qui est des attitudes de la t�te et des deux bras, elles sont presque infinies, c'est pourquoi je ne veux point en donner des r�gles particuli�res; j'avertirai seulement qu'elles doivent �tre libres, ais�es, gracieuses, vari�es de plusieurs mani�res, de peur que les membres ne paroissent roides, comme s'ils �toient de bois. CHAPITRE CCXI. _De la libert� des membres, et de leur facilit� � se mouvoir._ Pour ce qui concerne la libert� des membres, il faut prendre garde qu'ayant � repr�senter quelqu'un, qui, par hasard, soit oblig� de se tourner en arri�re ou de c�t�, vous ne lui fassiez point poser les pieds et tous les membres vers le m�me endroit o� il tournera la t�te, mais il sera mieux de partager cette action avec quelque sorte de contraste et de diversit� dans les quatre jointures, qui sont celles des pieds, celles des genoux, celles des flancs, celles du col; et si la figure �toit appuy�e sur la jambe droite, le genou gauche sera pli� et retir� en arri�re, et son pied un peu �lev� en dehors, et l'�paule gauche un peu plus haute que la droite, et la nuque du col se rencontrera au m�me lieu o� la cheville ext�rieure du pied gauche sera tourn�e, l'�paule gauche sur la pointe du pied droit en ligne perpendiculaire: tenez aussi pour une maxime g�n�rale, que la t�te de vos figures ne soit point tourn�e du m�me c�t� que la poitrine, puisque la nature a fait pour notre commodit� que le col se tourne facilement pour porter les yeux de diff�rens c�t�s, lorsque nous voulons regarder autour de nous: il en est �-peu-pr�s de m�me des autres jointures, qui sont mobiles pour le service et pour les besoins de l'homme; et si vous repr�sentez un homme assis, qui ait besoin de travailler de ses bras � quelque chose qui soit � c�t� de lui, il doit avoir l'estomac tourn� sur la jointure du flanc. CHAPITRE CCXII. _D'une figure seule hors de la composition d'une histoire._ Il ne faut point encore voir un m�me mouvement de membre r�p�t� dans une figure que vous feignez �tre seule: par exemple, si elle court seule, qu'elle n'ait pas les deux mains jet�es en devant, mais si l'une est devant, que l'autre soit derri�re, parce qu'autrement elle ne pourroit courir; et si le pied droit avance en devant, que le bras droit reste derri�re, et que le gauche se trouve devant; car sans ce contraste des membres, et cette contrari�t� de leurs mouvemens, il n'est pas possible de bien courir; si quelque autre figure suit celle-ci, et qu'elle porte une des jambes un peu en devant, faites que l'autre jambe se trouve sous la t�te, et que le bras du m�me c�t� fasse un mouvement contraire, et passe devant. Je parlerai plus amplement de cette mati�re dans le livre des Mouvemens. CHAPITRE CCXIII. _Quelles sont les principales et les plus importantes choses qu'il faut observer dans une figure._ En dessinant des figures, il faut avoir principalement attention � bien asseoir la t�te sur les �paules, le buste sur les hanches, et les hanches et les �paules sur les pieds. CHAPITRE CCXIV. _Que l'�quilibre d'un poids doit se trouver sur le centre, ou plut�t autour du centre de la gravit� des corps._ La figure qui demeure ferme sur ses pieds sans se mouvoir, fera un �quilibre de tous ses membres autour de la ligne centrale sur laquelle elle se soutient, c'est-�-dire, que si la figure qui est sans mouvement, �tant appuy�e sur ses pieds, vient � jeter en devant un de ses bras, elle doit porter en m�me temps vers le c�t� oppos� un autre membre, ou une partie de son poids qui soit �gale � ce qu'elle a port� en devant; et cela se doit entendre g�n�ralement de chaque partie qui saillira hors de son Tout contre l'ordinaire. CHAPITRE CCXV. _De la figure qui doit remuer ou �lever quelque poids._ Jamais un homme ne pourra remuer ou soulever un fardeau, qu'il ne tire de soi-m�me un poids plus qu'�gal � celui qu'il veut lever, et qu'il ne le porte de l'autre c�t� oppos� � celui o� est le fardeau qu'il veut lever. CHAPITRE CCXVI. _De l'attitude des hommes._ Il faut que les attitudes des figures dans tous les membres soient tellement dispos�es, et aient une telle expression, que par elles on puisse conno�tre ce qu'elles veulent repr�senter. CHAPITRE CCXVII. _Diff�rences d'attitudes._ On exprime les actions dans les figures d'hommes, d'une mani�re conforme � leur �ge et � leur qualit�, et on fait les figures diff�rentes selon l'esp�ce ou le sexe de m�le ou de femelle. CHAPITRE CCXVIII. _Des attitudes des figures._ Un Peintre doit remarquer les attitudes et les mouvemens des hommes imm�diatement apr�s qu'ils viennent d'�tre produits par quelque accident subit, et il doit les observer sur le champ, et les esquisser sur ses tablettes pour s'en souvenir, et n'attendre pas, par exemple, que l'action de pleurer soit contrefaite par quelqu'un qui n'auroit point sujet de pleurer, pour en �tudier l'expression sur ce mod�le, parce qu'une telle action n'ayant point une v�ritable cause, elle ne sera ni prompte ni naturelle; mais il est fort avantageux d'avoir auparavant remarqu� chaque action dans la nature m�me, et ensuite de faire tenir un mod�le dans cette m�me disposition, pour s'aider un peu l'imagination, et t�cher d'y d�couvrir encore quelque chose qui fasse au sujet, et puis peindre d'apr�s. CHAPITRE CCXIX. _Des actions de ceux qui se trouvent pr�sens � quelque accident consid�rable._ Tous ceux qui se trouvent pr�sens � quelque accident digne d'�tre remarqu�, font diverses expressions d'admiration, en consid�rant ce qui se passe, comme lorsque la justice fait punir les criminels; ou, si le sujet est de pi�t�, tous les assistans l�vent les yeux avec diff�rentes marques de d�votion vers cet objet, comme � l'�l�vation de l'hostie pendant la messe, et en d'autres semblables c�r�monies; ou si c'est quelque extravagance qui fasse rire, ou qui donne de la compassion, en ce cas il n'est pas n�cessaire que les spectateurs aient tous les yeux tourn�s vers cet objet, mais ils peuvent faire divers mouvemens; et il est bon de les partager en diff�rens groupes de personnes qui s'assemblent pour marquer leur joie ou leur tristesse. Si c'est quelque sujet terrible qui inspire de la frayeur, il faut faire � ceux qui fuient, des visages p�les et �tonn�s avec une grande d�monstration de peur, et que la fuite soit diversement exprim�e par leurs mouvemens, comme nous dirons au livre des Mouvemens. CHAPITRE CCXX. _De la mani�re de peindre le nu._ Ne faites jamais une figure d�licate et d'une taille svelte avec des muscles trop relev�s et trop marqu�s, parce que les hommes de cette taille n'ont jamais beaucoup de chair sur les os; mais ils sont sveltes et l�gers faute de chair; et o� il n'y a gu�re de chair les muscles ne peuvent avoir beaucoup de relief. CHAPITRE CCXXI. _D'o� vient que les muscles sont gros et courts._ Les hommes musculeux ont les os �pais et sont d'une taille grosse et courte, et ont peu de graisse, parce que les muscles charnus en croissant se resserrent l'un avec l'autre, et la graisse qui se glisse ordinairement entre eux n'y a point de place; et les muscles dans ces corps qui ont peu de graisse, �tant contigus, et ne se pouvant �tendre, ils prennent leur accroissement en grosseur, et ils croissent et se fortifient davantage dans la partie qui est la plus �loign�e des extr�mit�s, c'est-�-dire, vers le milieu de leur largeur et de leur longueur. CHAPITRE CCXXII. _Que les personnes grasses n'ont pas de gros muscles._ Encore que les hommes gras soient quelquefois courts et gros, aussi bien que les musculeux, desquels nous venons de parler, ils ont n�anmoins les muscles petits, mais leur peau couvre beaucoup de chair spongieuse et molle, c'est-�-dire, pleine d'air, c'est pourquoi ces hommes gras nagent mieux, et se soutiennent plus facilement sur l'eau que ceux qui ont le corps musculeux, lesquels ont moins d'air entre la peau. CHAPITRE CCXXIII. _Quels sont les muscles qui disparoissent selon les divers mouvemens de l'homme._ En haussant les bras ou les baissant, les muscles de l'estomac, ou disparoissent, ou prennent un plus grand relief; les hanches aussi font le m�me effet quand on les plie en dehors ou en dedans, et il se fait plus de vari�t� aux �paules, aux flancs et au col, qu'en aucune autre jointure du corps, parce que leurs mouvemens sont en plus grand nombre que ceux des autres parties. J'en ferai un Trait� particulier. CHAPITRE CCXXIV. _Des muscles._ Les membres des jeunes gens ne doivent pas �tre marqu�s de muscles forts et relev�s, parce qu'ils marquent une vigueur d'homme fait et tout form�, et la jeunesse n'est pas encore arriv�e � cette maturit� et � cette derni�re perfection; mais il faut toucher les muscles avec plus ou moins de force, selon qu'ils travaillent plus ou moins: car ceux qui font quelque effort paroissent toujours plus gros et plus relev�s que ceux qui demeurent en repos, et jamais les lignes centrales du dedans des membres qui sont pli�s ne demeurent dans la situation en long qu'elles ont naturellement. CHAPITRE CCXXV. _Que le nu o� l'on verra distinctement tous les muscles ne doit point faire de mouvement._ Le nu o� tous les muscles sont marqu�s avec un grand relief, doit demeurer ferme sans se mouvoir; parce qu'il n'est pas possible que le corps se remue, si une partie des muscles ne se rel�che quand les muscles antagonistes qui leur sont oppos�s sont en action, et ceux qui sont en repos cessent de paro�tre, � mesure que ceux qui travaillent se d�couvrent davantage, et sont plus enfl�s. CHAPITRE CCXXVI. _Que dans les figures nues il ne faut pas que tous les muscles soient enti�rement et �galement marqu�s._ Les figures nues ne doivent pas avoir les muscles trop marqu�s, ou prononc�s trop exactement, parce que cette expression est d�sagr�able � l'oeil, et difficile � ex�cuter; mais il faut que les muscles soient beaucoup plus marqu�s du c�t� que les membres se porteront � leur action: car la nature des muscles dans l'op�ration est de ramasser leurs parties ensemble, et de les fortifier en les unissant, de sorte que plusieurs de celles qui auparavant ne paroissoient point, se d�couvrent en se r�unissant pour agir ensemble. CHAPITRE CCXXVII. _De l'extension et du raccourcissement des muscles._ Le muscle qui est derri�re la cuisse fait une plus grande vari�t� dans son extension et dans sa contraction, qu'aucun autre muscle qui soit dans l'homme; le second muscle est celui qui forme les fesses; le troisi�me celui de l'�chine; le quatri�me celui de la gorge; le cinqui�me celui des �paules; le sixi�me celui de l'estomac: ce muscle prend sa naissance sous les mamelles, et se va rendre sous le petit ventre, comme je l'expliquerai dans le Trait� g�n�ral des Muscles. CHAPITRE CCXXVIII. _En quelle partie du corps de l'homme se trouve un ligament sans muscle._ Au poignet du bras, environ � quatre doigts de la paume de la main, on trouve un ligament, le plus grand qui soit dans le corps de l'homme; il est sans muscle, et a sa naissance dans le milieu d'un des fuciles du bras, et va finir au milieu de l'autre fucile: sa forme est quarr�e, il est large d'environ trois doigts, et �pais d'un demi-doigt: ce ligament sert seulement � tenir serr�s ensemble les deux fuciles des bras, et emp�cher qu'ils ne se dilatent. CHAPITRE CCXXIX. _Des huit osselets qui sont au milieu des ligamens, en diverses jointures du corps de l'homme._ Il se forme dans les jointures du corps de l'homme de petits os, qui sont stables au milieu des ligamens qui attachent quelques-unes des jointures, comme les rotules des genoux, les jointures des �paules, de la poitrine et des pieds, lesquelles sont au nombre de huit: il n'y en a qu'une � chaque �paule et � chaque genou; mais chaque pied en a deux, sous la premi�re jointure des gros orteils, et vers le talon, et ceux-ci deviennent fort durs quand l'homme approche de la vieillesse. CHAPITRE CCXXX. _Du muscle qui est entre les mamelles et le petit ventre._ Il y a un certain muscle qui na�t entre les mamelles et le petit ventre, ou plut�t qui aboutit au petit ventre: ce muscle a trois facult�s, parce qu'il est divis� dans sa largeur par trois ligamens; savoir, le muscle sup�rieur, qui est le premier, ensuite duquel est un des ligamens aussi large que ce muscle; puis en descendant on trouve le second muscle joint au second ligament; enfin suit le troisi�me muscle, avec le troisi�me ligament, qui est uni et adh�rent � l'os pubis du petit ventre; et ces trois muscles avec ces trois ligamens ont �t� faits par la nature, � cause du grand mouvement qui arrive au corps de l'homme lorsqu'il se courbe et qu'il se renverse, par le moyen de ce muscle, lequel, s'il n'e�t point �t� ainsi partag�, auroit produit un trop grand effet par son extension et sa contraction; et lorsque ce muscle aura le moins de vari�t� dans ses mouvemens, le corps en sera plus beau: car si ce muscle se doit �tendre de neuf doigts, et se retirer apr�s d'autant, chaque partie de ce muscle n'aura pas plus de trois doigts, si bien que leur forme en sera fort peu chang�e, aussi bien que la beaut� g�n�rale de tout le corps. [Illustration n� 15: CHAPITRE CCXXXI. _Pag. 189_] [Illustration n� 16: CHAPITRE CCXXXII. _Pag. 189_] [Illustration n� 17: CHAPITRE CCXXXII. _Pag. 189_] CHAPITRE CCXXXI. _De la plus grande contorsion que le corps de l'homme puisse faire en se tournant en arri�re._ Le terme de la contorsion que l'homme peut faire en tournant la t�te en arri�re, est de tourner le corps de telle sorte que le visage soit en face, vis-�-vis des talons, en ligne perpendiculaire, et cela ne se fait pas sans peine; il faut m�me pour cela, outre la flexion du col, plier encore la jambe, et baisser l'�paule du c�t� que la t�te est tourn�e: la cause de ce d�tour sera expliqu�e dans mon Trait� d'Anatomie, o� je marquerai quels muscles servent les premiers et les derniers � cette action. CHAPITRE CCXXXII. _Combien un bras se peut approcher de l'autre bras derri�re le dos._ Des bras qu'on porte derri�re le dos, les coudes ne peuvent jamais s'approcher plus pr�s que de la longueur qu'il y a depuis le coude jusqu'au bout des plus longs doigts; c'est-�-dire, que la plus grande proximit� que peuvent avoir les deux coudes en cet �tat, ne sauroit �tre que de l'�tendue qu'il y a du coude � l'extr�mit� du plus grand doigt de la main, et les bras ainsi plac�s forment un quarr� parfait; la plus grande extension du bras dessus l'estomac, est de pouvoir porter le coude jusques au milieu de l'estomac, et alors le coude avec les �paules et les deux parties du bras forment ensemble un triangle �quilat�ral. CHAPITRE CCXXXIII. _De la disposition des membres de l'homme qui se pr�pare � frapper de toute sa force._ Lorsqu'un homme se dispose � donner un coup avec violence, il se plie et se d�tourne autant qu'il peut du c�t� contraire � celui o� il a dessein de frapper, et l� il ramasse toute la force qu'il a, il la porte et la d�charge ensuite sur la chose qu'il atteint par le mouvement compos�; c'est-�-dire, par exemple, de son bras et du b�ton dont il est arm�. [Illustration n� 18: CHAPITRE CCXXXIII. _Pag. 190_] [Illustration n� 19: CHAPITRE CCXXXIV et CCXXXV. _Pag. 191 et 192_] CHAPITRE CCXXXIV. _De la force compos�e de l'homme, et premi�rement de celle des bras._ Les deux muscles qui servent au mouvement du grand fucile du bras, pour l'�tendre et le retirer, prennent leur naissance vers le milieu de l'os nomm� _Adjutorium_, l'un derri�re l'autre; celui de derri�re �tend le bras, et l'autre qui est devant le plie. Or, pour savoir si l'homme aura plus de force en tirant � soi ou en poussant, je l'ai prouv� dans mon Trait� des Poids par ce principe, qu'entre les poids d'�gale pesanteur, celui-l� doit �tre plus fort qui sera plus �loign� du milieu de leur balance; d'o� il s'ensuit que N B et N C �tant deux muscles d'�gale force, celui de devant qui est N C sera plus fort que le muscle N B, qui est derri�re, parce qu'il est attach� au bras en C, lieu plus �loign� du milieu du bras ou du coude A, que ne l'est B, lequel est au-del� du milieu, mais cette force est simple, et j'ai d� en parler d'abord devant que de rien dire de la force compos�e, dont il faut maintenant que je parle. J'appelle force compos�e, lorsqu'en faisant quelque action avec les bras, on y ajoute une seconde puissance, telle que la pesanteur du corps, l'effort des jambes et des reins, pour tirer ou pour pousser. L'usage de cette force compos�e consiste � faire effort des bras et du dos, et � bien �tendre le corps et les jambes, comme on le voit faire � deux hommes qui veulent abattre une colonne, et dont l'un la pousse et l'autre la tire. CHAPITRE CCXXXV. _En quelle action l'homme a plus de force ou lorsqu'il tire � soi, ou lorsqu'il pousse._ L'homme a beaucoup plus de force lorsqu'il tire � soi que quand il pousse, parce qu'en tirant, les muscles des bras, qui ne servent qu'� tirer, se joignent � ceux qui servent � pousser, agissent avec eux et augmentent leur force; mais lorsque le bras est �tendu tout droit pour pousser, les muscles qui donnent au coude son mouvement ne servent de rien � cette action, et ils ne l'ont pas plus d'effort que si l'homme tenoit l'�paule appuy�e contre la chose qu'il veut remuer du lieu o� elle est: or il n'y a point de nerfs ni de muscles qui contribuent � cet effet, que ceux qui servent � redresser les reins courb�s, et ceux qui redressent la jambe pli�e, qui sont sous la cuisse et au gras de la jambe; d'o� il s'ensuit que pour tirer � soi plusieurs forces, savoir celles des bras, des jambes, du dos et m�me de l'estomac, selon que le corps est plus ou moins courb�, s'unissent et agissent ensemble; mais quand il faut pousser, quoique les m�mes parties y concourent, n�anmoins la force des bras y est sans effet; parce qu'� pousser avec un bras �tendu tout droit et sans mouvement, elles n'aident gu�re davantage que si on avoit un morceau de bois entre l'�paule et la chose que l'on pousse. CHAPITRE CCXXXVI. _Des membres plians, et de ce que fait la chair autour de la jointure o� ils se plient._ La chair dont la jointure des os est rev�tue, et les autres choses qui l'environnent et qui sont adh�rentes � ces m�mes os, s'enflent et diminuent en grosseur, selon le pli ou l'extension des membres dont nous parlons; c'est-�-dire, qu'elles croissent et s'enflent par le c�t� int�rieur de l'angle form� par le pli des membres, et qu'elles s'allongent et s'�tendent par le dehors de l'angle ext�rieur, et ce qui se trouve au milieu du pli de ces membres participe � l'accroissement et � la diminution, mais plus ou moins, selon que ces angles sont plus proches ou plus �loign�s de la jointure. CHAPITRE CCXXXVII. _Si l'on peut tourner la jambe sans tourner aussi la cuisse._ Il est impossible de tourner la jambe depuis le genou jusqu'en bas, sans tourner aussi la cuisse par le m�me mouvement; cela vient de ce que la jointure de l'os du genou est embo�t�e dans l'os de la cuisse et assembl�e avec celui de la jambe, et cette jointure ne se peut mouvoir en avant ni en arri�re, qu'autant qu'il faut pour marcher et pour se mettre � genoux; mais elle ne peut jamais se mouvoir par le c�t�, parce que les assemblages qui composent la jointure du genou ne s'y trouvent pas dispos�s: car si cet embo�tement �toit pliable en tout sens, comme celui de l'os adjutoire qui est � l'�paule, ou comme celui de la cuisse qui joint la hanche, l'homme auroit le plus souvent les jambes pli�es aussi bien par les c�t�s qu'en devant et en arri�re, et elles seroient presque toujours de travers; de plus cette jointure est seulement pliable en devant et non en arri�re, et par son mouvement en devant, elle ne peut que rendre la jambe droite, parce que si elle plioit en arri�re, l'homme ne pourroit se lever en pied quand il seroit une fois � genoux; car pour se relever quand il est � genoux, il jette premi�rement tout le poids du corps sur un des genoux en d�chargeant l'autre, et au m�me temps l'autre jambe qui ne sent plus d'autre charge que son propre poids, l�ve ais�ment le genou et pose � terre toute la plante du pied; apr�s quoi il fait retourner tout le poids sur ce pied, appuyant la main sur son genou; et en m�me temps allongeant le bras qui soutient le corps, il hausse la t�te, il �tend et dresse la cuisse avec l'estomac, et se l�ve droit sur ce pied qui pose � terre, jusqu'� ce qu'il ait aussi lev� l'autre jambe. CHAPITRE CCXXXVIII. _Des plis de la chair._ La chair aux plis des jointures est toujours rid�e par le c�t� oppos� � celui o� elle est tendue. CHAPITRE CCXXXIX. _Du mouvement simple de l'homme._ On appelle mouvement simple, celui qu'il fait en se pliant simplement, en devant ou en arri�re. CHAPITRE CCXL. _Du mouvement compos�._ Le mouvement compos� est celui qui, pour produire quelque action, oblige de plier le corps en bas et de travers en m�me temps; ainsi un Peintre doit prendre garde � faire les mouvemens compos�s, de telle sorte qu'ils soient enti�rement observ�s en toute l'�tendue du sujet qu'il traite, c'est-�-dire, qu'ayant fait une figure dans une attitude compos�e, selon qu'il est n�cessaire � son histoire, il n'en affoiblisse point l'expression en l'accompagnant d'une autre, qui, tout au contraire, fasse une action simple et sans aucun rapport au sujet. CHAPITRE CCXLI. _Des mouvemens propres du sujet, et qui conviennent � l'intention et aux actions des figures._ Il faut que les mouvemens de vos figures montrent la quantit� de force qu'elles doivent raisonnablement employer, selon la diff�rence des actions qu'elles font; c'est-�-dire, que vous ne fassiez pas faire le m�me effort � celui qui ne l�veroit qu'un b�ton, que vous feriez faire � un autre qui voudroit lever une grosse poutre: ayez donc soin que l'expression de leur effort soit proportionn�e � la qualit� de leur travail et au fardeau qu'ils remuent. CHAPITRE CCXLII. _Du mouvement des figures._ Ne faites jamais les t�tes droites sur le milieu des �paules, mais toujours un peu tourn�e � droite ou � gauche, quand m�me elles regarderoient en haut ou en bas, ou m�me tout droit � la hauteur des yeux, parce qu'il est n�cessaire de leur donner quelque attitude qui fasse paro�tre du mouvement et de la vie; et ne dessinez jamais une figure toute de profil, ou toute de front, ou par le dos, en sorte qu'on voye les parties qui sont situ�es au milieu du corps tomber �-plomb, comme par alignement les unes sur les autres; et si quelque circonstance particuli�re vous oblige de le faire, faites-le aux figures des vieillards, auxquels cela convient mieux qu'aux autres, � cause de leur lenteur naturelle, et ne r�p�tez jamais les m�mes actions des bras ou des jambes, non-seulement dans une m�me figure, mais encore dans toutes celles qui sont proches ou autour de cette figure, pourvu toutefois que le sujet que vous traiterez n'oblige point � faire autrement. CHAPITRE CCXLIII. _Des actions et des gestes qu'on fait quand on montre quelque chose._ Dans les actions o� l'on montre de la main quelque chose proche, ou par l'intervalle du temps, ou par l'espace du lieu, il faut que la main qui nous la montre ne soit pas trop �loign�e de celui qui montre, lequel ne doit pas avoir le bras trop �tendu; mais si cette m�me chose est �loign�e, il faut aussi que le bras soit fort �tendu et la main fort �loign�e de celui qui montre, et que le visage de celui qui montre soit tourn� vers celui auquel il parle. CHAPITRE CCXLIV. _De la vari�t� des visages._ L'air des visages doit �tre vari� selon la diversit� des accidens qui surviennent � l'homme pendant qu'il travaille ou qu'il est en repos, lorsqu'il pleure, qu'il rit, qu'il crie, qu'il est saisi de crainte, ou �mu de quelque autre passion; il faut encore que chaque membre de la figure, et toute son attitude, aient un rapport naturel � la passion qui est exprim�e sur le visage. CHAPITRE CCXLV. _Des mouvemens convenables � l'intention de la figure qui agit._ Il y a des mouvemens de l'ame qui s'expriment sans action du corps, et d'autres qui sont accompagn�es de l'action du corps; les mouvemens de l'ame sans l'action du corps, laissent tomber les bras, les mains et toutes les autres parties qui sont plus agissantes, et ordinairement plus en mouvement que les autres: mais les mouvemens de l'ame qui sont accompagn�s de l'action du corps, tiennent les membres en des attitudes convenables � l'intention de l'esprit et au mouvement de l'ame; et il y a beaucoup de choses � dire sur ce sujet. Il se trouve encore un troisi�me mouvement qui participe de l'un et de l'autre; et un quatri�me tout particulier, lequel ne tient d'aucun d'eux: ces deux derni�res sortes de mouvemens sont ceux d'un insens� ou d'un furieux: on doit les rapporter au Chapitre de la folie et des grotesques, dont les moresques sont compos�es. CHAPITRE CCXLVI. _Comment les actions de l'esprit et les sentimens de l'ame font agir le corps par des mouvemens faciles et commodes au premier degr�._ Le mouvement de l'esprit fait mouvoir le corps par des actions simples et faciles, sans le porter d'aucun c�t�, parce que son objet est dans l'esprit, lequel n'�meut point les sens quand il est occup� en lui-m�me. CHAPITRE CCXLVII. _Du mouvement qui part de l'esprit � la vue d'un objet qu'on a devant les yeux._ Le mouvement qui est excit� dans l'homme par la pr�sence d'un objet, peut �tre produit imm�diatement ou m�diatement; s'il est produit imm�diatement, celui qui se meut tourne d'abord vers l'objet les yeux, c'est-�-dire, le sens qui lui est le plus n�cessaire pour le reconno�tre et l'observer; en m�me temps cet homme tient les pieds immobiles en leur place, et d�tourne seulement les cuisses, les hanches et les genoux vers le c�t� o� se portent les yeux: et ainsi en de semblables rencontres, il faudra faire des observations exactes sur tous les mouvemens qui s'y remarquent. CHAPITRE CCXLVIII. _Des mouvemens communs._ La vari�t� des mouvemens dans les hommes est pareille � celle des accidens qui leur arrivent et des fantaisies qui leur passent par l'esprit, et chaque accident fait plus ou moins d'impression sur eux, selon leur temp�rament, leur �ge et le caract�re de leurs passions; parce que, dans la m�me occasion, les mouvemens d'un jeune homme sont tout autres que ceux d'un vieillard, et ils doivent �tre exprim�s tout autrement. CHAPITRE CCXLIX. _Du mouvement des animaux._ Tout animal � deux pieds, dans son mouvement, baisse plus la partie qui est sur le pied qu'il l�ve, que celle qui est sur le pied qu'il pose � terre, et sa partie la plus haute fait le contraire; ce qui se remarque aux hanches et aux �paules de l'homme pendant qu'il marche: et la m�me chose arrive aux oiseaux dans leur t�te et leur croupion. CHAPITRE CCL. _Que chaque membre doit �tre proportionn� � tout le corps, dont il fait partie._ Faites que chaque partie d'un tout soit proportionn�e � son tout; comme si un homme est d'une taille grosse et courte, faites que la m�me forme se remarque en chacun de ses membres, c'est-�-dire, qu'il ait les bras courts et gros, les mains de m�me larges et grosses, les doigts courts avec leurs jointures pareilles, et ainsi du reste. CHAPITRE CCLI. _De l'observation des biens�ances._ Observez la biens�ance en vos figures; c'est-�-dire, dans leurs actions, leur d�marche, leur situation et les circonstances de la dignit� ou peu de valeur des choses, selon le sujet que vous voulez repr�senter. Par exemple, dans la personne d'un roi, il faut que la barbe, l'air du visage, et l'habillement soient graves et majestueux; que le lieu soit bien par�; que ceux de sa suite fassent paro�tre du respect, de l'admiration; qu'ils aient un air noble; qu'ils soient richement v�tus d'habits sortables � la grandeur et � la magnificence de la cour d'un roi. Au contraire, dans la repr�sentation de quelque sujet bas, les personnes paro�tront m�prisables, mal v�tues, de mauvaise mine, et ceux qui sont autour auront le m�me air, et des mani�res basses, libres et peu r�gl�es, et que chaque membre ait du rapport � la composition g�n�rale du sujet et au caract�re particulier de chaque figure; que les actions d'un vieillard ne ressemblent point � celles d'un jeune homme, ni celles d'une femme � celles d'un homme, ni celles d'un homme fait � celles d'un petit enfant. CHAPITRE CCLII. _Du m�lange des figures, selon leur �ge et leur condition._ Ne m�lez point une certaine quantit� de petits enfans avec pareil nombre de vieillards, ni de jeunes hommes de condition avec des valets, ni des femmes parmi des hommes, si le sujet que vous voulez repr�senter ne le demande absolument. CHAPITRE CCLIII. _Du caract�re des hommes qui doivent entrer dans la composition de chaque histoire._ Pour l'ordinaire, faites entrer peu de vieillards dans les compositions d'histoires, et qu'ils soient encore s�par�s des jeunes gens, parce qu'en g�n�ral il y a peu de vieilles gens, et que leur humeur n'a point de rapport avec celle de la jeunesse; et o� il n'y a point de conformit� d'humeur, il ne peut y avoir d'amiti�, et sans l'amiti� une compagnie est bient�t s�par�e: de m�me aussi, dans les compositions d'histoires graves et s�rieuses, o� l'on repr�sente des assembl�es qui se tiennent pour des affaires d'importance, que l'on y voye peu de jeunes gens, parce qu'ordinairement les jeunes gens ne sont pas charg�s de ces sortes d'affaires, ils ne prennent pas volontiers conseil, et ils n'aiment pas se trouver � de pareilles assembl�es. CHAPITRE CCLIV. _Comment il faut repr�senter une personne qui parle � plusieurs autres._ Avant que de faire une figure qui ait � parler � plusieurs personnes, il faudra consid�rer la mati�re dont elle doit les entretenir, pour lui donner une action conforme au sujet; c'est-�-dire, s'il est question de les persuader, qu'on le reconnoisse par ses gestes; et si la mati�re consiste � d�duire diverses raisons, faites que celui qui parle prenne, avec deux doigts de la main droite, un des doigts de sa main gauche, tenant serr�s les deux autres de la m�me main, qu'il ait le visage tourn� vers l'assembl�e, avec la bouche � demi-ouverte, en sorte qu'on voie qu'il parle; et s'il est assis, qu'il semble se vouloir lever debout, portant la t�te un peu en avant; et si vous le repr�sentez debout, faites qu'il se courbe un peu, ayant le corps et le visage tourn�s vers l'assembl�e, laquelle doit paro�tre attentive et dans un grand silence: que tous aient les yeux attach�s sur celui qui parle, et qu'ils fassent paro�tre qu'ils l'admirent. On peut repr�senter quelque vieillard qui fasse conno�tre qu'il admire ce qu'il entend, en tenant la bouche ferm�e et les l�vres serr�es, et se formant des rides aux coins de la bouche, au bas des joues et au front, par les sourcils, qu'il �l�vera vers le milieu du visage du c�t� du nez. Que d'autres se tiennent assis, et qu'ayant les doigts des mains entrelac�s, ils embrassent leur genou gauche. Que quelque vieillard ait un genou crois� sur l'autre, et que le coude s'appuyant sur le genou, la main soutienne le menton, qui sera couvert d'une barbe v�n�rable. CHAPITRE CCLV. _Comment il faut repr�senter une personne qui est fort en col�re._ Si vous repr�sentez quelqu'un qui soit fort en col�re, faites-lui prendre quelqu'un aux cheveux, et que lui pressant le c�t� avec le genou, il lui tourne la t�te contre terre, et paroisse pr�t � le frapper, en tenant le bras droit haut et le poing ferm�: il faut que ce furieux grince des dents, qu'il ait les cheveux h�riss�s, les sourcils bas et serr�s, et les c�t�s de la bouche courb�s en arc, le col gros, enfl�, et tout sillonn� de plis par-devant vers le c�t� qu'il se penche sur son ennemi. CHAPITRE CCLVI. _Comment on peut peindre un d�sesp�r�._ Un d�sesp�r� peut �tre repr�sent� avec un couteau � la main, dont il se perce, apr�s avoir d�chir� ses habits, et s'�tre arrach� les cheveux. Que d'une main il ouvre et augmente sa plaie; il sera debout, ayant les pieds �cart�s, et les jambes un peu pli�es, le corps pench� et comme tombant par terre. CHAPITRE CCLVII. _Des mouvemens qu'on fait en riant et en pleurant, et de leur diff�rence._ Entre celui qui rit et celui qui pleure, il n'y a gu�re de diff�rence aux yeux, � la bouche, ni aux joues; mais il y en a dans l'enflure et la roideur des sourcils, qui se joignent dans celui qui pleure, et qui sont plus hauts et plus �tendus dans celui qui rit. On peut faire encore que celui qui pleure d�chire ses habits, et fasse d'autres actions semblables ou diff�rentes, selon les divers sujets de son affliction; parce que quelqu'un pourroit pleurer de col�re, un autre d'appr�hension; l'un de tendresse et de joie, l'autre par soup�on; quelqu'un de douleur et par le sentiment de quelque mal, un autre par compassion et de regret d'avoir perdu ses parens ou ses amis: les expressions de douleur, de tristesse, de chagrin, sont fort diff�rentes quand on pleure; ainsi, faites que l'un paroisse enti�rement d�sesp�r�, que l'autre montre plus de mod�ration, qu'un autre se contente de pleurer et de verser des larmes, tandis qu'un autre fait des cris; que quelques-uns l�vent les yeux vers le ciel, ayant les bras pendans avec les mains jointes et les doigts entrelac�s, et que d'autres pleins d'appr�hension haussent les �paules jusqu'aux oreilles: c'est ainsi qu'il faut varier l'expression de la m�me passion, suivant les diff�rens sujets que vous avez � traiter. Celui qui verse des larmes hausse les sourcils vers leur jointure, et les approche l'un de l'autre, et forme des rides sur les c�t�s et au milieu de la bouche en bas; mais celui qui rit, a les c�t�s de la bouche �lev�s, et les sourcils droits et bien �tendus. CHAPITRE CCLVIII. _De la position des figures d'enfans et de vieillards._ La disposition des jambes dans les enfans et dans les vieillards, ne doit point marquer ordinairement des mouvemens prompts et des actions trop vives. CHAPITRE CCLIX. _De la position des figures de femmes et de jeunes gens._ Il ne sied pas bien aux femmes et aux jeunes gens d'�tre dans des attitudes o� les jambes soient �cart�es, parce que cette contenance paro�t trop libre; mais au contraire les jambes serr�es sont une marque de modestie. CHAPITRE CCLX. _De ceux qui sautent._ La nature apprend d'elle-m�me sans aucun raisonnement � ceux qui sautent, que quand ils veulent s'�lever, il faut qu'ils haussent les bras et les �paules avec imp�tuosit�; ces parties suivant cet effort se meuvent ensemble avec une grande partie du corps pour le soulever et les porter en haut, jusqu'� ce que leur effort ait cess�: cet effort est accompagn� d'une prompte extension du corps qui s'�toit tendu comme un ressort le long des reins, en se courbant par le moyen des jointures des cuisses, des genoux et des pieds; le corps en s'�tendant ainsi avec effort, d�crit une ligne oblique, c'est-�-dire, inclin�e en devant et tirant en haut; et ainsi le mouvement destin� � faire aller en avant, porte en avant le corps de celui qui saute, et le mouvement qui doit l'�lever, hausse le corps et lui fait former comme un grand arc, qui est le mouvement qu'on fait en sautant. [Illustration n� 20: CHAPITRE CCLXI. _Pag. 211_] CHAPITRE CCLXI. _De l'homme qui veut jeter quelque chose bien loin avec beaucoup d'imp�tuosit�._ L'homme qui veut lancer un dard, ou jeter une pierre, ou quelqu'autre chose avec violence, peut �tre repr�sent� en deux mani�res, ou lorsqu'il se pr�pare � l'ex�cution de ce dessein, ou lorsqu'il l'a ex�cut�. Si vous le repr�sentez lorsqu'il se pr�pare � cette action, observez ce qui suit. 1�. Que la hanche du c�t� du pied qui porte le corps doit �tre �-plomb avec la ligne centrale, ou le creux de l'estomac. 2�. Que l'�paule du c�t� oppos� doit s'avancer en devant et passer au-dessus de ce pied qui porte le corps, pour former une ligne droite et perpendiculaire avec lui; c'est-�-dire, que si c'est le pied droit qui porte, l'�paule gauche sera perpendiculairement sur la pointe du m�me pied droit. CHAPITRE CCLXII. _Pourquoi celui qui veut tirer quelque chose de terre, en se retirant, ou l'y ficher, hausse la jambe oppos�e � la main qui agit, et la tient pli�e._ Celui qui veut en se retirant ficher quelque pieu en terre ou l'arracher, hausse la jambe oppos�e au bras qui tire, et la plie par le genou; ce qu'il fait pour prendre son contrepoids sur le pied qui porte � terre: car sans ce pli il ne pourroit agir, et s'il n'�tendoit la jambe, il ne pourroit se retirer. CHAPITRE CCLXIII. _De l'�quilibre des corps qui se tiennent en repos sans se mouvoir._ L'�quilibre du corps des hommes se divise en deux: savoir, en simple et en compos�; l'�quilibre simple est celui que l'homme fait lorsqu'il demeure debout sur ses pieds sans se remuer. Dans cette situation, si l'homme �tend les bras, et les �loigne de leur milieu de quelque mani�re que ce soit, ou s'il se baisse �tant sur ses pieds, le centre de sa pesanteur se trouve toujours perpendiculairement sur la ligne centrale du pied qui porte le corps; et s'il se soutient �galement sur ses deux pieds, pour lors l'estomac de l'homme aura son centre perpendiculaire sur le milieu de la ligne, qui mesure l'espace qui est entre les centres des pieds. Par l'�quilibre compos� on entend celui que fait un homme lorsqu'il a sur lui quelque fardeau, et qu'il le soutient par des mouvemens diff�rens, comme on le voit dans la figure suivante d'Hercule, qui �touffe Anth�e, en le serrant avec les bras contre sa poitrine, apr�s l'avoir �lev� de terre; il faut lui donner en contrepoids autant de charge de ses propres membres derri�re la ligne centrale de ses deux pieds, que la pesanteur d'Anth�e lui en donne au-devant de la m�me ligne centrale des pieds. [Illustration n� 21: CHAPITRE CCLXIII. _Pag. 212_] CHAPITRE CCLXIV. _De l'homme qui est debout sur ses pieds, et qui se soutient davantage sur l'un que sur l'autre._ Quand apr�s �tre demeur� long-temps en pied, un homme s'est lass� la jambe sur laquelle il s'appuie, il renvoie une partie de sa pesanteur sur l'autre jambe; mais cette sorte de position ne doit �tre pratiqu� qu'aux figures des vieillards, ou � celles des petits enfans, ou bien en ceux qui doivent paro�tre fatigu�s, car cela t�moigne une lassitude et une foiblesse de membres: c'est pourquoi il faut toujours qu'un jeune homme sain et robuste soit appuy� sur l'une des jambes, et s'il appuie quelque peu sur l'autre, il ne le fait que comme une disposition n�cessaire � son mouvement, sans laquelle il est impossible de se mouvoir, parce que le mouvement ne vient que de l'in�galit�. CHAPITRE CCLXV. _De la position des figures._ Les figures qui sont dans une attitude stable et ferme, doivent avoir dans leurs membres quelque vari�t� qui fasse un contraste; c'est-�-dire, que si un des bras se porte en devant, il faut que l'autre demeure ferme ou se retire en arri�re; et si la figure est appuy�e sur une jambe, que l'�paule qui porte sur cette jambe soit plus basse que l'autre �paule: cela s'observe par les personnes de jugement, qui ont toujours soin de donner le contrepoids naturel � la figure qui est sur ses pieds, de peur qu'elle ne vienne � tomber, parce que s'appuyant sur un des pieds, la jambe oppos�e qui est un peu pli�e, ne soutient point le corps, et demeure comme morte et sans action; de sorte qu'il faut n�cessairement que le poids d'en haut qui se rencontre sur cette jambe, envoie le centre de sa pesanteur sur la jointure de l'autre jambe qui porte le corps. CHAPITRE CCLXVI. _De l'�quilibre de l'homme qui s'arr�te sur ses pieds._ L'homme qui s'arr�te sur ses pieds, ou il s'appuie �galement sur ses deux pieds, ou bien il en charge un plus que l'autre; s'il s'appuie �galement sur ses deux pieds, il les charge du poids naturel de son corps et de quelqu'autre poids accidentel, ou bien il les charge seulement du seul poids naturel de son corps: s'il les charge du poids naturel et accidentel tout ensemble, alors les extr�mit�s oppos�es de ses membres ne sont pas �galement �loign�es de la jointure des pieds; mais s'il les charge simplement de son poids naturel, pour lors ces extr�mit�s des membres oppos�s seront �galement �loign�es de la jointure des pieds. Je ferai un Livre particulier de cette sorte d'�quilibre. CHAPITRE CCLXVII. _Du mouvement local plus ou moins v�te._ Le mouvement que fait l'homme ou quelqu'autre animal que ce soit qui va d'un lieu � un autre, sera d'autant plus ou moins v�te, que le centre de gravit� sera plus loin ou plus pr�s du centre du pied sur lequel il se soutient. CHAPITRE CCLXVIII. _Des animaux � quatre pieds, et comment ils marchent._ La partie la plus �lev�e du corps des animaux � quatre pieds, re�oit plus de changement dans ceux qui marchent que dans ceux qui demeurent arr�t�s, et cette vari�t� est encore plus ou moins grande, selon que ces animaux sont plus grands ou plus petits; cela vient de l'obliquit� des jambes qui touchent � terre, lesquelles haussent la figure de l'animal quand elles se redressent, et qu'elles appuient perpendiculairement sur la terre. [Illustration n� 22: CHAPITRE CCLXXVIII. _Pag. 216_] CHAPITRE CCLXIX. _Du rapport et de la correspondance qui est entre une moiti� de la grosseur du corps de l'homme et l'autre moiti�._ Jamais la moiti� de la grosseur et de la largeur de l'homme ne sera �gale � l'autre, si les membres r�ciproques ne se remuent conjointement par des mouvemens �gaux et semblables. CHAPITRE CCLXX. _Comment il se trouve trois mouvemens dans les sauts que l'homme fait en haut._ Quand l'homme s'�l�ve en sautant, le mouvement de la t�te est trois fois plus v�te que celui que fait le talon du pied qui s'�l�ve avant que le bout du pied parte de terre, et deux fois plus v�te que celui des flancs: cela arrive, parce qu'en m�me temps il se forme trois angles qui s'ouvrent et s'�tendent; le plus haut de ces angles est celui que fait le corps par devant aux hanches dans sa jointure avec les cuisses; le second, celui de la jointure des cuisses avec les jambes par derri�re, et le troisi�me, celui que forment les jambes par devant avec l'os du pied. CHAPITRE CCLXXI. _Qu'il est impossible de retenir tous les aspects et tous les changemens des membres qui sont en mouvement._ Il est impossible qu'aucune m�moire puisse conserver toutes les vues et les changemens de certains membres de quelque animal que ce soit. Je vais le d�montrer par l'exemple d'une main qui est en mouvement, et parce que toute quantit� continue est divisible � l'infini, le mouvement que fait l'oeil qui regarde la main, et se meut de A en B, peut �tre aussi divis� en une infinit� de parties: or, la main qui fait ce mouvement change � tous momens de situation et d'aspect, et on peut distinguer autant d'aspects diff�rens dans la main, que de parties dans le mouvement: donc il y a dans la main des aspects � l'infini; ce qu'il est impossible qu'aucune imagination puisse retenir. La m�me chose arrivera, si la main au lieu de baisser d'A en B, s'�l�ve de B en A. [Illustration] CHAPITRE CCLXXII. _De la bonne pratique qu'un Peintre doit t�cher d'acqu�rir._ Si vous voulez acqu�rir une grande pratique, je vous avertis que si les �tudes que vous ferez pour y parvenir ne sont fond�es sur la connoissance du naturel, vos ouvrages vous feront peu d'honneur, et ne vous apporteront point de profit; mais si vous suivez la route que je vous ai marqu�e, vous ferez quantit� de beaux ouvrages, qui vous gagneront l'estime des hommes, et beaucoup de bien. CHAPITRE CCLXXIII. _Du jugement qu'un Peintre fait de ses ouvrages, et de ceux des autres._ Quand les connoissances d'un Peintre ne vont pas au-del� de son ouvrage, c'est un mauvais signe pour le Peintre; et quand l'ouvrage surpasse les connoissances et les lumi�res de l'ouvrier, comme il arrive � ceux qui s'�tonnent d'avoir si bien r�ussi dans l'ex�cution de leur dessin, c'est encore pis; mais lorsque les lumi�res d'un Peintre vont au-del� de son ouvrage, et qu'il n'est pas content de lui-m�me, c'est une tr�s-bonne marque, et un jeune Peintre qui a ce rare talent d'esprit, deviendra sans doute un excellent ouvrier: il est vrai qu'il fera peu d'ouvrages, mais ils seront excellens, ils donneront de l'admiration, et, comme on dit, ils attireront. CHAPITRE CCLXXIV. _Comment un Peintre doit examiner lui-m�me son propre ouvrage, et en porter son jugement._ Il est certain qu'on remarque mieux les fautes d'autrui que les siennes propres; c'est pourquoi un Peintre doit commencer par se rendre habile dans la perspective, puis acqu�rir une connoissance parfaite des mesures du corps humain: il doit �tre encore bon architecte, pour le moins en ce qui concerne la r�gularit� ext�rieure d'un �difice et de toutes ses parties. Pour ce qui est des choses dont il n'a pas la pratique, il ne faut point qu'il n�glige d'aller voir et dessiner d'apr�s le naturel, et qu'il ait soin en travaillant d'avoir toujours aupr�s de lui un miroir plat, et de consid�rer souvent son ouvrage dans ce miroir, qui le lui repr�sentera tout � rebours, comme s'il �toit de la main d'un autre ma�tre; par ce moyen il pourra bien mieux remarquer ses fautes: encore il sera fort utile de quitter souvent son travail, et de s'aller divertir un peu, parce qu'au retour il aura l'esprit plus libre; au contraire, une application trop grande et trop assidue appesantit l'esprit, et lui fait faire de grosses fautes. CHAPITRE CCLXXV. _De l'usage qu'on doit faire d'un miroir en peignant._ Quand vous voulez voir si votre tableau pris tout ensemble ressemble aux choses que vous avez imit�es d'apr�s le naturel, prenez un miroir, et pr�sentez le � l'objet que vous avez imit�, puis comparez � votre peinture l'image qui paro�t dans le miroir, consid�rez-les attentivement, et comparez-les ensemble; vous voyez sur un miroir plat des repr�sentations qui paroissent avoir du relief: la peinture fait la m�me chose; la peinture n'est qu'une simple superficie, et le miroir de m�me; le miroir et la peinture font la m�me repr�sentation des choses environn�es d'ombres et de lumi�res, et l'une et l'autre paro�t fort �loign�e au-del� de sa superficie, du miroir et de la toile; et puisque vous reconnoissez que le miroir, par le moyen des traits et des ombres, vous fait paro�tre les choses comme si elles avoient du relief, il est certain que si vous savez employer selon les r�gles de l'art les couleurs dont les lumi�res et les ombres ont plus de force que celle d'un miroir, votre peinture paro�tra aussi une chose naturelle, repr�sent�e dans un grand miroir: votre Ma�tre (qui est ce miroir) vous montrera le clair et l'obscur de quelque objet que ce soit, et parmi vos couleurs il y en a de plus claires que les parties les plus �clair�es de votre mod�le, et pareillement il y en a d'autres plus obscures que les ombres les plus fortes du m�me mod�le: enfin, parce que les deux yeux voient davantage de l'objet, et l'environnent, lorsqu'il est moindre que la distance d'un oeil � l'autre, vous ferez vos peintures semblables aux repr�sentations de ce miroir, lorsqu'on le regarde avec un oeil seulement. CHAPITRE CCLXXVI. _Quelle peinture est la plus parfaite._ La plus excellente mani�re de peindre est celle qui imite mieux, et qui rend le tableau plus semblable � l'objet naturel qu'on repr�sente: cette comparaison du tableau avec les objets naturels, fait souvent honte � certains Peintres qui semblent vouloir r�former les ouvrages de la nature, comme font ceux qui repr�sentent un enfant d'un an, dont la t�te n'est qu'un cinqui�me de sa hauteur, et eux ils la font d'une huiti�me partie, et la largeur des �paules qui est �gale � la longueur de la t�te, ils la font deux fois plus grande, r�duisant ainsi la proportion d'un petit enfant d'un an � celle d'un homme qui en a trente. Ces ignorans ont tant de fois pratiqu� et vu pratiquer ces fautes, qu'ils se sont fait une habitude de les faire eux-m�mes, et cette habitude s'est tellement fortifi�e, qu'ils se persuadent que la nature, ou ceux qui l'imitent, se trompent en suivant un autre chemin. CHAPITRE CCLXXVII. _Quel doit �tre le premier objet et la principale intention d'un Peintre._ La premi�re intention du Peintre, est de faire que sur la superficie plate de son tableau, il paroisse un corps relev� et d�tach� de son fond; et celui qui en ce point surpasse les autres, m�rite d'�tre estim� plus habile qu'eux dans sa profession. Or, cette perfection de l'art vient de la dispensation juste et naturelle des lumi�res et des ombres; ce qu'on appelle le clair et l'obscur: de sorte que si un Peintre �pargne les ombres o� elles sont n�cessaires, il se fait tort � lui-m�me, et rend son ouvrage m�prisable aux connoisseurs, pour s'acqu�rir une fausse estime du vulgaire et des ignorans, qui ne consid�rent dans un tableau que l'�clat et le fard du coloris, sans prendre garde au relief. CHAPITRE CCLXVIII. _Quel est le plus important dans la peinture, de savoir donner les ombres � propos, ou de savoir dessiner correctement._ Dans la peinture, il est bien plus difficile de donner les ombres � une figure, et il faut pour cela bien plus d'�tude et de r�flexions que pour en dessiner les contours. La preuve de ce que je dis est claire, car on peut dessiner toutes sortes de traits au travers d'un verre plat plac� entre l'oeil et la chose qu'on veut imiter; mais cette invention est inutile � l'�gard des ombres, � cause de leur diminution et de l'insensibilit� de leurs termes, qui le plus souvent sont m�l�s entre eux, comme je l'ai d�montr� dans mon livre des Ombres et des Lumi�res. CHAPITRE CCLXXIX. _Comme on doit donner le jour aux figures._ Le jour doit �tre donn� d'une mani�re convenable au lieu naturel o� vous feignez qu'est votre figure, c'est-�-dire, que si le soleil l'�claire, il lui faut donner des ombres fortes et des lumi�res tr�s-�tendues, et que l'ombre de tous les corps d'alentour soit marqu�e sur le terrein; mais si la figure est dans un air sombre, mettez peu de diff�rence entre la partie qui est �clair�e et celle qui est dans l'ombre, et qu'il n'y ait aucune ombre aux pieds de la figure. Si la figure est dans un logis, les lumi�res et les ombres seront fort tranch�es, et la projection de son ombre sera marqu�e sur le plan; mais si vous feignez que la fen�tre ait un chassis, et que les murailles soient blanches, il faudra mettre peu de diff�rence entre les ombres et les lumi�res, et si elle prend sa lumi�re du feu, faites les lumi�res rouge�tres et vives, et les ombres fort obscures, et la projection des ombres contre les murs et sur le pav� fort termin�e, et que les ombres croissent � proportion qu'elles s'�loignent du corps. Et si un c�t� de la figure �toit �clair� de l'air et l'autre c�t� du feu, faites le c�t� de l'air plus clair, et celui du feu tirant sur le rouge presque de couleur de feu: faites, en g�n�ral, que les figures que vous peignez soient �clair�es d'un grand jour qui vienne d'en haut, principalement lorsque vous ferez quelque portrait; parce que les personnes que vous voyez dans les rues re�oivent toutes leur jour d'en haut; et sachez qu'il n'y a point d'homme dont vous connoissiez si bien les traits et le visage, que vous n'eussiez peine � le reconno�tre si on lui donnoit la lumi�re par-dessous. CHAPITRE CCLXXX. _En quel lieu doit �tre plac� celui qui regarde une peinture._ Supposons que A B soient le tableau, et que D soit le c�t� d'o� lui vient le jour: je dis que celui qui se mettra entre C et E verra tr�s-mal le tableau, principalement s'il est peint � l'huile, ou qu'on lui ait donn� une couche de vernis, parce qu'il sera lustr�, et aura presque l'effet d'un miroir: c'est pourquoi plus on sera pr�s du rayon C, moins on le verra, parce que c'est l� que portent les reflets du jour qui est envoy� de la fen�tre sur le tableau; mais entre E et D, on pourra voir commod�ment le tableau, et on le verra mieux � mesure qu'on approchera plus pr�s du point D, parce que ce lieu est moins sujet � la r�verb�ration des rayons r�fl�chis. [Illustration] CHAPITRE CCLXXXI. _A quelle hauteur on doit mettre le point de vue._ Le point de vue doit �tre mis au niveau de l'oeil d'un homme de taille ordinaire, sur la ligne qui fait confiner le plan avec l'horizon; la hauteur de cette ligne doit �tre �gale � celle de l'extr�mit� du plan joignant l'horizon, sans n�anmoins y comprendre les montagnes, que le Peintre fera aussi hautes que le demande son sujet, ou qu'il le jugera � propos. CHAPITRE CCLXXXII. _Qu'il est contre la raison de faire les petites figures trop finies._ Les choses ne paroissent plus petites qu'elles le sont en effet, que parce qu'elles sont �loign�es de l'oeil, et qu'il y a entre elles et l'oeil beaucoup d'air qui affoiblit la lumi�re, et, par une suite naturelle, emp�che qu'on ne distingue exactement les petites parties qu'elles ont. Il faut donc qu'un Peintre ne touche que l�g�rement ces figures, comme s'il vouloit seulement en esquisser l'id�e; s'il fait autrement, ce sera contre l'exemple de la Nature, qui doit �tre son guide: car, comme je viens de dire, une chose ne paro�t petite qu'� cause de la grande distance qui est entre l'oeil et elle; la grande distance suppose beaucoup d'air entre deux, et la grande quantit� d'air cause une grande diminution de lumi�re, qui �te � l'oeil le moyen de distinguer les plus petites parties de son objet. CHAPITRE CCLXXXIII. _Quel champ un Peintre doit donner � ses figures._ Puisque nous voyons par exp�rience que tous les corps sont entour�s d'ombres et de lumi�res, je conseille au Peintre de faire en sorte que la partie �clair�e de sa figure se rencontre sur un fond obscur, et que la partie qui est dans l'ombre soit sur un champ clair: l'observation de cette r�gle contribuera fort au relief de ses figures. CHAPITRE CCLXXXIV. _Des ombres et des jours, et en particulier des ombres des carnations._ Pour distribuer les jours et les ombres avec jugement, consid�rez bien en quel endroit la lumi�re est plus claire et plus �clatante, et en quel endroit l'ombre est plus forte et plus obscure. Pour ce qui est des carnations des jeunes gens, je vous avertis sur-tout de ne leur point donner d'ombres qui soient tranch�es, parce que leur chair qui n'est point ferme et dure, mais molle et tendre, a quelque chose de transparent, ce qu'on reconno�t en regardant sa main, apr�s l'avoir mise entre le soleil et l'oeil; car elle paro�t rouge�tre, avec une certaine transparence lumineuse; et si vous voulez savoir quelle sorte d'ombre convient � la carnation que vous peignez, faites-en l'�tude et l'exp�rience sur l'ombre m�me de votre doigt; et selon que vous la voudrez plus claire ou plus obscure, tenez le doigt plus pr�s ou plus loin de votre tableau, et l'imitez. CHAPITRE CCLXXXV. _De la repr�sentation d'un lieu champ�tre._ Les arbres et toutes les herbes qui sont plus charg�s de petites branches, doivent avoir moins de tendresse en leurs ombres, et les autres dont les feuilles seront plus grandes et plus larges, causeront de plus grandes ombres. CHAPITRE CCLXXXVI. _Comment on doit composer un animal feint et chim�rique._ Vous savez qu'on ne peut repr�senter un animal s'il n'a des membres, et il faut que chacun de ses membres ressemble en quelque chose � ceux d'un v�ritable animal; si vous voulez donc faire qu'un animal feint paroisse �tre un animal v�ritable et naturel, par exemple, un serpent, prenez pour la t�te celle d'un m�tin, ou de quelque autre chien, et donnez-lui les yeux d'un chat, les oreilles d'un porc-�pic, le museau d'un l�vrier, les sourcils d'un lion, les c�t�s des tempes de quelque vieux coq, et le col d'une tortue d'eau. CHAPITRE CCLXXXVII. _Ce qu'il faut faire pour que les visages aient du relief et de la grace._ Dans les rues qui sont tourn�es au couchant, le soleil �tant � son midi, et les murailles des maisons �lev�es � telle hauteur, que celles qui sont tourn�es au soleil ne r�fl�chissent point la lumi�re sur les parties des corps, lesquelles sont dans l'ombre, si l'air n'est point trop �clair�, on trouve la disposition la plus avantageuse pour donner du relief et de la grace aux figures: car on verra les deux c�t�s des visages participer � l'ombre des murs qui leur sont oppos�s; et ainsi les carnes du nez et toute la face tourn�e � l'occident sera �clair�e, et l'oeil qu'on suppose au bout de la rue plac� au milieu, verra ce visage bien �clair� dans toutes les parties qu'il a devant lui, et les c�t�s vers les murs couverts d'ombres; et ce qui donnera de la grace, c'est que ces ombres ne sont point tranch�es d'une mani�re dure et s�che, mais noy�es insensiblement. La raison de ceci est que la lumi�re r�pandue par-tout dans l'air, vient frapper le pav� de la rue, d'o� �tant r�fl�chie vers les parties de la t�te qui sont dans l'ombre, elle les teint l�g�rement de quelque lumi�re, et la grande lumi�re qui est r�pandue sur le bord des to�ts et au bout de la rue, �claire presque jusqu'� la naissance des ombres qui sont sous la face, et elle diminue les ombres par degr�s, et augmente peu � peu la clart�, jusqu'� ce qu'elle soit arriv�e sur le menton avec une ombre insensible de tous c�t�s. Par exemple, si cette lumi�re �toit A E, elle voit la ligne F E de la lumi�re qui �claire jusques sous le nez, et la ligne C F �claire seulement jusques sous la l�vre, et la ligne A H s'�tend sous le menton, et en ce lieu-l� le nez est fort �clair�, parce qu'il est vu de toute la lumi�re A B C D E. [Illustration n� 23: CHAPITRE CCLXXXVII. _Pag. 232_] [Illustration] CHAPITRE CCLXXXVIII. _Ce qu'il faut faire pour d�tacher et faire sortir les figures hors de leur champ._ Vous devez placer votre figure dans un champ clair si elle est obscure; et si elle est claire, mettez-la dans un champ obscur; et si elle est claire et obscure, faites rencontrer la partie obscure sur un champ clair, et la partie claire sur un champ obscur. CHAPITRE CCLXXXIX. _De la diff�rence des lumi�res selon leur diverse position._ Une petite lumi�re fait de grandes ombres, et termin�es sur les corps du c�t� qu'ils ne sont pas �clair�s; au contraire, les grandes lumi�res font sur les m�mes corps du c�t� qu'ils ne sont pas �clair�s, des ombres petites et confuses dans leurs termes. Quand une petite lumi�re, mais forte, sera enferm�e et comprise dans une plus grande et moins forte, comme le soleil dans l'air, la plus foible ne tiendra lieu que d'une ombre sur les corps qui en seront �clair�s. CHAPITRE CCXC. _Qu'il faut garder les proportions jusques dans les moindres parties d'un tableau._ C'est une faute ridicule, et dans laquelle cependant plusieurs Peintres ont coutume de tomber, de donner avec si peu de jugement les proportions aux parties de leurs tableaux, qu'un b�timent, par exemple, ou une ville a des parties si basses, qu'elles n'arrivent pas seulement � la hauteur du genou d'un homme, quoique selon la disposition du plan elles soient plus pr�s de l'oeil de celui qui regarde le tableau, qu'elles ne le sont de celui qui paro�t vouloir y entrer. Nous avons vu quelquefois dans des tableaux des portiques peints, tous charg�s de figures d'hommes, et les colonnes qui soutenoient ces portiques �toient empoign�es par un de ces hommes, qui s'appuyoit dessus comme sur un b�ton: il se fait beaucoup d'autres fautes semblables qu'il faut �viter avec soin. CHAPITRE CCXCI. _Des termes ou des extr�mit�s des corps, qu'on appelle profilures ou contours._ Les contours des corps sont si peu sensibles � l'oeil, que pour la moindre distance qu'il y a entre l'oeil et son objet, il ne sauroit discerner le visage de son ami ou de son parent, qu'il ne reconno�t gu�re qu'� leur habit et � leur contenance: de sorte que par la connoissance du Tout, il vient � celle de la partie. CHAPITRE CCXCII. _Effet de l'�loignement des objets par rapport au dessin._ Les premi�res choses qui disparoissent en s'�loignant dans les corps qui sont dans l'ombre, et m�me dans ceux qui sont �clair�s, ce sont les contours; et apr�s, en un peu plus de distance, on cesse de voir les termes qui divisent les parties des corps contigus, quand ces corps sont dans l'ombre: ensuite la grosseur des jambes par le pied, puis les moindres parties se perdent peu � peu, tellement qu'� la fin, par un grand �loignement, l'objet ne paro�t plus que comme une masse confuse, o� l'on ne distingue point de parties. [Illustration n� 24: CHAPITRE CCXCIV. _Pag. 237_] CHAPITRE CCXCIII. _Effet de l'�loignement des objets, par rapport au coloris._ La premi�re chose que l'�loignement fait disparo�tre dans les couleurs, c'est le lustre qui est leur plus subtile partie, et comme l'�clat dans les lumi�res; la seconde chose qui disparo�t, ou plut�t qui diminue et qui s'affoiblit en s'�loignant davantage, est la lumi�re, parce qu'elle est moindre en quantit� que n'est l'ombre; la troisi�me sont les ombres principales; et enfin dans un grand �loignement il ne reste plus qu'une obscurit� m�diocre, mais g�n�rale et confuse. CHAPITRE CCXCIV. _De la nature des contours des corps sur les autres corps._ Quand les corps dont la superficie est convexe, vont terminer sur d'autres corps de m�me couleur, le terme ou le contour du corps convexe paro�tra plus obscur que le corps qui lui sert de champ, et qui confine avec le corps convexe. A l'�gard des superficies plates, leur terme paro�tra fort obscur sur un fond blanc; et sur un fond obscur, il paro�tra plus clair qu'en aucune autre de ses parties, quoique la lumi�re qui �claire les autres parties ait par-tout la m�me force. CHAPITRE CCXCV. _Des figures qui marchent contre le vent._ Un homme qui marche contre le vent, quand il est violent, ne garde pas la ligne qui passe par le centre de sa pesanteur avec l'�quilibre parfait qui se fait par la distribution �gale du poids du corps autour du pied qui le soutient. CHAPITRE CCXCVI. _De la fen�tre par o� vient le jour sur la figure._ Il faut que la fen�tre d'un Peintre, au jour de laquelle il peint, ait des chassis de papier huil�, sans menaux et sans traverses de bois au chassis; ils ne feroient qu'�ter une partie du jour, et faire des ombres qui nuiroient � l'ex�cution de l'ouvrage. [Illustration n� 25: CHAPITRE CCXCV. _Pag. 238_] CHAPITRE CCXCVII. _Pourquoi apr�s avoir mesur� un visage et l'avoir peint de la grandeur m�me de sa mesure, il paro�t plus grand que le naturel._ A B est la largeur de l'espace o� est la t�te, laquelle est mise � la distance marqu�e C F, o� sont les joues, et il faudroit qu'elle demeur�t en arri�re de toute la longueur A C, et pour lors les tempes seroient port�es � la distance O R des lignes A F B F, de sorte qu'elles seroient plus �troites que le naturel, de la diff�rence C O et R D d'o� il s'ensuit que les deux lignes C F et D F pour �tre plus courtes, doivent aller rencontrer le plan, sur lequel toute la hauteur est dessin�e, qui sont les lignes A F et B F o� est la v�ritable grandeur; de sorte que, comme j'ai dit, il s'y trouve de diff�rence, les lignes C O et R D. [Illustration] CHAPITRE CCXCVIII. _Si la superficie de tout corps opaque participe � la couleur de son objet._ Vous devez savoir que si on met un objet blanc entre deux murailles, dont l'une soit blanche et l'autre noire, il se trouvera entre la partie de cet objet qui est dans l'ombre et celle qui est �clair�e, une proportion pareille � celle qui est entre les murailles; et si l'objet est de couleur d'azur, il aura le m�me effet: c'est pourquoi si vous avez � le peindre, vous ferez ce qui suit. Pour donner les ombres � l'objet qui est de couleur d'azur, prenez du noir semblable au noir ou � l'ombre de la muraille que vous supposez devoir r�fl�chir sur l'objet que vous voulez peindre; et pour agir par des principes s�rs, observez ce que je vais marquer. Lorsque vous peignez une muraille, de quelque couleur que ce soit, prenez une petite cuiller, qui soit plus ou moins grande, selon que sera l'ouvrage que vous devez peindre, et qu'elle ait les bords d'�gale hauteur, afin que vous mesuriez plus justement la quantit� des couleurs que vous emploierez au m�lange de vos teintes: par exemple, si vous avez donn� aux premi�res ombres de la muraille trois degr�s d'obscurit� et un de clart�, c'est-�-dire, trois cuiller�es pleines, et que ces trois cuiller�es fussent d'un noir simple, avec une cuiller�e de blanc, vous aurez sans doute fait un m�lange d'une qualit� certaine et pr�cise. Apr�s avoir donc fait une muraille blanche et une obscure, si vous avez � placer entre elles un objet de couleur d'azur, auquel vous voulez donner la vraie teinte d'ombre et de clair qui convient � cet azur, mettez d'un c�t� la couleur d'azur que vous voulez qui reste sans ombre, et placez le noir aupr�s, puis prenez trois cuiller�es de noir, et les m�lez avec une cuiller�e d'azur clair, et leur donnez l'ombre la plus forte: cela fait, voyez si la forme de l'objet est ronde, ou en croissant, ou carr�e, ou autrement; et si elle est ronde, tirez des lignes des extr�mit�s des murailles obscures au centre de cet objet rond, et mettez les ombres les plus fortes entre des angles �gaux, au lieu o� ces lignes se coupent sur la superficie de cet objet, puis �claircissez peu � peu les ombres, en vous �loignant du point o� elles sont fortes, par exemple, en N O, et diminuez autant de l'ombre que cet endroit participe � la lumi�re de la muraille sup�rieure A D, et vous m�lerez cette couleur dans la premi�re ombre de A B avec les m�mes proportions. [Illustration] CHAPITRE CCXCIX. _Du mouvement des animaux et de leur course._ La figure qui paro�tra courir plus v�te, sera celle qui tombera davantage sur le devant. Le corps qui se meut soi-m�me, aura d'autant plus de v�tesse, que le centre de sa pesanteur sera �loign� du centre de la partie qui le soutient: ceci regarde principalement le mouvement des oiseaux, lesquels sans aucun battement d'ailes, ou sans �tre aid�s du vent, se remuent d'eux-m�mes; et cela arrive quand le centre de leur pesanteur est hors du centre de leur soutien, c'est-�-dire, hors du milieu de l'�tendue de leurs ailes; parce que si le milieu des deux ailes est plus en arri�re que le milieu ou le centre de la pesanteur de tout l'oiseau, alors cet oiseau portera son mouvement en haut et en bas, mais d'autant plus ou moins en haut qu'en bas, que le centre de sa pesanteur sera plus loin ou plus pr�s du milieu des ailes; c'est-� dire, que le centre de la pesanteur �tant �loign� du milieu des ailes, il fait que la descente de l'oiseau est fort oblique; et si ce centre est pr�s des ailes, la descente de l'oiseau aura peu d'obliquit�. CHAPITRE CCC. _Faire qu'une figure paroisse avoir quarante brasses de haut dans un espace de vingt brasses, et qu'elle ait ses membres proportionn�s, et se tienne droite._ En ceci, et en toute autre rencontre, un Peintre ne se doit point mettre en peine sur quelle sorte de superficie il travaille, principalement si son ouvrage doit �tre vu d'une fen�tre particuli�re, ou de quelqu'autre endroit d�termin�; parce que l'oeil ne doit point avoir �gard � l'�galit� ou � la courbure de la muraille, mais seulement � ce qui doit �tre repr�sent� au-del� de cette muraille, en divers lieux du paysage feint; n�anmoins une superficie courbe r�guli�re, telle que F R G, est plus commode, parce qu'elle n'a point d'angles. [Illustration] [Illustration n� 26: CHAPITRE CCCI. _Pag. 245_] CHAPITRE CCCI. _Dessiner sur un mur de douze brasses une figure qui paroisse avoir vingt-quatre brasses de hauteur._ Si vous voulez peindre une figure ou quelqu'autre chose qui paroisse avoir vingt-quatre brasses de hauteur, faites-le ainsi. Dessinez premi�rement la muraille M N, avec la moiti� de la figure que vous voulez faire, puis vous ach�verez dans la vo�te M R l'autre moiti� de cette m�me figure que vous avez commenc�e; mais auparavant tracez en quelque endroit une muraille de la m�me forme qu'est le mur avec la vo�te o� vous devez peindre votre figure; puis derri�re cette muraille feinte, dessinez votre figure en profil de telle grandeur qu'il vous plaira, conduisez toutes vos lignes au point F, et repr�sentez-les sur le mur v�ritable comme elles sont; et comme elles se coupent sur le mur feint M N, que vous avez dessin�, ainsi vous trouverez toutes les hauteurs et les saillies de la figure, et les largeurs ou grosseurs qui se trouvent dans le mur feint M N, que vous copierez sur le mur v�ritable, parce que, par la retraite ou fuite du mur, la figure diminue d'elle-m�me. Vous donnerez � la partie de la figure qui doit entrer dans le courbe de la vo�te, la m�me diminution que si elle �toit droite: pour le faire s�rement, vous tracerez cette diminution sur quelque plan bien uni pour y mettre la figure que vous tirerez du mur N R, avec ses v�ritables grosseurs, que vous raccourcirez sur un mur de relief. Cette m�thode est tr�s-bonne et tr�s-s�re. CHAPITRE CCCII. _Avertissement touchant les lumi�res et les ombres._ Prenez garde qu'o� les ombres finissent il paro�t toujours une demi-ombre, c'est-�-dire, un m�lange de lumi�re et d'ombre; et que l'ombre d�riv�e s'unit d'autant mieux avec la lumi�re, que cette ombre est plus �loign�e du corps qui est dans l'ombre; mais la couleur de cette ombre ne sera jamais simple. Je l'ai prouv� ailleurs par ce principe, que la superficie de tout corps participe � la couleur de son objet, quand m�me ce seroit la superficie d'un corps transparent, comme l'air, l'eau, et d'autres semblables; parce que l'air re�oit sa lumi�re du soleil, et que les t�n�bres ne sont autre chose que la privation de la lumi�re du soleil. Et parce que l'air n'a de lui-m�me aucune couleur, non plus que l'eau et tous les corps parfaitement transparent, comme il est r�pandu par-tout, et qu'il environne tous les objets visibles, il prend autant de teintes diff�rentes qu'il y a de couleurs entre les objets et l'oeil qui les voit. Mais les vapeurs qui se m�lent avec l'air dans sa basse r�gion pr�s de la terre le rendent �pais, et font que les rayons du soleil venant � battre dessus, lui impriment leur lumi�re, qui, ne pouvant passer librement au travers d'un air �pais, est r�fl�chie de tous c�t�s: au contraire, l'air qui est au-dessus de la basse r�gion paro�t de couleur d'azur; parce que l'ombre du ciel qui n'est pas un corps lumineux, et quelques parties de lumi�re que l'air, quelque subtil qu'il soit, retiennent, forment cette couleur, qui est la couleur naturelle de l'air; de-l� vient qu'il a plus ou moins d'obscurit�, selon qu'il est plus ou moins �pais et m�l� de vapeurs. CHAPITRE CCCIII. _Comment il faut r�pandre sur les corps la lumi�re universelle de l'air._ Dans les compositions o� il entre plusieurs figures d'hommes ou d'animaux, faites que les parties du corps soient plus obscures, � proportion qu'elles sont plus basses ou qu'elles sont plus enfonc�es dans le milieu d'un groupe, quoique d'elles-m�mes elles soient de m�me couleur que les autres parties plus hautes ou moins enfonc�es dans les groupes. Cela est n�cessaire, parce que le ciel qui est la source de la lumi�re de tous les corps, �clairant sur les lieux bas et sur les espaces resserr�s entre ces figures d'animaux, la portion d'arc de son h�misph�re dont il les voit, est d'une moindre �tendue que celle dont il �claire les parties sup�rieures et plus �lev�es des m�mes espaces: ce qui se prouve par la figure suivante, o� A B C D repr�sentent l'arc du ciel, qui donne le jour universel � tous les corps inf�rieurs; M N sont les corps qui bornent l'espace S T R H contenu entre eux; on voit manifestement dans cet espace que le lieu F, lequel �tant �clair� de la portion C D, est �clair� d'une plus petite portion de l'arc du ciel, que n'est le lieu E, lequel est vu de toute la portion d'arc A B, laquelle est plus grande que l'arc D C, si bien qu'il sera plus �clair� en E qu'en F. [Illustration] CHAPITRE CCCIV. _De la convenance du fond des tableaux avec les figures peintes dessus, et premi�rement des superficies plates d'une couleur uniforme._ Les fonds de toute superficie plate, dont les couleurs et les lumi�res sont uniformes, ne paroissent point d�tach�s d'avec leur superficie, �tant de m�me couleur et ayant la m�me lumi�re: donc, tout au contraire, ils paro�tront d�tach�s, s'ils sont diff�rens en couleur et en lumi�re. CHAPITRE CCCV. _De la diff�rence qu'il y a par rapport � la peinture entre une superficie et un corps solide._ Les corps r�guliers sont de deux sortes; les uns ont une superficie curviligne, ovale, ou sph�rique; les autres ont plusieurs c�t�s ou plusieurs faces qui sont autant de superficies plates s�par�es par des angles, et ces corps-ci sont r�guliers ou irr�guliers. Les corps sph�riques ou de forme ovale, paro�tront toujours de relief et d�tach�s de leur fond, quoique le corps soit de la couleur de son fond: la m�me chose arrivera aux corps qui ont plusieurs c�t�s; cela vient de ce qu'ils sont naturellement dispos�s � produire des ombres, lesquelles occupent toujours un de leurs c�t�s; ce qui ne peut arriver � une simple superficie plate. CHAPITRE CCCVI. _En peinture, la premi�re chose qui commence � disparo�tre, est la partie du corps laquelle a moins de densit�._ Entre les parties du corps qui s'�loignent de l'oeil, celle qui est plus petite disparo�t la premi�re, d'o� il s'ensuit que la partie la plus grande sera aussi la derni�re � disparo�tre; c'est pourquoi il ne faut point qu'un Peintre termine beaucoup les petits membres des choses qui sont fort �loign�es; mais qu'il se comporte en ces occasions suivant les r�gles que j'ai donn�es. Combien voit-on de Peintres, lesquels en peignant des villes et d'autres choses �loign�es de l'oeil, font des dessins d'�difices aussi finis que si ces objets �toient vus de fort pr�s, ce qui est contre l'exp�rience; car il n'y a point de vue assez forte et assez p�n�trante, pour discerner dans un grand �loignement les termes et les derni�res extr�mit�s des corps; c'est la raison pourquoi un Peintre ne doit toucher que l�g�rement les contours des corps fort �loign�s de la vue, sans autre chose que les termes ou finimens de leurs propres superficies, sans les faire durs ni tranch�s: il doit aussi prendre garde, en voulant peindre une distance fort �loign�e, de n'y pas employer un azur si vif, que par un effet tout contraire, les objets paroissent peu �loign�s et la distance fort petite: il faut encore observer dans la repr�sentation des b�timens d'une ville dans un lointain, de n'y faire point paro�tre les angles, parce qu'il est impossible de les voir de loin. CHAPITRE CCCVII. _D'o� vient qu'une m�me campagne paro�t quelquefois plus grande ou plus petite qu'elle n'est en effet._ Les campagnes paroissent quelquefois plus grandes ou plus petites qu'elles ne sont; cela vient de ce que l'air qui est entre l'oeil et l'horizon, est plus grossier ou plus subtil qu'il ne l'est ordinairement. Entre les horizons �galement �loign�s de l'oeil, celui qui sera vu au travers d'un air plus grossier paro�tra plus �loign�, et celui qui sera vu au travers d'un air plus pur, paro�tra plus proche. Les choses d'une grandeur in�gale �tant vues dans des distances �gales, paro�tront �gales, si l'air qui est entre l'oeil et ces grandeurs in�gales, a la m�me disproportion d'�paisseur que ces grandeurs ont entre elles; c'est-�-dire, si l'air le plus grossier se trouve entre la moindre grandeur; et cela se prouve par le moyen de la perspective des couleurs, laquelle fait qu'une montagne paroissant petite � la mesurer au compas, semble n�anmoins plus grande qu'une colline qui est pr�s de l'oeil; de m�me qu'on voit qu'un doigt pr�s de l'oeil couvre une grande montagne, laquelle en est �loign�e. CHAPITRE CCCVIII. _Diverses observations sur la Perspective et sur les couleurs._ Entre les choses d'une �gale obscurit�, de m�me grandeur, de m�me figure, et qui sont �galement �loign�es de l'oeil, celle-l� paro�tra plus petite qui sera vue dans un lieu plus �clair� ou plus blanc: cela se remarque lorsqu'on regarde un arbre sec et sans feuilles, qui est �clair� du soleil du c�t� oppos� � celui qui regarde; car alors les branches de l'arbre oppos�es au soleil, paroissent si diminu�es, qu'elles sont presque invisibles. La m�me chose arrivera si l'on tient une pique droite entre l'oeil et le soleil. Les corps parall�les plant�s droits �tant vus dans un brouillard, doivent paro�tre plus gros par le haut que par le bas: cela vient de ce que le brouillard ou l'air �pais �tant p�n�tr� des rayons du soleil, paro�t d'autant plus blanc qu'il est plus bas; les figures qu'on voit de loin paroissent mal proportionn�es, parce que la partie qui est plus �clair�e envoie � l'oeil son image avec des rayons plus forts que la partie qui est obscure; et j'ai observ� une fois, en voyant une femme habill�e de noir, laquelle avoit sur la t�te un linge blanc, que la t�te lui paroissoit deux fois plus grosse que les �paules qui �toient v�tues de noir. CHAPITRE CCCIX. _Des villes et des autres choses qui sont vues dans un air �pais._ Les �difices des villes que l'oeil voit pendant un temps de brouillards, ou dans un air �paissi par des fum�es et d'autres vapeurs, seront toujours d'autant moins sensibles qu'ils seront moins �lev�s; et, au contraire, ils seront plus marqu�s et on les distinguera mieux, quand on les verra � une plus grande hauteur: on le prouve ainsi. L'air est d'autant plus �pais qu'il est plus bas, et d'autant plus �pur� et plus subtil qu'il est plus haut: cela est d�montr� par la figure suivante, o� nous disons que la tour A F est vue par l'oeil N dans un air �pais B F, lequel se divise en quatre degr�s d'autant plus �pais, qu'ils sont plus pr�s de terre. Moins il y a d'air entre l'oeil et son objet, moins la couleur de cet objet participe � la couleur du m�me air: donc il s'ensuit que plus il y aura d'air entre l'oeil et son objet, plus aussi le m�me objet participera � la couleur de cet air: cela se d�montre ainsi. Soit l'oeil N, vers lequel concourent les cinq diff�rentes esp�ces d'air des cinq parties de la tour A F, savoir, A B C D E. Je dis que si l'air �toit de m�me �paisseur, il y auroit la m�me proportion entre la couleur d'air qu'acquiert le pied de la tour, et la couleur d'air que la m�me tour acquiert � sa partie B, qu'il y a en longueur entre la ligne M F et la ligne B S; mais par la proposition pr�c�dente, qui suppose que l'air n'est point uniforme ni �galement �pais par-tout, mais qu'il est d'autant plus grossier qu'il est plus bas, il faut n�cessairement que la proportion des couleurs, dont l'air fait prendre sa teinte aux diverses �l�vations de la tour B C F, exc�de la proportion des lignes; parce que la ligne M F, outre qu'elle est plus longue que la ligne S B, elle passe encore par un air dont l'�paisseur est in�gale par degr�s uniformes. CHAPITRE CCCX. _Des rayons du soleil qui passent entre diff�rens nuages._ Les rayons du soleil passant au travers de quelque �chapp� de vide qui se rencontre entre les diverses �paisseurs des nues, illuminent tous les endroits par o� ils passent, et �clairent m�me les t�n�bres, et colorent de leur �clat tous les lieux obscurs qui sont derri�re eux, et les obscurit�s qui restent se d�couvrent entre les s�parations de ces rayons du soleil. CHAPITRE CCCXI. _Des choses que l'oeil voit confus�ment au-dessous de lui, m�l�es parmi un brouillard et dans un air �pais._ Quand l'air sera plus pr�s de l'eau, ou plus pr�s de la terre, il sera plus grossier: cela se prouve par cette proposition que j'ai examin�e ailleurs; savoir, qu'une chose plus pesante s'�l�ve moins qu'une chose plus l�g�re; d'o� il faut conclure par la r�gle des contraires, qu'une chose plus l�g�re s'�l�ve davantage qu'une chose plus pesante. [Illustration n� 27: CHAPITRE CCCIX. _Pag. 254_] [Illustration n� 28: CHAPITRE CCCXII. _Pag. 257_] CHAPITRE CCCXII. _Des b�timens vus au travers d'un air �pais._ La partie d'un b�timent qui se trouvera dans un air plus �pais et plus grossier, sera moins sensible et se verra moins qu'un autre qui ne sera point dans un air si �pais; au contraire, celle qui est dans un air pur frappera bien plus les yeux. Donc si on suppose que l'oeil N regarde la tour A D, il en verra les parties plus confus�ment � mesure qu'elles seront plus proches de la terre, et plus distinctement, � mesure qu'elles en seront plus �loign�es. CHAPITRE CCCXIII. _Des choses qui se voyent de loin._ Une chose obscure paro�tra d'autant plus claire, qu'elle sera plus loin de l'oeil; et par la raison des contraires, il s'ensuit qu'une chose obscure paro�tra aussi d'autant plus obscure, qu'elle sera plus proche de l'oeil; tellement que les parties inf�rieures de quelque corps que ce soit qui est dans un air �pais, paro�tront plus �loign�es que le sommet du m�me corps; et par cons�quent une montagne paro�tra plus loin de l'oeil par le bas que par sa cime, qui n�anmoins est r�ellement plus �loign�e. CHAPITRE CCCXIV. _De quelle sorte paro�t une ville dans un air �pais._ L'oeil qui voit de haut en bas une ville dans un air �pais, remarquera plus distinctement les sommets des b�timens qui paroissent plus obscurs et plus termin�s que les �tages d'en bas, lesquels se trouvent dans un champ blanch�tre et moins �pur�, parce qu'ils sont vus dans un air bas et grossier; ce qui arrive par les raisons que j'ai apport�es dans le Chapitre pr�c�dent. CHAPITRE CCCXV. _Des termes ou extr�mit�s inf�rieures des corps �loign�s._ Les termes ou les extr�mit�s inf�rieures des choses qui sont �loign�es, sont moins sensibles � l'oeil que leurs parties sup�rieures: cela se remarque aux montagnes, dont la cime a pour champ les c�t�s et la base de quelque autre montagne plus �loign�e. Dans les montagnes qui sont pr�s de l'oeil, on voit les parties d'en haut plus distinctes et plus termin�es que celles d'en bas, parce que le haut n'est point environn� de cet air �pais et grossier qui entoure les parties basses des m�mes montagnes, et qui emp�che qu'on ne les voie distinctement; et la m�me chose arrive � l'�gard des arbres et des b�timens, et de tous les autres corps qui sont fort �lev�s: de-l� vient que souvent si l'on voit de loin une tour fort �lev�e, elle paro�t plus grosse par le haut que par le bas, parce que l'air subtil qui l'environne vers le haut n'emp�che point qu'on n'apper�oive les contours, et qu'on ne distingue toutes les parties de cette tour qui sont effac�es en bas par l'air grossier, comme je l'ai montr� ailleurs, lorsque j'ai prouv� que l'air �pais r�pand sur les objets une couleur blanch�tre qui en rend les images moins vives; au lieu que l'air subtil en donnant aux objets sa couleur d'azur, n'affoiblit point l'impression qu'ils font sur nos yeux. On peut encore apporter un exemple sensible de ce que je dis. Les cr�neaux des forteresses ont leurs intervalles �galement espac�s du plein au vide, et n�anmoins il paro�t dans une distance m�diocre que l'espace vide est beaucoup plus grand que la largeur du cr�neau, et dans un plus grand �loignement, les cr�neaux paroissent extr�mement diminu�s: enfin l'�loignement est quelquefois si grand, que les cr�neaux disparoissent enti�rement, comme si les tours qu'on voit �toient termin�es en haut par un mur plein sans cr�neaux. CHAPITRE CCCXVI. _Des choses qu'on voit de loin._ Les termes ou les contours d'un objet seront d'autant moins distincts, qu'on les verra de plus loin. CHAPITRE CCCXVII. _De l'azur dont les paysages paroissent color�s dans le lointain._ De toutes les choses qui sont �loign�es de l'oeil, de quelque couleur qu'elles soient, celle qui aura plus d'obscurit� naturelle ou accidentelle, paro�tra d'une couleur d'azur plus forte et plus fonc�e. L'obscurit� naturelle vient de la couleur propre de chaque corps; l'obscurit� accidentelle vient de l'ombre des autres corps. CHAPITRE CCCXVIII. _Quelles sont les parties des corps qui commencent les premi�res � disparo�tre dans l'�loignement._ Les parties des corps lesquelles ont moins de quantit�, c'est-�-dire, qui sont plus minces et plus d�li�es, disparoissent les premi�res dans un grand �loignement. Cela arrive, parce que dans une �gale distance les images des petits objets viennent � l'oeil sous un angle plus aigu que celui que forment les grands objets, et la connoissance ou le discernement des corps �loign�s est d'autant plus foible, que leur quantit� est plus petite: il s'ensuit donc que quand la plus grande quantit� est si �loign�e, qu'elle vient � l'oeil sous un angle tellement aigu, qu'il a de la peine � la remarquer, une quantit� encore plus petite reste enti�rement imperceptible. CHAPITRE CCCXIX. _Pourquoi, � mesure que les objets s'�loignent de l'oeil, ils deviennent moins connoissables._ L'objet qui sera plus loin de l'oeil qu'un autre objet, sera aussi moins connoissable; cela vient de ce que les premi�res parties qui disparoissent sont les plus menues, et les plus grosses disparoissent ensuite, mais seulement dans une plus grande distance; ainsi en s'�loignant de plus en plus d'un objet, l'impression que font ces parties s'affoiblit tellement, qu'on ne les distingue plus, et que l'objet tout entier disparo�t. La couleur m�me s'efface aussi par la densit� de l'air qui se rencontre entre l'oeil et l'objet que l'on voit. CHAPITRE CCCXX. _Pourquoi les visages vus de loin paroissent obscurs._ Les choses visibles qui servent d'objet aux yeux, n'y font impression que par les images qu'elles envoient; ces images ne sont autre chose que les rayons de lumi�re: ces rayons partent du contour et de toutes les parties de l'objet, et passent au travers de l'air; ils aboutissent � la prunelle de l'oeil, et y forment un angle en se rencontrant; et comme il y a toujours des vapeurs dans l'air qui nous environne, il arrive que plusieurs rayons de lumi�re sont rompus et n'arrivent pas jusqu'� l'oeil: de sorte que dans une grande distance tant de rayons de lumi�re se perdent, que l'image de l'objet est confuse, et l'objet paro�t obscur. Ajoutez que les organes de la vue, qui sont les parties de l'oeil et le nerf optique, sont quelquefois mal dispos�es, et ne re�oivent point l'impression des rayons de lumi�re que l'objet envoie, ce qui la fait paro�tre obscure. CHAPITRE CCCXXI. _Dans les objets qui s'�loignent de l'oeil, quelles parties disparoissent les premi�res, et quelles autres parties disparoissent les derni�res._ Des parties d'un corps qui s'�loignent de l'oeil, celle qui est plus petite, plus mince, et d'une figure moins �tendue, cesse de faire impression, plut�t que celles qui sont plus grosses: cela se remarque dans les parties minces et aux membres d�li�s des animaux. Par exemple, on ne voit pas si-t�t le bois et les pieds d'un cerf, que son corps, qui �tant plus gros et ayant plus d'�tendue, se d�couvre de plus loin. Mais en g�n�ral la premi�re chose qui disparo�t dans un objet, ce sont les contours qui le terminent, et qui donnent � ses parties leur figure. CHAPITRE CCCXXII. _De la perspective lin�ale._ La perspective lin�ale consiste � marquer exactement par des traits et des lignes la figure et la grandeur des objets dans l'�loignement o� ils sont: en sorte que l'on connoisse combien la grandeur des objets diminue en apparence, et en quoi leur figure est alt�r�e ou chang�e dans les diff�rens degr�s de distance, jusqu'� ce que l'�loignement les fasse enti�rement disparo�tre. L'exp�rience m'a appris qu'en consid�rant diff�rens objets qui sont tous �gaux en grandeur, et plac�s dans diff�rens degr�s de distance dans un espace de vingt brasses, si ces objets sont �galement �loign�s les uns des autres, le premier paro�t une fois plus grand que le second, et le second paro�t une fois plus petit que le premier, et une fois plus grand que le troisi�me, et ainsi des autres � proportion, par o� l'on peut juger de la grandeur qu'ils paroissent avoir s'ils sont plac�s � des distances in�gales. Mais au-del� de vingt brasses, la figure �gale perdra 3/4 de sa grandeur, et au-del� de quarante brasses, elle en perdra 9/10, et 10/20 dans l'�tendue de soixante brasses; et la diminution se fera toujours avec la m�me proportion, � mesure que la distance sera plus grande. Pour appliquer maintenant ce que je viens de dire aux tableaux qu'on peint, il faut qu'un Peintre s'�loigne de son tableau deux fois autant qu'il est grand, car s'il ne s'en �loignoit qu'autant qu'il est grand, cela feroit une grande diff�rence des premi�res brasses aux secondes. CHAPITRE CCCXXIII. _Des corps qui sont vus dans un brouillard._ Les objets qui seront vus envelopp�s d'un brouillard, paro�tront beaucoup plus grands qu'ils ne sont en effet; cela vient de ce que la perspective du milieu, qui est entre l'oeil et son objet, ne garde pas la proportion de sa couleur avec la grandeur de cet objet, parce que la qualit� de ce brouillard est semblable � celle d'un air �pais qui se rencontre entre l'oeil et l'horizon dans un temps serein; et le corps qui est pr�s de l'oeil �tant vu au travers d'un brouillard, semble �tre �loign� jusqu'� l'horizon, vers lequel une grande tour ne paro�t pas si haute que le corps d'un homme qui seroit proche de l'oeil. CHAPITRE CCCXXIV. _De la hauteur des �difices qui sont vus dans un brouillard._ La partie d'un �difice qui n'est pas �loign�, laquelle est plus loin de terre, paro�t plus confuse � l'oeil: cela vient de ce qu'il y a plus d'air n�buleux entre l'oeil et le sommet de l'�difice, qu'entre l'oeil et les parties basses de l'�difice; et une tour dont les c�t�s sont parall�les, �tant vue de loin dans un brouillard, paro�tra d'autant plus �troite qu'elle approchera davantage du rez-de-chauss�e: cela arrive, parce que l'air n�buleux paro�t d'autant plus blanc et plus �pais qu'il est pr�s de terre, et parce qu'un objet de couleur obscure paro�t d'autant plus petit, qu'il est dans un champ plus blanc et plus clair. De sorte que l'air n�buleux �tant plus blanc vers la superficie de la terre qu'il ne l'est un peu plus haut, il est n�cessaire que cette tour, � cause de sa couleur obscure et confuse, paroisse plus �troite au pied qu'au sommet. [Illustration n� 29: CHAPITRE CCCXXVI. _Pag. 267_] CHAPITRE CCCXXV. _Des villes et autres semblables �difices qu'on voit sur le soir ou vers le matin, au travers d'un brouillard._ Dans les �difices qu'on voit de loin, vers le soir ou le matin durant un brouillard, ou au travers d'un air �pais, on ne remarque dans ces �difices que les c�t�s qui sont tourn�s vers l'horizon et �clair�s du soleil; et les parties de ces �difices qui ne sont point �clair�es par le soleil, restent presque de la couleur du brouillard. CHAPITRE CCCXXVI. _Pourquoi les objets plus �lev�s sont plus obscurs dans l'�loignement, que les autres qui sont plus bas, quoique le brouillard soit uniforme et �galement �pais._ Des corps qui se trouvent situ�s dans un brouillard ou en quelqu'autre air �pais, ou parmi quelque vapeur, ou dans la fum�e, ou dans l'�loignement, celui qui sera plus �lev� sera plus sensible � l'oeil; et entre les choses d'�gale hauteur, celle qui est dans un brouillard plus obscur paro�t plus obscure, comme il arrive � l'oeil H, lequel voyant A B C, trois tours d'�gale hauteur entre elles, il voit le sommet C de la premi�re tour depuis R, c'est-�-dire, dans un air �pais qui a deux degr�s de profondeur, et il voit ensuite le sommet de la seconde tour B dans le m�me brouillard, mais qui n'a qu'un degr� de profondeur dans ce qu'il en voit. Donc le sommet C paro�tra plus obscur que le sommet B. CHAPITRE CCCXXVII. _Des ombres qui se remarquent dans les corps qu'on voit de loin._ Le col dans l'homme, ou tel autre corps que l'on voudra, qui sera �lev� �-plomb, et aura sur soi quelque partie en saillie, paro�tra plus obscur que la face perpendiculaire de la partie qui est en saillie, et ce corps saillant sera plus �clair� lorsqu'il recevra une plus grande quantit� de lumi�re. Par exemple, dans la figure suivante le point A n'est �clair� d'aucun endroit du ciel F K, le point B est �clair� de la partie H K du ciel, le point C est �clair� de la partie G K, et le point D est �clair� de la partie F K toute enti�re; c'est-�-dire, de presque la moiti� du ciel qui �claire notre h�misph�re. Ainsi dans cette figure l'estomac tout seul est autant �clair� que le front, le nez et le menton ensemble. Il faut aussi remarquer que les visages re�oivent autant d'ombres diff�rentes, que les distances dans lesquelles on les voit sont diff�rentes; il n'y a que les ombres des orbites des yeux, et celles de quelques autres parties semblables, qui sont toujours fortes; et dans une grande distance le visage prend une demi-teinte d'ombre, et paro�t obscur, parce que les lumi�res et les ombres qu'il a, quoiqu'elles ne soient pas les m�mes dans ses diff�rentes parties, elles s'affoiblissent toutes dans un grand �loignement, et se confondent pour ne faire qu'une demi-teinte d'ombre: c'est aussi l'�loignement qui fait que les arbres et les autres corps paroissent plus obscurs qu'ils ne sont en effet; et cette obscurit� les rend plus marqu�s et plus sensibles � l'oeil, en leur donnant une couleur qui tire sur l'azur, sur-tout dans les parties ombr�es; car dans celles qui sont �clair�es, la vari�t� des couleurs se conserve davantage dans l'�loignement. [Illustration] CHAPITRE CCCXXVIII. _Pourquoi sur la fin du jour, les ombres des corps produites sur un mur blanc sont de couleur bleue._ Des ombres des corps qui viennent de la rougeur d'un soleil qui se couche et qui est proche de l'horizon, seront toujours azur�es; cela arrive ainsi, parce que la superficie de tout corps opaque tient de la couleur du corps qui l'�claire; donc la blancheur de la muraille �tant tout-�-fait priv�e de couleur, elle prend la teinte de son objet, c'est-�-dire, du soleil et du ciel; et parce que le soleil vers le soir est d'un coloris rouge�tre, que le ciel paro�t d'azur, et que les lieux o� se trouve l'ombre ne sont point vus du soleil, puisqu'aucun corps lumineux n'a jamais vu l'ombre du corps qu'il �claire, comme les endroits de cette muraille, o� le soleil ne donne point, sont vus du ciel, l'ombre d�riv�e du ciel, qui fera sa projection sur la muraille blanche, sera de couleur d'azur; et le champ de cette ombre �tant �clair� du soleil, dont la couleur est rouge�tre, ce champ participera � cette couleur rouge. [Illustration n� 30: CHAPITRE CCCXXVIII. _Pag. 270_] CHAPITRE CCCXXIX. _En quel endroit la fum�e paro�t plus claire._ La fum�e qui est entre le soleil et l'oeil qui la regarde, doit paro�tre plus claire et plus transparente que celle des autres endroits du tableau; il en est de m�me de la poussi�re, des brouillards, et des autres corps semblables, qui doivent vous paro�tre obscurs, si vous �tes entre le soleil et eux. CHAPITRE CCCXXX. _De la poussi�re._ La poussi�re qui s'est �lev�e par la course de quelque animal, plus elle monte, plus elle est claire; et au contraire, moins elle s'�l�ve, plus elle paro�t obscure, si elle se trouve entre le soleil et l'oeil. CHAPITRE CCCXXXI. _De la fum�e._ La fum�e est plus transparente et d'une couleur moins forte aux extr�mit�s de ses masses, qu'au centre et vers le milieu. La fum�e s'�l�ve avec d'autant plus de d�tours, et forme d'autant plus de tourbillons embarrass�s les uns dans les autres, que le vent qui l'agite est plus fort et plus violent. La fum�e prend autant de coloris diff�rens, qu'il y a de causes diff�rentes qui la produisent. La fum�e ne fait jamais d'ombres termin�es et tranch�es, et ses extr�mit�s s'affoiblissent peu � peu, et deviennent insensibles � mesure qu'elles s'�loignent de la cause qui l'a produite. Les objets qui sont derri�re la fum�e sont d'autant moins sensibles, que la fum�e est plus �paisse. La fum�e est plus blanche et plus �paisse quand elle est pr�s de son principe, et elle paro�t bleu�tre et azur�e quand elle en est �loign�e: le feu paro�tra d'autant plus obscur, qu'il se trouvera plus de fum�e entre l'oeil et lui. Dans les lieux o� la fum�e est plus �loign�e, les corps paroissent moins offusqu�s; elle fait que le paysage est tout confus, comme durant un brouillard, parmi lequel on voit en divers lieux des fum�es m�l�es de flammes, qui paroissent dans les masses les plus �paisses de la fum�e. Quand il y a des fum�es ainsi r�pandues dans la campagne, le pied des hautes montagnes paro�t bien moins que la cime; ce qui arrive aussi quand le brouillard est bas, et qu'il tombe. [Illustration n� 31: CHAPITRE CCCXXXII. _Pag. 273_] CHAPITRE CCCXXXII. _Divers pr�ceptes touchant la peinture._ La superficie de tout corps opaque tient de la couleur du milieu transparent qui se trouve entre l'oeil et cette superficie; et plus le milieu est dense, et plus l'espace qui est entre l'oeil et la superficie de l'objet est grand, plus aussi la couleur que cette superficie emprunte du milieu est forte. Les contours des corps opaques sont d'autant moins sensibles, que ces corps sont plus �loign�s de l'oeil qui les voit. Les parties des corps opaques sont plus ombr�es ou plus �clair�es, selon qu'elles sont plus pr�s, ou du corps obscur qui leur fait de l'ombre, ou du corps lumineux qui les �claire. La superficie de tout corps opaque participe � la couleur de son objet, mais plus ou moins, selon que l'objet en est plus proche ou plus �loign�, ou qu'il fait son impression avec plus ou moins de force. Les choses qui se voient entre la lumi�re et l'ombre, paroissent d'un plus grand relief que celles qui sont de tous c�t�s dans l'ombre ou dans la lumi�re. Lorsque dans un grand �loignement vous peindrez les choses distinctes et bien termin�es, ces choses, au lieu de paro�tre �loign�es, paro�tront �tre proches: c'est pourquoi dans vos tableaux peignez les choses avec une telle discr�tion, qu'on puisse conno�tre leur �loignement; et si l'objet que vous imitez paro�t confus et peu arr�t� dans ses contours, repr�sentez-le de la m�me mani�re, et ne le faites point trop fini. Les objets �loign�s paroissent, pour deux raisons, confus et peu arr�t�s dans leurs contours; la premi�re est qu'ils viennent � l'oeil sous un angle si petit, qu'ils font une impression toute semblable � celle que font les petits objets, tels que sont les ongles des doigts, les corps des insectes, dont on ne sauroit discerner la figure. La seconde est qu'entre l'oeil et les objets �loign�s, il y a une si grande quantit� d'air qu'elle fait corps; et cette grande quantit� d'air a le m�me effet qu'un air �pais et grossier qui par sa blancheur ternit les ombres, et les d�colore en telle sorte, que d'obscures qu'elles sont, elles d�g�n�rent en une couleur bleu�tre, qui est entre le noir et le blanc. Quoiqu'un grand �loignement emp�che de discerner beaucoup de choses, n�anmoins celles qui seront �clair�es du soleil feront toujours quelque impression; mais les autres qui ne sont pas �clair�es demeureront envelopp�es confus�ment dans les ombres, parce que cet air est plus �pais et plus grossier � mesure qu'il approche de la terre: les choses donc qui seront plus basses paro�tront plus sombres et plus confuses, et celles qui sont plus �lev�es paro�tront plus distinctes et plus claires. Quand le soleil colore de rouge les nuages sur l'horizon, les corps qui par leur distance paroissent de couleur d'azur, participeront � cette couleur rouge; de sorte qu'il se fera un m�lange d'azur et de rouge, qui rendra toute la campagne riante et fort agr�able: tous les corps opaques qui seront �clair�s de cette couleur m�l�e, paro�tront fort �clatans et tireront sur le rouge, et tout l'air aura une couleur semblable � celle des fleurs de lis jaune. L'air qui est entre la terre et le soleil, quand il se l�ve ou se couche, offusquera plus les corps qu'il environne que l'air qui est ailleurs, parce que l'air en ce temps-l� est plus blanch�tre entre la terre et le soleil, qu'il ne l'est ailleurs. Il n'est pas n�cessaire de marquer de traits forts toutes les extr�mit�s d'un corps auquel un autre sert de champ; il doit au contraire s'en d�tacher de lui-m�me. Si un corps blanc et courbe se rencontre sur un autre corps blanc, il aura un contour obscur, et ce contour sera la partie la moins claire de celles qui sont �clair�es; mais si ce contour est sur un champ obscur, il paro�tra plus clair qu'aucun autre endroit qui soit �clair�. Une chose paro�tra d'autant plus �loign�e et plus d�tach�e d'une autre, qu'elle aura un champ plus diff�rent de sa couleur. Dans l'�loignement, les premiers termes des corps qui disparoissent, sont ceux qui ont leurs couleurs semblables, sur-tout si ces termes sont vis-�-vis les uns des autres; par exemple, si un ch�ne est vis-�-vis d'un autre ch�ne semblable. Si l'�loignement augmente, on ne discernera plus les contours des corps de couleurs moyennes dont l'un sert de champ � l'autre, comme pourroient �tre des arbres, des champs labour�s, une muraille, quelques masures, des ruines de montagnes, ou des rochers; enfin dans un �loignement extr�mement grand, on perdra de vue les corps qui paroissent ordinairement le plus, tels que sont les corps clairs et les corps obscurs m�l�s ensemble. Entre les choses d'�gale hauteur qui sont plac�es au-dessus de l'oeil, celle qui sera plus loin de l'oeil paro�tra plus basse; et de plusieurs choses qui seront plac�es plus bas que l'oeil, celle qui est plus pr�s de l'oeil paro�tra la plus basse, et celles qui sont parall�les sur les c�t�s, iront concourir au point de vue. Dans les paysages qui ont des lointains, les choses qui sont aux environs des rivi�res et des marais, paroissent moins que celles qui en sont bien �loign�es. Entre les corps d'�gale �paisseur, ceux qui seront plus pr�s de l'oeil paro�tront moins denses, et ceux qui sont plus �loign�s paro�tront plus �pais. L'oeil qui aura une plus grande prunelle verra l'objet plus grand: l'exp�rience s'en fait en regardant quelque corps c�leste par un trou d'aiguille fait dans un papier; car ce trou ne pouvant admettre qu'une petite portion de la lumi�re de ce corps c�leste, ce corps semble diminuer et perdre de sa grandeur apparente, � proportion que le trou par o� il est vu est plus petit que son tout, c'est-�-dire, que celui de la prunelle de l'oeil. L'air �paissi par quelques brouillards rend les contours des objets qu'il environne incertains et confus, et fait que ces objets paroissent plus grands qu'ils ne sont en effet: cela vient de ce que la perspective lin�ale ne diminue point l'angle visuel qui porte � l'oeil les images des choses, et la perspective des couleurs, qu'on appelle a�rienne, le pousse et le renvoie � une distance qui est en apparence plus grande que la v�ritable; de sorte que l'une fait retirer les objets loin de l'oeil, et l'autre leur conserve leur v�ritable grandeur. Quand le soleil est pr�s de se coucher, les grosses vapeurs qui tombent en ce temps-l� �paississent l'air, de sorte que tous les corps qui ne sont point �clair�s du soleil, demeurent obscurs et confus; et ceux qui en sont �clair�s, tiennent du rouge et du jaune qu'on voit ordinairement en ce temps-l� sur l'horizon. De plus, les choses qui sont alors �clair�es du soleil sont tr�s-marqu�es, et frappent la vue d'une mani�re fort sensible, sur-tout les �difices, les maisons des villes, et les ch�teaux de la campagne, parce que leurs ombres sont fort obscures; et il semble que cette clart� particuli�re leur vienne tout d'un coup, et naisse de l'opposition qu'il y a entre la couleur vive et �clatante de leurs parties hautes qui sont �clair�es, et la couleur sombre de leurs parties basses qui ne le sont pas, parce que tout ce qui n'est point vu du soleil est d'une m�me couleur. Quand le soleil est pr�s de se coucher, les nuages d'alentour qui se trouvent les plus pr�s de lui, sont �clair�s par-dessous du c�t� qu'il les regarde, et les autres qui sont en de��, deviennent obscurs, et paroissent color�s d'un rouge brun; et s'ils sont l�gers et transparens, ils prennent peu d'ombre. Une chose qui est �clair�e par le soleil l'est encore par la lumi�re universelle de l'air, si bien qu'il se forme deux sortes d'ombres, dont la plus obscure sera celle qui aura sa ligne centrale, directement vers le centre du soleil. La ligne centrale de la lumi�re primitive et d�riv�e, �tant allong�e et continu�e dans l'ombre, formera la ligne centrale de l'ombre primitive et d�riv�e. C'est une chose agr�able � voir que le soleil quand il est � son couchant, et qu'il �claire le haut des maisons, des villes et des ch�teaux, la cime des grands arbres, et qu'il les dore de ses rayons; tout ce qui est en bas au-dessous des parties �clair�es, demeure obscur et presque sans aucun relief, parce que ne recevant de lumi�re que de l'air, il y a fort peu de diff�rence entre l'ombre et le jour de ces parties basses, c'est pourquoi leur couleur a peu de force. Entre ces corps, ceux qui s'�l�vent davantage et qui sont frapp�s des rayons du soleil, participent, comme il a �t� dit, � la couleur et � l'�clat de ses rayons; tellement que vous devez prendre de la couleur m�me dont vous peignez le soleil, et la m�ler dans les teintes de tous les clairs des autres corps que vous feignez en �tre �clair�s. Il arrive encore assez souvent qu'un nuage paro�tra obscur sans recevoir aucune ombre d'un autre nuage d�tach� de lui, et cela arrive selon l'aspect et la situation de l'oeil, parce qu'�tant pr�s de ce nuage, il en d�couvre seulement la partie qui est dans l'ombre; mais d'un autre endroit plus �loign�, il verroit le c�t� qui est �clair� et celui qui est dans l'ombre. Entre les corps d'�gale hauteur, celui qui sera plus loin de l'oeil lui paro�tra le plus bas. Remarquez en la figure suivante que des deux nuages qui y sont repr�sent�s, bien que le premier qui est plus pr�s de l'oeil soit plus bas que l'autre, n�anmoins il paro�t �tre plus haut, comme on le d�montre sur la ligne perpendiculaire A N, laquelle fait la section de la pyramide du rayon visuel du premier et plus bas nuage en M A, et du second, qui est le plus haut en N M, au-dessous de M A. Il peut arriver aussi par un effet de la perspective a�rienne, qu'un nuage obscur vous paroisse �tre plus haut et plus �loign� qu'un autre nuage clair et vivement �clair� vers l'horizon des rayons du soleil, lorsqu'il se l�ve ou qu'il se couche. [Illustration] CHAPITRE CCCXXXIII. _Une chose peinte qu'on suppose � une certaine distance, ne paro�t jamais si �loign�e qu'une chose r�elle qui est � cette distance, quoiqu'elles viennent toutes deux � l'oeil sous la m�me ouverture d'angle._ Je peins sur la muraille B C, une maison qui doit paro�tre � la distance de mille pas, puis � c�t� de mon tableau j'en d�couvre une r�elle, qui est v�ritablement �loign�e de mille pas; ces maisons sont tellement dispos�es, que la ligne A C fait la section de la pyramide du rayon visuel � m�me ouverture d'angle; n�anmoins jamais avec les deux yeux on ne verra paro�tre ces deux maisons de m�me grandeur, ni �galement �loign�es. [Illustration] CHAPITRE CCCXXXIV. _Du champ des tableaux._ La principale chose, et la plus n�cessaire pour donner du relief � la peinture, est de consid�rer le champ des figures sur lequel les termes ou les extr�mit�s des corps qui ont la superficie convexe, font toujours conno�tre leur figure, quoique les couleurs des corps soient les m�mes que les couleurs de leur fond; cela vient de ce que les termes ou les extr�mit�s convexes d'un corps ne prennent pas leur lumi�re de la m�me sorte que leur fond, quoiqu'il soit �clair� par le m�me jour, parce que souvent le contour sera plus clair ou plus obscur que le fond sur quoi il est; mais s'il arrive que le contour ait la m�me couleur que le fond, et au m�me degr� de clart� ou d'obscurit�, on ne pourra discerner le contour de la figure; et cette uniformit� d'esp�ces et de degr�s dans les couleurs, doit �tre soigneusement �vit�e par les Peintres judicieux et intelligens, parce que l'intention d'un Peintre est de faire voir que ses figures se d�tachent de leur fond; et dans cette conjoncture le contraire arrive, non-seulement � l'�gard de la peinture, mais encore dans les figures qui sont de relief. CHAPITRE CCCXXXV. _Du jugement qu'on doit faire des ouvrages d'un Peintre._ Premi�rement, vous devez consid�rer si les figures ont un relief conforme au lieu o� elles sont, et � la lumi�re qu'elles re�oivent. Les ombres ne doivent pas �tre les m�mes aux extr�mit�s et au milieu des groupes; car il y a bien de la diff�rence entre des objets qui sont tout environn�s d'ombres, et des objets qui n'en ont que d'un c�t�. Les figures qui sont dans le milieu d'un groupe sont environn�es d'ombres de tous c�t�s; car du c�t� de la lumi�re, les figures qui sont entre elles et la lumi�re leur envoient de l'ombre; mais les figures qui sont aux extr�mit�s des groupes ne sont dans l'ombre que d'un c�t�, car de l'autre elles re�oivent la lumi�re. C'est au centre des figures qui composent une histoire que se trouve la plus grande obscurit�; la lumi�re n'y peut p�n�trer, le plus grand jour est ailleurs, et il r�pand sa clart� sur les autres parties du tableau. Secondement, que dans l'ordonnance ou la disposition des figures, il paroisse qu'elles sont accommod�es au sujet et � la repr�sentation de l'histoire que le Peintre a trait�e. Troisi�mement, que les figures soient attentives au sujet pour lequel elles se trouvent l�, et qu'elles aient une attitude et une expression convenable � ce qu'elles font. CHAPITRE CCCXXXVI. _Du relief des figures qui sont �loign�es de l'oeil._ Un corps opaque paro�tra avoir moins de relief selon qu'il sera plus loin de l'oeil; cela arrive, parce que l'air qui se rencontre entre l'oeil et le corps opaque, �tant plus clair que n'est l'ombre de ce corps, il corrompt cette ombre, la ternit, et en affoiblit la teinte obscure; ce qui fait perdre � ce corps son relief. CHAPITRE CCCXXXVII. _Des contours des membres du c�t� du jour._ Le contour d'un membre du c�t� qu'il est �clair�, paro�tra d'autant plus obscur qu'il sera vu sur un fond plus clair; et, par la m�me raison, il paro�tra d'autant plus clair qu'il se trouvera sur un fond plus obscur: et si ce contour �toit d'une forme plate, et sur un fond clair semblable en couleur et en clart�, il seroit insensible � l'oeil. CHAPITRE CCCXXXVIII. _Des termes ou extr�mit�s des corps._ Les termes des corps qui sont � une distance m�diocre, ne seront jamais si sensibles que ceux des corps qui sont plus pr�s; ils ne doivent point aussi �tre touch�s d'une mani�re si forte. Un Peintre doit donc tracer le contour des objets avec plus ou moins de force, selon qu'ils sont plus ou moins �loign�s. Le terme qui s�pare un corps d'un autre, est comme une ligne, mais une ligne qui n'est pas diff�rente du corps m�me qu'elle termine; une couleur commence o� une autre couleur finit, sans qu'il y ait rien entre ces deux couleurs. Il faut donc donner aux contours et aux couleurs le degr� de force ou d'affoiblissement que demande l'�loignement des objets. CHAPITRE CCCXXXIX. _De la carnation, et des figures �loign�es de l'oeil._ Il faut qu'un Peintre qui repr�sente des figures et d'autres choses �loign�es de l'oeil, en esquisse seulement la forme par une l�g�re �bauche des principales ombres, sans rien terminer; et pour cette esp�ce de figures, il doit choisir le soir ou un temps n�buleux, �vitant sur-tout, comme j'ai dit, les lumi�res et les ombres termin�es, parce qu'elles n'ont pas de grace, elles sont difficiles � ex�cuter, et �tant vues de loin, elles ressemblent � des taches. Souvenez-vous aussi de ne pas faire les ombres si obscures, que par leur noirceur elles noient et �teignent leur couleur originale, si ce n'est que les corps soient plac�s dans un lieu enti�rement rempli de t�n�bres; ne marquez point les contours des membres ni des cheveux; ne rehaussez point les jours de blanc tout pur, si ce n'est sur les choses blanches, et que les clairs fassent conno�tre la v�ritable et parfaite teinte de la couleur de l'objet. CHAPITRE CCCXL. _Divers pr�ceptes de la peinture._ Dans les grands clairs et dans les ombres fortes, la figure et les contours des objets ne se peuvent discerner qu'avec beaucoup de peine; les parties des objets qui sont entre les plus grands clairs et les ombres, sont celles qui paroissent davantage et qu'on distingue le mieux. La perspective, en ce qui concerne la Peinture, se divise en trois parties principales, dont la premi�re consiste en la diminution de quantit� qui se fait dans la dimension des corps selon leurs diverses distances. La seconde est celle qui traite de l'affoiblissement des couleurs des corps. La troisi�me apprend � marquer plus ou moins les termes et les contours des objets, selon que ces objets sont plus ou moins �loign�s: de cette mani�re plus ou moins forte de tracer les contours, d�pend la facilit� qu'on a � les discerner, et la connoissance qu'on a de la figure des corps dans les divers degr�s d'�loignement o� ils sont. L'azur de l'air est d'une couleur compos�e de lumi�re et de t�n�bres: Je dis de lumi�re, car c'est ainsi que j'appelle les parties �trang�res des vapeurs qui sont r�pandues dans l'air, et que le soleil rend blanches et �clatantes. Par les t�n�bres j'entends l'air pur, qui n'est point rempli de ces parties �trang�res qui re�oivent la lumi�re du soleil, l'arr�tent sans lui donner passage, et la r�fl�chissent de tous c�t�s. On peut remarquer ce que je dis dans l'air qui se trouve entre l'oeil et les montagnes, lesquelles sont obscurcies par la grande quantit� d'arbres qui les couvrent, ou qui sont obscures du c�t� qu'elles ne sont point �clair�es du soleil; car l'air paro�t de couleur d'azur de ces c�t�s-l�; mais il n'en est pas de m�me du c�t� que ces montagnes sont �clair�es, et bien moins encore dans les lieux couverts de neige. Entre les choses d'une �gale obscurit�, et qui sont dans une distance �gale, celle qui sera sur un champ plus clair paro�tra plus obscure, et celle qui sera sur un champ plus obscur paro�tra plus claire. La chose qui sera peinte avec plus de blanc et plus de noir, aura un plus grand relief qu'aucune autre. C'est pour cela que j'avertis ici les Peintres de colorier leurs figures de couleurs vives et les plus claires qu'ils pourront; car s'ils leur donnent des teintes obscures, elles n'auront gu�re de relief, et paro�tront peu de loin: ce qui arrive, parce que les ombres de tous les corps sont obscures; et si vous faites une draperie d'une teinte obscure, il y aura peu de diff�rence entre le clair et l'obscur; c'est-�-dire, entre ce qui est �clair� et ce qui est dans l'ombre; au lieu que dans les couleurs vives et claires, la diff�rence s'y remarquera sensiblement. CHAPITRE CCCXLI. _Pourquoi les choses imit�es parfaitement d'apr�s le naturel, ne paroissent pas avoir le m�me relief que le naturel._ Il n'est pas possible que la peinture, quoiqu'ex�cut�e avec une tr�s-exacte perfection et une juste pr�cision de contours, d'ombres, de lumi�res et de couleurs, puisse faire paro�tre autant de relief que le naturel, � moins qu'elle ne soit vue avec un seul oeil: cela se d�montre ainsi. Soient les yeux A B, lesquels voient l'objet C par le concours des lignes centrales ou rayons visuels A C et B C. Je dis que les lignes ou c�t�s de l'angle visuel qui comprennent les centrales, voient encore au-del�, et derri�re le m�me objet l'espace G D et l'oeil A voit tout l'espace F D, et l'oeil B voit tout l'espace G E; donc les deux yeux voient derri�re l'objet C tout l'espace F E, de sorte que par ce moyen cet objet C est comme s'il �toit transparent, selon la d�finition de la transparence, derri�re laquelle rien n'est cach�: ce qui ne peut pas arriver � celui qui verra ce m�me objet avec un seul oeil, l'objet �tant d'une plus grande �tendue que l'oeil. De tout ceci nous pouvons conclure et r�soudre notre question; savoir, qu'une chose peinte couvre tout l'espace qui est derri�re elle, et qu'il n'y a nul moyen de d�couvrir aucune partie du champ que la surface comprise dans son contour cache derri�re elle. [Illustration] CHAPITRE CCCXLII. _De la mani�re de faire paro�tre les choses comme en saillie, et d�tach�es de leur champ, c'est-�-dire, du lieu o� elles sont peintes._ Les choses peintes sur un fond clair et plein de lumi�re, auront un plus grand relief que si elles �toient peintes sur un champ obscur: c'est pourquoi, si vous voulez que votre figure ait beaucoup de force et de rondeur, faites en sorte que la partie la plus �loign�e du jour en re�oive quelque reflet, parce que si elle �toit obscure en cette partie, et qu'elle v�nt � se rencontrer encore dans un champ obscur, les termes de ses contours seroient confus; de sorte que sans l'aide de quelques reflets tout l'ouvrage demeure sans grace: car de loin on ne discerne que les parties qui sont �clair�es, et les parties obscures semblent �tre du champ m�me; et ainsi les choses paroissent coup�es et mutil�es de tout ce qui se perd dans l'obscurit�, et elles n'ont pas tant de relief. CHAPITRE CCCXLIII. _Quel jour donne plus de grace aux figures._ Les figures auront plus de grace �tant mises dans la lumi�re universelle de la campagne, que dans une lumi�re particuli�re; parce que cette grande lumi�re �tant forte et �tendue, elle environne et embrasse le relief des corps, et les ouvrages qui ont �t� faits en ces lumi�res, paroissent de loin et avec grace; au lieu que ceux que l'on peint � des jours de chambre o� la lumi�re est petite et resserr�e, prennent des ombres tr�s-fortes; et les ouvrages faits avec des ombres de cette esp�ce ne paroissent jamais de loin, que comme une simple teinte, et une peinture plate. CHAPITRE CCCXLIV. _Que dans les paysages il faut avoir �gard aux diff�rens climats, et aux qualit�s des lieux que l'on repr�sente._ Vous prendrez garde de ne pas repr�senter dans les lieux maritimes et dans ceux qui sont vers les parties m�ridionales, les arbres ou les prairies pendant l'hiver, comme dans les pays fort �loign�s de la mer, et dans les pays septentrionaux, si ce n'�toit de ces sortes d'arbres qui conservent leur verdure toute l'ann�e, et qui jettent continuellement de nouvelles feuilles. CHAPITRE CCCXLV. _Ce qu'il faut observer dans la repr�sentation des quatre saisons de l'ann�e, selon qu'elles sont plus ou moins avanc�es._ Dans un automne vous ferez les choses conform�ment � la qualit� du temps; c'est-�-dire, qu'au commencement de cette saison les feuilles des arbres qui sont aux plus vieilles branches commencent � devenir p�les, plus ou moins, selon la st�rilit� ou la fertilit� du lieu; et ne faites pas comme plusieurs Peintres qui donnent toujours une m�me teinte et la m�me qualit� de verd � toutes sortes d'arbres, lorsqu'ils sont � la m�me distance. Ce que je dis doit aussi s'entendre du coloris des prairies, des rochers, des troncs d'arbres, et de toutes sortes de plantes, o� il faut toujours apporter de la vari�t�; car la nature diversifie ses ouvrages � l'infini. CHAPITRE CCCXLVI. _De la mani�re de peindre ce qui arrive lorsqu'il y a du vent._ Dans la repr�sentation du vent, outre que les arbres auront leurs branches courb�es et pli�es par l'agitation de l'air, et leurs feuilles recoquill�es vers le c�t� o� souffle le vent, il faut encore que l'on voie la poussi�re s'�lever en tourbillons, et se m�ler confus�ment dans l'air. CHAPITRE CCCXLVII. _Du commencement d'une pluie._ Lorsque la pluie tombe, elle obscurcit l'air, le ternit, et lui donne une couleur triste et plomb�e, prenant d'un c�t� la lumi�re du soleil, et l'ombre de l'autre, ainsi qu'on remarque sur les nuages. La terre devient sombre �tant offusqu�e par la pluie qui lui d�robe la lumi�re du soleil; les objets qu'on voit � travers la pluie paroissent confus et tout informes; mais les choses qui seront plus pr�s de l'oeil seront plus ais�es � discerner, et on reconno�tra mieux celles qui se trouveront vers le c�t� o� la pluie fait ombre, que de celui auquel elle est �clair�e; cela vient de ce que les choses qu'on voit dans l'ombre de la pluie, ne perdent-l� que leurs principales lumi�res; au lieu que celles que l'on voit vers le c�t� o� la pluie est �clair�e, perdent la lumi�re et l'ombre; parce que toutes leurs parties �clair�es se confondent dans la clart� de l'air, et les parties qui sont dans l'ombre sont �clair�es par la m�me lumi�re de l'air �clair�. CHAPITRE CCCXLVIII. _De l'ombre des ponts sur la surface de l'eau qui est au-dessous._ L'ombre des ponts ne peut jamais �tre vue sur l'eau qui passe dessous, que premi�rement cette eau n'ait perdu sa transparence, qui la rend semblable � un miroir, et qu'elle ne soit devenue trouble et boueuse; la raison est, que l'eau claire �tant lustr�e et polie en sa surface, l'image du pont s'y forme et s'y r�fl�chit en tous les endroits qui sont plac�s � angles �gaux, entre l'oeil et le corps du pont, et l'air se voit m�me sous le pont aux lieux o� est le vide des arches: ce qui n'arrivera pas, lorsque l'eau sera trouble, parce que la transparence et le lustre d'o� vient l'effet du miroir, ne s'y trouve plus; mais elle recevra l'ombre, de m�me que fait le plan d'une rue poudreuse. CHAPITRE CCCXLIX. _Usage de la Perspective dans la Peinture._ La Perspective est la r�gle de la peinture; la grandeur d'une figure peinte, doit faire conno�tre la distance d'o� elle est vue, et si la figure vous paro�t de la grandeur du naturel, vous jugerez qu'elle est proche de l'oeil. CHAPITRE CCCL. _De l'�quilibre des figures._ Le nombril se trouve toujours dans la ligne centrale de l'estomac, qui est depuis le nombril en montant en haut; c'est pourquoi dans l'�quilibre du corps de l'homme on aura autant d'�gard au poids �tranger ou accidentel, qu'� son poids naturel: cela se voit manifestement, lorsque la figure �tend le bras; car le poing qui est � l'extr�mit� du bras sert � contrebalancer le poids qui est de l'autre c�t�, si bien qu'il faut par n�cessit� que la figure en renvoie autant de l'autre c�t� du nombril, qu'en emporte le poids extraordinaire du bras �tendu avec le poing, et il est souvent besoin que pour cet effet le talon se hausse et demeure en l'air. CHAPITRE CCCLI. _Pratique pour �baucher une statue._ Si vous voulez faire une figure de marbre dressez-en premi�rement un mod�le de terre: apr�s qu'il sera achev� et sec, il le faudra mettre dans une caisse assez grande pour contenir (apr�s que le mod�le de terre en sera �t�) le bloc de marbre sur lequel vous voulez tailler une figure semblable � celle qui est de terre; puis ayant pos� dans cette caisse votre mod�le, ayez des baguettes, lesquelles puissent entrer justement et pr�cis�ment par des trous que vous ferez � la caisse; poussez dans chaque trou quelqu'une de ces baguettes, qui doivent �tre blanches, en sorte qu'elle aille toucher et rencontrer la figure en divers endroits; le reste de ces baguettes qui demeurera hors de la caisse, vous le marquerez de noir avec une marque particuli�re � chaque baguette et � son trou, afin que vous les puissiez reconno�tre et remettre � la m�me place quand vous le voudrez; puis vous tirerez hors de la caisse votre mod�le de terre, pour y mettre dans sa place le bloc de marbre, que vous d�grossirez et �baucherez, jusqu'� ce que toutes vos baguettes entrent et soient cach�es jusqu'� leur marque en chaque trou; et pour pouvoir mettre plus commod�ment votre dessin en ex�cution, faites en sorte que le coffre de la caisse se puisse lever en haut (le fond de la caisse demeurant toujours en bas sous le bloc de marbre); car ainsi avec vos outils de fer, vous en pourrez tailler ce qu'il faudra avec une grande facilit�. CHAPITRE CCCLII. _Comment on peut faire une peinture qui sera presque �ternelle, et paro�tra toujours fra�che._ Ayant trac� sur une feuille de papier fin bien tendue sur un chassis, le dessin que vous voulez peindre, vous y mettrez premi�rement une bonne et grosse couche faite de carreau pil� et de poix, puis une autre couche de blanc et de macicot, sur laquelle vous mettrez les couleurs convenables � votre dessin; vous le vernirez ensuite avec de vieille huile cuite, qui soit claire et fort �paisse; puis vous collerez dessus avec le m�me vernis un carreau de verre bien net et bien plat. Mais il vaut encore mieux prendre un carreau de terre bien vitrifi�, et mettre dessus une couche de blanc et de macicot, et puis peindre et appliquer le vernis, et le couvrir d'un beau cristal; mais auparavant il faudra bien faire s�cher votre peinture dans une �tuve, et ensuite la vernir avec de l'huile de noix et de l'ambre, ou bien seulement de l'huile de noix bien �pur�e et �paissie au soleil[2]. [2] L'invention qu'on a trouv�e depuis quelque temps de peindre en �mail avec tant de perfection, est tr�s-convenable au titre de ce Chapitre, et bien plus excellente que la m�thode qui nous est d�crite ici par l'Auteur. CHAPITRE CCCLIII. _Mani�re d'appliquer les couleurs sur la toile._ Tendez votre toile sur un chassis, et lui donnez une l�g�re couche de colle de gants, laquelle �tant s�che, dessinez votre tableau, et couchez la teinte des carnations avec des brosses, et en m�me temps pendant qu'elle est toute fra�che, vous y marquerez � votre mani�re les ombres qui doivent �tre fort douces. La carnation se fera de blanc, de lacque, et de macicot; la teinte de l'ombre sera compos�e de noir et de terre d'ombre, ou d'un peu de lacque, si vous voulez avec de la pierre noire. Apr�s avoir l�g�rement �bauch� votre tableau, laissez-le s�cher, puis vous le retoucherez � sec, avec de la lacque d�tremp�e dans de l'eau de gomme, et qui ait �t� gard�e long-temps en cette eau de gomme, parce qu'elle est alors d'un meilleur usage, et elle ne porte point de lustre lorsqu'elle est mise en oeuvre. Pour faire encore vos ombres plus noires, prenez de la lacque dont je viens de parler, d�tremp�e avec de l'encre gomm�e; et de cette teinte vous pourrez ombrer plusieurs couleurs, parce qu'elle est transparente, et elle sera fort bonne pour donner les ombres � l'azur, � la lacque, au vermillon, et � quelques autres semblables couleurs. CHAPITRE CCCLIV. _Usage de la Perspective dans la peinture._ Quand un brouillard ou quelqu'autre qualit� de l'air vous emp�chera de remarquer de la vari�t� dans le clair des jours, ou dans le noir des ombres, qui environnent les choses que vous imitez, alors n'ayez plus d'�gard en peignant � la perspective des couleurs; mais servez-vous seulement de la perspective lin�ale pour les diminuer, � proportion de leur distance, ou bien de la perspective a�rienne, qui affoiblit et diminue la connoissance des objets, en les repr�sentant moins termin�s et moins finis: car cette sorte de perspective fait paro�tre une m�me chose plus ou moins �loign�e, selon qu'elle repr�sente sa figure plus ou moins termin�e. L'oeil n'arrivera jamais par le moyen de la perspective lin�ale, � la connoissance de l'intervalle qui est entre deux objets diversement �loign�s, s'il n'est aid� du raisonnement qu'on tire de la perspective a�rienne, qui consiste dans l'affoiblissement des couleurs. CHAPITRE CCCLV. _De l'effet de la distance des objets._ Dans un objet la partie qui se trouvera plus proche du corps lumineux, d'o� il prend son jour, en sera plus fortement �clair�e; l'image des choses dans l'�loignement, perd autant de degr�s de force qu'il y a de degr�s d'�loignement; c'est-�-dire, qu'� proportion que la chose sera vue de plus loin, elle sera d'autant moins sensible � l'oeil et moins connoissable au travers de l'air. CHAPITRE CCCLVI. _De l'affoiblissement des couleurs, et de la diminution apparente des corps._ Il faut observer que la teinte des couleurs s'affoiblisse et se d�colore, � mesure que les corps que l'on peint diminuent par l'�loignement. CHAPITRE CCCLVII. _Des corps transparens qui sont entre l'oeil et son objet._ Plus un corps transparent situ� entre l'oeil et son objet, est grand, et plus il occupe d'espace; plus aussi la couleur de l'objet sera chang�e et transform�e en une couleur semblable � celle du corps transparent. Quand l'objet vient se rencontrer entre l'oeil et la lumi�re, vis-�-vis de la ligne centrale qui s'�tend entre le centre de la lumi�re et de l'oeil, alors cet objet se trouve enti�rement priv� de lumi�re. CHAPITRE CCCLVIII. _Des draperies qui couvrent les figures, et de la mani�re de jeter les plis._ Les draperies dont les figures sont habill�es, doivent �tre tellement accommod�es dans leurs plis, autour des membres qu'elles couvrent, qu'on ne voie point de plis avec des ombres fort obscures dans les parties de ces draperies qui sont �clair�es du plus grand jour, et que dans les lieux qui sont couverts d'ombre, il ne s'y rencontre point aussi de plis qui prennent une lumi�re trop vive, et que les contours et la mani�re des plis suivent et repr�sentent en quelques endroits la forme du membre qu'ils couvrent: prenez bien garde aussi de ne point faire de ces faux contours trop rompus, qui d�truisent la forme du membre, en p�n�trant dans le vif par des ombres trop coch�es et plus profondes que ne peut �tre la superficie du corps qu'elles couvrent; mais qu'en effet la draperie soit accommod�e et jet�e de telle sorte, qu'elle ne paroisse pas un habillement sans corps; c'est-�-dire, un amas d'�toffes, ou des habits d�pouill�s et sans soutien, comme on le voit faire � plusieurs Peintres, qui se plaisent tant � entasser une grande quantit� de plis, qui embarrassent leurs figures, sans penser � l'usage pour lequel ces �toffes ont �t� faites, qui est d'habiller et de couvrir avec grace les parties du corps sur lesquelles elles sont, et non pas de l'en charger et de l'en accabler, comme si ce corps n'�toit qu'un ventre, ou que tous ses membres fussent autant de vessies enfl�es sur les parties qui ont du relief. Je ne veux pas dire n�anmoins que l'on doive n�gliger de faire quelques beaux plis sur les draperies; mais il faut qu'ils soient plac�s et accommod�s judicieusement aux endroits de la figure, o� les membres, par la position ou par l'action qu'ils font entre eux, ou par l'attitude de tout le corps, ramassent cette draperie; et sur-tout qu'on prenne garde dans les histoires et dans les compositions de plusieurs figures, d'y apporter de la vari�t� aux draperies, comme si l'on fait en quelques-uns de gros plis � la mani�re des draps de laine fort �pais, qu'on en fasse aussi en quelques autres de plus serr�s et de plus menus, comme sont ceux d'une �toffe fine de soie, avec des contours, les uns plus droits et plus tranch�s, les autres plus doux et plus tendres. CHAPITRE CCCLIX. _De la nature et de la vari�t� des plis des draperies._ Beaucoup de Peintres se plaisent � faire leurs draperies fort coch�es, avec des angles aigus, et d'une mani�re crue et tranch�e; d'autres suivent une mani�re plus douce, et leur donnent des angles presque insensibles; quelques-uns les font sans aucuns angles, se contentant de donner aux plis quelque peu de profondeur. CHAPITRE CCCLX. _Comment on doit ajuster les plis des draperies._ La partie d'une draperie qui se trouvera plus �loign�e du lieu o� elle est contrainte de faire des plis, reviendra toujours � son �tat naturel. Toute chose desire naturellement de se conserver en son �tre; par cons�quent une �toffe qui est d'une �gale force et d'une �gale �paisseur au-devant et au revers, t�che de demeurer plate; c'est pourquoi lorsqu'elle est contrainte par quelque pli de quitter sa forme plate, on remarque dans le lieu de sa plus grande contrainte, qu'elle s'efforce continuellement de revenir en son �tat naturel; de sorte que dans la partie la plus �loign�e de cette contrainte, elle se trouve plus approchante de son premier �tat; c'est-�-dire, plus �tendue et plus d�pli�e. Soit, par exemple, A B C le pli de la draperie, et A B l'endroit de sa plus grande contrainte et le plus pli�; je vous ai dit que la partie de l'�toffe qui �toit plus loin du lieu o� elle est contrainte de se plier, tiendroit davantage de sa premi�re forme, et reviendroit plus � son �tat naturel, de sorte que C se trouvant plus loin du pli, il sera plus large et plus �tendu qu'aucune autre partie. [Illustration n� 32: CHAPITRE CCCLX. _Pag. 306_] CHAPITRE CCCLXI. _Comment on doit ajuster les plis des draperies._ Une draperie ne doit point �tre remplie d'une grande quantit� de plis embarrass�s; au contraire, il en faut faire seulement aux lieux o� elle est contrainte et retenue avec les mains ou avec les bras, laissant tomber le reste simplement et naturellement: il faut aussi les voir et les dessiner sur le naturel; c'est-�-dire, si vous voulez repr�senter une draperie de laine, dessinez ses plis sur une �toffe semblable; de m�me si vous voulez qu'elle paroisse de soie ou de quelque �toffe fine, ou bien d'un gros drap de bure pour des villageois, diversifiez-les chacune par la forme de ses plis, et ne les dessinez jamais, comme font plusieurs, sur des mod�les couverts de papier mouill� ou de peaux l�g�res, parce que vous pourriez y �tre fort tromp�. [Illustration n� 33: CHAPITRE CCCLXII. _Pag. 309_] CHAPITRE CCCLXII. _Des plis des draperies des membres qui sont vus en raccourci._ Aux endroits o� la figure se raccourcit, faites-y paro�tre un plus grand nombre de plis qu'aux endroits o� elle n'est point raccourcie, ou bien faites qu'ils soient entour�s de beaucoup de plis. Par exemple, soit E le lieu de la position de l'oeil. La figure M N envoie le centre de chaque cercle des plis successivement plus loin de la ligne de leur contour, � proportion qu'ils s'�loignent de l'oeil; la figure N O montre les contours des cercles presque tous droits, parce qu'elle se rencontre directement vis-�-vis de l'oeil; et P Q les fait paro�tre tout au contraire de la premi�re figure N M. CHAPITRE CCCLXIII. _De quelle sorte l'oeil voit les plis des draperies qui sont autour des membres du corps de l'homme._ Les ombres qui se rencontrent entre les plis des draperies qui sont autour des membres du corps de l'homme, seront d'autant plus obscures, qu'elles seront plus directement vis-�-vis de l'oeil, avec les creux au fond desquels les ombres sont produites: ce que j'entends seulement quand l'oeil est plac� entre la partie �clair�e de la figure, et celle qui est dans l'ombre. CHAPITRE CCCLXIV. _Des plis des draperies._ Les plis des habillemens en quelque action de la figure qu'ils se rencontrent, doivent toujours montrer par la forme de leurs contours l'attitude de la figure, en sorte qu'ils ne laissent aucun doute sur la v�ritable position du corps � celui qui la consid�re, et qu'il n'y ait point de pli qui, par son ombre, fasse rompre aucun des membres; c'est-�-dire, qui paroisse plus coch� dans sa profondeur que n'est le vif ou la surface du membre qu'il couvre; et si vous repr�sentez des figures habill�es de plusieurs �toffes l'une sur l'autre, qu'il ne semble point que la derni�re renferme en soi le simple squelette des figures; mais qu'elles paroissent encore bien garnies de chair, avec une �paisseur convenable � la quantit� de ces draperies. Les plis des draperies qui environnent les membres, doivent diminuer de leur grosseur vers l'extr�mit� de la partie qu'ils environnent. La longueur des plis qui sont plus serr�s autour des membres, doit faire plusieurs replis sur le c�t� o� le membre diminue par son raccourcissement, et s'�tendre de l'autre c�t� oppos�. [Illustration n� 34: CHAPITRE CCCLXV. _Pag. 311_] CHAPITRE CCCLXV. _De l'horizon qui paro�t dans l'eau._ Par la sixi�me proposition de notre Trait� de Perspective, on verra paro�tre l'horizon, comme dans un miroir, vers le c�t� de l'eau qui se trouvera oppos� � l'horizon et � l'oeil; comme il paro�t en la figure suivante, o� l'horizon F est vu du c�t� B C, tandis que le m�me c�t� est encore vu de l'oeil; de mani�re qu'un Peintre ayant � repr�senter quelque �tendue d'eau, il doit se souvenir que la couleur de cette eau ne sauroit avoir une autre teinte, soit claire, soit obscure, que celle du lieu circonvoisin dans lequel elle est, et que cette couleur doit �tre encore m�l�e des couleurs des autres choses qui sont derri�re lui. FIN. TABLE DES MATI�RES. A. _AIR._ Couleurs et qualit�s de l'air, selon qu'il est plus pr�s ou plus loin de terre, pag. 56, ch. lxix. Air qui paro�t sur la superficie de l'eau, pag. 115, ch. cxxxv. D'o� vient � l'air sa couleur d'azur, pag. 125, ch. clj, pag. 288 et 289, ch. cccxl. _Anatomie._ Un Peintre, pour dessiner correctement, doit savoir l'anatomie, pag. 30, ch. xliij. Qu'il faut �tudier l'anatomie, et comment, pag. 42, ch. lvij. _Attitude._ Moyen pour donner aux figures une attitude convenable, pag. 43, ch. lviij. Attitude des enfans, pag. 44, ch. lxj. Des vieillards, pag. 45, ch. lxij. Des vieilles, _ibid._ ch. lxiij. Des femmes, _ibid._ ch. lxiv. L'attitude doit �tre convenable au sujet, pag. 179, ch. ccxvj. Diff�rences d'attitude, _ibid._ ch. ccxvij. Moyen de conno�tre les attitudes convenables � chaque sujet, pag. 180, ch. ccxviij et suiv. Attitude qu'il faut donner aux figures en diff�rentes occasions, pag. 197 et 198, ch. ccxlij. Attitude d'une figure qui montre quelque chose, pag. 198, ch. ccxliij. Des enfans, des vieillards, pag. 209, ch. cclviij. Des femmes, des jeunes gens, _ibid._ ch. cclix. De ceux qui sautent, pag. 220, ch. cclx. De ceux qui jettent quelque chose avec imp�tuosit�, pag. 211, ch. cclxj. De ceux qui arrachent quelque chose, ou qui la fichent en terre, pag. 212, ch. cclxij. D'un homme en col�re, pag. 207, ch. cclv. D'un d�sesp�r�, _ibid._ ch. cclvj. _Azur._ D'o� vient � l'air la couleur d'azur, pag. 125, ch. clj. B. _BATAILLE._ Comment on doit repr�senter une bataille, pag. 50, ch. lxvij. _Beaut�._ Ce qui contribue � en donner aux visages, du c�t� du dessin et du c�t� du clair-obscur, pag. 163, ch. cxcj. _Biens�ance._ De l'observation des biens�ances, pag. 203, ch. cclj. _Blanc._ N'est point mis au nombre des couleurs, pag. 128, ch. clv. La couleur de son ombre quand il est � la campagne, _ibid._ _Bonne-grace._ D'o� vient la bonne-grace des figures, pag. 174, ch. ccx. C. _CAMPAGNE._ Voyez _Paysage_. _Caract�re._ Caract�re des enfans, des vieillards, des vieilles, des femmes, pag. 45 et suiv. ch. lxj et suiv. _Carnation._ Quelle lumi�re on doit prendre pour peindre les carnations, pag. 26, ch. xxxvj. Carnation des visages, leur couleur, pag. 109, ch. cxxvj. _Champ._ Quel champ convient � chaque ombre et � chaque lumi�re, pag. 116, ch. cxxxvij. Ce qu'il faut faire quand le champ est de m�me couleur que le corps auquel il sert de champ, pag. 117, ch. cxxxviij. Effet des couleurs qui servent de champ au blanc, pag. 117 et suiv. ch. cxxxix. Du champ des figures, pag. 118, ch. cxl, pag. 234, ch. cclxxxviij. Du champ convenable � chaque chose, pag. 119, ch. cxlj. De la couleur du champ de quelque figure que ce soit, pag. 127, ch. cliv. Quelle doit �tre la couleur du champ pour donner du relief aux figures, pag. 132 et suiv. ch. clix et clx. Du rapport du champ avec les figures, pag. 249, ch. ccciv, pag. 283, ch. cccxxxiv. _Clair-obscur._ Des jours et des ombres qu'il faut donner aux figures qu'on dessine d'apr�s les bosses et les figures de relief, pag. 19 et suiv. ch. xxviij, pag. 21, ch. xxix. Donner de la grace � une t�te par le moyen des ombres et des lumi�res convenables, pag. 25, ch. xxxv. Si le clair-obscur l'emporte sur le dessin, pag. 42, ch. lvj. Des degr�s de teintes dans la Peinture, pag. 121 et suiv. ch. cxliv. Des jours et des ombres qu'il faut donner aux figures, pag. 225, ch. cclxxix, pag. 230, ch. cclxxxiv, pag. 248, ch. ccciij. Des lumi�res grandes ou petites, et des ombres, pag. 234, ch. cclxxxix, pag. 246, ch. cccij. _Coloris, couleur._ Que l'assortiment des couleurs doit servir � d�tacher les figures, et � les faire paro�tre �loign�es les unes des autres, pag. 60, ch. lxxiij. Des couleurs r�fl�chies, de leur force et de leur foiblesse, pag. 73, ch. lxxxvij. De l'assortiment des couleurs pour leur donner de la grace, pag. 84, ch. xcix. Comment on peut rendre les couleurs belles et vives, pag. 85, ch. c. De la couleur des ombres des couleurs, pag. 86, ch. cj. De la vari�t� des couleurs, qui vient de ce qu'elles sont plus �loign�es ou plus proches, _ibid._ ch. cij. A quelle distance les couleurs disparoissent enti�rement, pag. 87, ch. ciij. Quelle est la couleur de l'ombre du blanc, pag. 88, ch. civ. Quelle couleur produit l'ombre la plus obscure, _ibid._ ch. cv. En quelle occasion la qualit� de l'air et la distance n'apportent point de changement aux couleurs, pag. 89 et suiv. ch. cvj, et pag. 95, ch. cviij. De la perspective des couleurs, pag. 93, ch. cvij. Des couleurs qui se perdent �tant dans l'ombre, pag. 96, ch. cix. Pourquoi on ne distingue point la couleur des choses qui sont dans un lieu qui paro�t n'�tre point �clair�, quoiqu'il le soit, pag. 97, ch. cx. Ce qui est n�cessaire pour que la v�ritable couleur des choses paroisse, pag. 98, ch. cxj. Du changement que cause aux couleurs le champ sur lequel elles sont, pag. 99, ch. cxij. Du changement des couleurs transparentes couch�es sur d'autres couleurs, pages 99 et suivantes, chap. cxiij. Du m�lange des couleurs, _ibid._ Du degr� de teinte o� chaque couleur paro�t davantage, pag. 100, ch. cxiv. Que les couleurs qui n'ont point de lustre sont plus belles dans les parties �clair�es que dans les parties sombres, pag. 101, ch. cxv. De l'apparence des couleurs, pag. 102, ch. cxvj. Quelle partie de la couleur doit �tre plus belle, _ibid._ ch. cxvij. Ce qu'il y a de plus beau dans une couleur doit �tre plac� dans les jours, pag. 103, ch. cxviij. Du m�lange des couleurs, leur nombre, pag. 105 et suiv. ch. cxxj. De la couleur de la surface des corps opaques, pag. 107, ch. cxxij. Quel fond est plus propre � recevoir les couleurs, _ibid._ ch. cxxiij. Quelle partie d'un corps participe davantage � la couleur de son objet, pag. 108, ch. cxxiv. En quel endroit un corps paro�tra d'une plus belle couleur, pag. 109, ch. cxxv. Du changement que cause dans les couleurs leur �loignement de l'oeil, pag. 110, ch. cxxviij. Quel corps fait moins paro�tre sa v�ritable couleur, pag. 112, ch. cxxxj. Quel corps la fait mieux paro�tre, _ibid._ ch. cxxxij. De l'affoiblissement des couleurs caus� par l'�loignement, pag. 113, ch. cxxxiv. Caus� par un corps qui est entre elles et l'oeil, pag. 116, ch. cxxxvj. Des couleurs des choses qui sont �loign�es de l'oeil, pag. 120, ch. cxliij. Des degr�s de teintes dans la Peinture, pag. 121, ch. cxliv. Effets des couleurs diff�rentes oppos�es les unes aux autres, pag. 123, ch. cxlvj. Couleur des ombres, _ibid._ ch. cxlvij. Affoiblissement des couleurs dans les lieux obscurs, pag. 124, ch. cxlviij. Perspective des couleurs, _ibid._ ch. cxlix. Ce qui rend les couleurs plus belles, pag. 125, ch. cl. Rapport et conformit� de certaines couleurs, p. 126, ch. clij. Des couleurs qui sont dans l'ombre, pag. 126 et suiv ch. cliij. Quelle couleur le feu et la lumi�re du matin et du soir donnent aux objets, pag. 129, ch. clvj. Couleur des lumi�res incidentes et des lumi�res r�fl�chies, pag. 130, ch. clvij. Des couleurs qui r�sultent du m�lange des autres couleurs, pag. 134, ch. clxj. Diverses remarques sur les couleurs, pag. 135 et suiv. ch. clxij, pag. 253, ch. cccviij, pag. 254, ch. cccix. De la couleur des montagnes, pag. 138, ch. clxiij. Pratique de la perspective des couleurs, pag. 139, ch. clxiv. Couleur que les rayons du soleil donnent aux objets, pag. 256, ch. cccx. Des objets qu'on voit de loin, et au travers d'un air �pais, pag. 257 et suiv. ch. cccxij et suiv. De la couleur bleue que les ombres des corps produisent sur la fin du jour sur un corps blanc, pag. 270, ch. cccxxviij. Diverses remarques sur les couleurs, pag. 273 et suiv. ch. cccxxxij, pag. 288, ch. cccxl. Mani�re d'appliquer les couleurs sur la toile, pag. 300, ch. cccliij. Effet des corps transparens qui sont entre l'oeil et son objet, par rapport aux couleurs, p. 303, ch. ccclvij. _Composition._ Il faut, dans la composition d'un tableau, mettre de la vari�t� dans les figures, et en quoi, pag. 78, ch. xciv et pag. 82, ch. xcvij. Il faut, dans la composition d'un tableau, observer les coutumes et les biens�ances, pag. 203, 204, 205, ch. cclj et suiv. Composition d'un tableau o� l'on repr�sente une personne qui parle � plusieurs autres, pag. 205, ch. ccliv. D'une bataille, pag. 50 et suiv. ch. lxvij. D'une temp�te, pag. 47, ch. lxvj. D'une nuit, pag. 46, ch. lxv. D'un animal chim�rique, pag. 231, ch. cclxxxvj. _Contour._ Qu'il faut �viter la duret� des contours, p. 35, ch. lj. L'�loignement fait perdre les contours, pag. 236, ch. ccxcj. Contours des corps qui sont sur d'autres corps, pag. 237, ch. ccxciv. Contour des corps du c�t� du jour, pag. 286, ch. cccxxxvij. Des contours plus ou moins sensibles, pag. 286 et suiv. ch. cccxxxviij et suiv. _Contraste._ Il faut du contraste dans une composition d'histoire, dans les airs de t�te, les traits du visage, la situation des membres, &c. pag. 83, ch. xcviij, pag. 154, ch. clxxxiij. Il en faut dans la situation des membres, m�me d'une seule figure, pag. 214, ch. cclxv. D. _D�FAUTS._ Moins remarquables dans les petites choses que dans les grandes, pag. 36, ch. lij. _Dessin._ Mani�re d'apprendre � dessiner, pag. 9, ch. xij. En dessinant il faut s'accoutumer � finir ce qu'on fait, pag. 13, ch. xviij. Quand on dessine d'apr�s le naturel, � quelle distance il faut �tre de l'objet qu'on dessine, pag. 17, ch. xxv. De quel c�t� il faut prendre le jour, et � quelle hauteur il faut prendre son point de lumi�re pour dessiner d'apr�s le naturel, pag. 18, ch. xxvij, pag. 23, ch. xxxj. Comment il faut dessiner le nu, pag. 22, ch. xxx. Mani�re de dessiner un paysage, ou de faire un plan de quelque campagne, pag 23, ch. xxxij. Comment il faut dessiner � la lumi�re de la chandelle, pag. 24, ch. xxxiv. Comment on doit dessiner les figures qui doivent entrer dans la composition d'un tableau, pag. 26, ch. xxxvij. Moyen pour dessiner avec justesse d'apr�s le naturel, pag. 27, ch. xxxviij. Division d'une figure en diff�rentes parties pour la bien dessiner, _ibid._ ch. xxxix. Comment un Peintre doit se placer � l'�gard du jour qui �claire son mod�le, pag. 28, ch. xl. D'o� vient qu'on se trompe dans le jugement qu'on fait de la beaut� des parties du corps et de la justesse des proportions, pag. 29, ch. xlij. Pour dessiner correctement, il est n�cessaire de savoir l'anatomie, pag. 30, ch. xliij. Division du dessin, pag. 33, ch. xlviij. Proportion, attitude, expression des figures, _ibid._ ch. xlix, pag. 34, ch. l. Si le dessin l'emporte sur le clair-obscur, p. 42, ch. lvj. Mani�re de dessiner d'apr�s la bosse, pag. 110, ch. cxxvij. Mouvemens et proportions des membres de l'homme, pag. 142, ch. clxvj. Changemens que l'�ge cause dans les proportions des membres, _ibid._ ch. clxvij. Diff�rence des jointures des membres des enfans et de ceux des hommes, pag. 143, ch. clxviij. Diff�rence des proportions des membres des enfans et de ceux des hommes, pag. 144, ch. clxix. Jointures des doigts, pag. 145, ch. clxx. Des �paules, _ibid._ ch. clxxj. Des mains, pag. 149, ch. clxxvj. Des pieds, pag. 150, ch. clxxvij. Des membres, pag. 156, ch. clxxxiv. Mouvement des �paules, pag. 146, ch. clxxij. Mesures des corps, pag. 146, ch. clxxiij, pag. 147, ch. clxxiv. Plis des membres, _ibid._ Leur effet, pag. 150, ch. clxxviij et clxxix, pag. 170, ch. cciv, pag. 171, ch. ccv. Proportion des membres, pag. 148, ch. clxxv, pag. 157, ch. clxxxv. Diff�rens mouvemens de l'homme, pag. 151 et suiv. ch. clxxx et suiv. Nez; ses diff�rentes formes ou figures, pag. 159 et suiv. ch. clxxxviij et suiv. Muscles, comment ils doivent �tre marqu�s, pag. 163, ch. cxcj, pag. 165, ch. cxciv. Hauteur des �paules dans les diff�rentes actions de l'homme, pag. 166, ch. cxcvj. A quoi il faut prendre garde en dessinant les figures, pag. 178, ch. ccxiij. Effet des plis des membres, pag. 193, ch. ccxxxvj. Plis qui se font aux jointures, pag. 195, ch. ccxxxviij. Proportion des membres, pag. 202, ch. ccl. _Disposition_ � la Peinture diff�rente de l'inclination, pag. 4, ch. iv. _Draperies._ Des draperies, de leurs plis, &c. pag. 304 et suiv. ch. ccclviij et suiv. E. _ELOIGNEMENT._ Effet de l'�loignement par rapport au dessin et par rapport au coloris, pag. 236, ch. ccxcij et suiv. pag. 251, ch. cccvj, pag. 252, ch. cccvij, pag. 260 et suiv. ch. cccxvj et suiv. pag. 282, ch. cccxxxiij, pag. 303, ch. ccclv et suiv. _Enfant._ Caract�re et attitude des enfans, pag. 44, ch. lxj. _�quilibre._ Comment en retirant le bras �tendu on change l'�quilibre du corps, pag. 167, ch. cxcviij. Centre de gravit� dans les mouvemens lents, pag. 168, ch. cxcix. �quilibre dans un homme qui porte un fardeau sur ses �paules, pag. _ibid._ ch. cc. Dans un homme qui se tient sur ses pieds, pag. 169, ch. ccj, pag. 178, ch. ccxiv, pag. 215, ch. cclxvj. Dans un homme qui marche, pag. 170, ch. ccij. Dans un animal arr�t� sur ses jambes, _ibid._ ch. cciij. Dans l'homme consid�r� en diff�rentes attitudes, pag. 171, ch. ccvj, et pag. 173, ch. ccix. Dans un homme qui veut �lever un poids, ou le remuer, pag. 179, ch. ccxv. Dans un homme qui est en repos, pag. 212, ch. cclxiij. Dans un homme qui est debout, pag. 213, ch. cclxiv. Dans un homme qui marche contre le vent, pag. 238, ch. ccxcv. �quilibre des figures, pag. 297, ch. cccl. _Esquisse._ Comment il faut faire les esquisses des compositions d'histoires et des figures, pag. 9, ch. xiij. _�tude._ Ordre qu'un jeune Peintre doit garder dans ses �tudes, pag. 1, ch. j. A quoi il doit s'appliquer principalement dans ses �tudes, pag. 2, ch. ij. Comment il doit se comporter dans ses �tudes, pag. 4, ch. v. Mani�re de faire des �tudes, pag. 5, ch. vij. Moyen pour rendre les �tudes plus utiles, pag. 12. ch. xvij. Dans les �tudes il faut apprendre � finir ses ouvrages, devant que de prendre une mani�re prompte et hardie, pag. 13, ch. xviij. Qu'il faut voir le naturel, et ne pas se fier aux id�es qu'on s'est form� des choses, pag. 14, ch. xx. Qu'il faut �tudier l'Anatomie, et comment, pag. 42, ch. lvij. Comment il faut �tudier les mouvemens du corps humain, pag. 79, ch. xcv. Comment il faut �tudier la composition des histoires, pag. 81, ch. xcvj. Il faut �tudier la nature, pag. 219, ch. cclxxij. _Expression._ Moyen de donner aux figures une expression convenable, pag. 43, ch. lviij. Elle consiste dans le mouvement des parties du visage, et des autres membres, pag. 158, ch. clxxxvij. Ce qu'il y faut observer, _ibid._ Les mouvemens des figures doivent exprimer leurs sentimens, pag. 164, ch. cxciij. Expressions doivent �tre vari�es selon la diff�rence des choses que font les figures, pag. 199, ch. ccxliv. Et selon les sentimens diff�rens de l'ame, pag. _ibid._ ch. ccxlv. Effet des sentimens de l'ame sur le corps, pag. 200, ch. ccxlvj. et suiv. Expression du rire, de la joie, de la tristesse, pag. 208, ch. cclvij. F. _FAUTES._ Il faut corriger les fautes qu'on remarque dans ses ouvrages, pag. 10, ch. xiv. _Femme._ Caract�re et attitude des femmes, pag. 45, ch. lxiv. _Feu._ Quelle couleur le feu donne aux objets qu'il �claire, pag. 129, ch. clvj. _Figure._ De la position des figures, pag. 74, ch. lxxxix. _Finir._ Quelles choses doivent �tre plus finies, et quelles choses doivent l'�tre moins, pag. 60, ch. lxxij, et pag. 228, ch. cclxxxij. _Fond._ Voyez _Champ_. _Fum�e._ Remarques sur la fum�e, pag. 271, ch. cccxxix, pag. 272, ch. cccxxxj. G. _GRANDEUR._ Comment on peut repr�senter la juste grandeur des objets, pag. 58, ch. lxxj. _Groupe._ Comment on peut apprendre � agrouper les figures, pag. 75, ch. xc. H. _HORIZON._ De l'horizon qui paro�t dans l'eau, pag. 311, ch. ccclxv. I. _IMITATION._ Un Peintre ne doit pas imiter servilement un autre Peintre, pag. 17, ch. xxiv. Il doit imiter la nature, _ibid._ _Inclination._ Inclination pour la Peinture, diff�rente de la disposition, comment elle se conno�t, pag. 4, ch. iv. _Invention._ Moyen d'inventer ais�ment plusieurs choses, pag. 11, ch. xvj. _Jour._ Voyez _Clair-obscur_. Que le jour qu'on donne � un tableau est souvent diff�rent de celui auquel on a dessin� les figures qu'on y fait entrer; ce qu'il y a � observer sur cela, pag. 32, ch. xlvj. Comment on doit prendre le jour en face, ou de c�t�, lequel donne plus de grace, pag. 61, ch. lxxiv. Quel jour il faut prendre en peignant, pag. 238, ch. ccxcvj. Quel jour donne plus de grace aux figures, pag. 293, ch. cccxliij. _Jugement._ Jugement qu'on doit porter de ses ouvrages, pag. 14, ch. xx. Un Peintre doit savoir les jugemens qu'on fait de ses ouvrages, _ibid._ ch. xix. L. _LOINTAIN._ Comment on doit peindre un lointain, pag. 55, ch. lxviij. _Lumi�re._ Voyez _Jour_ et _Clair-obscur_. Quelle lumi�re est avantageuse pour faire paro�tre les objets, pag. 28, ch. xlj. Division de la lumi�re, pag. 62 et suiv. ch. lxxvj. Quelle lumi�re il faut donner aux paysages, pag. 113, ch. cxxxiij. Lumi�re incidente et lumi�re r�fl�chie, leur couleur, pag. 130, ch. clvij. Couleur des ombres, pag. 131, ch. clviij. M. _MER._ Couleurs de l'eau de la mer, selon les divers endroits d'o� elle est vue, pag. 122, ch. cxlv. _M�thode._ M�thode qu'il faut donner � ceux qui veulent apprendre � peindre, pag. 2, ch. iij. _Mod�le._ Du choix qu'un Peintre doit faire d'un mod�le, pag. 31, ch. xlv. _Montagne._ Comment on doit repr�senter les montagnes, pag. 55 et 56, ch. lxviij. De la couleur des montagnes, pag. 138, ch. clxiij. _Mouvement._ Mouvement, course de l'homme et des animaux, pag. 165, ch. cxcv, pag. 242, ch. ccxcix. Divers mouvemens de l'homme, pag. 172, ch. ccvij. Le mouvement est produit par la perte de l'�quilibre, pag. 173, ch. ccviij. Libert� des membres, leur facilit� � se mouvoir, pag. 175, ch. ccxj. Mouvement de l'homme lorsqu'il tourne la t�te en arri�re, pag. 189, ch. ccxxxj. Lorsqu'il approche les bras l'un de l'autre par derri�re, pag. _ibid._ ch. ccxxxij. Lorsqu'il se pr�pare � frapper de toute sa force, pag. 190, ch. ccxxxiij. Si l'on peut tourner la jambe sans tourner la cuisse, pag. 194, ch. ccxxxvij. Mouvement simple de l'homme, pag. 196, ch. ccxxxix. Mouvement compos�, _ibid._ ch. ccxl. Mouvemens; ils doivent �tre convenables � l'action qu'on repr�sente, pag. 197, ch. ccxlj. Mouvemens des animaux, pag. 202, ch. ccxlix, pag. 216, ch. cclxvij et suiv. Effet du mouvement dans l'homme, pag. 217, ch. cclxix. Mouvement d'un homme qui saute, pag. _ibid._ ch. cclxx. _Muscle._ Dans quelles figures les muscles ne doivent pas �tre trop marqu�s, pag. 182, ch. ccxx. Des muscles gros et courts, _ibid._ ch. ccxxj. Des muscles de ceux qui sont gras, pag. 183, ch. ccxxiij. Des muscles qui disparoissent en diff�rens mouvemens, _ibid._ Dans quelles figures les muscles doivent �tre peu marqu�s, pag. 184, ch. ccxxiv, pag. 185, ch. ccxxvj. Ce que marquent des muscles qui paroissent beaucoup, pag. 185, ch. ccxxv. Extension et raccourcissement des muscles, p. 186, ch. ccxxvij. N. _NUIT._ Comment on doit repr�senter une nuit, pag. 46 et suiv. ch. lxv. O. _OMBRE._ Voyez _Clair-obscur_. Remarque sur les diff�rentes ombres qu'on objet a en m�me temps, pag. 18, ch. xxvj. Quelquefois les ombres ne doivent pas �tre trop exactement termin�es, pag. 44, ch. lx. Couleur des ombres, pag. 131, ch. clviij. Ombre des ponts, marqu�s sur l'eau, pag. 296, ch. cccxlviij. P. _PAYSAGE._ Mani�re de dessiner un paysage, pag. 23, ch. xxxij, pag. 24, ch. xxxiij. Quelle lumi�re il faut donner aux paysages, pag. 113, ch. cxxxiij. Dans un paysage les objets �loign�s ne doivent pas avoir une teinte plus obscure, pag. 120, ch. cxlij. Des arbres et des herbes qu'on repr�sente dans un paysage, pag. 231, ch. cclxxxv. Qu'il y faut observer chaque pays, pag. 293, ch. cccxliv. Et chaque saison, pag. 294, ch. cccxlv. _Peintre, Peinture._ Division g�n�rale de la Peinture, pag. 33, ch. xlvij. Des jugemens qu'un Peintre fait de ses ouvrages et de ceux des autres, pag. 219 et suiv. ch. cclxxiij et suiv. Usage d'un miroir en peignant, pag. 221 et suiv. ch. cclxxv. Quelle peinture est la plus parfaite, pag. 223, ch. cclxxvj. Quel doit �tre le dessein d'un Peintre et son intention, pag. 224, ch. cclxxvij. S'il est plus important dans la Peinture de dessiner correctement ou d'entendre le clair-obscur, _ibid._ ch. cclxxviij. En quel lieu il faut �tre plac� pour bien voir un ouvrage de Peinture, pag. 227, ch. cclxxx. Comment on doit juger des ouvrages de Peinture, pag. 284, ch. cccxxxv. _Perspective._ Quand il la faut apprendre, pag. 1, ch. j. De la perspective a�rienne ou des couleurs, pag. 93, ch. cvij, pag. 113, ch. cxxxiv, pag. 140 et suiv. ch. clxv. Pratique de la perspective des couleurs, pag. 139, ch. clxiv. Faire paro�tre une figure plus grande qu'elle n'est en effet, pag. 244 et suiv. ch. ccc et suiv. Observations sur la perspective, pag. 253, ch. cccviij, pag. 254, ch. cccix. De la perspective lin�ale, pag. 264, ch. cccxxij. Parties de la perspective par rapport � la Peinture, pag. 288 et suiv. ch. cccxl. Usage de la perspective, pag. 297, ch. cccxlix, pag. 302, ch. cccliv. _Pluie._ Effets de la pluie par rapport au coloris, p. 295, ch. cccxlvij. _Point de vue._ Qu'il ne faut point peindre sur une m�me fa�ade divers tableaux qui aient diff�rens points de vue, pag. 39, ch. liv. Un tableau n'a qu'un point de vue, pag. 43, ch. lix. A quelle hauteur doit �tre le point de vue, pag. 228, ch. cclxxxj. _Portraits._ Quelle lumi�re on doit prendre pour peindre les portraits, pag. 26, ch. xxxvj. Observation pour faire les portraits, pag. 159, ch. clxxxviij. Moyen de les faire, quoiqu'on n'ait vu qu'une fois la personne qu'on veut portraire, p. 161, ch. clxxxix. Moyen de conserver l'id�e des traits d'un visage, pag. 162, ch. cxc. _Poussi�re._ Remarque sur la poussi�re qui s'�l�ve, pag. 272, ch. cccxxx. _Pratique._ La pratique doit suivre l'�tude de la th�orie, pag. 16, ch. xxiij. _Progr�s._ Comment on conno�t le progr�s qu'on fait dans la Peinture, pag. 8, ch. xj. _Proportion._ Voyez _Dessin_. Vari�t� des figures qui vient de la diff�rence des proportions, pag. 15, ch. xxj. Quelle proportion il faut donner � la hauteur de la premi�re figure d'un tableau d'histoire, pag. 76, ch. xcj. Il faut toujours observer et garder les proportions, pag. 235, ch. ccxc. R. _RACCOURCIR._ En quelle occasion on peut faire des figures raccourcies, et quand on ne le peut pas, pag. 78, ch. xciij. _Reflet._ Des reflets de lumi�re, pag. 62, ch. lxxv. En quel endroit il ne peut y avoir de reflets, _ibid._ ch. lxxvj. De la couleur des reflets, pag. 63, ch. lxxvij. De la clart� ou de l'�clat des reflets, pag. 64, chap. lxxviij. En quel endroit ils paroissent davantage, en quel endroit ils paroissent moins, pag. 65, ch. lxxix. Quelle partie d'un reflet doit �tre plus claire, _ibid._ ch. lxxx. Des reflets du coloris de la carnation, pag. 67, ch. lxxxj. En quels endroits les reflets sont plus sensibles, pag. 68, ch. lxxxij. Des reflets doubles et triples, _ibid._ ch. lxxxiij. Que la couleur d'un reflet n'est pas simple, mais m�l�e de deux ou de plusieurs couleurs, pag. 70, ch. lxxxiv. Que les reflets sont rarement de la couleur du corps d'o� ils partent, ou de la couleur du corps o� ils sont port�s, pag. 71, ch. lxxxv. Des couleurs des reflets, de la vivacit� et de la foiblesse de ces couleurs, pag. 72, ch. lxxxvj. Des termes des reflets, pag. 74, ch. lxxxviij. _Relief._ Les choses peintes n'ont jamais le m�me relief que les choses naturelles, et pourquoi, pag. 37, ch. liij. Quelle lumi�re peut donner un plus grand relief aux figures, pag. 41, ch. lv. Moyen pour donner un grand relief aux figures, pag. 57, ch. lxx, et pag. 293, ch. cccxliij. Quelle figure dans un tableau d'histoire doit avoir plus de relief, pag. 77, ch. xcij. Comment on peut donner du relief aux visages, pag. 232 et suiv. ch. cclxxxvij, pag. 234, ch. cclxxxviij. Relief des figures �loign�es de l'oeil, pag. 285, ch. cccxxxvj. Diff�rence entre le relief des figures peintes, et le relief des figures naturelles, pag. 290, ch. cccxlj. _R�p�tition._ Il ne faut pas dans un m�me tableau r�p�ter les m�mes choses, les m�mes attitudes, les m�mes plis de draperies, &c. pag. 30, ch. xliv, pag. 154, ch. clxxxiij, pag. 177, ch. ccxij. S. _STATUE._ Pratique pour �baucher une statue, p. 298, ch. ccclj. T. _TEINTE._ Voyez _Coloris_. _Temp�te._ Comment on doit repr�senter une temp�te, pag. 47 et suiv. ch. lxvj. _Th�orie._ Il faut �tudier la Th�orie devant que de s'adonner � une pratique prompte et l�g�re, pag. 16, ch. xxiij. V. _VENT._ Comment il faut repr�senter les effets du vent, pag. 295, ch. cccxlvj. _Vert-de-gris._ Du vert-de-gris, pag. 103, ch. cxix. Moyen de le rendre plus beau, pag. 104, ch. cxx. _Verd._ De la verdure de la campagne, pag. 111, ch. cxxix. Quel verd tire plus sur le bleu, pag. _ibid._ ch. cxxx. _Vieilles gens._ Caract�re et attitude des vieillards et des vieilles, pag. 45, ch. lxij et lxiij. U. _UNIVERSEL._ Un Peintre doit �tre universel, pag. 4, ch. v. Ce qu'il doit faire pour �tre universel, p. 6 et suiv. ch. viij, ix et x, pag. 15 et suiv. ch. xxij. FIN DE LA TABLE DES MATI�RES. A PARIS, DE L'IMPRIMERIE DE CRAPELET. * * * * * Liste des modifications: page XXV: �qu l'emp�cha� remplac� par �qui l'emp�cha� (une aventure bizarre qui l'emp�cha) page 17: �rencontre� par �rencontrent� (quelles parties se rencontrent) page 112: �genon� par �genou� (et la plie par le genou) page 255: �dn� par �du� (la couleur du m�me air) End of the Project Gutenberg EBook of Trait� �l�mentaire de la peinture, by L�onard de Vinci *** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK TRAIT� �L�MENTAIRE DE LA PEINTURE *** ***** This file should be named 35971-8.txt or 35971-8.zip ***** This and all associated files of various formats will be found in: http://www.gutenberg.org/3/5/9/7/35971/ Produced by Claudine Corbasson and the Online Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This file was produced from images generously made available by The Internet Archive/American Libraries.) Updated editions will replace the previous one--the old editions will be renamed. 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Redistribution is subject to the trademark license, especially commercial redistribution. *** START: FULL LICENSE *** THE FULL PROJECT GUTENBERG LICENSE PLEASE READ THIS BEFORE YOU DISTRIBUTE OR USE THIS WORK To protect the Project Gutenberg-tm mission of promoting the free distribution of electronic works, by using or distributing this work (or any other work associated in any way with the phrase "Project Gutenberg"), you agree to comply with all the terms of the Full Project Gutenberg-tm License (available with this file or online at http://gutenberg.org/license). Section 1. General Terms of Use and Redistributing Project Gutenberg-tm electronic works 1.A. By reading or using any part of this Project Gutenberg-tm electronic work, you indicate that you have read, understand, agree to and accept all the terms of this license and intellectual property (trademark/copyright) agreement. 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INDEMNITY - You agree to indemnify and hold the Foundation, the trademark owner, any agent or employee of the Foundation, anyone providing copies of Project Gutenberg-tm electronic works in accordance with this agreement, and any volunteers associated with the production, promotion and distribution of Project Gutenberg-tm electronic works, harmless from all liability, costs and expenses, including legal fees, that arise directly or indirectly from any of the following which you do or cause to occur: (a) distribution of this or any Project Gutenberg-tm work, (b) alteration, modification, or additions or deletions to any Project Gutenberg-tm work, and (c) any Defect you cause. Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg-tm Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of electronic works in formats readable by the widest variety of computers including obsolete, old, middle-aged and new computers. It exists because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from people in all walks of life. Volunteers and financial support to provide volunteers with the assistance they need, are critical to reaching Project Gutenberg-tm's goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will remain freely available for generations to come. In 2001, the Project Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure and permanent future for Project Gutenberg-tm and future generations. To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4 and the Foundation web page at http://www.pglaf.org. Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit 501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at http://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent permitted by U.S. federal laws and your state's laws. The Foundation's principal office is located at 4557 Melan Dr. S. Fairbanks, AK, 99712., but its volunteers and employees are scattered throughout numerous locations. Its business office is located at 809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887, email business@pglaf.org. Email contact links and up to date contact information can be found at the Foundation's web site and official page at http://pglaf.org For additional contact information: Dr. Gregory B. Newby Chief Executive and Director gbnewby@pglaf.org Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide spread public support and donations to carry out its mission of increasing the number of public domain and licensed works that can be freely distributed in machine readable form accessible by the widest array of equipment including outdated equipment. Many small donations ($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt status with the IRS. The Foundation is committed to complying with the laws regulating charities and charitable donations in all 50 states of the United States. Compliance requirements are not uniform and it takes a considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up with these requirements. We do not solicit donations in locations where we have not received written confirmation of compliance. To SEND DONATIONS or determine the status of compliance for any particular state visit http://pglaf.org While we cannot and do not solicit contributions from states where we have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition against accepting unsolicited donations from donors in such states who approach us with offers to donate. International donations are gratefully accepted, but we cannot make any statements concerning tax treatment of donations received from outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff. Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation methods and addresses. Donations are accepted in a number of other ways including checks, online payments and credit card donations. To donate, please visit: http://pglaf.org/donate Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic works. Professor Michael S. Hart is the originator of the Project Gutenberg-tm concept of a library of electronic works that could be freely shared with anyone. For thirty years, he produced and distributed Project Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of volunteer support. Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed editions, all of which are confirmed as Public Domain in the U.S. unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily keep eBooks in compliance with any particular paper edition. Most people start at our Web site which has the main PG search facility: http://www.gutenberg.org This Web site includes information about Project Gutenberg-tm, including how to make donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks.