The Project Gutenberg EBook of Le Tour du Monde; Mont C�leste, by Various This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included with this eBook or online at www.gutenberg.org Title: Le Tour du Monde; Mont C�leste Journal des voyages et des voyageurs; 2e Sem. 1905 Author: Various Editor: �douard Charton Release Date: November 21, 2009 [EBook #30518] Language: French Character set encoding: ISO-8859-1 *** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK LE TOUR DU MONDE; MONT C�LESTE *** Produced by Carlo Traverso, Christine P. Travers and the Online Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This file was produced from images generously made available by the Biblioth�que nationale de France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr) [Note au lecteur de ce fichier digital: Seules les erreurs clairement introduites par le typographe ont �t� corrig�es. Ce fichier est un extrait du recueil du journal "Le Tour du monde: Journal des voyages et des voyageurs" (2e semestre 1905). Les articles ont �t� regroup�s dans des fichiers correspondant aux diff�rentes zones g�ographiques, ce fichier contient les articles sur le Mont C�leste. Chaque fichier contient l'index complet du recueil dont ces articles sont originaires. La liste des illustrations �tant tr�s longue, elle a �t� d�plac�e et plac�e en fin de fichier.] LE TOUR DU MONDE PARIS IMPRIMERIE FERNAND SCHMIDT 20, rue du Dragon, 20 NOUVELLE S�RIE--11e ANN�E 2e SEMESTRE LE TOUR DU MONDE JOURNAL DES VOYAGES ET DES VOYAGEURS Le Tour du Monde a �t� fond� par �douard Charton en 1860 PARIS LIBRAIRIE DE HACHETTE ET Cie 79, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 79 LONDRES, 18, KING WILLIAM STREET, STRAND 1905 Droits de traduction et de reproduction r�serv�s. TABLE DES MATI�RES L'�T� AU KACHMIR Par _Mme F. MICHEL_ I. De Paris � Sr�nagar. -- Un guide pratique. -- De Bombay � Lahore. -- Premiers pr�paratifs. -- En _tonga_ de Rawal-Pindi � Sr�nagar. -- Les Kachmiris et les ma�tres du Kachmir. -- Retour � la vie nomade. 1 II. La �Vall�e heureuse� en _dounga_. -- Bateliers et bateli�res. -- De Baramoula � Sr�nagar. -- La capitale du Kachmir. -- Un peu d'�conomie politique. -- En amont de Sr�nagar. 13 III. Sous la tente. -- Les petites vall�es du Sud-Est. -- Histoires de voleurs et contes de f�es. -- Les ruines de Martand. -- De Brahmanes en Moullas. 25 IV. Le p�lerinage d'Amarn�th. -- La vall�e du Lidar. -- Les p�lerins de l'Inde. -- Vers les cimes. -- La grotte sacr�e. -- En _dholi_. -- Les Goudjars, pasteurs de buffles. 37 V. Le p�lerinage de l'Haramouk. -- Alpinisme fun�bre et hydroth�rapie religieuse. -- Les temples de Vang�th. -- Frissons d'automne. -- Les adieux � Sr�nagar. 49 SOUVENIRS DE LA COTE D'IVOIRE Par _le docteur LAMY_ _M�decin-major des troupes coloniales_. I. Voyage dans la brousse. -- En file indienne. -- Mot�so. -- La route dans un ruisseau. -- Dengu�ra. -- Kodioso. -- Villes et villages abandonn�s. -- O� est donc Betti�? -- Arriv�e � Dioubasso. 61 II. Dans le territoire de Mop�. -- Coutumes du pays. -- La mort d'un prince h�ritier. -- L'�preuve du poison. -- De Mop� � Betti�. -- B�nie, roi de Betti�, et sa capitale. -- Retour � Petit-Al�p�. 73 III. Rapports et r�sultats de la mission. -- Valeur �conomique de la c�te d'Ivoire. -- Richesse de la flore. -- Sup�riorit� de la faune. 85 IV. La fi�vre jaune � Grand-Bassam. -- Deuils nombreux. -- Retour en France. 90 L'�LE D'ELBE Par _M. PAUL GRUYER_ I. L'�le d'Elbe et le �canal� de Piombino. -- Deux mots d'histoire. -- D�barquement � Porto-Ferraio. -- Une ville d'op�ra. -- La �teste di Napoleone� et le Palais imp�rial. -- La banni�re de l'ancien roi de l'�le d'Elbe. -- Offre � Napol�on III, apr�s Sedan. -- La biblioth�que de l'Empereur. -- Souvenir de Victor Hugo. Le premier mot du po�te. -- Un enterrement aux flambeaux. Cagoules noires et cagoules blanches. Dans la paix des limbes. -- Les diff�rentes routes de l'�le. 97 II. Le golfe de Procchio et la montagne de Jupiter. -- Soir temp�tueux et morne tristesse. -- L'ascension du Monte Giove. -- Un village dans les nu�es. -- L'Ermitage de la Madone et la �Sedia di Napoleone�. -- Le vieux gardien de l'infini. �Bastia, Signor!�. Vision sublime. -- La c�te orientale de l'�le. Capoliveri et Porto-Longone. -- La gorge de Monserrat. -- Rio 1 Marina et le monde du fer. 109 III. Napol�on, roi de l'�le d'Elbe. -- Installation aux Mulini. -- L'Empereur � la gorge de Monserrat. -- San Martino Saint-Cloud. La salle des Pyramides et le plafond aux deux colombes. Le lit de Bertrand. La salle de bain et le miroir de la V�rit�. -- L'Empereur transporte ses p�nates sur le Monte Giove. -- Elbe perdue pour la France. -- L'ancien Mus�e de San Martino. Essai de reconstitution par le propri�taire actuel. Le lit de Madame M�re. -- O� il faut chercher � Elbe les vraies reliques imp�riales. �Apollon gardant ses troupeaux.� �ventail et bijoux de la princesse Pauline. Les clefs de Porto-Ferraio. Autographes. La robe de la signorina Squarci. -- L'�glise de l'archiconfr�rie du Tr�s-Saint-Sacrement. La �Pieta� de l'Empereur. Les broderies de soie des Mulini. -- Le vieil aveugle de Porto-Ferraio. 121 D'ALEXANDRETTE AU COUDE DE L'EUPHRATE Par _M. VICTOR CHAPOT_ _membre de l'�cole fran�aise d'Ath�nes._ I. -- Alexandrette et la mont�e de Be�lan. -- Antioche et l'Oronte; excursions � Daphn� et � Soueidieh. -- La route d'Alep par le Kasr-el-Benat et Dana. -- Premier aper�u d'Alep. 133 II. -- Ma caravane. -- Village d'Yazides. -- Nisib. -- Premi�re rencontre avec l'Euphrate. -- Biredjik. -- Souvenirs des H�t�ens. -- Excursion � Resapha. -- Comment atteindre Ras-el-A�n? Comment le quitter? -- Enfin � Orfa! 145 III. -- S�jour � Orfa. -- Samosate. -- Vall�e accident�e de l'Euphrate. -- Roum-Kaleh et A�ntab. -- Court repos � Alep. -- Saint-Sym�on et l'Alma-Dagh. -- Huit jours trappiste! -- Conclusion pessimiste. 157 LA FRANCE AUX NOUVELLES-H�BRIDES Par _M. RAYMOND BEL_ � qui les Nouvelles-H�brides: France, Angleterre ou Australie? Le condominium anglo-fran�ais de 1887. -- L'oeuvre de M. Higginson. -- Situation actuelle des �les. -- L'influence anglo-australienne. -- Les ressources des Nouvelles-H�brides. -- Leur avenir. 169 LA RUSSIE, RACE COLONISATRICE Par _M. ALBERT THOMAS_ I. -- Moscou. -- Une d�ception. -- Le Kreml, acropole sacr�e. -- Les �glises, les palais: deux �poques. 182 II. -- Moscou, la ville et les faubourgs. -- La bourgeoisie moscovite. -- Changement de paysage; Nijni-Novgorod: le Kreml et la ville. 193 III. -- La foire de Nijni: marchandises et marchands. -- L'oeuvre du commerce. -- Sur la Volga. -- � bord du _Sviatoslav_. -- Une visite � Kazan. -- La �sainte m�re Volga�. 205 IV. -- De Samara � Tomsk. -- La vie du train. -- Les passagers et l'�quipage: les soir�es. -- Dans le steppe: l'effort des hommes. -- Les �migrants. 217 V. -- Tomsk. -- La m�l�e des races. -- Anciens et nouveaux fonctionnaires. -- L'Universit� de Tomsk. -- Le r�le de l'�tat dans l'oeuvre de colonisation. 229 VI. -- Heures de retour. -- Dans l'Oural. -- La Grande-Russie. -- Conclusion. 241 LUGANO, LA VILLE DES FRESQUES Par _M. GERSPACH_ La petite ville de Lugano; ses charmes; son lac. -- Un peu d'histoire et de g�ographie. -- La cath�drale de Saint-Laurent. -- L'�glise Sainte-Marie-des-Anges. -- Lugano, la ville des fresques. -- L'oeuvre du Luini. -- Proc�d�s employ�s pour le transfert des fresques. 253 SHANGHA�, LA M�TROPOLE CHINOISE Par _M. �MILE DESCHAMPS_ I. -- Woo-Sung. -- Au d�barcad�re. -- La Concession fran�aise. -- La Cit� chinoise. -- Retour � notre concession. -- La police municipale et la prison. -- La cangue et le bambou. -- Les ex�cutions. -- Le corps de volontaires. -- �meutes. -- Les conseils municipaux. 265 II. -- L'�tablissement des j�suites de Zi-ka-oue�. -- Pharmacie chinoise. -- Le camp de Kou-ka-za. -- La fumerie d'opium. -- Le charnier des enfants trouv�s. -- Le fournisseur des ombres. -- La concession internationale. -- Jardin chinois. -- Le Bund. -- La pagode de Long-hoa. -- Fou-tch�ou-road. -- Statistique. 277 L'�DUCATION DES N�GRES AUX �TATS-UNIS Par _M. BARGY_ Le probl�me de la civilisation des n�gres. -- L'Institut Hampton, en Virginie. -- La vie de Booker T. Washington. -- L'�cole professionnelle de Tuskegee, en Alabama. -- Conciliateurs et agitateurs. -- Le vote des n�gres et la casuistique de la Constitution. 289 � TRAVERS LA PERSE ORIENTALE Par _le Major PERCY MOLESWORTH SYKES_ _Consul g�n�ral de S. M. Britannique au Khorassan_. I. -- Arriv�e � Astrabad. -- Ancienne importance de la ville. -- Le pays des Turkomans: � travers le steppe et les Collines Noires. -- Le Khorassan. -- Mechhed: sa mosqu�e; son commerce. -- Le d�sert de Lout. -- Sur la route de Kirman. 301 II. -- La province de Kirman. -- G�ographie: la flore, la faune; l'administration, l'arm�e. -- Histoire: invasions et d�vastations. -- La ville de Kirman, capitale de la province. -- Une saison sur le plateau de Sardou. 313 III. -- En Baloutchistan. -- Le Makran: la c�te du golfe Arabique. -- Histoire et g�ographie du Makran. -- Le Sarhad. 325 IV. -- D�limitation � la fronti�re perso-baloutche. -- De Kirman � la ville-fronti�re de Kouak. -- La Commission de d�limitation. -- Question de pr�s�ance. -- L'oeuvre de la Commission. -- De Kouak � K�lat. 337 V. -- Le Seistan: son histoire. -- Le delta du Helmand. -- Comparaison du Seistan et de l'�gypte. -- Excursions dans le Helmand. -- Retour par Yezd � Kirman. 349 AUX RUINES D'ANGKOR Par _M. le Vicomte DE MIRAMON-FARGUES_ De Sa�gon � Pn�m-penh et � Compong-Chuang. -- � la rame sur le Grand-Lac. -- Les charrettes cambodgiennes. -- Siem-R�ap. -- Le temple d'Angkor. -- Angkor-Tom -- D�cadence de la civilisation khmer. -- Rencontre du second roi du Cambodge. -- Oudong-la-Superbe, capitale du p�re de Norodom. -- Le palais de Norodom � Pn�m-penh. -- Pourquoi la France ne devrait pas abandonner au Siam le territoire d'Angkor. 361 EN ROUMANIE Par _M. Th. HEBBELYNCK_ I. -- De Budapest � Petrozeny. -- Un mot d'histoire. -- La vall�e du Jiul. -- Les Boyards et les Tziganes. -- Le march� de Targu Jiul. -- Le monast�re de Tismana. 373 II. -- Le monast�re d'Horezu. -- Excursion � Bistritza. -- Romnicu et le d�fil� de la Tour-Rouge. -- De Curtea de Arges � Campolung. -- D�fil� de Dimboviciora. 385 III. -- Bucarest, aspect de la ville. -- Les mines de sel de Slanic. -- Les sources de p�trole de Doftana. -- Sina�a, promenade dans la for�t. -- Busteni et le domaine de la Couronne. 397 CROQUIS HOLLANDAIS Par _M. Lud. GEORGES HAM�N_ _Photographies de l'auteur._ I. -- Une ville hollandaise. -- Middelburg. -- Les nuages. -- Les _boerin_. -- La maison. -- L'�clusier. -- Le march�. -- Le village hollandais. -- Zoutelande. -- Les bons aubergistes. -- Une soir�e locale. -- Les sabots des petits enfants. -- La kermesse. -- La pi�t� du Hollandais. 410 II. -- Rencontre sur la route. -- Le beau cavalier. -- Un d�jeuner d�cevant. -- Le p�re Kick. 421 III. -- La terre hollandaise. -- L'eau. -- Les moulins. -- La culture. -- Les polders. -- Les digues. -- Origine de la Hollande. -- Une nuit � Veere. -- Wemeldingen. -- Les cinq jeunes filles. -- Flirt muet. -- Le pochard. -- La vie sur l'eau. 423 IV. -- Le p�cheur hollandais. -- Volendam. -- La lessive. -- Les marmots. -- Les canards. -- La p�che au hareng. -- Le fils du p�cheur. -- Une �le singuli�re: Marken. -- Au milieu des eaux. -- Les maisons. -- Les moeurs. -- Les jeunes filles. -- Perspective. -- La tourbe et les tourbi�res. -- Produit national. -- Les tourbi�res hautes et basses. -- Houille locale. 433 ABYDOS dans les temps anciens et dans les temps modernes Par _M. E. AMELINEAU_ L�gende d'Osiris. -- Histoire d'Abydos � travers les dynasties, � l'�poque chr�tienne. -- Ses monuments et leur spoliation. -- Ses habitants actuels et leurs moeurs. 445 VOYAGE DU PRINCE SCIPION BORGH�SE AUX MONTS C�LESTES Par _M. JULES BROCHEREL_ I. -- De Tachkent � Prjevalsk. -- La ville de Tachkent. -- En tarentass. -- Tchimkent. -- Aouli�-Ata. -- Tokmak. -- Les gorges de Bouam. -- Le lac Issik-Koul. -- Prjevalsk. -- Un chef kirghize. 457 II. -- La vall�e de Tomghent. -- Un aoul kirghize. -- La travers�e du col de Tomghent. -- Chevaux alpinistes. -- Une vall�e d�serte. -- Le Kizil-tao. -- Le Saridjass. -- Troupeaux de chevaux. -- La vall�e de Kachkateur. -- En vue du Khan-Tengri. 469 III. -- Sur le col de Tuz. -- Rencontre d'antilopes. -- La vall�e d'Inghiltchik. -- Le �tchiou mouz�. -- Un chef kirghize. -- Les gorges d'Attia�lo. -- L'aoul d'Oustchiar. -- Arr�t�s par les rochers. 481 IV. -- Vers l'aiguille d'Oustchiar. -- L'aoul de Kaende. -- En vue du Khan-Tengri. -- Le glacier de Kaende. -- Bloqu�s par la neige. -- Nous songeons au retour. -- Dans la vall�e de l'Irtach. -- Chez le kaltch�. -- Cuisine de Kirghize. -- Fin des travaux topographiques. -- Un enterrement kirghize. 493 V. -- L'heure du retour. -- La vall�e d'Irtach. -- Nous retrouvons la douane. -- Arriv�e � Prjevalsk. -- La dispersion. 505 VI. -- Les Khirghizes. -- L'origine de la race. -- Kazaks et Khirghizes. -- Le classement des Bourouts. -- Le costume khirghize. -- La yourte. -- Moeurs et coutumes khirghizes. -- Mariages khirghizes. -- Conclusion. 507 L'ARCHIPEL DES FERO� Par _Mlle ANNA SEE_ Premi�re escale: Trangisvaag. -- Thorshavn, capitale de l'Archipel; le port, la ville. -- Un peu d'histoire. -- La vie v�g�tative des Fero�ens. -- La p�che aux dauphins. -- La p�che aux baleines. -- Excursions diverses � travers l'Archipel. 517 PONDICH�RY chef-lieu de l'Inde fran�aise Par _M. G. VERSCHUUR_ Acc�s difficile de Pondich�ry par mer. -- Ville blanche et ville indienne. -- Le palais du Gouvernement. -- Les h�tels de nos colonies. -- Enclaves anglaises. -- La population; les enfants. -- Architecture et religion. -- Commerce. -- L'avenir de Pondich�ry. -- Le march�. -- Les �coles. -- La fi�vre de la politique. 529 UNE PEUPLADE MALGACHE LES TANALA DE L'IKONGO Par _M. le Lieutenant ARDANT DU PICQ_ I. -- G�ographie et histoire de l'Ikongo. -- Les Tanala. -- Organisation sociale. Tribu, clan, famille. -- Les lois. 541 II. -- Religion et superstitions. -- Culte des morts. -- Devins et sorciers. -- Le Sikidy. -- La science. -- Astrologie. -- L'�criture. -- L'art. -- Le v�tement et la parure. -- L'habitation. -- La danse. -- La musique. -- La po�sie. 553 LA R�GION DU BOU HEDMA (sud tunisien) Par _M. Ch. MAUMEN�_ Le chemin de fer Sfax-Gafsa. -- Maharess. -- Lella Mazouna. -- La for�t de gommiers. -- La source des Trois Palmiers. -- Le Bou Hedma. -- Un groupe m�galithique. -- Renseignements indig�nes. -- L'oued Hadedj et ses sources chaudes. -- La plaine des Ouled bou Saad et Sidi haoua el oued. -- Bir Saad. -- Manoubia. -- Khrangat Touninn. -- Sakket. -- Sened. -- Ogla Zagoufta. -- La plaine et le village de Mech. -- Sidi Abd el-Aziz. 565 DE TOL�DE � GRENADE Par _Mme JANE DIEULAFOY_ I. -- L'aspect de la Castille. -- Les troupeaux en _transhumance_. -- La Mesta. -- Le Tage et ses po�tes. -- La Cuesta del Carmel. -- Le Cristo de la Luz. -- La machine hydraulique de Jualino Turriano. -- Le Zocodover. -- Vieux palais et anciennes synagogues. -- Les Juifs de Tol�de. -- Un souvenir de l'inondation du Tage. 577 II. -- Le Taller del Moro et le Salon de la Casa de Mesa. -- Les pupilles de l'�v�que Siliceo. -- Santo Tom� et l'oeuvre du Greco. -- La mosqu�e de Tol�de et la reine Constance. -- Juan Guaz, premier architecte de la Cath�drale. -- Ses transformations et adjonctions. -- Souvenirs de las Navas. -- Le tombeau du cardinal de Mendoza. Isabelle la Catholique est son ex�cutrice testamentaire. -- Xim�n�s. -- Le rite mozarabe. -- Alvaro de Luda. -- Le porte-banni�re d'Isabelle � la bataille de Toro. 589 III. -- Entr�e d'Isabelle et de Ferdinand, d'apr�s les chroniques. -- San Juan de los Reyes. -- L'h�pital de Santa Cruz. -- Les Soeurs de Saint-Vincent de Paul. -- Les portraits fameux de l'Universit�. -- L'ange et la peste. -- Sainte-L�ocadie. -- El Cristo de la Vega. -- Le soleil couchant sur les pinacles de San Juan de los Reyes. 601 IV. -- Les �cigarrales�. -- Le pont San Martino et son architecte. -- D�vouement conjugal. -- L'inscription de l'H�tel de Ville. -- Cordoue, l'Ath�nes de l'Occident. -- Sa mosqu�e. -- Ses fils les plus illustres. -- Gonzalve de Cordoue. -- Les comptes du _Gran Capitan_. -- Juan de Mena. -- Do�a Maria de Par�des. -- L'industrie des cuirs repouss�s et dor�s. 613 TOME XI, NOUVELLE S�RIE.--39e LIV. N� 39.--30 Septembre 1905. [Illustration: Le bazar de Tachkent s'�tale dans un quartier vieux et f�tide (page 458).--D'apr�s une photographie.] VOYAGE DU PRINCE SCIPION BORGH�SE AUX MONTS C�LESTES PAR M. JULES BROCHEREL. I. -- De Tachkent � Prjevalsk. -- La ville de Tachkent. -- En tarentass. -- Tchimkent. -- Aouli�-Ata. -- Tokmak. -- Les gorges de Bouam. -- Le lac Issik-Koul. -- Prjevalsk. -- Un chef kirghize. [Illustration: Un kozaque de Djarghess (page 468).--D'apr�s une photographie.] Le 28 juin, apr�s trente-quatre jours de voyage, j'arrivais � Tachkent, capitale du Turkestan russe. En m'embarquant � G�nes, je pensais pouvoir franchir cette distance en moins de trois semaines. Mais, en Orient, le temps ne fait pas monnaie, et on le d�pense sans compter. Quand on part on ne sait jamais quand on arrive, et quand on arrive on ignore � quel moment on se remettra en route. Le chemin est jalonn� de menus incidents et de petites m�saventures qui, tout en �prouvant la patience et le caract�re, n'en demeurent pas moins des contre-temps toujours f�cheux pour un voyageur press�. Hommes et choses semblent fig�s dans une fatidique immobilit�, contre laquelle on ne peut rien. Aussi, ce n'est pas sans un vif soulagement que j'aper�us sur le quai de la gare de Tachkent la haute stature de don Scipion Borgh�se, et la face barbue du guide Zurbriggen, qui me souhait�rent la bienvenue par de cordiales et chaleureuses poign�es de main. Pensez donc! Ils m'attendaient depuis quinze jours. Nous d�cid�mes de partir le surlendemain, car la saison �tait d�j� avanc�e et nous risquions fort de compromettre la campagne d'alpinisme que nous allions entreprendre. Les deux journ�es qui nous restaient, nous les employ�mes � visiter la ville, et � r�gler nos instruments � l'Observatoire m�t�orologique. Presque toutes les villes asiatiques ont des r�serves d'impr�vu pour le nouveau d�barqu�, et poss�dent je ne sais quelle charmante originalit� qui le captive de prime abord. Il n'en est point ainsi de Tachkent. Cette ville n'a jamais �t�, dans les temps pass�s, qu'un petit centre de commerce et un entrep�t de marchandises. Elle n'a, pour ainsi dire, pas subi l'influence de l'�pop�e timourienne, et n'a pas, par cons�quent, re�u l'empreinte de l'art iranien, qui laissa de si belles traces dans la ville de Samarkand. Les ruines grandioses, que les arch�ologues recherchent avec avidit�, y font compl�tement d�faut. Tachkent, comme �tendue, est aussi grande que Paris, mais ne compte que 300�000 habitants. Sauf les quartiers indig�nes, refoul�s dans les faubourgs, la ville pr�sente un aspect moderne, presque am�ricain. On s'aper�oit imm�diatement que c'est une cit� toute jeune, cr��e sur un plan d�termin�. Ses larges avenues qui s'entre-croisent et s'allongent pendant plusieurs verstes, sont r�guli�rement plant�es d'une double rang�e d'arbres, arros�s par des ruisseaux qui coulent abondamment des deux c�t�s de la chauss�e. Les maisons russes sont confortables, quoique tr�s basses, compos�es d'un seul rez-de-chauss�e, � cause des fr�quents tremblements de terre. Invariablement, un porche en bois y donne acc�s, et une vaste cour ombrag�e les entoure de trois c�t�s. Dans les rues, on trouve un peu partout des magasins de nouveaut�s, des clubs, des biblioth�ques, des caf�s, tout le confort de la vie moderne, avec ses d�fauts et sa corruption. Certes, si Tachkent ne peut �tre consid�r�e comme une ville tr�s attrayante, elle ne doit pas non plus �tre trait�e de lieu d'exil, comme de complaisants voyageurs l'ont avanc�. Le nombre des �trangers qui l'habitent va toujours en augmentant; il n'est pas rare que quelques-uns d'entre eux la quittent apr�s fortune faite. L'emplacement de la ville est bien choisi pour devenir un des plus grands centres commerciaux de l'Asie. Situ�e au carrefour des routes de la Sib�rie, de la Chine, de l'Afghanistan et de la Perse, reli�e � l'Europe par une ligne de chemin de fer, environn�e de cultures superbes qui ne font que s'�tendre, son avenir est des plus assur�s. Et si la ligne projet�e qui doit passer par la S�miretchi� et aboutir, � Ta�ga, au Transsib�rien s'effectue, son d�veloppement ne peut que s'accentuer encore, car elle �changera ses produits avec les pays du Nord, et deviendra un comptoir de premier ordre en Asie centrale. Le bazar de Tachkent ne ressemble gu�re � ceux de Bokhara, de T�h�ran ou de Tiflis. C'est un quartier � part, dont l'�l�ment tatar a �t� modifi� par les races qui se sont tour � tour succ�d� dans le Turkestan: quartier vieux et f�tide, dont la lumi�re et l'eau semblent � jamais bannies. Ce qui caract�rise le bazar de Tachkent, plus que les ruelles obscures et fangeuses, recouvertes de loques invraisemblables et de nattes �raill�es, plus que les �choppes encombr�es de marchandises bizarres, et plus que la foule bigarr�e qui s'y presse, ou y caracole, c'est la distribution des m�tiers en trente-deux groupes, et de chacun de ces groupes en trente-deux sp�cialit�s. Quelle complication pour le moindre achat qu'on y peut faire! [Illustration: Itin�raire de Tachkent � Prjevalsk.] Tachkent est une vraie p�pini�re de races, ayant chacune son quartier, son temple, sa langue, son costume et ses traditions, anim�es les unes � l'�gard des autres de rancunes et de haines que les si�cles n'ont pas �touff�es. Au-dessus de ces races diverses, il existe un �l�ment hybride, composite qui constitue le fond de la population de la ville, et forme, pour ainsi dire, un trait d'union entre les naturels et les exotiques: ce sont les Sartes. D'aucuns ont voulu croire que les Sartes �taient un produit du m�lange d'Ouzbegs et de Tadjiks. C'est une erreur. Leur tige g�n�alogique s'est greff�e aux plus disparates tron�ons turco-mongoliques. Ce qui est certain, c'est qu'ils forment une caste privil�gi�e. Le Sarte est plus instruit, plus souple et plus entreprenant que tout autre de ses coreligionnaires. L'habitation des indig�nes est plut�t mis�rable, et d'une solidit� assez probl�matique. Les maisons, toujours tr�s basses, divis�es au plus en deux ou trois compartiments, sont construites quelquefois en trav�es de bois, mais le plus souvent elles se composent exclusivement de murs en pis�. Les toits ne sont que des treillis de branchages, consolid�s par une �paisse couche de terre, o� ne tardent pas � se former des plants de coquelicots et de capucines. Tant que dure la belle saison, tout va bien. Pendant les grandes chaleurs, une agr�able fra�cheur r�gne � l'int�rieur de ces demeures, et en hiver l'�paisseur de la couche d'argile est tr�s efficace � conserver le peu de chaleur entretenue � grand'peine par la petite quantit� de combustible dont on dispose. Mais, dans les fortes pluies, la terre se gonfle, craque, et la fr�le charpente s'effondre tout � coup, surprenant quelquefois la famille au milieu de la nuit. Aussi a-t-on soin de maintenir la toiture en bon �tat, afin d'�viter autant que possible ces sortes d'accidents. [Illustration: Les marchands de pain de Prjevalsk (page 466).--D'apr�s une photographie.] Le 30 juin, � cinq heures du matin, nous quittons Tachkent. Les tarentass, qu'on a lou�s la veille, nous attendent dans la cour de l'h�tel. Les bagages, plut�t encombrants, sont charg�s, et nous prenons place � l'int�rieur, o� nous nous am�nageons une petite couchette sur une brass�e de paille. Nous sommes dirig�s sur Prjevalsk, pr�s du lac Issik-Koul, au coeur m�me des Monts C�lestes. La distance qui nous en s�pare est d'environ 900 kilom�tres, que nous comptons pouvoir franchir en une semaine. Naturellement nous voyagerons jour et nuit, autant que nous le permettront l'�tat de la route, la solidit� de nos �quipages et la qualit� des chevaux que nous relayerons le long du chemin. Au moment du d�part, tout va bien: le yemtchik fait claquer son fouet, les grelots de la dounga tintent joyeusement, et l'air du matin chasse les derniers vestiges d'un sommeil opini�tre. La route, en sortant des faubourgs, d�bouche dans la rase campagne et remonte lentement un long plateau, d'une triste sauvagerie. La teinte br�l�e du gazon, macul�e �a et l� de flaques saum�tres, s'�tend � l'infini et s'estompe dans la ligne de l'horizon. Le terrain, sur lequel nous roulons � toute allure, s'enchev�tre peu � peu de bosses et de fondri�res. Le tarentass se fait alors conna�tre pour ce qu'il vaut. Nous avons beau nous cramponner aux rebords de la capote et appuyer �nergiquement les pieds sous le si�ge du cocher, impossible d'�viter les chocs et les heurts de la course folle. Deux mouvements contraires secouent avec rage nos v�hicules: un mouvement d'avant en arri�re et d'arri�re en avant et un mouvement de gauche � droite et de droite � gauche, le tangage et le roulis! On saute, on danse, on rebondit, on se cogne contre les ferrures, on est projet� contre son voisin et on retombe d'une hauteur de plusieurs pieds sur les valises qui servent de si�ges. Le soleil, qui s'est lev�, br�le d�j� nos visages. Les chevaux, quand ils ne s'embourbent pas dans la terre molle, soul�vent des nuages de poussi�re, qui nous recouvrent enti�rement, bien que nos �quipages se tiennent � une discr�te distance l'un de l'autre, afin d'amoindrir cet ennui. Le prince et moi, nous jetons quelquefois un coup d'oeil en arri�re, afin de constater si Zurbriggen et Abbas nous suivent. Nous n'apercevons ni chevaux ni voiture, mais une v�ritable nu�e qui fonce sur nous � une vitesse effr�n�e. De temps � autre, nous rencontrons d'interminables th�ories de chariots, tra�n�s par des chevaux ou par des buffles, attach�s au v�hicule qui les pr�c�de. Plus loin, ce sont de longues caravanes de chameaux qui s'�cartent sur le bord de la route, avec de grotesques balancements de t�tes et de lasses courbatures de corps, comme s'ils marchaient sur une surface mouvante. Ces convois, s'avan�ant d'un pas rythm�, m�canique, hommes, b�tes et choses de la m�me teinte, ressemblent � des processions de revenants condamn�s par la fatalit� � errer sans cesse sur la terre. Vers midi, le chemin se d�roule, en de brefs lacets, sur la pente d'une c�te o� court un filet d'eau encadr� de verdure. Sur les bords du ruisseau quelques _yourtes_ (maisonnettes) sont diss�min�es parmi les saules. Une modeste maison de poste nous invite � un sommaire d�jeuner pendant qu'on relaye les chevaux. Dans les environs, quelques champs d'orge rev�tent d'une blonde toison les mouvements du terrain. Des cavaliers s'y rendent, la faux sur l'�paule; d'autres en reviennent portant d'�normes faix d'herbes sur le devant de la selle. Des chiens hargneux jappent aux jambes de nos chevaux et ne cessent d'aboyer que lorsque nous sommes d�j� loin, dans les steppes. Toute l'apr�s-midi s'�coule en plein d�sert. Les _stantzias_ ne sont pas toutes situ�es au milieu d'un bouquet d'arbres. Quelques-unes d'entre elles doivent se contenter d'eau de pluie qu'on recueille dans des citernes, creus�es dans le sol. Aussi, malgr� la soif qui nous d�vore, nous nous abstenons de boire quoi que ce soit. Peu avant Tchimkent, nous devons traverser une s�rie de petits foss�s, dont l'eau, en se faufilant dans les orni�res trac�es par les roues, a converti la couche de poussi�re en une boue tenace et profonde d'o� nos attelages ont mille peines � se d�p�trer. On cherche � �viter cette fondri�re en prenant � c�t�, mais c'est quelquefois pire. Nous traversons une rivi�re et nous p�n�trons peu apr�s dans la ville de Tchimkent. Il est dix heures du soir. Sauf quelques rares lumi�res, c'est l'obscurit� la plus compl�te, et de toute la �cit� verte� nous ne voyons que le bouge qui sert de maison de poste, et o� nous devons attendre deux heures avant de pouvoir repartir. [Illustration: Un des trente-deux quartiers du bazar de Tachkent (page 458).--D'apr�s une photographie.] Il y a l� un g�n�ral qui doit se rendre � Viernyi, et il va sans dire que les chevaux disponibles sont pour lui. C'est un contre-temps qui ne laisse pas de nous aigrir.... � minuit nous repartons, et nous regagnons bient�t le steppe. La route para�t bonne, et nous cherchons � nous assoupir. L'air est relativement frais, et surtout il n'y a pas de poussi�re. Fatigu�s par un cahotement de vingt-quatre heures, les muscles d�tendus, nous finissons par sommeiller autant que nous le permettent le roulement de la voiture, le carillon de la dounga, et les cris, les sifflements dont le cocher se sert pour encourager ses chevaux. Mais le soleil ne tarde pas � nous frapper en plein visage; en m�me temps nous �prouvons des secousses si violentes et si continues, que nos yeux s'ouvrent: impossible de dormir. Nous descendons un couloir d'�rosion, o� les galets d�tach�s des terrains sup�rieurs se sont donn� rendez-vous sur la route m�me. Quant � les entasser sur les bords, ou � les transporter ailleurs, personne n'y songe. [Illustration: Un contrefort montagneux borde la rive droite du Tchou (page 462).--D'apr�s une photographie.] N'allez pas croire que le yemtchick ait mod�r� l'allure endiabl�e de ses chevaux: sauf l� o� la pente est trop raide, et o� forc�ment il doit ralentir son train, c'est comme s'il roulait sur une pelouse. � Vannovsk, petit poste de Kozaques, perdu dans le steppe, nous devons attendre de dix heures du matin jusqu'� trois heures de l'apr�s-midi. Ici, ce n'est plus le g�n�ral qui a de l'avance sur nous, mais le courrier. On ne conna�t pas l'heure de son passage, mais on a �t� inform� qu'il arrivera et repartira dans la journ�e. Cela suff�t au _smotrissiel_ pour nous refuser les chevaux pendant un temps ind�termin�. Fortement intrigu�s de cet �tat de choses insolite, nous demandons des explications sur le fonctionnement �trange de la poste. Le smotrissiel nous dit que notre _podoroyn�_ (feuille de route) n'est que de troisi�me classe, et que par cons�quent il ne nous conf�re aucun privil�ge. Il ne nous donne droit d'avoir des chevaux que quand le courrier et les fonctionnaires auront �t� servis. Heureusement, dans l'apr�s-midi, nous apprenons que des moujiks du village nous loueraient volontiers des chevaux jusqu'� la prochaine station. Nous d�battons les prix, et nous obtenons deux _tro�kas_ pour quatre roubles. Nous faisons de m�me pour les relais suivants, car la poste n'a pas l'air de se presser, et nous ne pouvons attendre son bon plaisir. Vers le soir, nous atteignons le col de Tchak-pak, large d�pression qui s'ouvre dans la cha�ne du Karataou, se d�tachant des monts Alexandre, et s'avan�ant, comme une jet�e cyclop�enne, dans l'espace plat et d�sert. Au del�, nous nous engageons dans une petite gorge boursoufl�e de rochers, et parsem�e de broussailles blanch�tres. Comme la route est en pente raide, le cocher a attach� les roues du tarentass, afin que son poids n'entra�n�t pas les chevaux. Ayant mis pied � terre, pour nous d�gourdir un peu, nous d�couvrons une source d'eau fra�che qui jaillit de la f�lure d'un rocher. C'est une aubaine inattendue, qui nous permet de nous rafra�chir le gosier, br�l� par la chaleur et la poussi�re. � la tomb�e de la nuit, nous passons � Aouli�-Ata, village insignifiant, qui doit sa petite c�l�brit� au tombeau d'un khan v�n�r� par les Kirghizes. Son nom lui vient de l�: _Saint-P�re_. La r�gion qui se prolonge au del� d'Aouli�-Ata, c'est le _Tegherek-minn_ des nomades, le pays des �mille torrents� dont parle le p�lerin chinois Hiouen-Tsang, et o� s'�tablit, selon la tradition, le premier royaume des _Kara-Kita�s_, les Chinois noirs. C'est le bassin sup�rieur du Tchou, dont les nombreux affluents, descendant des monts Alexandre, arrosant la zone qui s'�tend � leurs pieds, facilitent la culture. Graphiquement, ce faisceau de rivi�res a quelque analogie avec un pin-parasol, dont les racines dispara�traient dans le steppe. En effet, le Tchou, apr�s �tre devenu un fleuve respectable, finit on ne sait o�, absorb� par les sables du d�sert. Ce pays a �t� la voie historique des migrations, de la guerre, et du commerce entre la Chine du nord et l'Asie occidentale. Mais les villes que b�tissait un conqu�rant, un autre les renversait, et l'on n'y voit plus que des ruines. Il en est ainsi de Merke et de Pichpek, que nous rencontrons sur notre chemin, et o� de nombreuses colonies russes cherchent � redonner l'ancienne fertilit� � ce sol st�rilis� par le d�peuplement. La fatigante monotonie des plaines du steppe est ici fr�quemment rompue par le cours des rivi�res, sur la berge desquelles des fouillis de joncs gigantesques �mettent une odeur de fourr�s de fauves. Les tigres y apparaissent quelquefois pour donner la chasse aux sangliers et aux antilopes qui y pullulent. � Pichpek, nous laissons � gauche le grand _track_, qui continue sur Viernyi, en �vitant, par un grand lacet, le contrefort qui se prolonge et borde la rive droite du Tchou. Ceux qui veulent esquiver ce fastidieux d�tour, prennent par Tokmak, o� un sentier m�ne rapidement � la capitale de la S�miretchi�, en escaladant le col de Kastek. Enfin, nous approchons des montagnes, qui, depuis plusieurs jours, se d�roulaient sans fin sur notre droite, et qui, avec leur dentelle de neige, ne faisaient qu'augmenter notre impatience. Le paysage a chang� d'aspect, et le regard peut se rafra�chir en se reposant sur la verdure des prairies. Mais pas la moindre trace d'un bois, d'une for�t quelconque. Allons-nous en �tre priv�s pendant toute la dur�e du voyage? Au moment o� nous formulons cette question, nous voyons venir au-devant de nous une file de chariots charg�s de troncs de sapins. C'est d'un heureux pr�sage. Vers le milieu de la troisi�me nuit, nos voitures s'arr�tent � la station de Tjillaryk, isol�e compl�tement, et accot�e � l'escarpement d'un promontoire, � l'entr�e des gorges de Bouam. Ici, un incident se produit. � la merci d'un vent furieux et glac�, nous frappons � la maison de poste, mais inutilement. On explore les environs; pas le moindre signe de vie. Tandis que quelques-uns de nous, d�courag�s, vont s'enfouir dans le tarentass, Zurbriggen revient � la charge. �J'enfoncerai la porte, dit-il, mais je veux savoir quelque chose.� Et il cogne dur sur le panneau. Enfin, on entend craquer le plancher, et la porte s'ouvre. Un tout jeune homme � moiti� d�shabill� se pr�sente, une bougie � la main. Nous n'attendons pas qu'il nous invite � p�n�trer dans son logis, bien que son accueil ne soit pas pour nous y convier. Un rapide coup d'oeil, jet� � l'int�rieur de la poste, suffit � nous faire rebrousser chemin! Nous apprenons qu'il n'y a pas un seul cheval libre, et que, d'ailleurs, la route �tant mauvaise, il est prudent d'attendre jusqu'au lendemain. De bonne heure, on pourra aller chercher les b�tes, qui ne sont pas rentr�es du p�turage. Nous profitons de ce sursis pour faire un petit somme, blottis sous les couvertures. � la premi�re lueur du jour on attelle les chevaux, et on repart. Cette fois, les voitures ont chang� leur train enrag�, et c'est � petits pas que nous grimpons un raidillon, surplombant un affreux pr�cipice. La route est trac�e sur de nombreux mamelons qu'on remonte et redescend, tel un ruban qu'on laisserait choir sur une surface ondul�e. Les parois du d�fil� sont d�chir�es �a et l�, montrant la nudit� de leur structure. Ce sont d'�normes d�p�ts de calcaires rouge�tres, entrem�l�s de couches de schistes moir�s. Dans la partie sup�rieure, il y a de curieuses formations de _pouddingues_, qu'on prendrait pour des coul�es de lave, n'�taient leurs �raflures grenues provoqu�es par la corrosion des eaux. En somme, c'est une gorge tr�s int�ressante pour le g�ologue, mais ennuyeuse pour le simple voyageur qui doit � chaque instant mettre pied � terre, et n'a pas m�me la compensation d'une �chapp�e pittoresque. Apr�s deux relais, pendant lesquels nous repassons sur la rive droite du Tchou, nous apercevons devant nous une nappe d'eau bleu�tre qui s'�tend � perte de vue. Au del�, une muraille cr�nel�e, s'estompant dans la brume, nous annonce l'approche de la haute montagne. C'est le lac Issik-Koul et la cha�ne du Terske� Ala-taou. [Illustration: Le bazar de Prjevalsk, principale �tape des caravaniers de Viernyi et de Kachgar (page 466).--D'apr�s une photographie.] Le tableau est admirable de couleur et de ligne. Au premier plan, la d�clivit� fauve du talus de la montagne s'�vase lentement vers le lac, o� de minuscules falaises abritent des colonies de cygnes sauvages, de p�licans, de toute une tribu vari�e d'oiseaux aquatiques. La gr�ve, d'un rouge dor�, borde la chatoyante surface de l'eau, d'une polychromie sans cesse changeante. Tout au fond, au-dessus d'une couche ouat�e de vapeurs violettes, le Terske� Ala-taou dresse son rempart de roches, avec les arabesques lumineuses de ses reliefs et le fouillis cendr� de ses ombres. Le tout est si t�nu, si effac� et si dilu�, que l'�loignement semble beaucoup plus grand qu'il ne l'est en r�alit�. [Illustration: Couple russe de Prjevalsk.--D'apr�s une photographie.] Pendant les premi�res cent verstes, la campagne est absolument inculte et inhabit�e. La route traverse de nombreux c�nes de d�jection, encombr�s de d�bris de la montagne, et bossel�s de petits tertres de terre, portant chacun une touffe de gramin�es. Notre passage met en �moi des milliers de li�vres, qui se sauvent de chaque c�t� du chemin, tandis que de grands vautours les guettent, perch�s sur un tombeau kirghize, ou planant au-dessus de nos t�tes. Mais � mesure que nous avan�ons, le paysage s'anime de quelques troupeaux de b�tail; nous voyons des aouls kirghizes, et des villages de Kozaques; deux de ces derniers sont m�me de petits bourgs tr�s florissants, gr�ce � des torrents qui arrosent les environs. Le long de la route d�filent d'innombrables tombeaux kirghizes group�s en n�cropoles, ou isol�s dans le steppe. Les bords du lac Issik-Koul sont r�put�s comme sacr�s par les nomades, et les gens ais�s s'y font construire des monuments fun�raires. Tous ces tombeaux sont en terre glaise battue, et affectent presque toujours la forme d'une pyramide tronqu�e s'�levant en menus gradins. Quelques-uns sont m�me tr�s somptueux par rapport aux mat�riaux employ�s et � l'endroit d�sol� o� ils se trouvent. Leur construction se compose de quatre murs en argile, supportant un d�me, sur le haut duquel sont fix�s diff�rents attributs, comme cr�nes d'animaux, verroteries et queues de cheval flottant au bout d'une perche. La fa�ade est agr�ment�e d'ouvertures ogivales, ouvrag�es de motifs et inscriptions en relief, le tout fa�onn� dans un style incertain et avec des sym�tries enfantines. � l'extr�mit� orientale du lac, le Kounghe� Ala-taou court tout pr�s du lac, et le chemin est taill� quelquefois dans le roc. Les flancs de la montagne sont tr�s tourment�s, et se h�rissent de quelques sombres sapini�res. � droite, dans un endroit d�sert et sauvage, le monast�re de Tro�tsky mire ses b�tisses dans les eaux du lac. Il para�t que ce couvent est une prison, un refuge, un lieu d'exil, et un cottage en m�me temps. [Illustration: Arriv�e d'une caravane � Prjevalsk.--D'apr�s une photographie.] � dix heures, le 6 juillet, nous passons par Preobrajensk, qui �chelonne ses maisons sur le dos d'une falaise. Nous ne sommes plus qu'� 30 verstes de Prjevalsk. Le plateau qui s�pare les deux villes, s'�tage en plusieurs terrasses successives, entrecoup�es par les eaux du Tioum et du Djargalan qui ont creus� des lits profonds dans cet instable terrain d'alluvions. Sauf au bord de l'eau, le sol est partout d�pourvu de v�g�tation. Enfin nous atteignons le dernier repli, et nous entrevoyons l'ancienne Karakol, assise pittoresquement au milieu d'une verte frondaison et appuy�e au pied d'un amphith��tre de hautes montagnes neigeuses. De prime abord, elle ressemble � une bourgade des Alpes, avec ses clochers, ses vergers, ses bois et ses glaciers, s'�tageant sur les hauteurs. Seulement, autour d'elle, le steppe la cerne, inculte et comme br�l� par le feu. Cette grande tache de vert tendre, perc�e de points blancs et dor�s, r�jouit nos yeux. M�me de loin on sent la bienfaisante influence de cette v�g�tation inopin�e, et la vue seule de la neige nous rafra�chit le visage. Aux abords de la ville, la route est flanqu�e de peupliers, au del� desquels s'�tendent des champs de c�r�ales et de pavots multicolores. Un cimeti�re s'allonge � la droite du chemin, avec ses tumulus et ses sarcophages en terre glaise. [Illustration: Le chef des kirghizes de Prjevalsk et sa petite famille.--D'apr�s une photographie.] Il est deux heures de l'apr�s-midi quand nous p�n�trons dans la cour de la maison de poste de Prjevalsk. Nous quittons nos tarentass. Ce n'est pas trop t�t! Nous sommes tous meurtris, et comme d�sarticul�s. Zurbriggen ne peut s'emp�cher d'exprimer sa satisfaction. Il nous assure que jamais, dans ses voyages aux Indes, en Australie et dans l'Argentine, il n'a rencontr� d'aussi malencontreux v�hicules. Le smotrissiel, tr�s obligeamment, nous offre les deux pi�ces qu'on destine habituellement aux voyageurs. Les meubles n'existent pas, mais nous coucherons par terre. Ce sera toujours mieux que sur le tarentass. En attendant, une foule de gamins et de badauds ont envahi la cour, attir�s par l'�tranget� de notre accoutrement. Peu apr�s arrive un gendarme colossal, qui requiert nos papiers. Apprenant qui nous sommes, il s'en va incontinent en r�f�rer au gouverneur qui vient, accompagn� d'un interpr�te, nous pr�senter ses compliments protocolaires. Nous d�sirerions que ces messieurs nous donnassent, au moins, quelques utiles indications sur le massif du Khan Tengri et les vall�es qui y aboutissent, mais ils ne peuvent rien nous apprendre que nous ne sachions d�j�. Cependant, le Gouverneur nous promet un garde pour nous accompagner, et M. Kross, l'interpr�te-pharmacien de la ville, fera de son mieux pour nous aider dans nos recherches. Le lendemain, il nous conduit chez un chef kirghize, duquel nous esp�rions avoir des renseignements et surtout un guide attitr� des montagnes. C'�tait un vieux renard que ce chef, borgne, � la barbe de fleuve, et drap� dans une ample houppelande en soie de couleur. En entrant dans son logis--une masure en d�cr�pitude,--nous aper��mes une couv�e de marmots, qui jouaient dans la cour avec les oies et les poules qui s'�chapp�rent en tout sens, par des issues invisibles. Le personnage nous re�oit dans une pi�ce qui, pour �tre le home d'un chef, n'en demeure pas moins un trou malpropre, o� il y a pour tous meubles un tapis et deux ou trois coffres pouss�s dans les coins. Nous nous asseyons � la turque autour de lui et nous l'�coutons attentivement afin de d�chiffrer quelque chose du charabia qu'il d�bite avec une volubilit� d�bordante. Notre interpr�te officieux n'a pas l'air de se d�ranger trop souvent pour nous traduire en allemand le discours du chef. � force d'attention, nous p�n�trons le raisonnement de notre h�te, qui n'est autre qu'une violente diatribe contre les nouveaux ma�tres du pays, qui l'ont d�poss�d� de ses privil�ges d'antan. Cette franchise est imprudente de sa part. Il ne se g�ne pas pour souligner ses phrases, en nous tapant sur l'�paule, ou en nous pressant famili�rement les genoux. Il nous prend la main, dont il �carte les doigts s'il veut �num�rer quelque chose. Il nous promet tout ce que nous voulons avec des _da, da, da_ pleins d'excuses. Avant de se s�parer de nous, il nous offre le _tchia�_, que sert une de ses ni�ces, une superbe jeune fille de seize ans, dans un n�glig� par trop indiscret. Il faut croire que ce rus� personnage n'�tait pas tr�s vers� dans les us et coutumes des Occidentaux: il cassait le sucre avec une brosse quelconque sur le plancher, et nous jetait n�gligemment les morceaux en prenant nos tasses pour cibles. Dans la soir�e nous allons visiter le �boulevard�. C'est ainsi que les Russes d'Asie appellent les parcs qu'ils entretiennent avec de grands soins dans toute ville qui se respecte. L'�glise, le parc et le club, ce sont les trois �l�ments _sine qua non_ de l'existence dans ces pays. Le parc de Prjevalsk est surtout int�ressant pour nous avec son jardinet de plantes locales, et les quelques grosses pierres blanches qui surgissent dans le feuillage des buissons. De loin, ces pierres ne nous disent pas grand'chose; mais, en approchant, on distingue des formes r�guli�res, quelque chose comme des t�tes humaines, grossi�rement sculpt�es. Ces pierres sont d'anciens monuments fun�raires des Nestoriens, qui � une �poque ind�termin�e ont d� habiter le pays. Il serait tr�s int�ressant pour l'histoire de ce peuple, de recueillir et d'analyser tous les documents que leur passage a jalonn�s en Asie centrale. M. Gourdet, un ing�nieur fran�ais �tabli � Viernyi, qui nous fit l'honneur d'un entretien, avait d�j� retrouv� maintes �paves des doctrinaires de Nestorius, qui jadis �tendaient leurs colonies jusque sur les confins de la Mongolie. � Prjevalsk nous devions nous procurer des chevaux, acheter les grosses provisions de bouche, et recruter des indig�nes pour la conduite des b�tes de somme. [Illustration: Notre djighite, sorte de garde et de policier (page 467).--D'apr�s une photographie.] Les chevaux valent une trentaine de roubles environ; les juments � lait jusqu'� quarante et cinquante. Mais les maquignons auxquels nous nous adress�mes, nous en demand�rent tout de suite le double, nous traitant en �trangers. Nous les d�rout�mes bient�t par un petit stratag�me. Nous f�mes r�pandre le bruit que nous allions nous rendre ailleurs, et, pour donner plus de cr�ance � ce bruit, nous appr�t�mes les voitures. Cela fit son effet. Depuis lors, pendant toute la journ�e, et plusieurs jours de suite, tous les chevaux de la ville et des environs d�fil�rent devant nos yeux, dans la cour de la maison. Nous n'avions qu'� choisir. Nous en pr�mes douze: six pour la selle, et six pour le b�t. On ne peut imaginer les ennuis de toutes sortes que demande l'organisation d'une petite caravane dans un pays o� l'on ne peut se faire comprendre que par l'interm�diaire de tierces personnes. Heureusement pour nous, Abbas se multipliait avec une abn�gation et une honn�tet� extraordinaires, et M. Kross nous pilotait dans les magasins de la ville. Le bazar de Prjevalsk est tr�s fr�quent� par les Kirghizes et par les caravaniers qui font la navette entre Viernyi et Kachgar, en passant par les cols de Djououka et de Bedel. En dehors de ce peu de commerce, la ville est sans importance. Les environs sont tr�s fertiles, riches en p�turages, en c�r�ales et en arbres � fruits; seulement, on ne cultive que pour la consommation locale. On n'exporte gu�re que de l'opium, de la laine et quelques fourrures. Avec le chemin de fer Transasiatique, le bassin de l'Issik-Koul acquerra un d�veloppement consid�rable, car le terrain, form� d'alluvions, est des plus productifs. L'eau est plus que suffisante, les vall�es foisonnent de gibier, et les montagnes rec�lent de vastes gisements miniers. En dehors de ces ressources, le pays est tr�s sain, d'une captivante beaut�, tout en ayant un climat temp�r�. [Illustration: Le monument de Prjevalsky, � Prjevalsk.--D'apr�s une photographie.] Avant de quitter la ville, nous all�mes d�poser une gerbe de fleurs sur la tombe du grand explorateur Prjevalsky, qu'un modeste monument rappelle � la post�rit� � l'endroit m�me o� il succomba. Il se trouve tout pr�s du lac, sur le haut d'une falaise, isol� au bord du steppe. L'emplacement ne pouvait �tre mieux choisi pour recevoir le corps de celui qui passa la moiti� de sa vie � errer dans les solitudes de l'Asie centrale. Une pyramide en rocaille supporte un aigle aux ailes �ploy�es, tenant dans ses serres une croix orthodoxe et une cha�ne bris�e, pour indiquer que la civilisation russe a supprim� l'aveugle fatalisme qui retenait les populations dans la barbarie. Vers la moiti� du socle �merge le m�daillon du c�l�bre savant, avec des inscriptions rappelant ses exploits. � c�t� du monument, la pierre tombale est entour�e d'un parterre de fleurs, qu'un jardinier entretient constamment. Le 11 juillet, � deux heures de l'apr�s-midi, nous partons de Prjevalsk. Notre caravane se compose de sept hommes et de treize chevaux. Le chef kirghize nous avait bien promis un de ses administr�s pour nous guider dans les montagnes de sa juridiction, mais nous l'attend�mes en vain. Nous appr�mes plus tard que ce bonhomme n'avait jamais �t� chef de tribu, mais qu'il �tait r�put� par les nomades comme un puits de science, une esp�ce de Salomon, tranchant les questions les plus ardues. Aussi les Kirghizes viennent-ils le consulter souvent; et, pour cet effet, ils n'h�sitent pas � faire des centaines de verstes. [Illustration: Des t�tes humaines, grossi�rement sculpt�es, monuments fun�raires des nestoriens... (page 466).--D'apr�s une photographie.] Notre personnel se compose d'Abbas, d'un _djighite_, d'un jeune colon russe, Piotra, et d'un nomade, chasseur de profession. Ces quatre individus de races si diff�rentes, ont toutes les peines du monde � s'accorder. Le nomm� Abbas est un irani authentique d�racin� du Farsistan, dont l'accoutrement est une singuli�re r�miniscence des milieux dans lesquels il a pass�. Imaginez un homme plut�t malingre, d'une taille moyenne, � la figure quelconque, � la barbe cr�pue et � la chevelure d'�b�ne ruisselant en boucles sur le revers du veston. Car il porte un veston, un pantalon et des bottines jaunes � l'europ�enne, tandis que, en dessous et en dessus, il s'affuble de nippes persanes, pliss�es et serr�es � la taille par une ceinture avec boucle de fantaisie. � son c�t�, pend l'ins�parable yatagan, et sur son chef s'�l�ve un magistral bonnet en toison d'agneau. De loin, il a plut�t un air r�barbatif et des allures d'�gorgeur. Au fond, c'est un brave homme, honn�te jusqu'au scrupule, et qui avec ses aptitudes multiples et le z�le consid�rable qu'il d�ploie, peut devenir, suivant les occurrences, un drogman, un cuisinier, un caravanier et autre chose encore. Le djighite est une sorte de garde et de policier aux ordres du Gouvernement russe. Bien qu'il soit aussi kirghize que les nomades auxquels il a affaire, il se pr�tend sup�rieur � eux et les traite avec la derni�re brutalit�. Il va sans dire que quand il accomplit une tourn�e pour faire rentrer les tributs, une bonne part du produit entre dans sa poche, l'employ� des finances n'ayant qu'une vague id�e de la statistique de ses contribuables. Le n�tre �tait porteur d'une lettre autographe en langues russe et kirghize, munie du sceau du gouverneur, dans laquelle il �tait ordonn� de nous recevoir en amis et de nous offrir tout ce dont nous pourrions avoir besoin. Ce papier �tait pour nous comme un talisman qui nous rendait presque intangibles. Nous sachant des prot�g�s de la Russie, les nomades se seraient bien gard�s de nous molester en quoi que ce soit, car la moindre transgression au devoir d'hospitalit� leur aurait peut-�tre co�t� cher. Le djighite, pour faire conna�tre sa qualit�, porte une plaque en t�le sur son _tchiapann_ et est arm� d'un sabre et d'un revolver. Notre djighite a l'air tr�s malin, tout en �tant un d�vou� serviteur, bien qu'il ne soit pas pay� par nous. Cependant on lui a promis un cadeau s'il fait bien son service. Piotra et le �chasseur� sont des personnages de moindre importance. Le premier est fils d'un Kozaque, cantonn� � Prjevalsk; il nous sert de sommelier. Le deuxi�me, un Kirghize de corps et d'�me, est le meilleur caravanier qu'on puisse rencontrer; il conduit bien ses chevaux et �vite avec soin les accidents de la route, mais une fois arriv� � l'�tape il devient de plomb, et il est impossible de le faire bouger. En sortant de Prjevalsk nous prenons la route qui, passant par le col de Santach, contourne les deux cha�nes de l'Ala-taou transilien et du Kounghe� Ala-taou et aboutit � Viernyi. Elle se d�roule au milieu d'une campagne fertile, mais peu cultiv�e, � l'escarpe des derniers contreforts du kirghize Ala-taou. Apr�s une dizaine de verstes, nous touchons Aksou�skijie, une mis�rable colonie de Kozaques. Toute la population se range sur le chemin; les hommes aux lourdes bottes et � la chemise �carlate tombant sur le pantalon, nous saluent respectueusement. Les femmes, aux formes rebondies, et couvertes de haillons aux couleurs �clatantes, se tiennent dans l'embrasure des portes, les poings sur les hanches. Vers sept heures, nous nous arr�tons pr�s d'un ruisseau, pour camper. Un peu plus bas, une vingtaine de masures se cachent derri�re une haie de saules: c'est Djarghess, autre colonie de Kozaques. Notre arriv�e et notre installation n'ont pas manqu� d'attirer des curieux; ce sont presque tous des Kozaques du village voisin, qui viennent famili�rement s'accroupir autour du feu. Une bonne femme pousse m�me la gracieuset� jusqu'� nous offrir un vase de lait. Nous lui distribuons de gros morceaux de sucre, dont elle est tr�s friande. En attendant le d�ner, nous fl�nons autour des tentes tout en admirant un inoubliable coucher de soleil. En aval, la petite rivi�re de Djargalan serpente au milieu d'une plaine bleu�tre, agr�ment�e de quelques arbres solitaires, dont les sombres silhouettes se d�tachent sur les lointains lumineux. Suivant les sinuosit�s du ruisseau, les yourtes ou tentes des nomades s'�gr�nent pr�s de la berge dans une b�ate qui�tude, avec des panaches de fum�e s'envolant au-dessus de leur d�me en feutre. � notre gauche, � plus de deux cents verstes, les monts Alexandre, d'un lilas cendr�, l�vent leurs t�tes neigeuses. � droite l'Ala-taou s'avance insensiblement de notre c�t�, accentuant ses d�tails, et fon�ant sa teinte � mesure qu'il s'approche de nous, gouach� �a et l� par les derniers �panouissements du soleil. Le lac reste masqu� par l'�paisse couche de vapeurs que la subite fra�cheur de la nuit a condens�es. Mais Piotra, le Russe, nous a pr�par� le d�ner sur un tapis de feutre, devant la tente du prince. Nous nous asseyons gaiement par terre, appuy�s sur un coude, autour d'une serviette o� est plac� le modeste et frugal repas. Dans le menu figure encore un poulet r�ti. Seulement, il est d'une r�sistance in�branlable. Enfin, � dix heures, nous nous glissons dans nos sacs, et nous cherchons � nous endormir. C'est la premi�re nuit de campement. Notre corps a d�j� subi maintes �preuves; notre �piderme s'est pour ainsi dire insensibilis� sur le tarentass, ce qui n'emp�che pas que nous sentions encore quelques menus cailloux nous agacer insolemment les c�tes. Mais la fatigue ne tarde pas � nous plonger dans les bras de Morph�e. (_� suivre._) JULES BROCHEREL. [Illustration: Enfants kozaques sur des boeufs.--D'apr�s une photographie.] Droits de traduction et de reproduction r�serv�s. TOME XI, NOUVELLE S�RIE.--40e LIV. N� 40.--7 Octobre 1905. [Illustration: Un de nos campements dans la montagne.--D'apr�s une photographie.] VOYAGE DU PRINCE SCIPION BORGH�SE AUX MONTS C�LESTES[1] [Note 1: _Suite. Voyez page 457._] PAR M. JULES BROCHEREL. II. -- La vall�e de Tomghent. -- Un aoul kirghize. -- La travers�e du col de Tomghent. -- Chevaux alpinistes. -- Une vall�e d�serte -- Le Kizil-tao. -- Le Saridjass. -- Troupeaux de chevaux. -- La vall�e de Kachkateur. -- En vue du Khan Tengri. [Illustration: Mont�e du col de Tomghent.--D'apr�s une photographie.] Le 12 juillet nous sommes debout d�s cinq heures. Mais il faut faire et prendre le th�, assembler les chevaux, trier les bagages et les charger; il est bien sept heures quand nous levons le camp pour quitter la pauvre bourgade kozaque d'Aksou�skijie. Pendant qu'on d�marre, nous croisons d'innombrables caravanes de Kirghizes, qui �migrent vers les monts Alexandre, � la recherche de nouveaux p�turages. Ces longues files d'hommes, de femmes et d'enfants, mont�s sur des chevaux, des chameaux ou des boeufs; ces milliers de brebis s'avan�ant comme une mar�e vivante; ces centaines de chevaux aux robes multicolores, de tous les �ges et de toutes tailles; ces bandes de chameaux attach�s les uns aux autres, disparaissant sous les objets les plus divers, et proc�dant d'un pas uniforme; enfin ce confus clapotement des sabots sur le gravier de la route, m�l� aux hennissements des poulains appelant leurs m�res, aux b�lements des agneaux, aux cris d�chirants des dromadaires, aux sifflements et aux appels des bergers,... tout cela forme un spectacle unique: c'est un d�fil� f�erique, propre � frapper et � �mouvoir les gens les plus blas�s. Peu apr�s Djarghess, la route effleure un mamelon rocheux, et continue � gravir lentement la pente de gauche de la vall�e de Djargalan. En aval, toute une ville de yourtes se r�veille pr�s de la rivi�re; de nombreux troupeaux, partent en tout sens, tandis qu'autour des tentes errent des personnages microscopiques. Nous suivons un sentier qui nous conduit � l'entr�e de la vall�e de Tomghent, dont les lianes sont presque enti�rement recouverts par une �paisse sapini�re. Le chemin longe la rive gauche du torrent, au milieu d'un chaotique amoncellement de pierres et d'un enchev�trement de branches qui sont loin de faciliter la circulation. Pourtant, la route est assez fr�quent�e par les Kirghizes qui habitent de l'autre c�t� de la montagne, mais aucun ne s'est avis� de frayer un passage convenable au milieu de ce dangereux fouillis de ronces. Dans certains endroits, on est oblig� de se coucher sur le cou du cheval pour �viter une branche qui empi�te sur le chemin; ailleurs il faut se livrer � de vrais tours d'acrobate pour contourner un gros bloc roul� sur le sentier. Il en est ainsi depuis des si�cles, et cela continuera encore longtemps. [Illustration: Dans la vall�e de Kizil-tao (page 473).--D'apr�s une photographie.] Nous admirons l'habilet� avec laquelle nos montures triomphent des mille et un obstacles de ce terrain tourment�, le flair et l'adresse avec lesquels elles savent �viter les passages dangereux. Seulement, il faut se tenir sur le qui-vive, car le moindre faux mouvement de la b�te nous lancerait vite dans le torrent qui gronde � c�t�. Un pont primitif, fait avec des troncs d'arbres jet�s transversalement sur deux poutres, nous m�ne sur l'autre rive. Ici, il faut gravir une s�rie de raidillons jonch�s de cailloux qui s'�boulent en avalanches sous les pieds des chevaux. Arriv�s � un certain point, un �croulement de monolites semble nous barrer le chemin. Eh bien, non: nos chevaux passent par dessus les rocs avec une agilit� de ch�vre, ou posent adroitement leurs sabots dans les interstices des blocs, sans que leurs jarrets en re�oivent la moindre �gratignure. [Illustration: Itin�raire du voyage aux Monts C�lestes.] Mais la for�t devient clairsem�e, la vall�e se d�couvre et un superbe cirque de p�turages d�cline moelleusement vers la rivi�re. Nous longeons le gravier du torrent. Au del� nous rencontrons un aoul kirghize, compos� de quelques yourtes �gren�es le long d'un ruisseau. � notre approche toute la tribu sort des tentes et nous regarde anxieusement, presque affol�e de notre brusque apparition. Le fusil que Zurbriggen porte en bandouli�re n'est peut-�tre pas fait pour leur donner une opinion trop bienveillante sur nos intentions. Cependant un homme, qui a reconnu le djighite, se d�tache du groupe, et lui demande ce que nous voulons. Nous nous arr�tons en face d'eux, dans une d�pression de la colline. Pendant que nous hissons nos tentes, quelques membres de la colonie nous apportent de la cr�me, du lait et des borsaks, biscuits faits avec de la farine d'orge frite dans de la graisse de mouton. En �change, nous donnons aux femmes des bagues et des peignes en aluminium, ce qui les met au comble du bonheur. [Illustration: La carabine de Zurbriggen intriguait fort les indig�nes (page 472).--D'apr�s une photographie.] Je remarque une jeune fille, rouge comme une pivoine, aux traits r�guliers, coiff�e d'un bonnet en poil de renard, sous lequel descend une multitude de petites nattes de cheveux couleur jais. Sous son tchiapann entre-b�ill� on entrevoit une charpente rudement taill�e. En s'en allant toute joyeuse du modeste cadeau re�u, elle ne trouve rien de mieux que d'administrer de formidables coups de poing � son petit fr�re, l'envoyant � maintes reprises rouler sur le gazon. C'est une fa�on � elle de le taquiner. L'endroit o� nous sommes s'appelle Bak-hali-koul. Nous n'avons jamais su pourquoi; les nomades n'en savent rien; pourtant, la vall�e est toujours la m�me. _13 juillet._--Plus haut, la vall�e se bifurque. Nous nous engageons dans le vallon de gauche, qui se dirige vers le Levant. Deux cavaliers nous ont aper�us d'en haut, et descendent � notre rencontre. Ils s'enqui�rent aupr�s du djighite, lequel pour toute r�ponse exhibe le papier dont il est muni. Ne sachant le d�chiffrer, ils appellent un jeune homme qui se trouve �tre l'unique lettr� de la tribu. En apprenant qui nous sommes, on fait avertir le boloch ou chef, de notre arriv�e. Quand nous atteignons la premi�re cabane, nous nous voyons cern�s par une foule de personnages aux longues robes et coiff�s invariablement d'un bonnet en peau d'agneau. Au premier rang se tiennent les anciens de la tribu, parmi lesquels le boloch, qui, s'avan�ant de notre c�t�, nous souhaite la bienvenue dans un incompr�hensible charabia, tout en nous faisant une s�rie de courbettes, les mains soigneusement crois�es sur le ventre. Un tapis est �tendu sur l'herbe, o� l'on nous invite � nous reposer un instant. Pendant que nous vidons les �triers, des hommes tiennent la bride de nos chevaux. Tout le monde prend place autour de nous, en cercles concentriques; on apporte une outre de _koumiss_, et des bols de fa�ence. Ces �cuelles sont pour les naturels du pays un luxe exceptionnel, une vaisselle r�serv�e exclusivement pour les grandes occasions. Aussi les renferme-t-on avec soin dans des �tuis _ad hoc_, bien capitonn�s, appel�s _tchiennegat_. Toute la caravane fait honneur au koumiss du boloch, sauf Zurbriggen et moi. Acquies�ant aux incitations r�it�r�es du chef, j'essaie pourtant d'approcher le bol de mes l�vres; mais, � l'instant m�me, je sens une telle puanteur se d�gager du liquide, que je dois d�tourner la t�te pour ne pas avoir la naus�e. On dit que le koumiss est une boisson capiteuse, tr�s rafra�chissante et d'un go�t agr�able; peut-�tre, mais toujours est-il qu'on le pr�pare dans des vases en peau qui ont plusieurs centim�tres de crasse, et en outre le lait contient un tas de malpropret�s qui ne vous engagent pas � le boire. Ce qui excita le plus la curiosit� des nomades, ce furent nos chaussures clout�es et la carabine de Zurbriggen. On se la passait de main en main, pendant que d'autres examinaient nos brodequins, en palpant la semelle et en comptant un � un les clous qui en sortaient. Comme il est un peu tard, nous croyons prudent de nous remettre imm�diatement en route. Des cavaliers kirghizes s'offrent pour nous accompagner jusque sur le col de Tomghent. Dans la mont�e nous rencontrons de nombreuses yourtes, autour desquelles des femmes sont occup�es � tanner des peaux de mouton, et � tresser des bandes d'�toffe. Les peaux sont tendues au moyen de piquets enfonc�s dans le sol, et recouvertes d'un m�lange de lait caill� et de terre argileuse, qu'on renouvelle tous les deux jours; apr�s quoi, on les racle avec un couteau. Des troupeaux de brebis, de ch�vres, de chameaux sont dispers�s un peu partout sur les deux flancs de la vall�e, jusqu'� la limite des neiges. Le chemin devient tr�s escarp�; il faut le chercher au milieu d'une vaste zone d'�boulis qui s'�paississent � mesure que nous montons. � midi nous nous trouvons tous r�unis au bas du col. Un glacier, d�blay� de neige, ray� en diagonale par une bande obscure, descend jusqu'� nous. En temps ordinaire, c'est-�-dire quand il y a beaucoup de neige, on monte en suivant cette ligne, qui n'est autre que de la fiente de moutons, d�pos�e au fur et � mesure par les caravanes. Mais ce chemin nous est absolument interdit dans l'�tat o� se trouve la glace. Les sabots des chevaux n'auraient aucune prise et les b�tes glisseraient in�vitablement avec charges et cavaliers. Nous croyons pr�f�rable d'attaquer le glacier de front au lieu de le prendre de biais. La distance qui nous s�parera du sommet sera moindre; puis les chevaux, en gravissant ainsi la pente, se trouveront avoir plus d'adh�rence sur la surface gel�e. Pendant qu'on d�charge les chevaux, Zurbriggen taille des marches avec son piolet, afin de faciliter l'ascension. Je lui embo�te le pas, tenant mon cheval par la bride. Apr�s une cinquantaine de m�tres, je m'aper�ois que celui-ci, au lieu de mettre ses pieds dans les creux, pr�f�re marcher � c�t�, o� ses sabots peuvent entamer une l�g�re cro�te de neige durcie. Enchant� des aptitudes alpinistes de mon coursier, je le laisse faire, et continuant ainsi je parviens sans encombre au sommet du col. [Illustration: Au sud du col, s'�levait une blanche pyramide de glace (page 478).--D'apr�s une photographie.] Profitant de cette le�on, nous conduis�mes en tr�s peu de temps toutes les b�tes sur le haut du glacier. Puis on transporta les bagages. Les Kirghizes, malgr� leurs chaussures rudimentaires, se mirent � la besogne avec beaucoup de courage et de d�vouement. Quand tout fut termin�, et pendant que nous �tions en train de nous restaurer un peu, survint une bourrasque de gr�le qui eut vite fait de transpercer nos v�tements. Il fallait transiger avec l'estomac et d�m�nager s�ance tenante de cette altitude de 3�545 m�tres, d'autant plus qu'il soufflait un vent glacial, qui risquait d'�tre dangereux. Nous d�val�mes lentement sur l'autre versant, et, apr�s quelques rapides d�gringolades, nous atteign�mes le thalweg de la vall�e de Kizil-tao. Nous camp�mes sur la berge, � l'herbe drue et haute, o� les chevaux s'en donn�rent � belles dents. Mais si le site �tait charmant, il manquait compl�tement de combustible. On avait beau interroger du regard tous les replis de la vall�e: pas l'ombre d'un arbuste. En outre, elle paraissait inhabit�e, manquait par cons�quent de bois, de lait et de viande. Nous n'avions certainement pas compt� l�-dessus, et le djighite, qui devait �tre pourtant au courant des lieux, ne nous en avait souffl� mot. Il est vrai que nous ne risquions pas encore de mourir de faim, avec notre r�serve de provisions; mais nous tenions � les m�nager pour la haute montagne. Et comme nous nous trouvions encore assez pr�s d'une tribu de Kirghizes, et pas tr�s �loign�s d'une for�t, nous d�cid�mes d'envoyer d�s le lendemain ma�tre Abbas et le djighite chez le boloch, pour acheter un troupeau de moutons et des charges de bois. [Illustration: La vall�e de Kizil-tao.--D'apr�s une photographie.] En attendant nous nous m�mes � la recherche d'herbes et de racines s�ches, avec lesquelles nous parv�nmes, non sans beaucoup de peine, � faire un peu de feu. Il nous fallut presque deux heures, avant de pouvoir d�guster une tasse de th�, et le d�ner, tr�s long � pr�parer, n'avait pas pr�cis�ment le meilleur parfum; mais ces bagatelles n'�taient rien en comparaison du bien-�tre que quelques aliments chauds caus�rent � nos estomacs ext�nu�s. _14 juillet._--Pendant qu'Abbas et le djighite rebroussent chemin, en qu�te de moutons et de bois, nous faisons une reconnaissance dans la partie sup�rieure de la vall�e. Un bel amphith��tre de pics, coup�s de glaciers, domine le fond du bassin, travers� par une quantit� de ruisseaux arrosant les molles ondulations du gazon. Deux cols s'ouvrent au nord et au sud: le premier dit de Karaguer communique avec l'embranchement ouest de la vall�e de Tomghent; l'autre, plus �lev� et aussi moins fr�quent� � cause des difficult�s qu'il pr�sente, est celui d'Otrouk, donnant sur l'autre vallon. Le soir, arriv�rent nos deux hommes avec tout un troupeau de moutons et de ch�vres et deux boeufs encombr�s de troncs d'arbres. Le boloch les accompagnait, avec quelques membres de sa tribu. Nous ret�nmes deux jeunes gens pour la conduite des b�tes. Notre caravane comptait d�sormais, en personnes et animaux, soixante-trois t�tes. La vall�e de Kizil-tao est ainsi appel�e � cause de la profusion de d�p�ts d'oligistes plus ou moins rouge�tres qu'on y rencontre. _Kizil_, en kirghize, signifie rouge, et _tao_, pierre, c'est donc la �vall�e aux pierres rouges�. Les vall�es, les monts et les cols du Thian-chan empruntent leur nom � la couleur ou � la forme de certains objets, dont la bizarrerie a frapp� l'imagination des nomades. Deux vallons d�bouchent dans la vall�e de Kizil-tao, pour la plupart du temps inhabit�e: � droite celui d'Otrouk, et � gauche celui du Berkout, ce dernier communiquant avec le plateau de Saridjass. Dans le contrefort qui la s�pare de la vall�e de Keou-eou-leou s'ouvre le col de Torpeu, haut de 3�066 m�tres, duquel on embrasse une vaste �tendue de montagnes. Ce passage, non mentionn� sur les cartes russes, est tr�s fr�quent� par les nomades qui transitent par la vall�e de Kizil-tao. Celle-ci, jusque-l� �panouie largement, se r�tr�cit tout � coup, et ce n'est plus qu'une �troite gorge o� le torrent se fraye � grand'peine une issue. Le sentier court au ras de l'eau, dont tant�t il longe le courant et tant�t il coupe les d�tours. Nous devons alors traverser en choisissant les endroits o� le lit s'�tale, afin que le courant ne nous emporte pas. Mais il ne nous est pas toujours donn� de trouver un point gu�able, et force nous est alors de franchir le fleuve o� nous pouvons. On est oblig� de jeter un � un les moutons dans l'eau, et de les laisser se d�brouiller tout seuls. C'�tait vraiment piti� de voir ces pauvres b�tes, jet�es brutalement � l'eau, dont elles avaient une instinctive r�pulsion, ballott�es par le courant, lanc�es contre les rochers, englouties momentan�ment dans un creux, puis finalement, apr�s une lutte h�ro�que contre l'inexorable �l�ment, atterrir tremblantes sur le gravier de la rive. Aussi, quand elles le pouvaient, pr�f�raient-elles s'�vader sur les escarpements de la montagne, ce qui obligeait le berger � une gymnastique dont il se serait dispens� volontiers. Peu � peu nous atteignons la vall�e du Saridjass qui n'est autre qu'une tranch�e effroyable, tranch�e de roches boulevers�es, au milieu desquelles serpente un fleuve �norme aux eaux fangeuses. Mais ce qui nous inqui�te, c'est de savoir par o� cette masse d'eau va s'�chapper, la montagne s'�levant d'un seul bloc et bornant partout le regard. Existerait-il une myst�rieuse issue par quelques antres souterrains? Pour le moment, il ne nous est pas possible d'�lucider ce probl�me. Les topographes russes n'�taient pas plus avanc�s, puisque sur la carte que nous avions ils ne savaient par o� faire sortir cette rivi�re, la laissant se perdre au sein du Keou-eou-leou. Le chemin escalade les parois de la tranch�e, souvent d�chir�es par des �boulements, puis redescend � m�me le niveau du fleuve, pour franchir aussit�t un autre pr�cipice. Dans les anfractuosit�s sont tapis quelques rares arbrisseaux, et sur les ar�tes des sapins rabougris profilent leurs branches ajour�es. Un peu plus loin, un gros bloc semble plac� � dessein au milieu du fleuve. � son sommet s'�l�ve un petit �cairn�, amas de pierres maintenant une petite perche au bout de laquelle est fix� un cr�ne de cheval. Ce singulier monument rappelle, para�t-il, le souvenir d'un fait dramatique survenu en cet endroit. Ce cr�ne est celui du coursier d'un chef kirghize, d'un _torgoi_, qui p�rit en voulant traverser la rivi�re, au temps de la conqu�te russe. _17 juillet._--De loin, la vall�e du Saridjass appara�t comme une immense plaine limit�e par une bordure de pics neigeux. Mais, en l'abordant, on est surpris de l'�tranget� de sa configuration qui est loin d'�tre celle qu'on s'�tait imagin�e. Si ce n'est l'�tendue d�mesur�e, il n'y a l� aucun simulacre de plaine. C'est une succession de mamelons, de promontoires et de collines, une s�rie de couloirs, de vallons et de conques, le tout recouvert par un manteau de gazon �ventr�, �a et l�, par des �raflures de terre jaun�tre, trou� par des �cueils de rochers aux reflets m�talliques, et bris� par de profondes coupures, au fond desquelles bouillonnent les eaux bourbeuses des torrents. [Illustration: Le col de Karaguer, vall�e de Tomghent (page 473).--D'apr�s une photographie.] Il est impossible, par un examen superficiel du terrain, de trouver l'explication ou la cause de cette perturbation. Des surprises de toutes sortes attendent le voyageur � chaque tournant du sentier, et d�routeraient la perspicacit� du g�ologue le plus �clair�. Certes, l'�poque glaciaire a d� �tre l'un des principaux agents de transformation, pour laisser des traces si manifestes d'un gigantesque travail. � partir de notre camp, la vall�e s'ouvre peu � peu avec des couloirs qui d�bouchent de chaque c�t�. Les ph�nom�nes glaciaires commencent � devenir tr�s visibles. Les �minences et les ar�tes s'arrondissent et s'adoucissent de plus en plus, par suite du frottement de l'ancien glacier, tandis que la paroi de gauche de la vall�e conserve encore pour longtemps son aspect tourment�. Notre caravane avance toujours du m�me pas, silencieusement, comme un convoi fun�bre. C'est que la chaleur est devenue insupportable; le paysage est toujours de la m�me teinte et de la m�me monotonie. On traverse un ruisseau, on remonte sur la berge, on longe une terrasse, on p�n�tre dans un couloir pour redescendre dans un torrent, et ainsi de suite sans discontinuer. [Illustration: Sur le col de Tomghent.--D'apr�s une photographie.] De temps � autre, le cri aigu d'une marmotte nous donne un moment d'�motion. On galope de ce c�t�, Zurbriggen met pied � terre, �paule son fusil et attend patiemment que le rongeur sorte de son terrier. Puis un coup part, et la pauvre victime de la civilisation vient augmenter le troph�e accroch� � la selle du guide. [Illustration: J'�tais enchant� des aptitudes alpinistes de nos coursiers (page 472).--D'apr�s une photographie.] Ne sachant que faire, j'observe notre troupeau de moutons qu'un gar�onnet kirghize chasse devant lui. Comme on devient parfois terre-�-terre, en un tel voyage! Une des plus grandes consolations, c'est trop souvent de penser qu'on aura quelque chose � se mettre sous la dent. Ce n'est pas la perspective d'un mets d�licat qui nous tente. L'art culinaire n'a rien � voir ici. � force de caracoler, de suer et de respirer � pleins poumons l'air vivifiant de la montagne, on aiguise un app�tit formidable, et, � l'heure du repas, on est bien aise de faire bonne ch�re et d'absorber les plats que ma�tre Abbas nous pr�pare. Pourvu qu'on mange, et le plus possible, cela suff�t. On devient d'une voracit� pantagru�lique. Les pauvres petits agneaux, avec l'�trange sac de graisse qui se dandine sur leur post�rieur, tondus � grands coups de ciseaux, n'avaient gu�re le temps de mordre les brins d'herbe, l'inexorable berger ne leur laissait pas un moment de r�pit. Il fallait que leurs jambes fissent un triple travail, pour suivre l'allure des chevaux. Quand, par malheur, ils rencontraient un ruisseau, c'�tait un b�lement � vous fendre le coeur, car ils n'avaient que fort peu de go�t pour l'eau, bien qu'ils nageassent � merveille. Mais souvent l'eau �tait profonde et le courant tr�s prononc�, et alors c'�tait un naufrage g�n�ral, une �mouvante noyade, o� les pauvres petits animaux �taient entra�n�s bien loin � la d�rive. Aussi, le soir, quand elles arrivaient � l'�tape et qu'on ne s'occupait plus d'elles, ces pauvres b�tes, au lieu d'aller chercher le peu de nourriture dont elles avaient besoin, s'accroupissaient, ext�nu�es, sur le sol. Les deux boeufs, par exemple, �taient d'un grotesque achev� avec leur anneau en bois pass� au museau, leur carcasse anguleuse, et surtout leur charge de troncs d'arbres attach�s � l'une de leurs extr�mit�s sur une sorte de b�t rudimentaire, et tra�nant de l'autre par terre, en d�crivant sur le sable de menus zigzags � chaque pas qu'ils faisaient. Quand ils devaient traverser un terrain en pente, c'�tait un mauvais quart d'heure pour eux. Pensez donc! le tronc qui se trouvait en amont les poussait en aval, tandis que l'autre, suspendu dans le vide, les y entra�nait. Au passage d'une rivi�re, ils ne trouvaient quelquefois rien de mieux que de s'arr�ter tout � coup au beau milieu de l'eau, narguant l'impatience des conducteurs qui ne savaient comment s'y prendre pour les faire sortir de leur stupide immobilit�. Le soir, faute de trouver un endroit propice, nous camp�mes tout pr�s d'un mar�cage. L'eau de celui-ci, qu'on nous servit pendant le d�ner, nous octroya certaines coliques, qui nous tinrent �veill�s pendant toute la nuit. [Illustration: Le plateau de Saridjass, peu tourment�, est pourvu d'une herbe suffisante pour les chevaux (page 477).--D'apr�s une photographie.] Peu apr�s notre d�part du camp, nous laissons � gauche le vallon du Berkout, dont le col donne dans la vall�e de Kizil-tao. Le contrefort qui la s�pare du Saridjass semble une gigantesque moraine, enti�rement recouverte de p�turages crev�s par quelques �lots de roches, qui rompent un peu la maussade uniformit� de cet interminable dos d'�ne. � un certain moment, nous remarquons un groupe d'_ovispoli_ de l'autre c�t� du fleuve, paissant tranquillement dans une combe. Ces animaux sont de la taille d'un veau, mais d'une carrure plus accentu�e, avec un manteau aux poils touffus et blonds, et portent sur le cr�ne une paire d'�normes cornes en spirales. Les Kirghizes les appellent: _koudja_. Ce mouton sauvage se tient de pr�f�rence sur les hauts plateaux du Pamir et du Tian-Chan. Il est inutile de le chercher sur les pentes abruptes des montagnes, o� il ne peut circuler, vu que ses cornes, qui sortent lat�ralement de la t�te, se heurteraient contre les rochers. En automne, les m�les se livrent des batailles acharn�es. Le plus souvent, � force de se choquer le cr�ne, un des combattants tombe assomm� sur le terrain, et son cadavre ne reste pas longtemps avant d'�tre �cartel� et d�pec� par les oiseaux de proie et les fauves des environs. Les cornes seules demeurent sur place, recueillies quelquefois par les nomades qui les �talent sur des rochers dont les formes �tranges attirent leur attention. [Illustration: Nous passons � gu� le Kizil-sou.--D'apr�s des photographies.] Le plateau du Saridjass est surtout peupl� de milliers de chevaux, partag�s en plusieurs troupeaux, et diss�min�s un peu partout dans la haute vall�e. C'est un endroit tr�s favorable � l'�levage hippique. Le terrain est peu tourment�, et si l'herbe n'est pas tr�s fournie, elle est suffisante cependant pour nourrir quelques centaines de milliers de b�tes. Pour surveiller autant de chevaux, il y a relativement peu de gardiens. � vrai dire, leur t�che se r�sume � bien peu de chose: elle consiste � ne pas perdre de vue les b�tes pendant le jour et � les rassembler le soir autour de leurs tentes. Mais, s'ils n'ont rien � faire, ces pauvres diables de bergers ne jouissent pas d'une vie tr�s enviable. Ils logent, soit sous un rocher, soit sous un feutre jet� en forme de tente, rarement dans une yourte. Leur nourriture n'est autre que le koumiss. Ils n'ont pas autre chose. Tous ces chevaux appartiennent � des Kozaques de la S�miretchi� et de la Dzoungarie. Deux fois par an, ils viennent faire un choix et conduisent des troupes de chevaux aux foires de Kouldja, d'Ak-sou ou de Kachgar, o� ils les vendent de 30 � 60 francs la t�te. Le sol sur lequel nous marchons est sillonn� d'une multitude d'orni�res trac�es parall�lement, comme si le terrain avait �t� labour� par une charrue. Ce sont les chevaux qui ont cannel� ainsi le gazon, parce que, comme les chameaux, ils aiment � marcher c�te � c�te; de cette mani�re, ils creusent autant de sentiers r�guliers qu'il y a d'espace disponible. Le torrent a tout � coup disparu de notre vue et il semble que la toison v�g�tale ne doive pas discontinuer d'un c�t� � l'autre de la vall�e. Le fleuve est dissimul� dans un foss� profond, coup� � pic. Un peu plus haut, il r�appara�t, et partage ses eaux en de nombreux canaux. Mais le plateau, ou ce qui de loin nous parut comme tel, a pris fin, et nous nous trouvons bient�t dans la r�gion de la haute montagne. L'air m�me est devenu tr�s vif et nous annonce le voisinage des glaciers. En effet, sur notre droite, le flanc gauche de la vall�e se dresse brusquement et se brise en plusieurs conques, o� des glaciers montrent leur t�te crevass�e au-dessus de leurs moraines frontales. Vers le soir, nous sommes au d�bouch� de la vall�e de Kachkateur, qui s'ouvre � droite du Saridjass, et m�ne par deux cols dans les vall�es de Kokdjart et de Kapkak, dans le bassin de l'Ili. _19 juillet._--Le Khan Tengri, le �prince des cieux�, comme le d�signent les Mongols dans leur langue imag�e, est le pic g�ant de toute la cha�ne des monts C�lestes. Cette d�nomination pompeuse n'a rien de d�plac�, si l'on consid�re sa position exceptionnelle et surtout son �l�vation consid�rable, qui, selon quelques voyageurs, d�passe 7�200 m�tres d'altitude. Presque tous les peuples barbares vivant en contact continuel avec la nature sauvage sont enclins � glorifier des choses inanim�es, � donner un sens, une signification � des objets dont la singularit� d�passe les bornes de leur compr�hension. Pour ne parler ici que de l'Asie centrale, on peut dire que le nom des villes, des fleuves, des lacs et des montagnes se rapporte le plus souvent � une impression que l'habitant de ces contr�es a re�ue au moment o� il en a aper�u le site. Nous avons d�j� eu l'occasion de relever ce fait dont l'exactitude ne saurait �tre mise en doute. Il serait d�sirable que les explorateurs eussent le tact de respecter ces r�gles de nomenclature g�ographique d'un cachet beaucoup plus original, en �vitant de la remplacer par les noms de savants, qui n'ont quelquefois aucun rapport avec les localit�s ou les objets qu'il s'agit de d�signer. La situation du Khan Tengri n'a jamais �t� exactement �tablie. Les g�ographes l'ont cas� un peu partout, sauf � sa vraie place. Les rares voyageurs qui l'approch�rent ne sont m�me pas tous d'accord; cela provient sans doute de ce qu'on n'a fait que l'entrevoir d'une certaine distance, et presque toujours du fond d'une des vall�es qui rayonnent autour de sa base. Tandis qu'il est visible des plaines du Tek�s, � plus de 200 verstes au nord, et m�me de la route de Kachgar � Koutcha, il demeure partout ailleurs masqu� par les contreforts qui constituent sa vaste assise. Sur quelques-unes des cartes que nous avions sous les yeux, le Khan Tengri semblait s'�lever isol�ment au nord de la petite ville de Ba�, sur le chemin d'Ak-sou. Suivant l'enqu�te que nous avions faite � Prjevalsk et selon les indications de la carte russe dont nous �tions nantis, le 18 juillet nous devions �tre tout pr�s du pic, nous trouvant � une vingtaine de verstes du point terminus de la vall�e du Saridjass, o� il �tait plac�. Nous br�lions de le voir et de l'�tudier, m�me d'une certaine distance, impatients de pr�senter nos hommages � cette myst�rieuse souverainet�, qui, depuis des mois, hantait notre esprit. Nous d�cid�mes donc d'escalader un pic quelconque de la vall�e de Kachkateur, mais dont l'�l�vation f�t assez consid�rable pour jouir d'une vaste �tendue de montagnes. � dix heures, nous arrivons sur le col de Kachkateur, passage tr�s fr�quent� par les nomades qui s'adonnent � l'�levage des chevaux sur le plateau du Saridjass. De ce col, en suivant la vall�e de Kokdjart, on arrive aux villages de Tald-boulak, de Dgilkarkara et de Kheghen. Au sud du col, s'�levait une blanche pyramide de glace, dont les angles se h�rissaient de rochers. C'est par l� que nous dirige�mes nos pas, et au bout de deux heures nous atteign�mes sans difficult� aucune le sommet, form� par une calotte de neige surplombant en une gigantesque corniche la vall�e de Kapkak. [Illustration: Panorama du massif du Khan Tengri.--D'apr�s une photographie.] En �tant nos lunettes � neige pour mieux voir, nous �prouv�mes un douloureux �blouissement qui nous contraignit � fermer instinctivement les yeux. Jamais, jusqu'alors, nous ne nous �tions trouv�s au milieu d'un pareil scintillement de neige, d'une fulguration de glaces aussi intense. Partout o� le regard pouvait plonger ou s'arr�ter, il ne distinguait qu'une succession chaotique de pics, d'ar�tes, de d�mes, d'aiguilles, un moutonnement infini de montagnes recouvertes de neiges, enchev�tr�es les unes dans les autres et se dirigeant en tous sens. [Illustration: Entr�e de la vall�e de Kachkateur.--D'apr�s une photographie.] [Illustration: Nous baptis�mes Kachkateur-tao, la pointe de 4�250 m�tres que nous avions escalad�e.--D'apr�s une photographie.] On a souvent compar� l'aspect d'une vaste �tendue de montagnes aux vagues de la mer, qui se seraient subitement solidifi�es par un coup de baguette magique. Sur les Alpes cette comparaison est exacte, car le d�ploiement des contreforts imite parfaitement, � peu de chose pr�s, la formation des ondes de la mer. Mais ici le bouleversement �tait tel, l'asym�trie si frappante, que cette similitude nous semblait trop modeste. C'�tait plut�t un oc�an agit� par un cataclysme, aux prises avec une temp�te effr�n�e. Les roches m�mes qui cr�nelaient les cr�tes de leurs �tranges silhouettes, pr�sentaient des reflets de poteries, des �clats de verre de Venise, avec des effets d'ombres qui faisaient qu'� grand'peine on les discernait de la neige qui les saupoudrait. Le Khan Tengri dominait de sa haute pyramide de granit cette arm�e de colosses qui semblaient former comme une garde d'honneur et interdire l'approche aux profanes. Il se trouvait � une quarantaine de verstes au sud de nous, formant le centre, d'o� rayonnaient et divergeaient de tous c�t�s les contreforts et les vall�es. D'apr�s notre carte, le Khan Tengri aurait d� �tre � l'est du col de Kachkateur, � moins d'une vingtaine de verstes de l'endroit o� nous �tions. Nous n'e�mes pas de difficult� � constater que cette carte �tait tout � fait erron�e sur ce point, et que si nous voulions aboutir � quelque r�sultat, nous devions nous en m�fier. Nous faisions fausse route, car par la vall�e du Saridjass, jamais nous n'aurions abord� le colosse. Il fallait tourner bride et nous en approcher par un autre c�t�. Apr�s quelques observations sur le massif, nous baptis�mes Kachkateur-tao, la pointe que nous venions d'escalader. Elle mesurait 4�250 m�tres d'altitude. Une heure apr�s nous �tions sur le col, o� le pauvre Kirghize qui gardait nos chevaux, � la merci d'un vent glacial, battait la semelle depuis longtemps, prenant force chiques de _nass_, pour combattre la faim, ne se doutant pas qu'il avait les vivres sur le dos! En descendant rejoindre le camp, nous trouv�mes une paire d'�normes cornes de cerf, � 3�000 m�tres, gisant l�, qui sait depuis combien de temps, rougies par les intemp�ries, et calcin�es par le soleil. _20 juillet._--Au del� du Saridjass-tao s'�tend la vall�e d'Inghiltchik, qui, selon toute probabilit�, doit prendre naissance au pied du Khan Tengri. Mais le contrefort qui les divise est tr�s �lev� et encombr� dans sa majeure partie par des neiges �ternelles. Pour des alpinistes, ces entraves �taient moins que rien, car, avec un guide comme Zurbriggen, les difficult�s s'aplanissent et deviennent des jeux d'enfants. Mais nous n'�tions pas seuls et il fallait aussi transporter tous les bagages de la caravane, car arriv�s de l'autre c�t�, nous n'aurions rien trouv� ni pour nous abriter ni pour nous sustenter. Nos chevaux ne craignaient gu�re le vertige, et leurs aptitudes de grimpeurs nous faisaient esp�rer que m�me dans un passage un peu laborieux ils se comporteraient bien. Seulement, il fallait trouver ce passage, ce qui n'�tait pas tr�s facile avec l'ignorance des lieux et l'impatience qui nous agitait, et qui �cartait toute vell�it� d'un long t�tonnement. Cependant le djighite nous fit comprendre que, peut-�tre, en interrogeant les gardiens des chevaux, il trouverait notre affaire. De l'endroit o� nous �tions il ne fallait pas compter pouvoir franchir la montagne. On devait d�valer jusqu'� la rencontre d'un vallon dont le col n'�tait pas trop dur pour nos montures. En attendant, nous nous r�veillons avec 20 centim�tres de neige sur nos tentes. Et ce n'est que tr�s tard que nous pouvons partir. Le passage � gu� du Saridjass-sou n'�tait pas sans offrir quelques dangers; n�anmoins nous arriv�mes sains et saufs sur l'autre rive, apr�s avoir �prouv� dans maintes baignades des �motions assez vives. Sur l'autre versant, nous ne f�mes pas peu d�concert�s de trouver, au lieu de la plaine que nous attendions, un terrain ondoyant de collines, creus� de r�servoirs d'eau bourbeuse et sillonn� de ruisseaux qui disparaissaient dans les d�chirures du sol. Le terrain �tait morainique par excellence, par cons�quent tr�s poreux, et surtout d'une uniformit� sans pareille. Il n'�tait pas prudent de s'�loigner trop de la caravane, car on aurait eu vite fait de s'�garer. Aussi, nous ne nous perdions jamais de vue et marchions en file indienne tr�s serr�e. Le soir, on campa en face de la vall�e d'Adeurteur, dont le glacier s'appelle de Mouchktoff, en l'honneur d'un officier russe du m�me nom, qui, le premier, entrevit le plateau du Saridjass. Le lendemain matin, m�me surprise que la veille. Pendant la nuit, la neige �tait tomb�e drue sur nos tentes. � la premi�re heure, des hennissements d�chirants et un pi�tinement acc�l�r� de sabots nous firent sursauter dans nos sacs. C'�tait une avalanche effr�n�e de chevaux, descendant des coteaux sup�rieurs chass�s par une tourmente de neige. � midi, nous nous acheminons, toujours sur le m�me versant, qui augmente peu � peu sa d�clivit� et s'approche de plus en plus de la ligne des vraies montagnes. Nous longeons plusieurs mares d'eau peupl�es par des colonies de canards sauvages. Piotra, notre jeune colon russe, se met en devoir d'attraper quelques-uns de ces volatiles; d�pouill� de v�tements, il se dissimule enti�rement dans l'eau, et saisit par les pattes les pauvres b�tes qui, ne se doutant pas de sa pr�sence, passaient � la port�e de sa main. Entre temps, le djighite s'est inform� aupr�s des bergers, et d�couvre finalement un passage pour franchir la montagne. C'est le col de Tuz. En h�tant un peu le pas, nous arrivons le soir, � l'embouchure de la vall�e du m�me nom. (_� suivre._) JULES BROCHEREL. [Illustration: La vall�e de Tomghent.--D'apr�s une photographie.] Droits de traduction et de reproduction r�serv�s. TOME XI, NOUVELLE S�RIE.--41e LIV. N� 41.--14 Octobre 1905. [Illustration: Des kirghizes d'Oustchiar �taient venus � notre rencontre (page 489).--D'apr�s une photographie.] VOYAGE DU PRINCE SCIPION BORGH�SE AUX MONTS C�LESTES[2] [Note 2: _Suite. Voyez pages 457 et 469._] PAR M. JULES BROCHEREL. III. -- Sur le col de Tuz. -- Rencontre d'antilopes. -- La vall�e d'Inghiltchik. -- Le �tchiou mouz�. -- Un chef kirghize. -- Les gorges d'Attia�lo. -- L'aoul d'Oustchiar. -- Arr�t�s par les rochers. [Illustration: Kirghize joueur de fl�te.--D'apr�s une photographie.] Le passage du col de Tuz est une �tape importante dans l'excursion aux Monts C�lestes; le vallon qui le pr�c�de ne s'aper�oit pas depuis le thalweg du Saridjass-sou; il reste masqu� par une moraine s'avan�ant comme une sorte de digue entre les deux fleuves, qui, avant de se r�unir, roulent longtemps presque parall�lement l'un � l'autre. Le 22, en quittant notre camp, nous sommes assaillis par des nu�es de moustiques qui s'abattent sur nous avec une voracit� cruelle. Nous avons beau couper l'air de nos cravaches pour �loigner ces aga�ants insectes, notre �piderme devient leur proie et nous en souffrons beaucoup. Vers dix heures, nous rencontrons un groupe de trois _arkars_, esp�ce d'antilope du genre du chamois, qui paissaient tranquillement sur une pente gazonn�e. Ils ne semblent gu�re surpris de notre pr�sence, et au lieu de d�taler � notre approche ils continuent � tondre les bouquets d'herbes, en s'arr�tant de temps � autre pour nous regarder. De la taille d'un petit chamois, ils sont tr�s fr�les, avec un pelage ras, d'un blond d'ocre, qui se confond facilement avec la teinte du terrain. Ils portent une paire de petites cornes droites, l�g�rement divergentes. C'est l'_antilope argalis_, commune dans la cha�ne du Tien Chan. Le vallon de Tuz se divise en trois combes. Nous prenons par celle de droite; les autres sont impraticables. Des traces de sentier nous conduisent rapidement aux premiers �boulis, au bas d'un �norme bastion de roches caverneuses. Il y a bien un semblant de chemin qui c�toie en rampant les escarpements boulevers�s de la montagne, qu'on distingue de loin aux pierres remu�es par les fr�quentes travers�es des caravanes, et qui se d�tache comme une longue bande claire sur la teinte ferrugineuse du sol. En r�alit�, c'est une parodie de sentier, car nous avan�ons avec beaucoup de peine, les cailloux qui jonchent le sol roulant avec une facilit� extraordinaire. Zurbriggen, qui nous a devanc�s, s'est plac� en statue �questre sur le haut du bastion. Quand nous parvenons � lui, il secoue tristement sa barbe rousse, malmenant la pipe �teinte au coin de sa bouche. C'est un mauvais pr�sage. [Illustration: Le massif du Kizil-tao (page 486).--D'apr�s une photographie.] �Par o� passerons-nous?� nous dit-il en promenant son regard sur l'amphith��tre de rochers et de glaces qui nous fait face � quelques centaines de m�tres. Nous appelons le djighite. Celui-ci nous indique une raie fonc�e qui traverse le glacier du milieu. �_Vot doroga!_--Voil� le chemin--nous r�pond-il en russe. _Djol dj�man!_--C'est tr�s mauvais�, ajoute-t-il dans son dialecte. Pr�s de nous, un petit lac recueille les eaux de trois glaciers, qui, bien que de petites dimensions, sont presque tous d�couverts, et d'une inclinaison assez alarmante. Mais �le chasseur�, prenant par la bride deux chevaux, a d�j� escalad� la moraine frontale. Nous le suivons sans savoir au juste ce que nous allons faire. Avec un courage un peu t�m�raire, nous hissons toutes les b�tes sur le sommet du pierrier, o� elles ont bien de la peine � se tenir debout, tant la place est exigu� et le sol glissant, � cause du suintement du glacier. [Illustration: R�gion des Monts C�lestes.] Zurbriggen, tenant sa b�te par les r�nes, s'aventure audacieusement sur la pente glac�e. D'abord il monte droit devant lui, puis un brusque renflement le contraint d'obliquer � droite, en prenant le glacier en �charpe. Nous tentons d'en faire autant, en suivant les fissures o� un petit relief permet de poser les pieds, et cherchons les endroits rugueux et granul�s. D�pourvus de piolet, nous sommes forc�s de nous servir des mains, afin de ne pas tomber. Mais quand il nous faut tourner � droite, pour traverser diagonalement le glacier, nous jugeons que le jeu est d�cid�ment trop dangereux. Les chevaux auraient toutes les chances de verser les charges, en m�me temps qu'ils d�gringoleraient in�vitablement jusqu'aux abrupts rochers d'en bas. Le guide, parvenu miraculeusement en lieu s�r, nous crie de toutes ses forces de ne pas avancer, car il avait failli tomber, et son cheval en tremblait encore d'�pouvante. Tout � coup un cheval charg� roula comme une pierre contre la moraine, o� stationnait le restant de la caravane. Abbas jeta un cri de douleur, se ramassant sur lui-m�me, sous les pieds du cheval. On le d�gagea. Il avait une jambe bless�e. [Illustration: Les kirghizes m�nent au village une vie peu occup�e.--D'apr�s une photographie.] Continuer dans de pareilles conditions, c'�tait de la folie. Nous d�cid�mes donc de camper tout pr�s du lac, afin de pouvoir chercher pendant le reste de la journ�e une route meilleure. Abandonnant nos chevaux � leur sort, nous rejoign�mes le guide, et en quelques minutes nous parv�nmes au sommet du col. Nous �tions � 3�450 m�tres d'altitude. � nos pieds s'�tendait la vall�e d'Inghiltchik sur une longueur de cent verstes, flanqu�e au sud par une paroi vertigineuse qui s'�levait � plus de 6�000 m�tres. Mais le temps pressait, et pour l'instant il convenait de d�couvrir un passage s�r, plut�t que de nous d�lecter du spectacle de la nature. � droite du col, au del� d'une ar�te de rocher, descendait un glacier avec une pente tr�s douce et des moraines lat�rales peu escarp�es. C'�tait par l� que nous devions passer. En arrivant au campement, nous trouv�mes deux malades, Abbas et Piotra. Celui-ci se roulait par terre en se tenant le ventre dans des contorsions atroces. L'autre se plaignait de souffrir de la jambe. On les frictionna avec un antiseptique, et on administra un purgatif au jeune Russe. La confiance aveugle que ces hommes simples avaient en notre toute-puissance, aid�rent � l'efficacit� des rem�des. Nous e�mes plus tard occasion de nous servir de notre pharmacie aupr�s des Kirghizes. Bien qu'ils soient des hommes tr�s endurcis, ce sont toujours des malades plus imaginaires que r�els. Il suffit alors d'un rien pour les gu�rir incontinent. Ils professent � l'�gard de la m�decine des civilis�s une confiance illimit�e. Le lendemain, au bout de trois heures, nous parvenons jusqu'au col de Tuz num�ro deux. En r�alit� ce sont deux cols que fr�quentent les nomades, selon que l'un des deux est plus ou moins praticable. Nous ne faisons donc que suivre l'exemple des Kirghizes. Tandis que la caravane marchait vers la vall�e d'Inghiltchik, je grimpai sur une petite �minence pour proc�der � mes travaux. La vall�e se d�veloppait en forme de croissant, � la p�riph�rie duquel je me trouvais. De la sorte, mon regard pouvait plonger en amont et en aval dans presque toute la longueur de ce gigantesque sillon. Au premier coup d'oeil, on peut facilement distinguer dans ce massif, trois sections. La partie sup�rieure, longue de 50 verstes environ, est occup�e enti�rement par un glacier colossal, ayant la forme d'un tronc d'arbre dont les embranchements se perdent dans des gorges. La partie moyenne de la vall�e, presque plate, est constitu�e par le thalweg m�me du fleuve, qui s'�tend sur une largeur de 2 � 3 verstes. Apr�s une vingtaine de verstes d'un amoncellement de pierres, et d'un fouillis de canaux, une �cluse naturelle de rochers r�unit tous les ruisseaux en un unique faisceau. C'est l� que la vall�e inf�rieure commence, rev�tue de maigres p�turages. Le versant qui tombe du fa�te du Saridjass-tao, est recouvert jusqu'� mi-hauteur d'une forte couche de d�p�ts morainiques, marquant par une ligne nettement trac�e le niveau de l'ancien glacier. Le terrain est br�l� par le soleil, et sa couleur jaun�tre ne fait que rehausser l'�blouissement des neiges sup�rieures. Mais la paroi de roches qui fait vis-�-vis est tout ce qu'on peut imaginer de plus terrible, de plus convuls�, de plus disloqu� dans la nature. Des aiguilles s'�lancent avec une sveltesse �tonnante, s'alignent en de multiples rang�es au-dessus du contrefort qui est labour� par des fentes, et tourment� en tout sens par une force diabolique. Ce bloc incommensurable de granit et de gneiss est taillad� de gradins, fendu de fissures qui stup�fient parfois par leur tranchante nettet�. Un talus de d�bris s'adosse � la base des rochers, dissimulant les anfractuosit�s. Des filets d'eau gazouillent en des f�lures t�n�breuses, dont les parois tiennent en suspension d'�normes rochers, pris entre les bords de la crevasse. Pour descendre le col de Tuz, il s'agit de faire un saut de 2�000 m�tres. Ne croyez pas qu'un sentier facilite la besogne et qu'on n'ait qu'� se laisser glisser. Il faut s'ouvrir une route. Quand je parvins aux premiers gazons, mon cheval saignait de ses quatre pieds, et ne paraissait pas tr�s enthousiasm� de ce divertissement. Vers trois heures nous arrivons tous au bas du coteau, dont la bordure s'�tait �croul�e par suite de l'�rosion du torrent. Le paysage manque toujours de charme, bien qu'il s'�gaye de quelques arbrisseaux blottis dans les anses de la berge. Des bouquets de crucif�res, couleur safran, des chardons, des centaur�es rouges et des an�mones jaunes fol�trant en de longues tra�n�es sur les buissons, se disputent une pi�tre existence dans le maigre terrain du talus. Quelquefois un ruisseau jaillit on ne sait comment de ce roc torr�fi� et arrose des parterres de gramin�es, formant de v�ritables oasis, dans le pierrier interrompu. Sur une petite terrasse du rivage, quelque chose d'insolite attire notre attention. C'est un tombeau kirghize form� par des troncs d'arbres entrecrois�s, au centre duquel s'�l�ve une pyramide de cailloux. [Illustration: Notre petite troupe s'aventure audacieusement sur la pente glac�e (page 482).--D'apr�s une photographie.] Peu de temps apr�s, nous atteignons un _a�l_ abandonn� de nomades. C'est l� qu'ils viennent s'�tablir pendant la mauvaise saison, car il para�t qu'alors, le versant que nous venons d'arpenter dans sa hauteur, expos� comme il est aux rayons du soleil, se d�barrasse vite de la neige, et se recouvre d'herbes. Autour d'un gros bloc de granit, on voit distinctement les cercles trac�s par les _keregas_, c'est-�-dire les treillis de bois qui forment la carcasse de la yourte. Au milieu, les trois pierres calcin�es de l'�tre, sont encore debout. L'herbe a pouss�, drue et haute, l� o� le stationnement prolong� des animaux a engraiss� le sol. Mais, au lieu de nous installer dans cet emplacement, nous pr�f�rons nous cacher � l'abri d'un mamelon, afin de prot�ger notre camp de l'haleine par trop r�frig�rante du glacier qui, tout pr�s de nous, vomit par mille bouches des torrents d'eau bourbeuse. En face, la masse �crasante du Kizil-tao, voil�e de nuages, nous menace incessamment de tonnantes avalanches, dont la chute nous amuse plut�t qu'elle ne nous effraie, car nous sommes hors de leur port�e. En amont, une mignonne cascade appara�t parmi les broussailles. [Illustration: Vall�e sup�rieure d'Inghiltchik.--D'apr�s une photographie.] Les Kirghizes y r�unissent habituellement leurs troupeaux de moutons, le site se trouvant clos naturellement. _24 juillet._--Nous allons faire une reconnaissance sur le glacier d'Inghiltchik, afin de chercher un endroit par o� faire passer les chevaux. Si nous avons cette chance, nous nous transporterons le plus haut possible, de mani�re � pouvoir �tablir notre quartier g�n�ral tout pr�s de la base du Khan Tengri. Il doit �tre, certainement, au point terminus de cette gigantesque coul�e de glace, que les nomades appellent le �tchiou mouz�, le grand glacier. La surface est tr�s mouvement�e: c'est tout un syst�me de lacs et de torrents, de combes et de monticules, litt�ralement encombr�s de pierres qui, suivant leur provenance et la plasticit� du glacier, s'accumulent en stries longitudinales et transversales, de couleurs vari�es. Vu d'en haut, le glacier ressemble � la carapace d'un reptile. Nous n'attendons pas longtemps pour nous apercevoir de l'impossibilit� absolue d'y amener nos b�tes, � cause du manque de p�turages et de l'impraticabilit� du terrain. Pour remonter le glacier d'Inghiltchik jusqu'� ses origines et y s�journer pendant quelques semaines, il e�t fallu avoir sous la main une �quipe de porteurs solides et chauss�s _ad hoc_; ce qui n'�tait pas le cas des hommes dont nous disposions, ni de ceux que nous aurions pu trouver dans les vall�es voisines. Ils sont d'abord mal habill�s, et puis on ne peut leur faire porter quoi que ce soit sur les �paules. Nous nous r�sign�mes donc � chercher ailleurs le point d'attaque du Khan Tengri. Nous d�cid�mes de l'aborder depuis le col du Mouj-art, en passant sur le territoire chinois. En levant le camp, nous ne f�mes pas peu surpris de voir le djighite nous amener un vieux Kirghize qui vint, sur-le-champ, se prosterner devant nous comme s'il implorait une gr�ce. Ce n'�tait rien moins que le chef, le _chirta�_, de toute la vall�e de Ka�nde, venu expr�s pour offrir ses bons offices. La veille, pendant que nous d�ambulions sur le glacier d'Inghiltchik, le djighite avait tout � coup disparu sans crier gare et, pour qu�rir son homme, il avait parcouru tout simplement 150 verstes et accompli le voyage en vingt-quatre heures. Ma�tre Abbas, abandonnant pour un moment ses casseroles, remplit gravement les fonctions de ma�tre des c�r�monies et d'interpr�te. D'une flegmatique imperturbabilit�, il envisagea la chose avec son tact habituel, c'est-�-dire en traitant son h�te comme une vieille connaissance � lui. Il faut dire qu'il n'aimait gu�re les Kirghizes, il les consid�rait comme des quantit�s n�gligeables. En parlant d'eux et de leurs femmes, il avait coutume de dire que c'�taient des chiens.... capables de manger jusqu'� des charognes. Ce _chirta�_ ne paraissait pas, � vrai dire, d'une tr�s haute distinction. Sauf quelques paroles de convenance, qu'Abbas nous traduisait dans son fran�ais de T�h�ran, il ne savait gu�re s'exprimer qu'� force de courbettes et de salamalecs, qu'il ex�cutait automatiquement � tout propos, en fermant les yeux et en pressant les mains sur la poitrine. � peine �tions-nous en route que deux nouveaux cavaliers vinrent � notre rencontre et se joignirent � nous. C'�taient deux sujets de notre autocrate en raccourci, mand�s par lui pour venir en aide � notre caravane. Comme on le voit, si ce chef n'�tait pas tr�s avenant, il connaissait au moins les r�gles �l�mentaires de l'hospitalit�. Ces hommes nous furent d'une grande utilit� pour passer � gu� le fleuve qui, en certains endroits, mesurait pr�s de 200 m�tres de largeur. Nous atterr�mes sur l'autre rive, � l'entr�e du vallon d'Attia�lo, le seul passage communiquant avec la vall�e de Ka�nde qui longe, au sud, celle d'Inghiltchik. Le contrefort qui les s�pare se pr�sente, au point de vue g�ologique, comme le noyau central du groupe du Khan Tengri. C'est un syst�me ayant des caract�res propres, tant par son aspect ext�rieur que par la nature de ses roches. � son profil anguleux et � la disposition en �ventail des couches granitiques, on reconna�t ais�ment l'origine plutonique de sa formation. Ce qui est surprenant dans la constitution de ce massif, c'est qu'� un moment donn� il cesse inopin�ment, coup� en biais, du sud-ouest au nord-est, par l'entaille des gorges d'Attia�lo. De loin, on ne s'attendrait pas � cette surprise, parce que la cha�ne ne semble gu�re interrompue et para�t continuer sous la forme att�nu�e d'un contrefort servant d'appui gigantesque � la masse imposante du Kizil-tao. Mais, de pr�s, comme nous le constatons en remontant le vallon d'Attia�lo, on d�couvre que cet appendice montueux est d'une origine et d'une structure toutes diff�rentes. [Illustration: Vall�e de Ka�nde: l'eau d'un lac s'�coulait au milieu d'une prairie �maill�e de fleurs.--D'apr�s une photographie.] Apr�s deux ou trois verstes, le vallon se partage en deux: � gauche, une effroyable tranch�e para�t contourner le bastion de granit, comme pour l'isoler. Nous prenons par celui de droite. Apr�s quelques heures de rapide mont�e, la pluie nous surprend et nous oblige de nous arr�ter au pied d'une paroi de rochers, coiff�e de glaces. Il y a bien des pierres qui d�gringolent de temps � autre et voltigent autour de notre camp, mais, habitu�s comme nous sommes � ces bagatelles, nous n'y faisons m�me plus attention. C'est le chapeau rabattu, le col relev� et le plaid sur les �paules, que nous partons de notre bivouac de 3�000 m�tres, sans savoir au juste o� nous coucherons le soir. Lentement, fouett�s par la pluie que le vent chasse contre nous, nous gravissons l'�chelonnement des terrasses �ventr�es par les �boulements, contournant de temps � autre quelques moraines, dont les glaciers s'enfuient dans des gouffres envelopp�s de brouillard, � notre gauche. Au sommet du col, les nuages se d�chirent un instant, et nous nous apercevons que nous fr�lons un lac, dont l'eau s'�coule en serpentant au milieu d'une prairie �maill�e de fleurs. Dans notre singulier �tat d'�me, voisin de l'indolence maussade, cette esquisse de paysage, aux lignes estomp�es et noy�es dans un flottement de vapeurs, nous est comme un soulagement. La lourdeur apathique dans laquelle sommeillait notre esprit, dispara�t tout � coup, et c'est presque avec enthousiasme que nous saluons ce lambeau de gazon ensoleill�, qui nous rappelle un petit coin des Alpes, un fragment de la patrie lointaine. Mais cet attendrissement nostalgique n'est pas de longue dur�e. Apr�s cette oasis alpestre, nous nous engageons, sans transition aucune, dans un affreux d�fil�, qui nous fait l'effet de quelque tunnel. [Illustration: Les femmes kirghizes d'Oustchiar se rang�rent, avec leurs enfants, sur notre passage (page 489).--D'apr�s une photographie.] Le temps s'obscurcit et la pluie recommence de plus belle. Le torrent s'est grossi d�mesur�ment. Il nous faut quand m�me le traverser et le longer � plusieurs reprises, avec la menace continuelle des pierres qui se d�tachent des pentes sup�rieures et d�gringolent avec une rapidit� extraordinaire. Pour �viter des accidents, nous sommes contraints � de p�rilleuses galopades sur le terrain tremp� et glissant au plus haut degr�. Soudain, le djighite s'arr�te tout court et nous fait signe d'en faire autant. Il nous dit alors, qu'un peu plus loin il y a un pr�cipice tr�s dangereux, et qu'il serait de la derni�re imprudence de s'y aventurer. Nous nous regardons interloqu�s. Que faire? Pourquoi ne nous avait-il pas avertis plut�t? Devrons-nous camper en cet endroit? Nous nous trouvons sur une bande de gravois charri�s par la rivi�re, dont l'eau tourbillonne � c�t�, entra�nant, dans sa course, de gros blocs qui, en formant un barrage, auraient pu enlever notre camp et nous avec lui. Mais � la seule pens�e de retourner en arri�re et de refaire la route de tout � l'heure, nous nous r�signons � accepter notre triste sort. Ce soir-l�, nous ne nous attard�mes pas � fl�ner, comme d'habitude, autour des tentes, pour faire la causette, et nous ne d�n�mes pas non plus sur le tchiamkerr �tendu � l'entr�e de nos demeures. Apr�s une courte inspection sur la solidit� de celles-ci et une enqu�te sur leur imperm�abilit�, nous enfil�mes nos sacs-lits et nous attend�mes que le Dieu du sommeil m�t un terme � notre surexcitation. [Illustration: Le chirta� de Ka�nde (page 485).--D'apr�s une photographie.] Pendant la nuit, les cauchemars les plus insens�s nous faisaient sursauter � chaque instant, avec la hantise s'attachant � notre esprit qu'� tout moment nous allions �tre an�antis. La pluie qui cr�pitait avec une intensit� toujours croissante sur la toile, nous faisait penser au torrent, dont le volume d'eau avait d� augmenter encore et dans lequel on entendait s'entrechoquer sourdement les pierres que le courant d�sagr�geait des berges. Et les all�es et venues des chevaux qui r�daient autour du camp, fr�lant les tentes, buttant contre les piquets et les cordes tendues, n'�taient pas sans nous donner de s�rieuses appr�hensions sur la solidit� de notre logis. Vers le matin cependant, les nuages se dissip�rent, et un splendide soleil s�cha vite nos bagages tremp�s. Le pr�cipice, dont le djighite nous avait entretenus la veille, �tait une �norme crevasse s'ouvrant dans la montagne dans le sens de la pente. Nous d�mes le remonter et le contourner avec mille pr�cautions, � cause de l'humidit� du sol. Avant de quitter les gorges d'Attia�l�, nous refaisons instinctivement le geste fameux du Dante. Arriv�s en lieu s�r, nous contemplons la beaut� farouche de ce gouffre, o� le torrent se d�bat furieusement entre les parois exigu�s qui l'emprisonnent, disparaissant de temps en temps dans des antres invisibles. Le versant que nous venons de c�toyer pr�sente � d�couvert sa rude charpente en gneiss micaschiste, ravag�e �a et l� par les effondrements des assises rocheuses, dont les d�bris se sont entass�s les uns sur les autres, formant une mosa�que accident�e de pierres de toutes couleurs et de toutes tailles. Mais de l'autre c�t�, la nature plus solide de la roche a conserv� aux escarpements leur structure primitive; ce sont des parois verticales, s'�tageant en gradins, et d�chiquet�es au fa�te par des blocs isol�s, qui donnent l'illusion d'un formidable castel du Moyen �ge. La couleur ferrugineuse des roches, stri�es verticalement de bandes bleu�tres, brunies par l'�coulement des eaux, et une multitude de trous �vas�s produits par je ne sais quel agent, donnaient � cette assise de calcaire dolomitique une v�tust� d'un pittoresque charmant. Apr�s quelques d�tours, nous descendons dans la vall�e de Ka�nde, o� le chirta� nous attendait avec deux hommes de sa tribu. Il nous apportait une outre pleine de koumiss, qu'il nous offrit tr�s obligeamment. Puis, prenant la t�te de la caravane, il nous guida � travers le d�dale de canaux qui sillonnent les pierres du thalweg et nous amena, apr�s force baignades, sur un tertre gazonn�, � la lisi�re d'un bois de sapins. [Illustration: Nous salu�mes la vall�e de Ka�nde comme un coin de la terre des alpes (page 480).--D'apr�s une photographie.] L�, le chef nous invite � pousser jusqu'� son aoul, qui se trouve � environ une demi-journ�e de marche, en amont. Mais press�s comme nous sommes d'atteindre le but de nos p�r�grinations, nous d�clinons ses avances, en lui laissant esp�rer que plus tard peut-�tre nous serions � m�me d'acquiescer � son d�sir. Pour franchir le contrefort qui flanque au sud la vall�e de Ka�nde, il nous faut redescendre celle-ci pendant trois heures environ, apr�s quoi nous serpentons � travers de beaux p�turages, jusqu'au col d'Oustchiar, que nous touchons vers deux heures de l'apr�s-midi. L� encore, deux Kirghizes aux visages inconnus, nous attendent avec la provision traditionnelle de koumiss. Leur pr�sence nous �tonne profond�ment. Comment ces hommes savaient-ils notre venue, puisqu'ils habitent l'autre versant? Myst�re! Escort�s par ces deux cavaliers d'honneur, nous arriv�mes une heure apr�s � leur aoul, �tabli pr�s d'un torrent dans le creux de la courbe. Tous les hommes pr�sents s'en vinrent incontinent � notre rencontre, pendant que les enfants se sauvaient �pouvant�s et que les femmes nous guettaient anxieusement � travers les fissures des yourtes. C'�tait, pour tout ce monde, un �v�nement incompr�hensible, que notre visite dans leur pays. Aussi le djighite et Abbas avaient-ils grand'peine � leur expliquer le but de notre voyage et � les convaincre qu'aucune id�e hostile ne nous animait. Pendant toute l'apr�s-midi notre camp se trouva envahi par l'�l�ment m�le de la colonie, qui fraternisait avec nous comme avec de vieux amis. Les Kirghizes ont ceci de particulier, qu'ils deviennent d'une effronterie extraordinaire une fois qu'ils vous savent inoffensifs. Le koumiss coula � flots, �chang� par Abbas contre de copieuses libations de th�, pr�par� d'avance dans une grande marmite. Dans la soir�e, nous f�mes un petit tour au milieu des yourtes, au grand ahurissement des femmes, qui se cachaient � notre approche. Mais les maris qui nous accompagnaient les firent sortir et ranger sur notre passage; elles s'ex�cut�rent avec assez de bonne gr�ce. Si leur accoutrement �tait pittoresque, leurs personnes n'avaient rien de bien app�tissant, et, il fallait quelque attention pour les distinguer des hommes, tellement leur charpente �tait disgracieuse et leurs traits durs et repoussants. Invit�s par un Kirghize, nous p�n�tr�mes dans une yourte. Deux femmes se tenaient dissimul�es derri�re un rideau; sur notre demande, le mari le fit glisser sur la tringle. Une d'elles �tait occup�e aupr�s d'un b�b� de quelques mois, qu'elle emmaillottait avec des peaux d'agneaux. Elle lui tendit bient�t un biberon fait d'une corne de boeuf �vid�e, avec au bout une ventouse de parchemin en guise de su�on. L'autre femme �tait en train de broder pour son �poux une calotte. Pour ce faire, elle avait tendu l'�toffe sur un cercle en bois, qu'elle tenait entre ses genoux, et passait � travers le tissu un fil de laine, au moyen d'une pointe d'os. Le dessin n'�tait gu�re sym�trique, mais les couleurs, bien que trop vives, �taient savamment combin�es, et le tout formait un ensemble harmonieux de teintes et de lignes. Sur ces entrefaites, le b�tail rentra. Ce fut un spectacle saisissant, que cette avalanche d'animaux, descendant des pentes de la montagne, refoul�s par les p�tres jusque dans l'emplacement exigu o� on les parque pendant la nuit. Un affolement g�n�ral r�gne dans l'aoul, � l'arriv�e des troupeaux. Toutes les femmes sortent des yourtes; chacune cherche � reconna�tre son b�tail, l'appelle et s'efforce de le r�unir. � cet effet, on tend par terre une longue corde, o� l'on attache les brebis, les ch�vres, les vaches et les juments. Les jeunes gens aident leurs m�res � trier les b�tes. Mais les hommes se gardent bien de faire quoi que ce soit; ils se contentent d'observer et, le cas �ch�ant, de gronder les femmes, si elles se trompent. De gros marmots joufflus, �g�s de deux ou trois ans � peine, � la peau tann�e par l'air, aux formes rebondies, laids �comme des Kirghizes�, petits monstres de sant�, se m�lent � la bagarre, se roulent, courent nus comme des b�tes, en voulant imiter leurs a�n�s. _29 juillet._--Avant de quitter l'aoul d'Oustchiar, comme un de nos chevaux boitait s�rieusement, nous l'�change�mes moyennant quelques roubles contre un autre appartenant aux nomades. � ce petit march� assista naturellement toute la tribu, et Dieu sait combien il aurait dur� si nous n'avions pas ordonn� � Abbas d'envoyer se promener tous ces faiseurs d'embarras. � dix heures, nous atteignons le col d'Artchiar qui s'ouvre dans le petit contrefort qui s�pare les vallons d'Oustchiar et d'Artchiar. Depuis le sommet on jouit d'une belle vue sur le pic d'Oustchiar, s'�levant au del� de l'aoul, rev�tu d'une cuirasse de glace, et coiff� d'une toque de neige. De l'autre c�t� du col, quatre ou cinq rang�es de montagnes se superposent et s'entre-croisent, nous cachant compl�tement l'issue de la conque qui d�cline � nos pieds. Cependant nous suivons l'encoignure de la combe qui nous m�ne en quelques heures dans un �tranglement du vallon, o� le torrent dispara�t tout � coup dans un pr�cipice, dont les parois se rapprochent pour nous barrer la route. Mais une esp�ce de sentier escalade une coul�e d'�boulis et c�toie une suite de promontoires et d'�perons qui s'�lancent audacieusement dans le vide. Nous nous trouvons environn�s par une affreuse tomb�e de roches disloqu�es et tourment�es en tout sens, s'�croulant vertigineusement � des profondeurs insondables. Il nous semble �tre enserr�s dans un �tau d'o� nous chercherions vainement � nous d�gager. [Illustration: Femmes mari�es de la vall�e de Ka�nde avec leur prog�niture.--D'apr�s une photographie.] Pourtant les chevaux avancent toujours du m�me pas alerte, se plient avec une souplesse f�line contre les grumeaux qui empi�tent sur le sentier, �vitent les pierres roulantes, contournent les craquelures, traversent un avalement, enjambent un r�cif; et ainsi de suite pendant deux heures. Cramponn�s �nergiquement au pommeau de la selle, nous nous laissons conduire, presque inconsciemment. Ce n'est pas le moment de mettre en relief notre virtuosit� hippique, et de faire de la haute �cole. Le moindre faux pas du cheval nous enverrait vite dans le n�ant. De temps en temps nous nous assurons, du haut d'une �minence, que toute la caravane est au complet. Apr�s le dernier mamelon, nous descendons par des fondri�res creus�es dans des bancs de terre glaise, au fond du vallon, � l'endroit o� il se partage en deux embranchements. La v�g�tation a tout � fait chang� son caract�re alpestre, et devient d'une singuli�re �tranget�. Des herbes �pineuses, coriaces, mouchet�es de fleurs multicolores, pars�ment le terrain d'un roux fauve; des halliers � l'odeur naus�abonde, des tamaris, des ails, des thyms, toute une l�gion de plantes inconnues simulent des gestes convulsifs d'agonie et ont des exhalations f�tides qui vous prennent � la gorge. Puis un saule solitaire au beau milieu du torrent, tordu, mutil� par la violence des crues. Tout cet amoncellement de pr�cipices et toute cette flore inaccoutum�e vous frappent d'�tonnement et vous font sentir que vous �tes dans une ambiance insolite, o� tout est myst�re, o� le moindre objet vous saisit par sa bizarrerie. [Illustration: L'�l�ment m�le de la colonie vint tout l'apr�s-midi voisiner dans notre campement (page 489).--D'apr�s une photographie.] L'unique chemin qui se pr�sente devant nous, c'est le lit du torrent, large de quelques m�tres seulement, dont l'eau s'�vertue � trouver un passage au milieu d'un amoncellement de blocs de toutes sortes et entre deux hautes murailles qui s'�l�vent toutes droites vers le ciel. Avec sa teinte sombre de cachot macul�e des taches sanglantes de lichens, cette saign�e de la montagne est d'un aspect vraiment terrifiant. Mais, en songeant que depuis des si�cles ces rochers menacent ainsi les voyageurs, nous franchissons sans crainte l'entr�e de cet enfer et nous p�n�trons dans la p�nombre de la gorge. Apr�s quelques pas, le couloir formant un coude brusque, le torrent se jette violemment contre la paroi de rochers, nous coupant la route. Force nous est alors de faire un plongeon dans l'eau, et d'y patauger avec l'al�a d'une noyade. Ce jeu p�rilleux se renouvelle maintes fois, au grand m�contentement de Zurbriggen qui ne semble pas avoir des sympathies tr�s prononc�es pour ces manoeuvres nautiques. Aussi met-il prudemment sa pipe ins�parable dans la poche, pour avoir les mains plus libres et parer aux chutes. Les gorges d'Artchiar se greffent directement sur la vall�e de Ko�kab, vers laquelle nous nous dirigions. Nous nous arr�t�mes sur une langue de terre s'enfon�ant entre les deux fleuves. Cette digue, form�e par le hasard des alluvions, �tait une sorte de pr�au dans la claustrale s�v�rit� de ces montagnes d�nud�es. Partout, les flancs de la vall�e descendaient � pic dans le foss� du fleuve, d�labr�s, labour�s et lav�s par le branle-bas des averses. Le soir, nous allumons de grands feux pour faire peur aux fauves, qui, au dire des Kirghizes, abondent dans les environs. Notre intention �tant de descendre sur le territoire chinois, afin d'aborder le Khan Tengri par la vall�e du Mouj-art, nous comptions suivre le cours du Ko�kab-sou, pensant qu'il nous aurait conduits en amont d'Ak-sou. Mais nous faisions notre projet sans conna�tre le terrain sur lequel nous allions �voluer. En touchant la vall�e de Ko�kab nous constatons de suite l'impossibilit� absolue de continuer notre chemin de ce c�t�. Une tranch�e de pr�s de mille m�tres de profondeur, et dans l'�troit encaissement un courant imp�tueux qui tourbillonnait avec une v�h�mence effr�n�e, soulevant des nuages de vapeurs, voil� ce dont nous disposons pour tout chemin. Il ne fallait pas y songer. En amont, la vall�e para�t plus accessible, et un adoucissement de la c�te nous invite � en tenter la mont�e. Cependant, apr�s avoir suivi pendant quelque temps le talus de la montagne, apr�s avoir pass� � gu� le fleuve, nous nous trouvons tout � coup dans la position d�savantageuse d'avoir � combattre de front le courant. L'eau �tait profonde de 3 � 4 m�tres. � peine les chevaux s'y plongent qu'ils sont entra�n�s comme des plumes. Et encore si, cet obstacle franchi, la route �tait libre! Autant que le regard peut fouiller, il ne voit que pr�cipices sur pr�cipices. Nous sommes tout � fait constern�s. �tre venus de si loin pour butter contre des rochers, c'�tait bien la peine! Mais que faire? Nous ne pouvions gu�re admettre de poursuivre notre voyage � pied. Bon gr�, mal gr�, il nous fallait battre en retraite. En attendant, comme nous ne nous sentons pas le courage de recommencer les baignades de tout � l'heure, nous campons o� nous nous trouvons. Avec un peu de bonne volont� nous d�blayons le terrain des pierres, tandis que les chevaux s'en vont brouter les ramilles des buissons de la berge. Nous ne voulons pourtant pas quitter la vall�e de Ko�kab avant d'�tre fix�s sur sa physionomie. Le lendemain, nous escaladons la montagne � laquelle nous sommes adoss�s. C'est une ascension p�nible et longue � la fois, pendant laquelle nous rencontrons de nombreux troupeaux de bouquetins, aux cornes �normes, appel�s par les savants _ovis argalis_. � quatre heures, nous atteignons 3�850 m�tres. Nous ne sommes pas encore arriv�s sur le plus haut sommet du contrefort; mais, comme il est tard, il faut aussi que nous m�nagions du temps pour la descente. De notre belv�d�re nous n'apercevions, malheureusement, que les bosses des cha�nons convergeant vers l'axe de la vall�e de Ko�kab. � l'est et au sud, des pics de 5�000 � 6�000 m�tres dressent leurs masses de granit recouvertes de glaciers et de neiges �ternelles. � l'extr�mit� du Kok-Chaal-tao, s'ouvre une large baie, d'o� nous entrevoyons une plaine vaporeuse, probablement le d�sert de Taclamakan. Mais le soleil d�cline � l'horizon. � 2�000 m�tres de profondeur, on voit distinctement nos hommes et nos b�tes fourmillant autour des tentes, dress�es sur l'emplacement de l'avant-veille. Le chemin pour y arriver semble tout indiqu� par une tomb�e d'�boulis, s'engouffrant dans un couloir. En quelques bonds nous y arrivons. Mais l� commence la s�rie de nos malheurs. Il nous faut franchir des sauts de rochers, nous laisser glisser sur des pierres suintantes, marcher � petits pas dans des goutti�res, faire en somme des tours d'acrobates, recevoir m�me le corpulent Zurbriggen sur les �paules. Et quand nous croyons avoir termin� la s�rie des m�saventures, nous nous trouvons tout juste au commencement des gorges d'Artchiar! Voil� qui est vexant! Comme bien vous pensez, nous n'avions aucunement envie de nous accommoder pendant toute la nuit de ce cachot, avec la perspective d'une pneumonie. Prenant philosophiquement ce f�cheux contre-temps, nous d�cidons co�te que co�te d'atteindre au plus vite notre camp. Mais c'est � grand-peine. Pourtant, attach�s tous les trois � la m�me corde, en sondant l'eau avec les pieds, en t�tant le vide avec le piolet ou les mains, � minuit nous parvenons au camp. Il est vrai que nous avions les chaussures bourr�es de gravier, que nos sacs �taient remplis d'eau, et que nous-m�mes nous �tions tremp�s jusqu'aux os. Un bon feu, une bonne soupe et un somme prolong� eurent vite raison des souffrances endur�es pendant cette malencontreuse nuit. (_� suivre._) JULES BROCHEREL. [Illustration: Un �aoul� kirghize.] Droits de traduction et de reproductions r�serv�s. TOME IX, NOUVELLE S�RIE.--42e LIV. N� 42.--21 Octobre 1905. [Illustration: Yeux brid�s, pommettes saillantes, nez �pat�, les femmes de Ka�nde sont de vilaines kirghizes (page 496).--D'apr�s une photographie.] VOYAGE DU PRINCE SCIPION BORGH�SE AUX MONTS C�LESTES[3] [Note 3: _Suite. Voyez pages 457, 469 et 481._] PAR M. JULES BROCHEREL. IV. -- Vers l'aiguille d'Oustchiar. -- L'aoul de Ka�nde. -- En vue du Khan Tengri. -- Le glacier de Ka�nde. -- Bloqu�s par la neige. -- Nous songeons au retour. -- Dans la vall�e de l'Irtach. -- Chez le kaltch�. -- Cuisine de Kirghize. -- Fin des travaux topographiques. -- Un enterrement kirghize. [Illustration: Enfant kirghize.--D'apr�s une photographie.] _1er ao�t._--Journ�e de repos aux gorges d'Artchiar. On prend force bains d'eau et de soleil. On herborise dans les environs; des plantes rares enrichissent notre collection. Dans l'apr�s-midi, une bande de loups traverse les coteaux. Nous leur envoyons quelques balles; ils se sauvent en hurlant. Pendant la nuit s'est abattue une pluie torrentielle, et vingt-quatre heures durant c'est une cataracte du ciel, une avalanche de boue et de pierres qui nous tiennent confin�s sous nos tentes. La montagne semble prise d'une attaque de nerfs. Le Ko�kab-sou, formant la goutti�re des deux versants, recueille l'apport de milliers de torrents, qui se pr�cipitent des hauteurs, entra�nant tout sur leur passage. La montagne ressemble � une �norme �ponge, vomissant de toutes parts des flots de liquide. Les deux fleuves varient � tout moment la direction de leur courant, et viennent menacer le soubassement de notre logis. Le 3 ao�t, en sortant des tentes, nous retrouvons un ciel limpide comme une glace, et un soleil flamboyant. La montagne s'est tue, et de l'emportement de la veille il ne subsiste que de tardifs larmoiements qui ruissellent dans les rainures, et impr�gnent l'air d'une agr�able fra�cheur. Nous pouvons donc, sans trop de dangers, affronter le d�fil� d'Artchiar, remonter au col, recommencer en somme le chemin que nous avions fait cinq jours auparavant. Le soir, quand, apr�s avoir rencontr� en route un berger et son troupeau nous arrivons � Oustchiar, les nomades se montrent enchant�s de nous revoir. Nous y trouvons un courrier mand� expr�s par le gouverneur de Prjevalsk. Il nous pr�sente une lettre par laquelle nous apprenons la guerre qui vient d'�clater en Chine. Ce fonctionnaire nous conseille fort d'�viter ce territoire volcanique, pour nous �pargner des d�sagr�ments. [Illustration: Kirghize dressant un aigle.--D'apr�s une photographie.] Dans la matin�e du jour suivant, nous nous m�lons aux Kirghizes, visitant leurs tentes, nous int�ressant � leurs travaux (l'un d'eux dressait un aigle), observant les femmes dans leurs occupations, et leur offrant des bijoux en aluminium. Tr�s touch�es, elles nous sourient gracieusement, et, si elles le pouvaient, elles entameraient bien une causette avec nous. Elles ne semblent plus effarouch�es; au contraire. � trois heures de l'apr�s-midi, le prince, Zurbriggen et moi, accompagn�s d'un cavalier kirghize, nous partons pour une excursion. C'est vers l'�l�gante aiguille d'Oustchiar que nous dirigeons nos pas. � la tomb�e de la nuit, nous bivouaquons � 3�850 m�tres, � la base de la pyramide terminale. Zurbriggen nous assure en partant que nous d�jeunerons au camp. Seulement, il ne pr�voit pas la chemin�e de glaces, qui nous attend, et o�, � la merci des avalanches de pierres, nous restons quatre heures pour gagner quelques centaines de m�tres. Glace d�couverte, verglas sur les rochers, attaches s'enlevant au moindre effort, c'�tait plus qu'il ne fallait pour nous d�courager. Mais avec de la patience et de la prudence on arrive � bout de tout: nous atteignons l'ar�te sud; suivant son tranchant puis le dos d'un n�v�, � une heure de l'apr�s-midi nous posons le pied sur l'extr�me calotte de l'aiguille d'Oustchiar. On proc�de imm�diatement � son bapt�me; apr�s quoi, nous donnons satisfaction � nos estomacs. [Illustration: Itin�raire du voyage aux Monts C�lestes.] C'est 4�500 m�tres d'altitude que mesure ce clocheton de granit et de glace. Notre premier souci, c'est de regarder si nous apercevons le fameux Khan Tengri. Nous n'avons pas de peine � le discerner, car il se d�tache au fond de la vall�e de Ka�nde, pos� sur un socle de glaciers qui divergent de tous les c�t�s. Les deux vall�es de Ka�nde et de Ko�kab s'allongent au couchant et au sud, se tournant le dos. Mais cette surface mouvement�e de roches est d'un aspect triste et d'une sauvagerie sans �gale. Pas la moindre tache de vert ne trouble la teinte terreuse de cette r�gion torr�fi�e par la chaleur du soleil. Si ce n'�tait la dentelle de neige qui frange les c�nes h�rissant la croupe des contreforts, on dirait un relief p�tri dans de la terre glaise. [Illustration: Nous rencontr�mes sur la route d'Oustchiar un berger et son troupeau (page 493).--D'apr�s une photographie.] Au sud, deux pics, l'Ak-sou-tao et le Djannart-tao, post�s en sentinelles � l'entr�e de deux vall�es, paraissent �tre plac�s pour veiller � l'approche d'un ennemi imaginaire. Entre eux deux s'ouvre la baie, par o� s'�chappent les eaux du Djannart-sou, que nous voyons serpenter au loin, comme un ruban d'argent, dans les plaines bleu�tres de la Kachgarie. Au-dessus, une raie ind�cise nous indique la position des collines de Bittama-tao, cernant au sud le plateau d'Outch Tourfan. Plus loin, c'est le Gobi fabuleux, qu'on devine plut�t qu'on ne le voit dans les lignes de l'horizon. Nous sommes admirablement plac�s pour embrasser, d'un seul coup d'oeil, la vasque immense qui recueille les eaux de centaines de glaciers, et est bord�e tout autour par un cercle de montagnes hautes de 5�000 m�tres. Nous constatons que l'art�re principale de ce syst�me hydrographique est le Saridjass-sou, qui, sauf aux d�bouch�s des vall�es, est enfoui dans un foss� �troit et profond, long de pr�s de 300 verstes. C'est un spectacle curieux et imposant � la fois, que de voir ce fleuve majestueux, blanc comme du lait, circuler dans les m�andres des montagnes, dispara�tre soudain au tournant d'un mamelon, pour se montrer plus loin comme s'il sortait des entrailles de la terre. Au couchant, deux vall�es nous font vis-�-vis: � gauche, celle de Djannart, avec les vallons du Ka�tch�, de Bichirtik et d'Archiriak creus�s dans la masse du Kook-chaal-tao. Au fond, l'�chancrure d'Ichtik nous laisse apercevoir les moutonnements du plateau de Karagan, o� prend naissance le Naryn, qui devient plus bas le Syr-Daria. � droite, la vall�e d'Irtach, apr�s un parcours d'une trentaine de verstes, tourne brusquement au nord, derri�re les massifs de Terekty-tao et de Keou-eou-leou-tao. Nous nous arr�tons encore un instant pour admirer les trois pics qui tiennent compagnie � l'Aiguille d'Oustchiar, �troitement group�s les uns pr�s des autres. Celui du milieu, surtout, conquiert de suite notre attention. Son air r�barbatif n'est pas pour inviter � en tenter l'escalade. Nous le nommons: _Kargan-tach_, �l'aigle de pierre�. La descente au camp s'effectue d'une haleine. Et quand nous nous retrouvons sous nos tentes spacieuses, autour de la nappe charg�e de confitures, et que nous savourons le th� au lait, il nous semble �tre dans un palais. Coucher sur le gazon apr�s une nuit pass�e sur des pierres et une journ�e sur la glace, c'est tout ce qu'on peut r�ver de plus confortable, dans ces contr�es. [Illustration: Je photographiai les kirghizes de Ka�nde qui s'�taient, pour nous recevoir, assembl�s sur une �minence.--D'apr�s une photographie.] _6 ao�t._--La vue du Khan-Tengri nous donne un regain d'enthousiasme. Il nous semble m�me que son ascension n'est aucunement dangereuse. Il suffirait d'aller camper � sa base et d'attendre le moment propice pour en effectuer l'escalade. Seulement, il faut que le temps se mette au beau, sans quoi on ne pourrait y arriver. Aujourd'hui on fl�ne tout comme les Kirghizes, et, pareils � des enfants, nous nous roulons sur le gazon. Apr�s un surmenage physique et une longue tension de nerfs, on aime � s'allonger parmi les herbes, et � regarder courir les nuages pendant que les muscles se d�tendent et que le sang reprend son rythme habituel. C'est d'une hygi�ne bien entendue. Le lendemain nous partons pour l'aoul de Ka�nde. Les Kirghizes viennent nous accompagner jusque sur le col d'Oustchiar. Nous refaisons le chemin du 28 juillet; puis nous suivons le flanc gauche de la vall�e, en douce d�clivit� et recouvert de p�turages, entrem�l�s de bois de sapins. Au soleil couchant nous atteignons le campement des nomades. Ceux-ci, assembl�s sur une �minence, nous accueillent avec des _salams_ et des _ba�s_ qui n'en finissent plus. Le _chirta�_ nous fait dire que lui, sa famille et sa tribu sont tr�s heureux de nous avoir pour h�tes. Il nous prie de rester pendant quelques jours, ce que nous acceptons de bon coeur. L'aoul de Ka�nde compte environ cent cinquante individus, partag�s en une vingtaine de tentes. Abbas nous ayant dit que le _chirta�_ avait sa fille fianc�e, nous faisons tant et si bien, qu'on nous la laisse voir et portraiturer. Mais, avant de se pr�senter, elle se fait une toilette en r�gle, endossant ses plus beaux atours. Elle est toute jeune, et tr�s grande pour son �ge. Mais, bien qu'elle soit habill�e en soie, chamarr�e de bijoux aux doigts, aux poignets et aux oreilles; qu'elle porte des bottines richement travaill�es et qu'elle se coiffe d'une toque en fourrure avec une aigrette de plumes blanches, elle reste toujours une vilaine Kirghize, avec des yeux brid�s, des pommettes saillantes et un nez �pat�. Il s'en faut de beaucoup que cette jeune personne excite notre admiration. Elle est promise au _kaltch�_--ou chef--de la vall�e d'Irtach, un des plus riches nomades de la contr�e. Mais, avant de prendre possession de ce tr�sor, celui-ci devra soustraire pas mal d'unit�s du nombre de ses troupeaux. Le chirta�, appuy� par ses deux fils c�libataires, avait �t� d'une exigence extr�me: le jour du mariage, l'�poux devra lui amener 40 chameaux, 400 chevaux et 5�000 moutons, sans compter une foule d'autres petits cadeaux secondaires. Ce que c'est que d'�tre la fille d'un chef, et d'avoir treize ans! _9 ao�t._--Apr�s quelques heures de marche nous arrivons au glacier de Ka�nde et nous prenons par la moraine de gauche pendant deux ou trois verstes. Le chaos de blocs s'�paississant de plus en plus, nous ne croyons pas devoir pousser plus loin et nous cherchons un emplacement pour notre camp. Nous le trouvons dans une ride de la c�te de la montagne, entre deux torrents d�valant des glaciers sup�rieurs. L'endroit est pourvu de tout le n�cessaire pour un s�jour prolong�. Les buissons de _t�o-go�rouks_ abondent, une source d'eau gazouille � c�t�, et les chevaux ont de quoi satisfaire leur app�tit. Le jour suivant, nous grimpons jusqu'� 4�000 m�tres, au-dessus de notre camp, pour faire une reconnaissance et nous assurer si nous ne pourrions pas aller un peu plus haut avec les chevaux. [Illustration: Le glacier de Ka�nde.--D'apr�s une photographie.] Le glacier de Ka�nde est encaiss� tr�s �troitement entre deux hautes parois de rochers, et s'avance, ou plut�t coule lentement, sans que sa surface accuse un obstacle trop violent. � droite et � gauche, il s'en racine au sein m�me de la montagne, par une multitude de glaciers secondaires qui se dessinent nettement � leur jonction par des �panchements blanch�tres, quasi-s�par�s par des chapelets de pierrailles. Une double rang�e de pics, sombres clochetons de pierre ou �tincelantes pyramides de glace, se dressent de chaque c�t�, semblant lui faire une escorte d'honneur. Au fond, dominant tous les autres, se l�ve le Khan Tengri, qui appara�t comme un globe �norme de cristal, comme le d�me d'une mosqu�e colossale. Il n'a rien de rebutant et se pr�sente plut�t comme un souverain oriental, qui, du haut de sa ventripotence accueille ses courtisans avec un sourire b�at. Comme nous apercevons des bandes de gazon qui rev�tent les d�pendances du glacier, et que celui-ci est plat et presque pas accident�, nous croyons pouvoir y conduire nos chevaux et camper � quelques verstes plus haut. Laissant une partie de notre bagage, de nos provisions, des chevaux et des moutons, � la garde du djighite, le lendemain nous nous acheminons sur le glacier de Ka�nde. Pendant la journ�e, nous gagnons � peine 15 kilom�tres. Mais avec combien de peines, d'ennuis et de cruaut� � l'�gard de nos pauvres b�tes! Celles-ci sont tout � fait �reint�es. La plupart ont les pieds qui saignent et les jarrets �corch�s. Un cheval, dans une chute, s'est m�me bless� � une cuisse, et le sang coule en abondance. Le soir, on les ram�ne � un p�turage qui se trouve en aval de notre camp, pour y rester jusqu'� notre retour. Nous sommes � 3�296 m�tres d'altitude. Nous campons sur le glacier m�me, ou plut�t sur la cro�te de pierre qui le recouvre. Abbas se trouve un peu d�pays�, et il nous fait observer que de sa vie il n'a jamais vu de neige. Pensez donc! il vient des bords du Chatt el-arab! Et il a toujours ses babouches aux pieds! _12 ao�t._--Nous essuyons une temp�te de neige, qui nous emprisonne pendant toute la journ�e. Les ch�vres et les moutons ne font que b�ler du matin au soir, et pour apaiser leur faim enrag�e ils m�chent notre bois de chauffage! Nous sommes noy�s dans une masse de brouillards. Des confettis unicolores voltigent incessamment et nous ensevelissent sous leurs amoncellements. Si ce temps continue, nous allons �tre enferm�s pendant quelques jours, et mis � la di�te. Le temps, apr�s deux jours, s'est enfin remis au beau, et nous en profitons pour une excursion au fond du glacier. Trois Kirghizes, chauss�s sommairement de pantoufles en peau de cheval, nous accompagnent comme porteurs. Ne sachant pas combien de temps nous resterons partis, nous for�ons la dose de nos provisions de bouche, et nous emportons deux tentes. Pour commencer, tout va bien. Nous marchons sur le gravier qui couvre le glacier, puis sur la glace m�me; la petite couche de neige ne nous g�ne pas. Mais, � mesure que nous avan�ons, la neige devient de plus en plus �paisse et molle; et force nous est de nous attacher � la corde. Le glacier se fend en des crevasses transversales, se creuse en des avalements et se troue de moulins d'eau, o� nous marchons avec beaucoup de circonspection. Malgr� toute la ma�stria de Zurbriggen, qui nous guide, il nous arriverait que, la neige c�dant tout � coup sous le poids de notre corps, nous dispara�trions dans des oubliettes, si la providentielle corde ne nous retenait pas. Vers la partie sup�rieure, le glacier pr�sente une petite cascade de s�racs. La chute n'est gu�re comparable � celle de la Mer de Glace, mais les f�lures sont si serr�es les unes contre les autres, et si longues, qu'elles ressemblent aux feuillets d'un livre entr'ouvert. Pour cheminer l�-dessus, il faut �tre des �quilibristes de premier ordre; et encore, c'est tellement fragile, que tout semble devoir s'effondrer au moindre choc des piolets. [Illustration: L'aiguille d'Oustchiar vue de Ka�nde (page 494).] Nous croyons donc qu'il vaut mieux l'�viter et prendre par la pente de neige qui descend � notre gauche, et sur laquelle d�gringolent les avalanches d'un glacier sup�rieur. L�, nous sommes rassur�s sur la solidit� non �quivoque du sol sur lequel nous marchons, mais la menace d'une vol�e de blocs de gla�ons nous met des ailes aux pieds, et, profitant d'une accalmie, en quelques bonds nous atterrissons sur une moraine. [Illustration: Notre cabane au pied de l'aiguille d'Oustchiar (page 494).--D'apr�s des photographies.] Bien qu'il soit assez raide et entrem�l� de n�v�s, l'endroit, � d�faut de mieux, se pr�te � un bivouac. Nous creusons un trou dans les �boulis, pour nous y coucher pendant la nuit; mais, en enlevant les pierres, l'excavation se remplit d'eau, qui filtre � travers les d�tritus. Zurbriggen pr�f�re se loger dans la fente d'un rocher. Les Kirghizes, ext�nu�s de fatigue, refusent tout aliment; ils souffrent horriblement des yeux, car, n'ayant pas de lunettes, la r�verb�ration de la neige les a afflig�s d'ophtalmie. Nous les soignons de notre mieux, et leur recommandons de se tenir bien chauff�s sous leurs tentes. La nuit n'est pas tr�s gaie. Avec les remous d'eau sous nos imperm�ables et les cailloux qui en sortent, avec 16 degr�s de froid et une couche de 20 centim�tres de neige sur la toile de notre tente, vous pouvez vous figurer ce que peut �tre le sommeil! Cependant, � 5 heures, Zurbriggen nous r�veille,--mani�re de parler, car notre sommeil n'avait rien de tr�s profond. Tant bien que mal, nous rev�tons nos effets, raides comme du bois, et nous chaussons les brodequins, devenus de bronze. Tout �tait gel�, hommes et choses. Apr�s nous �tre frott�s des pieds � la t�te pour nous d�gourdir, nous nous encordons, Zurbriggen en t�te, moi en queue, et le prince au milieu. [Illustration: Kirghizes de Ka�nde.--D'apr�s une photographie.] Nous nous dirigeons vers le col qui nous fait face, dans le but de voir si, de ce c�t�, l'ascension du pic de Ka�nde, que nous croyons �tre le Khan Tengri, est possible. Notre bivouac se trouve � 4�040 m�tres; le pic doit bien mesurer plus de 6�000 m�tres. Entre celui-ci et une aiguille � notre gauche, s'encaisse un glacier, se d�coupant en quelques crevasses. Les premiers rayons du soleil frappent en plein la paroi de rochers qui se dresse � droite du glacier, couverte d'un capuchon de glace dont les bords penchent dans le vide avec une quantit� de stalactites qui paraissent attendre notre passage pour s'abattre sur nous. Heureusement, ces dents de requins sont trop impatientes, et des tic tac nous avertissent qu'il faut nous m�fier de ces croquemitaines. Nous nous engageons dans la zone des crevasses et commen�ons � zigzaguer � droite et � gauche, en avant et en arri�re, en avan�ant de deux ou trois m�tres chaque quart d'heure. Mais � un certain moment, nous nous trouvons perch�s sur le haut d'un monolithe de glace, avec un gouffre qui nous cerne de toutes parts. Il y a bien une pseudo-passerelle de neige qui franchit, tel un pont suspendu, une trou�e b�ante, mais le guide, qui l'a sond�e avec son piolet, n'ose pas la prendre. Cependant, comme nous n'avons pas d'autres moyens pour nous d�gager de cette impasse, elle nous appara�t comme notre unique planche de salut. Tandis que le guide se tra�ne doucement � quatre pattes, nous tenons la corde solidement enroul�e au manche du piolet, enfonc� dans la neige. Un � un, nous rampons le plus l�g�rement possible, en �vitant de faire un choc quelconque ou d'�lever la voix, car la moindre vibration de l'air pourrait amener un effondrement de neige. Au del�, le glacier s'aplanit. En quelques minutes, nous atteignons la base du col, que nous gagnons en creusant force marches, dans la neige durcie. Le col d'_Ak-Mo�nok_--c'est ainsi que nous le baptisons--atteint 4�560 m�tres, et s'ouvre � l'extr�mit� est du contrefort qui s�pare les deux vall�es d'Inghiltchik et de Ka�nde. Il est inutile de dire que nous avons �t� les premiers � le franchir; nous serons peut-�tre aussi les derniers. Cette petite excursion a �t� la plus fructueuse entreprise de l'exp�dition; gr�ce � elle, nous avons �t� � m�me de conna�tre la vraie topographie du Khan Tengri. Celui-ci n'�tait aucunement le pic que nous avions aper�u depuis Oustchiar et qui s'�levait au fond du glacier de Ka�nde. Il se trouve plus au nord, � vingt verstes du col d'Ak-Mo�nok. [Illustration: Le pic de Ka�nde s'�l�ve � 6�000 m�tres.--D'apr�s une photographie.] Le glacier d'Inghiltchik se divise plus haut en deux grandes branches, partag�es par un contrefort au sommet duquel se d�gage la pyramide du Khan Tengri. Ce pic se trouve, par cons�quent, isol�, et n'a aucune attache directe avec les nombreuses cha�nes qui rayonnent autour de lui. Il est certain, cependant, que l'ossature granitique de ce syst�me de montagnes doit n�cessairement former un ensemble homog�ne, et que le massif, au centre duquel surgit le Khan Tengri, comprend les contreforts du Saridjass-taou, d'Inghiltchik-tao, de Ka�nde-tao et de Mouj-art-tao, pour ne parler que des principaux, et dont nous avons constat� l'existence. Nous profit�mes des avantages exceptionnels que nous offrait le col d'Ak-Mo�nok, pour faire des observations avec les instruments que nous avions apport�s. La descente se fit rapide, et en une heure nous arriv�mes au bivouac. Nous juge�mes qu'il �tait d�sormais inutile de tenter l'ascension du pic de Ka�nde, celui que nous pr�tendions �tre le Khan Tengri. Si le temps n'avait pas �t� aussi inconstant, et si nos Kirghizes avaient pu faire la navette entre le bivouac et le camp, nous y serions rest�s pendant quelques jours encore. Nous aurions voulu savoir comment le Khan Tengri �tait fait de l'autre c�t�, et il nous aurait �t� possible de lier convenablement, � des points de rep�re ant�rieurement d�finis, la trame de notre trigonom�trie. Le lendemain, les chevaux sont amen�s de tr�s bonne heure � notre camp, du milieu du glacier de Ka�nde. Mais � quel �tat piteux �taient r�duites ces pauvres b�tes; elles se tenaient � peine debout! Ayant enfourch� mon coursier, il se refuse � faire un pas. Il semble avoir des jambes de bois. Je dois recourir � l'amabilit� d'un Kirghize, qui me c�de sa monture. [Illustration: La fille du chirta� (chef) de Ka�nde, fianc�e au kaltch� de la vall�e d'Irtach (page 496).--D'apr�s une photographie.] Cahin-caha, clopin-clopant, nous arrivons � l'endroit o� nous avons laiss� le djighite. Il est en faction, mais par hasard. Nous pensons bien, comme du reste il nous l'a avou� plus tard, qu'il n'est pas rest� une minute � la garde de nos bagages. Il a pass� son temps � consoler les femmes d�laiss�es de Ka�nde. Cependant, sa pr�sence dans le pays a suffi pour �viter l'envie de nous enlever notre mat�riel. Pendant deux jours de suite, nous sommes clou�s sous les tentes, la pluie ne cessant un instant de tomber. Il est inutile que nous cherchions � nous d�raidir les membres. Le terrain est impr�gn� d'eau, et on enfonce jusqu'� la cheville, sans compter que si nous nous �cartions de quelques m�tres nous servirions vite de cible � la mitraille que la montagne nous lance sans cesse d'en haut. Les chevaux, quand ils ne s'engouffrent pas dans des trous que leur poids ouvre tout � coup, glissent de leurs quatre pieds jusqu'� la rencontre d'un rocher. Aussi ont-ils pris le parti de se tenir tous assembl�s autour de nos tentes. Toutefois, � force d'attendre, les nuages se dissipent, et nous pouvons, sans trop de risques, nous d�gager de ces lieux si inhospitaliers. En quelques heures nous atteignons le campement des nomades, qui, pendant notre absence, se sont transport�s plus en bas dans la vall�e. Les Kirghizes sont des gens tr�s serviables; ils guettent la moindre occasion de se rendre utiles. Je ne comprends pas pourquoi des voyageurs ont os� les calomnier. S'ils sont rustres, ce n'est pas leur faute; mais sous cette �corce rude on retrouve quelquefois des sentiments, qui, pour �maner de barbares, ne sont pas moins tr�s appr�ciables. Nous comptions retourner � Prjevalsk en �vitant de repasser sur le chemin que nous avions pris en venant. Tout en h�tant les �tapes nous pensions visiter la vall�e d'Irtach, o� nous songions �tre en mesure de clore notre lev� topographique qui, de la sorte, aurait embrass� tout le bassin du Djannart-sou. Nos chevaux �taient tous plus ou moins fourbus; nous devions en outre traverser de grands cours d'eau, o� ces pauvres b�tes, an�mi�es par le surmenage, n'auraient peut-�tre pas eu la force de sauver nos bagages. Devinant notre perplexit�, le chirta� nous offrit tr�s obligeamment trois chameaux pour le transport des colis, et des chevaux de selle pour tous les membres de la caravane. � l'aoul d'Irtach on les remplacerait par des animaux du kaltch�, son futur gendre, auquel il envoyait imm�diatement une estafette pour le pr�venir. Tant d'amabilit� ne pouvait nous laisser insensibles: nous prom�mes de le r�compenser en payant largement les hommes qui nous accompagneraient, et de le recommander aupr�s du Gouverneur de Prjevalsk, et on partit. En quittant l'aoul nous d�mes distribuer des _shake-hands_ � tous les membres de la tribu, tandis que les femmes se pressaient sur notre passage, nous pr�sentant leurs nourrissons et nous criant � tue-t�te: _Koch! koch!_ �Adieu! adieu!� On ne pourrait imaginer une vall�e aussi singuli�re que celle de Ka�nde. Longue de 60 verstes environ, elle se d�veloppe en serpentant irr�guli�rement, s'enflant d'un c�t� pour se r�tr�cir de l'autre, ici coup�e � pic, l� s'�vasant en de molles ondulations. La partie la plus caract�ristique, sous le point de vue g�ologique, est celle qui vient apr�s le col d'Oustchiar. Il semble que la d�pression de celui-ci soit la r�sultante d'un affaissement subit de la montagne, et que les mat�riaux qui devaient s'y entasser jadis aient �t� entra�n�s au thalweg de la vall�e. En bordure du fleuve s'�l�vent, en effet, de fantastiques falaises, tranch�es verticalement par l'affouillement des eaux, et taillad�es, sillonn�es, rong�es par les ruissellements des pluies. Ces emp�tements s�dimenteux, d�pos�s en couches successives, montrent � nu leur composition, qui rappelle vaguement une construction de l'�poque romaine. Chemin faisant, nous fr�lons une n�cropole kirghize. Le sol est �ventr� de trous, bossel� de buttes fun�raires en argile battue, ou d'entassements de pierres. Les Kirghizes v�n�rent leurs tr�pass�s. Quand ils passent pr�s d'un cimeti�re, ils ne manquent jamais de visiter les tombes de la famille, et d'y faire leurs pri�res. Si besoin est, ils s'arr�tent pour restaurer la s�pulture. C'est pourquoi on voit celles-ci presque toujours en bon �tat. En atteignant la limite inf�rieure de la vall�e, nous sommes arr�t�s par le Saridjass-sou, dont les eaux roulent avec fracas, bouillonnant entre des berges escarp�es. En face de nous d�bouche la vall�e d'Irtach, mais nous ne savons comment nous y prendre pour y arriver, car le gu� de ce courant imp�tueux est absolument impraticable. Il ne nous reste d'autre moyen que de le remonter jusqu'� ce que nous trouvions un endroit o� nous pourrons le traverser. Nous suivons un sentier qui longe la rive gauche du Saridjass-sou, et nous finissons apr�s mille difficult�s par passer la rivi�re � gu�. [Illustration: Le kaltch� (chef) de la vall�e d'Irtach, l'heureux fianc� de la fille du chirta� de Ka�nde (page 496).--D'apr�s une photographie.] La vall�e de Keou-eou-leou, que nous remontons ensuite pendant toute la journ�e, est assez quelconque, et aucun incident ne rompt la monotonie du chemin. Au fond de la vall�e, les Kirghizes qui nous accompagnaient depuis Oustchiar nous quittent, pour suivre la route qui, passant par le col de Karakol, m�ne directement sur Prjevalsk o� ils sont dirig�s. L'ascension du col de Keou-eou-leou, haut de 4�160 m�tres, est tr�s lente; les chameaux, �prouv�s par la rar�faction de l'air, s'arr�tent � chaque instant, afin de reprendre haleine. C'est par une chaleur insupportable, que le jour suivant nous d�valons la grande orni�re d'Irtach. Le terrain est jaune, les pentes des montagnes sont rouges, et le ciel est d'un bleu intense. Il nous semble voyager dans les _ambas_ du centre africain. De temps � autre, des glaciers lointains se montrent discr�tement dans l'entre-b�illement des gouffres qui fuient � droite et � gauche de la vall�e. Soudain, celle-ci tourne brusquement au levant, flanqu�e au sud par une bizarre muraille de roches basaltiques, dont l'uniformit� au fa�te para�t trop �trange pour �tre naturelle. Et nous descendons toujours, courb�s sur nos montures, les yeux souffrants et le visage pel� par la r�verb�ration du soleil. � la douzi�me heure de marche, comme nous ne rencontrons pas encore de nomades, nous nous arr�tons pour camper, malgr� la r�sistance opini�tre des Kirghizes qui veulent arriver le soir m�me chez le kaltch�. Celui-ci, qui a �t� pr�venu, vient nous rendre visite. Il sait d�j� qui nous sommes, et ce que nous voulons de lui. Il nous donnera chameaux et chevaux � discr�tion. Cependant, il se montre quelque peu froid et r�serv�, et ne semble pas tr�s enthousiaste de notre pr�sence, comme l'avait �t� le chirta�. Le prince et moi, nous profitons d'une journ�e de repos, pour rendre visite au chef. Il nous re�oit dans une yourte luxueuse, richement d�cor�e pour l'occasion. Nous prenons place sur un tapis de fourrures et nous nous accroupissons � la mode kirghize. Autour des parois on a accroch� des tapis authentiques de Kachgar, entrem�l�s de festons d'�toffes voyantes. [Illustration: Le glacier de Ka�nde.] [Illustration: Cheval kirghize au repos sur les flancs du Ka�nde.--D'apr�s des photographies.] Tout de suite le kaltch� introduit ses femmes qui, apr�s une r�v�rence, se ratatinent en demi-cercle en face de nous. Au milieu on �tend une toile, sur laquelle, apport�s par des domestiques, s'amoncellent des plats de viandes fumantes, puis des vases de lait, du th�, du sucre et des borsaks. Tout cela est bien embarrassant pour nous, qui venons de faire notre d�jeuner au camp. Malgr� nos d�n�gations, le kaltch� nous force � accepter une c�te de mouton qu'il nous tend avec le bout de ses doigts. Il a eu soin de choisir des morceaux bien gras, ce qui fait qu'il nous est impossible de les avaler. Notre geste n'a pas �t� inaper�u par le chef, qui ordonne de pr�parer un autre mets. Mais, h�las! en le voyant pr�parer, il nous enl�ve toute envie de l'ingurgiter. Voici la recette: on r�pe de la viande dans des bols de bouillon, on la p�trit avec les mains en ayant soin que la p�te jaillisse entre les doigts; puis on saupoudre d'herbes et de sel, et on sert. Nous acceptons cependant, pour lui faire plaisir, quelques bols de th� et de lait. Avant de nous les offrir, un Kirghize chasse soigneusement avec une paille les corps �trangers qui flottent sur le liquide; apr�s que nous les avons vid�s, les bols sont l�ch�s avec plaisir par les femmes, qui ne laissent pas perdre une goutte du liquide. Ces deux petits traits d�montrent le sans-g�ne vraiment na�f qui r�gne encore dans les moeurs kirghizes. Nous allons ensuite faire une excursion dans les trois vallons qui prennent le nom collectif de _Outch-koul_, les trois lacs. En r�alit�, il n'en existe qu'un seul, dans la combe qui se montre la premi�re, et qui, pour ce fait, est appel�e _Bach-koul_. C'est un endroit tr�s propice pour l'hivernage. _29 ao�t._--Afin de coordonner et clore notre lev� topographique, Zurbriggen et moi nous grimpons sur la pointe qui se dresse au sud de notre camp. C'est le point le plus �lev� de l'Ichigart-tao, qui s�pare les deux vall�es d'Irtach et de Djannart. Nous �vitons les coul�es d'�boulis, en suivant l'ar�te nord, h�riss�e de clochetons dolomitiques qui nous donnent pas mal de fil � retordre. Nous croyions le chemin facile et nous avions oubli� de nous pourvoir d'une corde, ce qui nous oblige � des tours de force de gymnastique, o� Zurbriggen fait des miracles d'�quilibre. Et dire que, par l'autre versant, un cheval aurait pu arriver sur le sommet! Tandis que nous risquions inutilement notre peau, que nous suions sang et eau, que nous nous arrachions les ongles, nous aurions pu ailleurs avoir le m�me r�sultat en nous promenant les mains dans les poches! Cependant, nos peines sont bien r�compens�es par le panorama splendide dont nous jouissons depuis le sommet du _Karahoum_, qui mesure 4�150 m�tres d'altitude. C'est surtout vers le myst�rieux plateau du Djannart que nous jetons notre d�volu, et nous y braquons nos appareils. Nous ne croyons pas qu'on puisse rencontrer aussi facilement ailleurs des contrastes et des surprises aussi inexplicables que dans les monts C�lestes. Nous e�mes d�j� maintes fois l'occasion de signaler ce fait. La nature semble ici avoir ob�i � des lois particuli�res, dont le dispositif est et demeure tr�s complexe et difficile � �tudier. Comment se sont-elles form�es et par quelle suite de m�tamorphoses ont-elles pass�, ces bizarres montagnes, pour se manifester en un si complet d�saccord avec l'id�e que nous nous sommes forg�e d'un soul�vement terrestre? En attendant que des voyageurs plus perspicaces tranchent cette obscure question, contentons-nous de relever l'anatomie de cette vaste cuve, dont l'ensemble constitue la vall�e de Djannart. Longue d'environ 150 verstes, large de 100, elle se d�ploie comme une immense ar�ne, presque plate au milieu, et s'�vasant tout autour par une haute muraille de montagnes. Au sud, se d�veloppent les cr�nelures neigeuses du Kook-chaal-tao, d�masquant la fronti�re russo-chinoise. De nombreux glaciers s'alignent et se pressent les uns contre les autres, escaladent les roches, ou s'�panchent lentement dans les courbes comme des coul�es de cristal. Dans ce contrefort, nous distinguons les vall�es de Djannart, qui donne le nom � tout le bassin, du Ka�tch� et de Bichirtik; puis, au fond, celle d'Ichtik, qui aboutit au plateau de Karagan. Vient ensuite la vall�e d'Akchirak, qui prend origine au col du m�me nom, point de d�part du cha�non sur lequel nous nous trouvons. De notre belv�d�re, nous revoyons avec plaisir des pics connus: la pointe d'Oustchiar, le Ka�nde-tao, le Khan Tengri, le Kizil-tao, puis les groupes de Terekty et de Keou-eou-leou, d'o� �merge un _horn_ tout saupoudr� de neige, qui nous rappelle involontairement le Cervin. Au couchant, jaillissent les d�mes qui couronnent le glacier de Pr�tovsk, la source pr�tendue du Syr-Daria. � notre d�part du camp, nous assistons � un enterrement kirghize. Il y a quelques jours, les bergers d'Irtach ont d�couvert un cadavre dans le torrent. Le kaltch�, ne pouvant le reconna�tre, a fait de suite colporter la nouvelle, qui est parvenue jusqu'� Prjevalsk, o� se trouvaient les parents du d�funt. Pendant ce temps, on a immerg� le cadavre dans l'eau, en l'y maintenant par des pierres et des cordes. C'est un syst�me frigorifique usit� par les nomades. � l'arriv�e des parents, on a transport� le cadavre sur une civi�re improvis�e, jusqu'� l'endroit destin� � l'inhumation. C'est ici qu'a lieu la c�r�monie, � laquelle nous sommes pr�sents. Elle est tr�s sommaire. Le kaltch� demande aux parents s'ils reconnaissent bien le mort pour un des leurs; � leur r�ponse affirmative, il fait r�p�ter � haute voix, par tous les assistants, que le tel des tels est tr�pass� par suite d'un accident. Puis on enveloppe le cadavre dans des feutres, on le ficelle avec des cordes, et on le descend dans la fosse, pendant que les parents font mine de larmoyer. On tourne ensuite autour du trou en y jetant � chaque pas une poign�e de terre, jusqu'� ce qu'il soit combl�; apr�s quoi on y amoncelle un tas de pierres. C'est une s�pulture tr�s exp�ditive et pas beaucoup compliqu�e; au surplus elle ne co�te pas grand'chose. Le soir, en campant sur le haut de la vall�e d'Irtach, nous apprenons pourquoi elle s'appelle ainsi. C'est � cause d'une pierre qui pr�sente vaguement la forme d'une selle de cheval. Ce _ph�nom�ne_ est connu � cent lieues � la ronde; tous les nomades qui ont occasion de passer par l�, ne manquent pas d'aller la voir et d'y apporter un tribut de cr�nes d'animaux. La pierre est plac�e sur un gros bloc erratique, autour duquel s'amoncellent les cornes de toutes esp�ces de b�tes. (_� suivre._) JULES BROCHEREL. [Illustration: Retour des champs.--D'apr�s une photographie.] Droits de traduction et de reproduction r�serv�s. TOME XI, NOUVELLE S�RIE.--43e LIV. N� 43.--28 Octobre 1905. [Illustration: Femmes kirghizes de la vall�e d'Irtach.--D'apr�s une photographie.] VOYAGE DU PRINCE SCIPION BORGH�SE AUX MONTS C�LESTES[4] [Note 4: _Suite. Voyez pages 457, 469, 481 et 493._] PAR M. JULES BROCHEREL. V. -- L'heure du retour. -- La vall�e d'Irtach. -- Nous retrouvons la douane. -- Arriv�e � Prjevalsk. -- La dispersion. [Illustration: Un chef de district dans la vall�e d'Irtach.] La vall�e d'Irtach, longue de pr�s de 100 verstes, pr�sente la forme d'un Z tr�s ouvert; le trait sup�rieur s'appuie au Terske�-ala-tao, qui ferme au sud le bassin du lac Issik-koul. � l'extr�mit� du trait, � la place du petit croc descendant, s'ouvre le col de Djoukoutchiak, tr�s fr�quent� par les nomades qui se rendent au march� de Prjevalsk. C'est le chemin que nous prenons pour notre retour. En face du col, du c�t� sud, circule une belle rang�e de pr�s entrem�l�s de glaciers, dont les torrents sillonnent un vaste plateau et se recueillent dans une multitude de petits lacs mar�cageux. Ce col, haut de 3�850 m�tres, est tr�s p�rilleux pour les chevaux; aussi les deux versants sont-ils jalonn�s de cadavres en putr�faction ou de squelettes d�charn�s par les vautours, qui s'envolent en avant, sur notre passage. Il faut d'abord s'ouvrir une route au milieu des pierres, puis on escalade une �paule de glace, au del� de laquelle on suit le dos des moraines jusqu'� la rencontre des premiers p�turages. Peu � peu nous quittons la r�gion de la haute montagne pour celle des for�ts. Le versant nord du Terske�-ala-tao est tr�s bois� et habit� par une telle profusion d'animaux, qu'on ne peut faire un pas sans que des quadrup�des se faufilent sous les vo�tes des buissons, ou que de ceux-ci s'�chappent des nu�es d'oiseaux. Le vallon se joint � la vall�e de Zououka, par laquelle transitent habituellement les caravaniers qui font le service des transports entre Viernyi et Kachgar. Ce service est entre les mains d'une tribu de Sartes qui en ont le monopole, et se le passent de p�re en fils. Tout en voyageant, ils trouvent encore le moyen de marauder chez les nomades en leur �changeant des pelleteries de prix pour des toiles de coton ou de la quincaillerie russe. Ces caravaniers passent leur vie � travers les monts C�lestes, en toute saison. Leur famille les suit toujours; les femmes montent � califourchon sur des ballots de coton ou des cylindres de toile, et les enfants sont emprisonn�s dans des cages en bois plac�es lat�ralement au b�t du cheval. En arrivant � la douane de Zououka, �tablie � l'embranchement de la vall�e, nous assistons � la visite des marchandises. Elles sont �tal�es sur l'herbe dans un pittoresque p�le-m�le, avec les chiens et moutons qui passent dessus. Les douaniers enregistrent, sans se presser, les articles tax�s, fouillent avec un cruel acharnement les moindres colis, jusqu'� faire d�shabiller les femmes pour v�rifier si elles n'ont rien de prohib� sous leurs dessous. Bien entendu ces fonctionnaires ont toujours raison; la r�sistance des femmes ou les invectives et les apostrophes des maris ne les �meuvent gu�re. Quelquefois, pour aplanir les difficult�s et trancher les diff�rends, les gabelous ont recours � quelques coups de trique. Ces femmes sont habill�es luxueusement, pour des voyageuses. Elles portent de gros bracelets en argent au cou, et aux oreilles leur pendent de longues cha�nettes qui battent sur les �paules, et s'embrouillent � chaque instant aux boutons de la veste. � partir de Zououka, la vall�e s'ouvre largement; ses deux flancs d�clinent � vue d'oeil et deviennent deux longues collines, semblables � deux murailles en briques. En effet, d'�normes d�p�ts de roches s�dimentaires, de couleur rouge, stri�es horizontalement de profonds sillons et taillad�es de petits coups tranchants, vous donnent l'illusion frappante de deux immenses digues, �lev�es pour contenir un torrent imaginaire. Le sol sur lequel nous marchons est partout de la m�me teinte, ce qui fait qu'� la moindre pluie, la rivi�re prend l'aspect d'un courant de sang, sortant d'un abattoir cyclop�en. � mesure que nous descendons et que la montagne s'�carte, nous entrevoyons vaguement, comme dans un r�ve, une blanche dentelle qui barre tout au fond l'horizon, comme un brise-bise suspendu dans le ciel. C'est le Kounghe�-ala-tao, s'�levant au del� du lac Issik-koul, dont la nappe d'eau, d'un bleu tendre, se dilue � droite et � gauche, � perte de vue, dans la bu�e d'or qui se d�gage du sol. Le bassin du lac Issik-koul, en quelque endroit qu'on se trouve, est vraiment enchanteur. Le paysage accuse des teintes si vari�es et si l�g�res, et les lignes du tableau sont si ind�cises et si vastes, qu'en les admirant vous restez �merveill� et �bloui de cette gr�ce inattendue et de cette grandeur un peu factice, qui vous semble incommensurable. Mais nous arrivons bient�t � Slifkina, un village de Kozaques qui est � l'avant-garde du r�gne de la civilisation, du c�t� des monts C�lestes. C'est la derni�re agglom�ration de Russes, dans la limite du sud et de l'ouest du lac Issik-koul. Au del�, le Terske�-ala-tao tombe par endroits � pic dans les eaux du lac, et les rivages, quand ils se pr�sentent plats, sont toujours inhabit�s, m�me par les nomades. [Illustration: Le pic du Kara-tach, vu d'Irtach, prend vaguement l'aspect d'une pyramide.--D'apr�s une photographie.] On ne saurait redire la joie que nous �prouvons en revoyant des �tres humains qui ne sont plus des Kirghizes, et des habitations autres que des yourtes. On se croit presque dans une grande ville. Les chevelures d'�toupe et les costumes �carlates des Kozaques ne nous choquent plus; et la face joufflue et rubiconde des femmes russes para�t s'�tre id�alis�e pendant notre absence. Nous arrivons jusqu'� les trouver belles. Nous nous rattrapons de notre longue abstinence, en faisant bombance pendant tout le restant de la journ�e. Nous nous bourrons de _pivo_ et de grosses pommes dor�es. Le soir, nous faisons un d�ner plantureux: des oeufs, un poulet, des pommes de terre, du riz et du dessert. [Illustration: Les caravaniers passent leur vie dans les Monts C�lestes, emmenant leur famille avec leurs marchandises (page 506).--D'apr�s une photographie.] Slifkina ou _Kizil-sou_, comme l'appellent les Kirghizes, se trouve � trente verstes au couchant de Prjevalsk. Ce n'est plus sur les glaciers, au bord des pr�cipices, ou entre des pierres, que nous caracolons, mais sur une belle route toute blanche, qui se d�ploie comme une �charpe � travers un tapis de verdure. Nous ne sommes plus d�sormais inqui�t�s par la travers�e des fleuves: les rivi�res que nous rencontrons, nous les passons sur des ponts solides, o� ga�ment retentissent les sabots des chevaux. Pourtant, malgr� cette tranquillit� et cette s�ret� d'�me, apr�s une vingtaine de verstes de ce paysage plat et uniforme, nous trouvons que le d�cor devient monotone, et que nous nous y fatiguons presque plus que sur les montagnes. Et puis une poussi�re!... et un soleil! Peu apr�s, nous �tions � Prjevalsk. Au lieu de nous r�installer � la maison de poste, pour ne pas en perdre l'habitude nous campons dans un verger. Le surlendemain, 4 septembre, tout le monde rentre dans ses foyers; Zurbriggen et Abbas partent pour Tachkent, et le Prince et moi nous prenons la route des �coliers, du c�t� de la Sib�rie. VI. -- Les Khirghizes. -- L'origine de la race. -- Kazaks et Khirgizes. -- Le classement des Bourouts. -- Le costume khirghize. La yourte. -- Moeurs et coutumes khirghizes. -- Mariages khirghizes. -- Conclusion. La science n'a pas encore dit son dernier mot sur les tribus composites qui se disputent les pi�tres ressources de la portion de l'Asie centrale que nous venions de parcourir. Bien des voyageurs croient pourtant avoir tranch� cette question ardue d'une fa�on d�finitive. Quand les recherches du savant peuvent s'appuyer sur l'histoire et que des documents positifs d�montrent la connexit� de certains �v�nements, on peut toujours �chafauder un raisonnement qui ne s'�carte pas trop de la v�rit�. Mais les peuples ne sont pas cens�s avoir tous une histoire, ne poss�dent pas tous des preuves mat�rielles de leur anciennet� et des monuments qui rappellent leurs ant�c�dents. Isol�s par des montagnes ou des d�serts, n'ayant jamais subi l'influence d'une civilisation ou l'ayant �vit�e, pour conserver leur libert�, ces peuples sont rest�s � l'�tat primitif. Vivants avec les animaux et comme des animaux, ils n'ont jamais �prouv� le besoin de secouer leur somnolence. Les Kirghizes sont de ceux-l�. Ils n'ont presque pas chang� depuis deux mille ans. Et pendant cette longue s�rie de si�cles, ils n'ont rien fait qui puisse �clairer l'�rudit sur l'arbre g�n�alogique de leur race et les vicissitudes de leur existence. On se perd encore en conjectures sur la provenance du mot _Kirghize_. En turc, il semble que ce serait quelque chose comme: coureurs de champs. Dans l'idiome des nomades ce mot signifie �quarante filles�: _Karr-Keuz_. � notre avis, il faut recourir au chinois pour en avoir l'�tymologie exacte. Depuis le Xe si�cle de notre �re, les livres chinois mentionnent l'existence d'un peuple dans le Tien-Chan-Nan-Sou, la route m�ridionale des monts C�lestes. Plus tard, vers la fin du XIIIe si�cle, le c�l�bre missionnaire Hiouen Tsang, qui, le premier, traversa le continent asiatique, parle des _Ki-zi-li-tz�_, dont il avait pu, en passant, �tudier les moeurs. Il nous dit avoir rencontr� les Kirghizes dans les vall�es de la Dzoungarie. Ces vall�es n'auraient �t� que leur patrie d'adoption, car, d'apr�s les l�gendes, ils avaient d� habiter auparavant l'Alta� oriental. Pourchass�s continuellement par les Mongols au sud, et par les Tatars au nord, ils se virent forc�s de se transporter dans le Tabargata�, et, de l�, quelques si�cles apr�s, dans les monts C�lestes. Le nom primitif de _Ki-zi-li-tz�_, se serait transform�, plus tard, en celui de Kirr-ki-tz�, quand le peuple embrassa la foi mahom�tane. M. Ujfalvy de Mez�-Kovesd, pendant sa mission dans le Turkestan, a cru entrevoir des affinit�s de races entre les habitants du steppe et ceux de la montagne. Selon lui et plusieurs autres voyageurs, il n'existerait aucune diff�rence entre les Kara-Kirghizes et les Kirghizes-Kazaks, les nomades de la plaine. Si ces deux peuples m�nent le m�me genre de vie et s'habillent d'une fa�on presque identique, leur langue n'en est pas moins tr�s diff�rente. Et puis, ils sont anim�s les uns � l'�gard des autres d'une haine si f�roce, qu'il semble impossible de concevoir qu'ils soient du m�me sang. Si l'on envisage la question au point de vue anthropologique, on peut constater aussi des dissemblances tr�s prononc�es entre les deux types. La constitution de leur corps, la t�te, la nuance de leur teint, la couleur et la forme des cheveux, n'ont presque pas d'analogie. Il est donc imprudent de vouloir certifier que les Kazaks soient des Kirghizes. Il faudrait, pour �lucider ce probl�me, des donn�es probantes, recueillies pendant un long s�jour dans les lieux m�mes. Il n'y a pour nous, que les Kirghizes--ou Bourouts,--peuplade qui habite exclusivement dans les vall�es du Tien Chan, du Pamir � la Dzoungarie, du lac Issik-koul � Ak-sou. Il serait impossible de faire une �valuation, m�me approximative, de la quantit� d'individus qui composent le peuple kirghize. On parle de 400 ou 500�000; mais ils sont certainement deux fois plus nombreux. Lorsqu'on demande � un chef de dire combien de t�tes compte son aoul, il ne le saura pas; en revanche, il vous dira le chiffre exact de ses chevaux et de ses moutons. On ne peut gu�re classer les Kirghizes dans un ordre quelconque. Leur pays n'est pas connu dans son entier, et par cons�quent il serait pu�ril de d�nommer des tribus qui n'ont pas encore �t� en contact avec les voyageurs. Les renseignements que les nomades vous donnent quelquefois, doivent toujours �tre contr�l�s, avant d'�tre accept�s. Cependant, jusqu'ici, on partage le peuple kirghize en deux grandes branches: celle de _gauche_ et celle de _droite_. La premi�re cat�gorie s'appelle sol et comprend tout le bassin du Naryn, du haut Oxus et du Kook-chal-daria. Elle se divise en quatre tribus: _Koutchi_, _Sorou_, _Moundouz_ et _Kita�s_. Cette derni�re d�nomination s'applique sp�cialement aux habitants du territoire chinois. [Illustration: La vall�e de Zououka, par o� transitent les caravaniers de Viernyi � Kachgar (page 505).--D'apr�s une photographie.] La branche de droite, appel�e _on_, r�side dans le bassin du lac Issik-koul et dans les vall�es attenantes au massif du Khan-tengri. Elle est divis�e en sept tribus: _Bogon_, _Sary-Baghichtch_, _Son-Baghichtch_, _Soulton_, _Ech�rik_, _Sagaz_ et _Bassindz_. Le Gouvernement russe les a class�s autrement. Partant de ce principe que l'habitant d'un aoul, quand il parle de celui d'une autre vall�e, dit simplement: _celui_ ou _ceux_ de tel village, il les appelle selon le lieu o� ils campent habituellement. Ainsi les _Tourghensky_ sont ceux qui hantent le vallon de Tourghent, et ainsi de suite. Il va sans dire que les Russes ne connaissent pas le nombre exact de leurs sujets kirghizes. La plupart de ceux-ci �chappent encore actuellement � la d�me, pourtant modique, de un rouble et demi par yourte ou famille. Ce tribut, c'est l'unique lien qui les tienne attach�s � la Russie, car tels ils �taient avant l'occupation du Turkestan, tels ils sont encore aujourd'hui, c'est-�-dire des gens libres et ind�pendants. [Illustration: Le massif du Djoukoutchiak; au pied, le dangereux col du m�me nom fr�quent� par les nomades qui se rendent � Prjevalsk (page 505).--D'apr�s une photographie.] Le Kirghize est g�n�ralement bien b�ti, et tr�s fort. Il a le nez �pat�, rarement aquilin, l'angle facial un peu fuyant, les zygomas tr�s saillants, et les yeux noirs, petits et un peu obliques, qui rappellent ceux des Chinois. La barbe et la moustache sont tr�s peu fournies. Les villosit�s sont presque toujours noires et lisses. Souvent on aper�oit parmi eux des types purement mongols. On en rencontre quelquefois des blonds, mais c'est l'exception. Les hommes sont relativement bien taill�s et d'un aspect agr�able. En revanche, il est rare de trouver des femmes un peu avenantes. Les jeunes filles ont des traits r�guliers et sont en g�n�ral potel�es, mais les lignes sont trop accus�es. Elles ont seulement de tr�s beaux yeux noirs et des dents superbes. Le costume qu'elles portent ne contribue certes pas � rehausser leur physique. L'accoutrement du Kirghize est tr�s �l�mentaire. Par-dessus une chemise en cotonnade imprim�e, aux manches d�mesur�ment longues, et un large pantalon �galement en toile, serr� � la ceinture par une coulisse, le Kirghize, homme ou femme, endosse toujours une veste en cretonne capitonn�e de laine ou d'ouate qui s'agrafe sur la poitrine par des boutons en bois et se serre � la taille au moyen d'une �charpe enroul�e et nou�e sur le devant. Les manches en sont tr�s courtes; elles n'arrivent m�me pas au coude, en sorte que la chemise tombe sur la main, et doit �tre � chaque instant rejet�e par un mouvement vif du poignet. Il y a des si�cles que les Kirghizes font ce geste. Ce rudimentaire habillement constitue la toilette d'int�rieur, ou, si l'on pr�f�re, celle que l'on porte g�n�ralement dans le village, en �t�. Ajoutez � cela une esp�ce de botte arrivant jusqu'au genou, avec un talon haut de 10 centim�tres au moins, et une calotte crasseuse cachant la nudit� du cr�ne soigneusement ras�, et vous conna�trez tout l'�quipement du Kirghize. Par les temps froids et en voyage, le Kirghize se prot�ge cependant contre les intemp�ries par un ample _tchiapann_, sorte de grand pardessus matelass�, qui cache toute sa personne. Selon la temp�rature, il en porte un, deux ou trois, et m�me davantage, s'il le faut. Il coiffe alors son chef d'un chapeau rond en feutre blanc, avec les ailes bord�es d'une large tresse noire, s'abaissant sur le devant et relev�es par derri�re. Ce couvre-chef est une r�miniscence chinoise, et, comme il n'est pas toujours facile de se le procurer, on le remplace par un bonnet en feutre grossier doubl� de peau d'agneau, avec le poil en dedans. Cette coiffure n'est pas disgracieuse du tout, et compl�te admirablement le costume. Elle a surtout l'avantage tr�s pr�cieux, sur les montagnes, qu'elle permet de prot�ger les oreilles; elle peut se porter la peau en dehors en cas de pluie. Les femmes sont v�tues exactement comme les hommes: les d�tails seuls varient. Ainsi les bottes sont plus �l�gantes, bord�es de soie, orn�es de gaufrages en cuir de couleur, et, � la semelle et au talon, de pointes en cuivre. Les pantalons sont plus larges et plus longs; le tchiapann est d'une �toffe plus voyante et riche, souvent en soie de Bokhara ou de Kachgar. Ce qui distingue surtout les femmes kirghizes, c'est la blanche cornette qui les coiffe, en leur donnant un air monacal. Imaginez un cylindre, haut de 30 centim�tres, form� d'une bande de toile empes�e, s'enroulant autour du cr�ne, et dont les deux bouts flottent sur le dos. Les cheveux sont soigneusement relev�s et emprisonn�s dans cette bo�te, qui sert, en outre, de poche pour y d�poser temporairement les menus objets dont la femme a besoin � chaque instant. Comme vous voyez, c'est tr�s pratique. Les cheveux sont r�unis en deux ou trois tresses, dont quelques-unes descendent sur le dos et portent attach�e une cha�nette ou boucle. � l'extr�mit� inf�rieure de celle-ci pend un trousseau de clefs et de plaques en cuivre, qui tombe sur les talons, de telle sorte qu'au moindre mouvement on entend un bruit de ferraille semblable � celui que produit un for�at en marchant. Ce turban ou ��letchik�, est l'uniforme des femmes mari�es. Les jeunes filles sont plus coquettes. Elles s'ornent la t�te d'une toque de fourrure de renard, avec un petit panache de plumes d'aigle, en guise d'aigrette. Les cheveux sont partag�s en plusieurs nattes, qui tombent de chaque c�t� des tempes et sur le dos, ces derni�res retenues par une pi�ce d'�toffe agr�ment�e de verroteries et de coraux. La jeune fille en qu�te d'un mari est chamarr�e de bijoux, et richement v�tue. Mais cette coquetterie, elle devra la payer bien cher plus tard, car elle deviendra l'esclave d'un homme souvent brutal, toujours autoritaire. La yourte kirghize n'est pas aussi spacieuse que celle des Kazaks et que la _kibitka_ des Turkomans. Elle est de proportions plus modestes et d'un aspect moins luxueux. Les Kirghizes sont contraints � de fr�quents d�placements, � cause de la pauvret� des p�turages. D'un autre c�t�, la rigueur et la dur�e de la mauvaise saison les obligent � r�duire les dimensions de leur _home_, afin de condenser le maximum de chaleur avec le minimum de combustible, celui-ci �tant tr�s rare. [Illustration: Le chaos des pics dans le Kara-tao.--D'apr�s une photographie.] La tente kirghize se compose d'un treillis en bois flexible, fix� au sol par des piquets et entre-crois� au moyen de lani�res en peaux. Cette charpente s'�l�ve sur une hauteur de 2 � 3 m�tres sur autant de largeur. Le plafond est soutenu par des tringles en bois, convergeant en rayons au milieu du d�me, o� est pratiqu�e une ouverture circulaire, qui sert en m�me temps de chemin�e et de fen�tre. Au-dessus de cette fr�le carcasse, on adapte de grands feutres tenus adh�rents par un syst�me de cordes. Le tout se dresse et se d�monte en quelques minutes. L'ensemble forme la charge de deux chameaux. L'int�rieur est fort simple, m�me chez les riches. Les piles de feutres servant de matelas pendant la nuit, des coffres en bois, des outres, des harnais et d'autres objets de moindre importance, tra�nent un peu partout, accroch�s aux parois, ou jonchant le sol. Au milieu de la yourte, pos�e sur trois pierres verticales ou sur un pi�destal en fer, tr�ne une �norme marmite--le _kazan_--qui constitue l'unique r�cipient que les nomades emploient pour popoter leur cuisine. Le mat�riel dont les Kirghizes disposent pour leurs diff�rentes occupations journali�res, n'est pas tr�s compliqu�. En dehors du kazan, ils poss�dent une sorte d'aigui�re en cuivre cisel�, et deux ou trois bols en bois; comme fourchette, ils se servent de leurs doigts. Pour les manipulations du lait, ils n'ont que des seaux en peau brute pour le traire et des outres pour le conserver. [Illustration: �talon kirghize de la vall�e d'Irtach, et son cavalier.--D'apr�s une photographie.] Les Kirghizes ne connaissent pas l'emploi des allumettes: chacun d'eux est arm� d'une petite sacoche en cuir contenant une pierre, un fragment de fer et de l'amadou. Cette pochette et un petit couteau � lame fixe ne les quittent jamais; il les tiennent en permanence attach�s � leur ceinture. Le couteau s'emploie aux usages les plus divers: � abattre les animaux, � racler les peaux, � se raser la t�te, � tailler le bois, etc.; c'est, en somme, l'unique instrument tranchant que connaissent les nomades. [Illustration: V�hicule kirghize employ� dans la vall�e d'Irtach.--D'apr�s une photographie.] Tous les travaux sont � la charge des femmes. Elles ont de quoi s'occuper pendant toute la journ�e. Le matin, une fois le b�tail rendu aux p�turages, elles fabriquent le koumiss avec le lait de la veille; elles tannent des peaux, battent des feutres, tissent des tresses, confectionnent des v�tements, et, si le temps le permet, elles brodent des morceaux d'�toffe avec de la laine. Le soir � l'arriv�e des troupeaux, aid�es par les jeunes filles et les gar�onnets, elles trient les animaux, et les attachent � de longues cordes fix�es au sol. Malgr� ce dur labeur, qui ne leur laisse pas un moment de r�pit, les femmes kirghizes ne semblent pas trop se plaindre de leur sort. Elles sont tr�s gaies; elles jasent et chantent tout le temps. Les hommes passent leurs journ�es � surveiller leurs femmes, tout en se racontant r�ciproquement des histoires, et tiennent des conciliabules sur les coups � faire. Leurs discours roulent presque toujours sur les chevaux. La langue kirghize, peu d�velopp�e en g�n�ral, abonde en expressions qui ont trait aux chevaux; ceux-ci re�oivent pour chaque ann�e d'�ge un nom particulier. Ils ne leur ont pas vou� de culte comme l'Arabe, ils n'ont pas su �lever et ennoblir leur nature, mais ils s'en servent constamment, et ne sauraient presque vivre sans leurs coursiers qui remplissent une partie de leur existence. Si le monde antique pla�ait le Tatar dans ces contr�es inconnues et croyait reconna�tre dans ces hommes sauvages la figure d'un centaure, demi-homme et demi-cheval, il faut convenir que le Kirghize r�pond aujourd'hui encore � l'id�e du centaure. Il faut le voir � cheval: agile et droit, il ne semble faire qu'un avec la selle, et, bien que celle-ci soit plus que rudimentaire--elle est en bois,--il accomplit sans la moindre fatigue les plus longs voyages, et par des sentiers presque toujours dangereux. [Illustration: Les roches pliss�es des environs de Slifkina, sur la route de Prjevalsk.--D'apr�s une photographie.] En revanche, le Kirghize d�teste les courses � pied, et il �vite, m�me quand il le peut, une centaine de pas. Il se fatigue vite. Ainsi, pour se rendre d'une yourte � l'autre, il tient en permanence une monture devant sa tente. Il est vrai qu'il est paresseux au plus haut degr�, et que la plupart du temps il sommeille comme un rongeur. Il ne peut se tenir debout pendant plus de quelques minutes. On ne saurait imaginer deux Kirghizes causant dans la position verticale. Quand ils ont quelque chose � se dire, ils s'accroupissent sur leurs talons, et, se prenant mutuellement par la main, ils d�bitent leurs nouvelles. Dans cette posture g�nante ils sont capables de demeurer une demi-journ�e. Le Kirghize �l�ve des chevaux non seulement pour les monter, mais aussi pour en tirer le koumiss. En g�n�ral, tous les Orientaux raffolent de ce nectar, mais aucun n'en est aussi friand que le Kirghize. Il ne vit que de lui et que pour lui. Vouloir l'en priver, c'est comme lui �ter l'air qu'il respire. S'il n'en est pas repu, rien ne l'arr�tera: il l�chera votre caravane pour explorer les replis de la montagne, afin de d�couvrir un aoul o� il puisse se rassasier. [Illustration: Campement kirghize, pr�s de Slifkina.--D'apr�s une photographie.] L'outre du koumiss est � la disposition des passants. On ne la refuse jamais aux voyageurs. Aussi quand il se met en route, le Kirghize n'a-t-il aucune envie de prendre de quoi se sustenter pendant le voyage. Il compte toujours sur les aouls qui s'�gr�nent le long du chemin. En dehors du koumiss, dont il fait usage � tout moment, le Kirghize ne prend qu'un repas par jour. Assembl�es dans la yourte, dix, quinze, vingt personnes se renouvellent autour du kazan, contenant un mouton tout entier. Chacune d'elles sort son _pitchiak_ de sa gaine, empoigne un os quelconque, et puis, allons-y! tant que �a dure on fait agir les m�choires. Et l'on puise � tour de r�le dans le bouillon. Ensuite on trinque avec le koumiss, qu'on a eu soin d'agiter pr�alablement dans son outre pour lui donner de l'effervescence. Aussi, apr�s s'�tre repu de la sorte, le Kirghize perd sa r�sistance et se laisse volontiers entra�ner par la somnolence in�vitable d'une digestion laborieuse. Les gens riches font usage de th� et de pain. Celui-ci est fabriqu� sur place, avec de la farine d'orge, qu'on roule en boulettes et qu'on grille dans de la graisse de mouton. Le combustible employ� par les Kirghizes consiste presque uniquement en tiges et en racines de _teo-go�rouk_--queues de chameaux,--ainsi appel� � cause de la ressemblance des branches avec l'appendice de cet animal. C'est un buisson, du genre du rhododendron, qui s'enfonce profond�ment dans le sol et s'�panouit en un bouquet de ramilles �pineuses, hautes d'un demi-m�tre environ. Cette plante pousse jusqu'� 3�000 m�tres d'altitude, toujours sur les versants tourn�s au nord. C'est gr�ce � cet arbuste providentiel que les nomades peuvent s�journer dans les hautes vall�es du Tien-Chan, qui, se trouvant pr�s des glaciers, conservent longtemps leurs herbages verdoyants en d�pit de la chaleur estivale. Mais lorsque, � cent lieues � la ronde, il lui est impossible de rencontrer du bois, le Kirghize a recours � la fiente des animaux, pour entretenir son feu. Un brasero semblable ne produit pas, pr�cis�ment, une atmosph�re tr�s respirable dans l'int�rieur de la yourte, mais heureusement le Kirghize ne poss�de pas un odorat tr�s subtil. � temps perdu, le Kirghize se fait braconnier. Il dresse des aigles pour la chasse des renards et des b�tes � fourrure. Il assomme les loups � coups de matraque; pour les gros animaux, comme les ours et les _ovis poli_, il s'arme d'un fusil � silex, portant attach� � un tiers du f�t un chevalet mobile, qui sert d'appui pour le tir. Cependant, ce Nemrod n'est pas tr�s dangereux pour les animaux de toutes sortes qui pullulent dans les vall�es des monts C�lestes. Il ne chasse que pour ses besoins; rarement il fait commerce de pelleteries. On a souvent dit que les Kirghizes �taient farouches et indomptables. Nous les trouv�mes, au contraire, tr�s soumis et d�bonnaires. En cela ils diff�rent des Kazaks, qui sont pillards et tra�tres. Les Kirghizes n'ont pas l'esprit belliqueux des Turkomans ou des Afghans; ils sont avant tout et surtout poltrons. Quand ils n'ont rien � risquer, ils ne ratent pas le coup. Le vol, chez eux, est un d�lit � l'ordre du jour. Aussi ont-ils la pr�caution de tenir sous l'oeil leurs troupeaux, qui, pendant la nuit, sont assembl�s pr�s de l'aoul et gard�s par des chiens. Les Kirghizes sont d'une bonhomie et d'une na�vet� vraiment extraordinaires. Cette simplicit� de caract�re provient peut-�tre du genre de vie qu'ils m�nent et de l'isolement dans lequel ils passent leur existence. Ils sont fatalistes en toutes circonstances. Tout leur est pr�sage, bon ou mauvais: la chute d'un fil sur une pierre blanche, la nuance de la flamme, la couleur ou la forme d'un nuage, la rencontre de tel animal, ou la vue de telle fleur, tout cela a une signification pour eux, et sur ces riens ils r�glent souvent les actes de leur vie. Pour conjurer les mauvais esprits ils recourent � toutes sortes d'exp�dients. Leur pu�rilit� ne conna�t pas de limite. Ainsi une pierre un peu bizarre, la pr�sence d'un arbuste dans la f�lure d'une roche, la chute d'un a�rolithe ou une source d'eau thermale, prennent pour eux les proportions d'un miracle, et ils ne s'approchent de ces objets qu'apr�s des tours de bras et des g�nuflexions r�it�r�es. Ils se disent mahom�tans sunnites, mais en r�alit� ils ne le sont point. Ils ne font ni les ablutions, ni les pri�res prescrites par le Coran; ils n'ont ni mosqu�es ni mollahs, et ils ne connaissent aucunement les p�lerinages au tombeau du Proph�te. Ils ont bien conserv� de l'islamisme certaines pratiques et coutumes qui les assimilent � la religion de Mahomet, mais il ne faut voir dans cela que des simagr�es que les Kirghizes �talent devant les �trangers. En fait, ils ne professent aucune croyance bien d�termin�e; ils rel�vent plut�t un peu de toutes les sectes qui jadis foisonnaient dans l'Asie du nord. Cependant, s'il y a un pr�cepte du Coran qu'ils suivent � la lettre, c'est bien celui qui conseille la pluralit� des femmes. Autant que cela lui est possible, le Kirghize �pousera une, deux, trois femmes, et m�me davantage. Le contingent des femmes est en rapport avec la quantit� des troupeaux que le Kirghize poss�de. C'est avec cette valeur marchande qu'il ach�te ses �pouses. [Illustration: Femme kirghize tannant une peau (page 512).--D'apr�s une photographie.] Accompagn� de quelques parents et amis, il parcourt monts et vaux, fouille tous les aouls, sonde par-ci par-l�, use de toutes sortes de subterfuges pour d�nicher les _kez_, qui demeurent presque toujours invisibles. Une fois qu'il a fait son choix, il s'entend avec les parents sur la dot � payer, apr�s marchandage de part et d'autre. Enfin, apr�s s'�tre chamaill�s pendant des semaines et des mois, on tombe d'accord, et la jeune fille est d�sormais pass�e � l'�tat d'objet quelconque. Apr�s le contrat, pendant une ann�e, d�fense lui est faite de parler � des hommes autres que ceux de sa famille; elle doit rester dans l'int�rieur de la yourte, o� les comm�res viennent la visiter, passer d'innombrables heures � bavarder avec elle, et l'aider � pr�parer son trousseau. La c�r�monie du mariage, pr�sid�e par le chef de la tribu, consiste en un �change d'accolades entre �poux et parents; apr�s quoi, tous les assistants communient dans une agape pantagru�lique, o� le koumiss coule � flots, o� les borsaks et les quartiers de moutons jouent des r�les pr�pond�rants. Le fianc� pr�sente alors les troupeaux � son beau-p�re. Celui-ci v�rifie l'�tat des b�tes, et les compte pour s'assurer qu'on ne l'a pas vol�. Puis, en �change, il fait pr�sent � son gendre de quelques chameaux et chevaux. Ce pr�sent forme la dot de la jeune fille, elle lui appartient sa vie durant. Le mari en g�re et en conserve la propri�t� aussi longtemps qu'il retiendra l'�pouse sous le toit conjugal; s'il la r�pudie, il doit rendre son bien, � moins qu'elle ne soit fautive. [Illustration: Les glaciers du Djoukoutchiak-tao.--D'apr�s une photographie.] Les Kirghizes ne prennent pas plusieurs femmes � la fois, comme le font en g�n�ral les musulmans. Ils n'en �pousent qu'une seule; apr�s quelque temps, quand elle commence � d�plaire, ils en �pousent une autre toute jeune, et ainsi de suite, autant que le leur permettent les richesses dont ils disposent. La nouvelle arriv�e est toujours la favorite du mari. Les autres ne comptent plus. Tandis que la fra�che �pous�e se dorlotera dans la yourte, choy�e et gard�e jalousement par son ma�tre, les autres travailleront dehors, et coucheront � l'�cart. Avant l'arriv�e des Russes, les Kirghizes ne connaissaient gu�re l'usage des monnaies; ils �changeaient leurs marchandises contre des t�tes de b�tail. Encore maintenant, ils n'ont pas d'id�es bien pr�cises sur la mesure du temps, ils ne savent pas leur �ge, ni l'ann�e de l'�re musulmane. L'an se divise d'apr�s les lunes, et les mois selon les quartiers de celle-ci. Pour compter le temps, ils disent: une journ�e, une demi-journ�e, un quart de journ�e. Cette m�thode sert aussi � mesurer les distances; ainsi, ils diront que tel aoul se trouve � une demi-journ�e de marche, ou plus ou moins. Pour les petites mesures, ils emploient les bras, les pieds, ou la main. Il est difficile de rencontrer parmi les nomades du Tien-Chan, des individus lettr�s ou un peu distingu�s. Ceux qui savent lire ou �crire se comptent sur les doigts. La plupart se pr�lassent dans une inconsciente ignorance, et ils ne font rien pour se d�gager de l'avilissement qui les abrutit depuis un temps imm�morial. Cette abjecte barbarie les a toujours emp�ch�s de se grouper en soci�t� polic�e, et de former une nation homog�ne. Chaque tribu vit dans son domaine, �vitant le voisinage des autres. On campe dans des endroits d�termin�s, o� chaque yourte r�occupe le m�me emplacement que l'ann�e pr�c�dente. C'est une routine plut�t qu'une coutume, � laquelle, cependant, le Kirghize, comme dans tous les actes de sa vie, est li� corps et �me. Les individus qui composent un aoul, vivant dans une communaut� patriarcale, sont solidaires des droits que leur ont l�gu�s les anc�tres. Ainsi ils veillent � ce que les aouls avoisinants ne viennent pas empi�ter sur leurs p�turages, ce qui cr�erait des droits pour plus tard. Il arrive, en effet, qu'une tribu tr�s peupl�e cherche � s'�tendre sur le territoire d'une autre dont le nombre des membres est moindre. Souvent, elles se confondent ensemble. Les Kirghizes sont rest�s comme ils �taient du temps o� ils vinrent �tablir leurs p�nates dans les vall�es sauvages des monts C�lestes. La vie des Kirghizes consiste � r��diter en tout point ce que firent et ce que furent leurs devanciers. Et �a n'est pas pr�s de changer. Le sentiment chez les Kirghizes est tr�s born�. Ils ne s'attachent pas ou peu aux hommes et aux choses. S'ils sont capables d'aimer leurs femmes, ce n'est pas par tendresse ou par sympathie, mais parce qu'ils sont anim�s par l'instinct de la brute. Pour leurs enfants, ils nourrissent une affection bien superficielle. S'ils aiment leurs montagnes, c'est uniquement parce qu'ils y sont habitu�s, et qu'ailleurs il ne leur serait pas si facile de conserver leur libert� vagabonde. Ils n'ont aucune id�e de patrie. Les manifestations de leur intelligence n'ont pas des envol�es d'une tr�s grande envergure. Ils ne poss�dent aucun sens artistique. Ils ornementent bien leurs feutres d'arabesques, les cuirs de gaufrages, les harnais de placages d'argent, mais ces vell�it�s sont tellement primitives, qu'on ne peut en tenir compte. D'ailleurs, ces objets, quand ils ne sont pas copi�s, proviennent des Sartes ou des Kachgariens. Par contre les Kirghizes sont des troubadours inlassables. Presque tous, hommes et femmes, dans un moment de d�lassement, fredonnent un refrain, ou geignent une complainte. Ils l'accompagnent quelquefois avec une esp�ce de luth creus� d'une seule pi�ce dans un morceau de bois, sur lequel ils pincent des cordes en boyau. Un autre instrument de musique plus commun, est un fifre fait d'une branche d'arbre, fendue et creus�e, qui produit un son rauque, cacophonique. Pour en jouer, on appuie son extr�mit� sup�rieure contre une dent, et on ouvre ou on ferme alternativement l'ouverture inf�rieure avec le doigt. Le peuple kirghize est encore � l'�tat d'enfance. � c�t� de d�fauts ataviques propres � la race et enracin�s dans des coutumes surann�es, il pr�sente des dispositions qui ne demandent qu'� �tre cultiv�es et exploit�es. Mais tant que leurs montagnes resteront leur domaine exclusif et que des barri�res de granit les s�pareront du reste du monde, les Kirghizes continueront � demeurer tels qu'ils sont. Il faut qu'une s�ve nouvelle et puissante vienne aviver leurs forces endormies, et qu'une race jeune et entreprenante les entra�ne dans la sph�re de la productivit� consciente de l'humanit�. Mais ce n'est pas de sit�t que cela arrivera. Et les Kirghizes pourront encore longtemps jouir de la qui�tude de leur vie solitaire, et narguer la servitude que toute civilisation entra�ne avec elle. Il ne faudrait maintenant pas se m�prendre sur la port�e d'un voyage au Tien-Chan. Sa raison d'�tre r�side uniquement dans un but scientifique. Il n'y a rien � y d�couvrir, sinon des glaciers et des torrents. On n'y rencontre pas de cit�s tumultueuses ou de ruines historiques; on ne risque pas non plus d'�tre d�vor� par des cannibales, et les explorateurs qui ambitionnent les aventures fantastiques n'y trouvent pas leur compte. Cependant, pour celui qui sait se contenter de la nature, brutale et vierge; pour celui qui affectionne les sveltes �l�gances des pics et les sinuosit�s immacul�es des glaciers; pour celui qui s'extasie devant une fleur, qui s'int�resse � un fragment de roche, et qui se r�jouit de la vue d'un humble insecte; pour cet homme-l�, ces montagnes mornes et d�sertes, et ces vall�es immenses qui semblent � jamais condamn�es � la st�rilit�, s'animent, s'�gayent et lui parlent de choses inconnues, excitent sa naturelle curiosit� de tout savoir, et l'incitent � la conqu�te de nouveaux probl�mes, � la d�couverte et � la solution de nouvelles hypoth�ses et questions. Notre petit voyage aux monts C�lestes, s'il n'a pas �t� tr�s gai, ni tr�s mouvement�, nous a toutefois mis dans les conditions de pouvoir d�terminer exactement la physionomie d'un vaste soul�vement terrestre et surtout l'aspect d'une r�gion jusque-l� inexplor�e. Ces r�sultats, qui ne sont pas � d�daigner pour la science g�ographique, suffisent � r�compenser nos exploits d'alpinistes. JULES BROCHEREL. [Illustration: Tombeau kirghize.--D'apr�s une photographie.] Droits de traduction et de reproduction r�serv�s. * * * * * TABLE DES GRAVURES ET CARTES L'�T� AU KACHMIR Par _Mme F. MICHEL_ En �rickshaw� sur la route du mont Abou. (D'apr�s une photographie.) 1 L'�l�phant du touriste � Dja�pour. 1 Petit sanctuaire lat�ral dans l'un des temples dja�ns du mont Abou. (D'apr�s une photographie.) 2 Pont de cordes sur le Djhilam, pr�s de Garhi. (Dessin de Massias, d'apr�s une photographie.) 3 Les �Kar�vas� ou plateaux alluviaux form�s par les �rosions du Djhilam. (D'apr�s une photographie.) 4 �Ekkas� et �Tongas� sur la route du Kachmir: vue prise au relais de Rampour. (D'apr�s une photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 5 Le vieux fort Sikh et les gorges du Djhilam � Ouri. (D'apr�s une photographie.) 6 Sh�r-Garhi ou la �Maison du Lion�, palais du Mah�r�dja � Sr�nagar. (Photographie Bourne et Sheperd, � Calcutta.) 7 L'entr�e du Tchinar-B�gh, ou Bois des Platanes, au-dessus de Sr�nagar; au premier plan une �dounga�, au fond le sommet du Takht-i-Souleiman. (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 7 Ruines du temple de Brankoutri. (D'apr�s une photographie.) 8 Types de Pandis ou Brahmanes Kachmirs. (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 9 Le quai de la R�sidence; au fond, le sommet du Takht-i-Souleiman. (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 10 La porte du Kachmir et la sortie du Djhilam � Baramoula. (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 11 Nos tentes � Lahore. (D'apr�s une photographie.) 12 �Dounga� ou bateau de passagers au Kachmir. (Photographie Bourne et Shepherd, � Calcutta.) 13 Vichnou port� par Garouda, idole v�n�r�e pr�s du temple de Vidja-Broer (hauteur 1m 40.) 13 Enfants de bateliers jouant � cache-cache dans le creux d'un vieux platane. (D'apr�s une photographie.) 14 Bateli�res du Kachmir d�cortiquant du riz, pr�s d'une rang�e de peupliers. (Photographie Bourne et Shepherd, � Calcutta.) 15 Campement pr�s de Palhallan: tentes et doungas. (D'apr�s une photographie.) 16 Troisi�me pont de Sr�nagar et mosqu�e de Shah Hamadan; au fond, le fort de Hari-Paryat. (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 17 Le temple inond� de Pandrethan. (D'apr�s une photographie.) 18 Femme musulmane du Kachmir. (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 19 Pandit Narayan assis sur le seuil du temple de Narasth�n. (D'apr�s une photographie.) 20 Pont et bourg de Vidjabroer. (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 21 Ziarat de Cheik Nasr-oud-Din, � Vidjabroer. (D'apr�s une photographie.) 22 Le temple de Panyech: � gauche, un brahmane; � droite, un musulman. (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 23 Temple hindou moderne � Vidjabroer. (D'apr�s une photographie.) 24 Brahmanes en visite au Naga ou source sacr�e de Valtongou. (D'apr�s une photographie.) 25 Gargouille ancienne, de style hindou, dans le mur d'une mosqu�e, � Houtamourou, pr�s de Bhavan. 25 Temple ruin�, � Khotair. (D'apr�s une photographie.) 26 Naga ou source sacr�e de Kothair. (D'apr�s une photographie.) 27 Ver-N�g: le bungalow au-dessus de la source. (D'apr�s une photographie.) 28 Temple rustique de Voutan�r. (D'apr�s une photographie.) 29 Autel du temple de Voutan�r et accessoires du culte. (D'apr�s une photographie.) 30 Noce musulmane, � Rozlou: les musiciens et le fianc�. (D'apr�s une photographie.) 31 Sacrifice bhramanique, � Bhavan. (D'apr�s une photographie.) 31 Int�rieur de temple de Martand: le repos des coolies employ�s au d�blaiement. (D'apr�s une photographie.) 32 Ruines de Martand: fa�ade post�rieure et vue lat�rale du temple. (D'apr�s des photographies.) 33 Place du campement sous les platanes, � Bhavan. (D'apr�s une photographie.) 34 La Ziarat de Za�n-oud-Din, � Eichmakam. (Photographie Bourne et Shepherd, � Calcutta.) 35 Naga ou source sacr�e de Brar, entre Bhavan et Eichmakar. (D'apr�s une photographie.) 36 Maisons de bois, � Palg�m. (Photographie Bourne et Shepherd, � Calcutta.) 37 Palanquin et porteurs. 37 Ganech-Bal sur le Lidar: le village hindou et la roche miraculeuse. (D'apr�s une photographie.) 38 Le massif du Kolahoi et la bifurcation de la vall�e du Lidar au-dessus de Palg�m, vue prise de Ganeth-Bal. (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 39 Vall�e d'Amarn�th: vue prise de la grotte. (D'apr�s une photographie.) 40 Pondjtarni et le camp des p�lerins: au fond, la passe du Mah�gounas. (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 41 Cascade sortant de dessous un pont de neige entre Tannin et Zodji-P�l. (D'apr�s une photographie.) 42 Le Koh-i-Nour et les glaciers au-dessus du lac �ecra-Nag. (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 43 Grotte d'Amarn�th. (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 43 Astan-Marg: la prairie et les bouleaux. (D'apr�s une photographie.) 44 Campement de Goudjars � Astan-Marg. (D'apr�s une photographie.) 45 Le bain des p�lerins � Amarnath. (D'apr�s une photographie.) 46 P�lerins d'Amarn�th: le S�dhou de Patiala; par derri�re, des brahmanes, et � droite, des musulmans du Kachmir. (D'apr�s une photographie.) 47 Mosqu�e de village au Kachmir. (D'apr�s une photographie.) 48 Brodeurs Kachmiris sur toile. (Photographie Bourne et Shepherd, � Calcutta.) 49 Mendiant musulman. (D'apr�s une photographie.) 49 Le Brahma S�r et le camp des p�lerins au pied de l'Haramouk. (D'apr�s une photographie.) 50 Lac Gang�bal au pied du massif de l'Haramouk. (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 51 Le Noun-K�l, au pied de l'Haramouk, et le bain des p�lerins. (D'apr�s une photographie.) 52 Femmes musulmanes du Kachmir avec leurs �houkas� (pipes) et leur �hangri� (chaufferette). (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 53 Temples ruin�s � Vang�th. (D'apr�s une photographie.) 54 �M�la� ou foire religieuse � Hazarat-Bal. (En haut, photographie par l'auteur; en bas, photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 55 La villa de Cheik Safai-Bagh, au sud du lac de Sr�nagar. (D'apr�s une photographie.) 56 Nishat-B�gh et le bord oriental du lac de Sr�nagar. (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 57 Le canal de Mar � Sridagar. (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 58 La mosqu�e de Shah Hamadan � Sr�nagar (rive droite). (Photographie Jadu Kissen, � Delhi.) 59 Sp�cimens de l'art du Kachmir. (D'apr�s une photographie.) 60 SOUVENIRS DE LA COTE D'IVOIRE Par _le docteur LAMY_ _M�decin-major des troupes coloniales_. La barre de Grand-Bassam n�cessite un grand d�ploiement de force pour la mise � l'eau d'une pirogue. (D'apr�s une photographie.) 61 Le f�minisme � Adoko�: un m�decin concurrent de l'auteur. (D'apr�s une photographie.) 61 �Travail et Maternit� ou �Comment vivent les femmes de Petit-Al�p�. (D'apr�s une photographie.) 62 � Mot�so: soins maternels. (D'apr�s une photographie.) 63 Installation de notre campement dans une clairi�re d�broussaill�e. (D'apr�s une photographie.) 64 Environs de Grand-Al�p�: des hangars dans une palmeraie, et une douzaine de grands mortiers destin�s � la pr�paration de l'huile de palme. (D'apr�s une photographie.) 65 Dans le sentier �troit, montant, il faut marcher en file indienne. (D'apr�s une photographie.) 66 Nous utilisons le f�t renvers� d'un arbre pour traverser la M�. (D'apr�s une photographie.) 67 La popote dans un admirable champ de bananiers. (D'apr�s une photographie.) 68 Indig�nes coupant un acajou. (D'apr�s une photographie.) 69 La c�te d'Ivoire.--Le pays Atti�. 70 Ce fut un sauve-qui-peut g�n�ral quand je braquai sur les indig�nes mon appareil photographique. (Dessin de J. Lav�e, d'apr�s une photographie.) 71 La rue principale de Grand-Al�p�. (D'apr�s une photographie.) 72 Les Trois Graces de Mop� (pays Atti�). (D'apr�s une photographie.) 73 Femme du pays Atti� portant son enfant en groupe. (D'apr�s une photographie.) 73 Une clairi�re pr�s de Mop�. (D'apr�s une photographie.) 74 La garnison de Mop� se porte � notre rencontre. (D'apr�s une photographie.) 75 Femme de Mop� fabriquant son savon � base d'huile de palme et de cendres de peaux de bananes. (D'apr�s une photographie.) 76 Danse ex�cut�e aux fun�railles du prince h�ritier de Mop�. (D'apr�s une photographie.) 77 Toilette et embaumement du d�funt. (D'apr�s une photographie.) 78 Jeune femme et jeune fille de Mop�. (D'apr�s une photographie.) 79 Route, dans la for�t tropicale, de Malamalasso � Daboissu�. (D'apr�s une photographie.) 80 Beni� Coam�, roi de Betti� et autres lieux, entour� de ses femmes et de ses hauts dignitaires. (D'apr�s une photographie.) 81 Chute du Mala-Mala, affluent du Como�, � Malamalasso. (D'apr�s une photographie.) 82 La vall�e du Como� � Malamalasso. (D'apr�s une photographie.) 83 Tam-tam de guerre � Mop�. (D'apr�s une photographie.) 84 Piroguiers de la c�te d'Ivoire pagayant. (D'apr�s une photographie.) 85 Allou, le boy du docteur Lamy. (D'apr�s une photographie.) 85 La for�t tropicale � la c�te d'Ivoire. (D'apr�s une photographie.) 86 Le d�bitage des arbres. (D'apr�s une photographie.) 87 Les lianes sur la rive du Como�. (D'apr�s une photographie.) 88 Les occupations les plus fr�quentes au village: discussions et farniente Atti�. (D'apr�s une photographie.) 89 Un incendie � Grand-Bassam. (D'apr�s une photographie.) 90 La danse indig�ne est caract�ris�e par des poses et des gestes qui rappellent une pantomime. (D'apr�s une photographie.) 91 Une inondation � Grand-Bassam. (D'apr�s une photographie.) 92 Un campement sanitaire � Abidjean. (D'apr�s une photographie.) 93 Une rue de Jackville, sur le golfe de Guin�e. (D'apr�s une photographie.) 94 Grand-Bassam: cases d�truites apr�s une �pid�mie de fi�vre jaune. (D'apr�s une photographie.) 95 Grand-Bassam: le boulevard Treich-Lapl�ne. (D'apr�s une photographie.) 96 L'�LE D'ELBE Par _M. PAUL GRUYER_ L'�le d'Elbe se d�coupe sur l'horizon, abrupte, montagneuse et viol�tre. 97 Une jeune fille elboise, au regard �nergique, � la peau d'une blancheur de lait et aux beaux cheveux noirs. 97 Les rues de Porto-Ferraio sont toutes un escalier (page 100). 98 Porto-Ferraio: � l'entr�e du port, une vieille tour g�noise, trapue, bizarre de forme, se mire dans les flots. 99 Porto-Ferraio: la porte de terre, par laquelle sortait Napol�on pour se rendre � sa maison de campagne de San Martino. 100 Porto-Ferraio: la porte de mer, o� aborda Napol�on. 101 La �teste� de Napol�on (page 100). 102 Porto-Ferraio s'�chelonne avec ses toits plats et ses fa�ades scintillantes de clart� (page 99). 103 Porto-Ferraio: les remparts d�coupent sur le ciel d'un bleu sombre leur profil anguleux (page 99). 103 La fa�ade ext�rieure du �Palais� des Mulini o� habitait Napol�on � Porto-Ferraio (page 101). 104 Le jardin imp�rial et la terrasse de la maison des Mulini (page 102). 105 La Via Napoleone, qui monte au �Palais� des Mulini. 106 La salle du conseil � Porto-Ferraio, avec le portrait de la derni�re grande-duchesse de Toscane et celui de Napol�on, d'apr�s le tableau de G�rard. 107 La grande salle des Mulini aujourd'hui abandonn�e, avec ses volets clos et les peintures d�coratives qu'y fit faire l'empereur (page 101). 107 Une paysanne elboise avec son vaste chapeau qui la prot�ge du soleil. 108 Les mille m�tres du Monte Capanna et de son voisin, le Monte Giove, d�valent dans les flots de toute leur hauteur. 109 Un enfant elbois. 109 Marciana Alta et ses ruelles �troites. 110 Marciana Marina avec ses maisons rang�es autour du rivage et ses embarcations tir�es sur la gr�ve. 111 Les ch�taigniers dans le brouillard, sur le faite du Monte Giove. 112 ... Et voici au-dessus de moi Marciana Alta surgir des nu�es (page 111). 113 La �Seda di Napoleone� sur le Monte Giove o� l'empereur s'asseyait pour d�couvrir la Corse. 114 La blanche chapelle de Monserrat au centre d'un amphith��tre de rochers est entour�e de sveltes cypr�s (page 117). 115 Voici Rio Montagne dont les maisons r�guli�res et cubiques ont l'air de dominos empil�s... (page 118). 115 J'aper�ois Poggio, un autre village perdu aussi dans les nu�es. 116 Une des trois chambres de l'ermitage. 117 L'ermitage du Marciana o� l'empereur re�ut la visite de la comtesse Walewska, le 3 Septembre 1814. 117 Le petit port de Porto-Longone domin� par la vieille citadelle espagnole (page 117). 118 La maison de Madame M�re � Marciana Alta.--�Bastia, signor!�--La chapelle de la Madone sur le Monte Giove. 119 Le coucher du soleil sur le Monte Giove. 120 Porto-Ferraio et son golfe vus des jardins de San Martino. 121 L'arriv�e de Napol�on � l'�le d'Elbe. (D'apr�s une caricature du temps.) 121 Le drapeau de Napol�on roi de l'�le d'Elbe: fond blanc, bande orang�-rouge et trois abeilles jadis dor�es. 122 La salle de bains de San Martino a conserv� sa baignoire de pierre. 123 La chambre de Napol�on � San Martino. 123 La cour de Napol�on � l'�le d'Elbe. (D'apr�s une caricature du temps.) 124 Une femme du village de Marciana Alta. 125 Le plafond de San Martino et les deux colombes symboliques repr�sentant Napol�on et Marie-Louise. 126 San Martino rappelle par son aspect une de ces maisonnettes � la Jean-Jacques Rousseau, agrestes et paisibles (page 123). 126 Rideau du th��tre de Porto-Ferraio repr�sentant Napol�on sous la figure d'Apollon gardant ses troupeaux chez Adm�te. 127 La salle �gyptienne de San Martino est demeur�e intacte avec ses peintures murales et son bassin � sec. 127 Broderies de soie du couvre-lit et du baldaquin du lit de Napol�on aux Mulini, dont on a fait le tr�ne �piscopal de l'�v�que d'Ajaccio. 128 La signorina Squarci dans la robe de satin blanc que son a�eule portait � la cour des Mulini. 129 �ventail de Pauline Borgh�se, en ivoire sculpt�, envoy� en souvenir d'elle � la signora Traditi, femme du maire de Porto-Ferraio. 130 Le lit de Madame M�re, qu'elle s'�tait fait envoyer de Paris � l'�le d'Elbe. 130 Le vieil aveugle Soldani, fils d'un soldat de Waterloo, chauffait, � un petit brasero de terre jaune, ses mains osseuses. 131 L'entr�e du goulet de Porto-Ferraio par o� sortit la flottille imp�riale, le 26 f�vrier 1815. 132 D'ALEXANDRETTE AU COUDE DE L'EUPHRATE Par _M. VICTOR CHAPOT_ _membre de l'�cole fran�aise d'Ath�nes_. Dans une sorte de cirque se dressent les pans de muraille du Ksar-el-Benat (page 142). (D'apr�s une photographie.) 133 Le canal de S�leucie est, par endroits, un tunnel (page 140). 133 Vers le coude de l'Euphrate: la pens�e de relever les traces de vie antique a dict� l'itin�raire. 134 L'Antioche moderne: de l'ancienne Antioche il ne reste que l'enceinte, aux flancs du Silpios (page 137). 135 Les rues d'Antioche sont �troites et tortueuses; parfois, au milieu, se creuse en foss�. (D'apr�s une photographie.) 136 Le tout-Antioche inonde les promenades. (D'apr�s une photographie.) 137 Les cr�tes des collines sont couronn�es de chapelles ruin�es (page 142). 138 Alep est une ville militaire. (D'apr�s une photographie.) 139 La citadelle d'Alep se d�tache des quartiers qui l'avoisinent (page 143). (D'apr�s une photographie.) 139 Les parois du canal de S�leucie s'�l�vent jusqu'� 40 m�tres. (D'apr�s une photographie.) 140 Les tombeaux de S�leucie s'�tageaient sur le Kasios. (D'apr�s une photographie.) 141 � Alep une seule mosqu�e peut presque passer pour une oeuvre d'art. (D'apr�s une photographie.) 142 Tout alentour d'Alep la campagne est d�serte. (D'apr�s une photographie.) 143 Le Kasr-el-Benat, ancien couvent fortifi�. 144 Balkis �veille, de loin et de haut, l'id�e d'une taupini�re (page 147). (D'apr�s une photographie.) 145 St�le Hittite. L'artiste n'a ex�cut� qu'un premier ravalement (page 148). 145 �glise arm�nienne de Nisib; le plan en est masqu� au dehors. (D'apr�s une photographie.) 146 Tell-Erfat est peupl� d'Yazides; on le reconna�t � la forme des habitations. (D'apr�s une photographie.) 147 La rive droite de l'Euphrate �tait couverte de stations romaines et byzantines. (D'apr�s une photographie.) 148 Biredjik vu de la citadelle: la plaine s'allonge ind�finiment (page 148). (D'apr�s une photographie.) 149 S�r�sat: village mixte d'Yazides et de B�douins (page 146). (D'apr�s une photographie.) 150 Les Tcherkesses diff�rent des autres musulmans; sur leur personne, pas de haillons (page 152). (D'apr�s une photographie.) 151 Ras-el-A�n. Deux jours se passent, m�lancoliques, en n�gociations (page 155). (D'apr�s une photographie.) 152 J'ai laiss� ma tente hors les murs devant Orfa. (D'apr�s une photographie.) 153 Environs d'Orfa: les vignes, basses, courent sur le sol. (D'apr�s une photographie.) 154 Vue g�n�rale d'Orfa. (D'apr�s une photographie.) 155 Porte arabe � Rakka (page 152). (D'apr�s une photographie.) 156 Passage de l'Euphrate: les chevaux apeur�s sont port�s dans le bac � force de bras (page 159). (D'apr�s une photographie.) 157 B�douin. (D'apr�s une photographie.) 157 Citadelle d'Orfa: deux puissantes colonnes sont rest�es debout. (D'apr�s une photographie.) 158 Orfa: mosqu�e Ibrahim-Djami; les promeneurs fl�nent dans la cour et devant la piscine (page 157). (D'apr�s une photographie.) 159 Pont byzantin et arabe (page 159). (D'apr�s une photographie.) 160 Mausol�e d'Alif, orn� d'une frise de t�tes sculpt�es (page 160). (D'apr�s une photographie.) 161 Mausol�e de Th�odoret, selon la l�gende, pr�s de Cyrrhus. (D'apr�s une photographie.) 162 Kara-Moughara: au sommet se voit une grotte taill�e (page 165). (D'apr�s une photographie.) 163 L'Euphrate en amont de Roum-Kaleh; sur la falaise campait un petit corps de l�gionnaires romains (page 160). (D'apr�s une photographie.) 163 Trappe de Checkhl�: un grand �difice en pierres a remplac� les premi�res habitations (page 166). 164 Trappe de Checkhl�: la chapelle (page 166). (D'apr�s une photographie.) 165 P�re Maronite (page 168). (D'apr�s une photographie.) 166 Acb�s est situ� au fond d'un grand cirque montagneux (page 166). (D'apr�s une photographie.) 167 Trappe de Checkhl�: premi�res habitations des trappistes (page 166). (D'apr�s une photographie.) 168 LA FRANCE AUX NOUVELLES-H�BRIDES Par _M. RAYMOND BEL_ Indig�nes h�bridais de l'�le de Spiritu-Santo. (D'apr�s une photographie.) 169 Le petit personnel d'un colon de Malli-Colo. (D'apr�s une photographie.) 169 Le quai de Franceville ou Port-Vila, dans l'�le Vat�. (D'apr�s une photographie.) 170 Une case de l'�le de Spiritu-Santo et ses habitants. (D'apr�s une photographie.) 171 Le port de Franceville ou Port-Vila, dans l'�le Vat�, pr�sente une rade magnifique. (D'apr�s une photographie.) 172 C'est � Port-Vila ou Franceville, dans l'�le Vat�, que la France a un r�sident. (D'apr�s une photographie.) 173 Dieux indig�nes ou Tabous. (D'apr�s une photographie.) 174 Les indig�nes h�bridais de l'�le Mallicolo ont un costume et une physionomie moins sauvages que ceux de l'�le Pentec�te. (D'apr�s des photographies.) 175 Pirogues de l'�le Vao. (D'apr�s une photographie.) 176 Indig�nes employ�s au service d'un bateau. (D'apr�s une photographie.) 177 Un sous-bois dans l'�le de Spiritu-Santo. (D'apr�s une photographie.) 178 Un banquet de Fran�ais � Port-Vila (Franceville). (D'apr�s une photographie.) 179 La colonie fran�aise de Port-Vila (Franceville). (D'apr�s une photographie.) 179 La rivi�re de Luganville. (D'apr�s une photographie.) 180 LA RUSSIE, RACE COLONISATRICE Par _M. ALBERT THOMAS_ Les enfants russes, aux grosses joues pales, devant l'isba (page 182). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 181 La reine des cloches �Tsar Kolokol� (page 180). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 181 Les chariots de transport que l'on rencontre en longues files dans les rues de Moscou (page 183). 182 Les paysannes en p�lerinage arriv�es enfin � Moscou, la cit� sainte (page 182). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 183 Une chapelle o� les passants entrent adorer les ic�nes (page 183). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 184 La porte du Sauveur que nul ne peut franchir sans se d�couvrir (page 185). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 185 Une porte du Kreml (page 185). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 186 Les moines du couvent de Saint-Serge, un des couvents qui entourent la cit� sainte (page 185). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 187 Deux villes dans le Kreml: celle du XVe si�cle, celle d'Ivan, et la ville moderne, que symbolise ici le petit palais (page 190). 188 Le mur d'enceinte du Kreml, avec ses cr�neaux, ses tours aux toits aigus (page 183). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 189 Tout pr�s de l'Assomption, les deux �glises-soeurs se dressent: les Saints-Archanges et l'Annonciation (page 186). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 189 � l'extr�mit� de la place Rouge, Saint-Basile dresse le fouillis de ses clochers (page 184). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 190 Du haut de l'Ivan V�liki, la ville immense se d�couvre (page 190). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 191 Un des isvotchiks qui nous m�nent grand train � travers les rues de Moscou (page 182). 192 Il fait bon errer parmi la foule pittoresque des march�s moscovites, entre les petits marchands, artisans ou paysans qui apportent l� leurs produits (page 195). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 193 L'isvotchik a rev�tu son long manteau bleu (page 194). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 193 Itin�raire de Moscou � Tomsk. 194 � c�t� d'une �picerie, une des petites boutiques o� l'on vend le kvass, le cidre russe (page 195). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 195 Et des Tatars offraient des �toffes �tal�es sur leurs bras (page 195). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 196 Patients, r�sign�s, les cochers attendent sous le soleil de midi (page 194). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 197 Une cour du quartier ouvrier, avec l'ic�ne protectrice (page 196). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 198 Sur le flanc de la colline de Nijni, au pied de la route qui relie la vieille ville � la nouvelle, la citadelle au march� (page 204). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 199 Le march� �tincelait dans son fouillis (page 195). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 200 D�j� la grande industrie p�n�tre: on rencontre � Moscou des ouvriers modernes (page 195). (D'apr�s une photographie.) 201 Sur l'Oka, un large pont de bois barrait les eaux (page 204). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 202 Dans le quartier ouvrier, les familles s'entassent, � tous les �tages, autour de grandes cours (page 196). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 203 Le char fun�bre �tait blanc et dor� (page 194). (D'apr�s une photographie.) 204 � Nijni, toutes les races se rencontrent, Grands-Russiens, Tatars, Tcherkesses (page 208). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 205 Une femme tatare de Kazan dans l'enveloppement de son grand ch�le (page 214). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 205 Nous avons travers� le grand pont qui m�ne � la foire (page 205). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 206 Au dehors, la vie de chaque jour s'�talait, p�le-m�le, � l'orientale (page 207). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 207 Les galeries couvertes, devant les boutiques de Nijni (page 206). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 208 Dans les rues, les petits marchands �taient innombrables (page 207). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 209 Dans une rue, c'�taient des coffres de toutes dimensions, peints de couleurs vives (page 206). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 210 Pr�s de l'asile, nous sommes all�s au march� aux cloches (page 208). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 211 Plus loin, sous un abri, des balances gigantesques �taient pendues (page 206). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 211 Dans une autre rue, les charrons avaient accumul� leurs roues (page 206). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 212 Paysannes russes, de celles qu'on rencontre aux petits march�s des d�barcad�res ou des stations (page 215). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 213 Le Kreml de Kazan. C'est l� que sont les �glises et les administrations (page 214). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 214 Sur la berge, des tarantass �taient rang�es (page 216). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 215 Partout sur la Volga d'immenses paquebots et des remorqueurs (page 213). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 216 � presque toutes les gares il se forme spontan�ment un petit march� (page 222). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 217 Dans la plaine (page 221). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 217 Un petit fumoir, vitr� de tous c�t�s, termine le train (page 218). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 218 Les �migrants �taient l�, p�le-m�le, parmi leurs mis�rables bagages (page 226). (D'apr�s une photographie de M. J. Cahen.) 219 Les petits gar�ons du wagon-restaurant s'approvisionnent (page 218). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 220 �migrants prenant leur maigre repas pendant l'arr�t de leur train (page 228). (Photographie de M. A. N. de Koulomzine) 221 L'ameublement du wagon-restaurant �tait simple, avec un bel air d'aisance (page 218). (Photographie de M. A. N. de Koulomzine) 222 Les gendarmes qui assurent la police des gares du Transsib�rien. (Photographie de M. Thi�beaux.) 223 L'�glise, pr�s de la gare de Tch�liabinsk, ne diff�re des isbas neuves que par son clocheton (page 225). (Photographie extraite du �Guide du Transsib�rien�.) 224 Un train de constructeurs �tait remis� l�, avec son wagon-chapelle (page 225). (Photographie de M. A. N. de Koulomzine.) 225 Vue De Stretensk: la gare est sur la rive gauche, la ville sur la rive droite. (Photographie de M. A. N. de Koulomzine.) 226 Un point d'�migration (page 228). (Photographie de M. A. N. de Koulomzine.) 227 Enfants d'�migrants (page 228). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 228 Un petit march� dans une gare du Transsib�rien. (Photographie de M. Legras.) 229 La cloche luisait, immobile, sous un petit toit isol� (page 230). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 229 Nous sommes pass�s pr�s d'une �glise � clochetons verts (page 230). (Photographie de M. Thi�beaux.) 230 Tomsk a group� dans la vall�e ses maisons grises et ses toits verts (page 230). (Photographie de M. Brocherel.) 231 Apr�s la d�b�cle de la Tome, pr�s de Tomsk (page 230). (D'apr�s une photographie de M. Legras.) 232 Le chef de police demande quelques explications sur les passeports (page 232). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 233 La cath�drale de la Trinit� � Tomsk (page 238). (Photographie extraite du �Guide du Transsib�rien�.) 234 Tomsk: en revenant de l'�glise (page 234). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 235 Tomsk n'�tait encore qu'un campement, sur la route de l'�migration (page 231). (D'apr�s une photographie.) 236 Une rue de Tomsk, d�finie seulement par les maisons qui la bordent (page 231). (Photographie de M. Brocherel.) 237 Les cliniques de l'Universit� de Tomsk (page 238). (Photographie extraite du �Guide du Transsib�rien�.) 238 Les longs b�timents blancs o� s'abrite l'Universit� (page 237). (Photographie extraite du �Guide du Transsib�rien�.) 239 La voiture de l'ic�ne stationnait parfois (page 230). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 240 Fl�neurs � la gare de Petropavlosk (page 242). (D'apr�s une photographie de M. Legras.) 241 Dans les vall�es de l'Oural, habitent encore des Bachkirs (page 245). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 241 Un taillis de bouleaux entourait une petite mare. (D'apr�s une photographie.) 242 Les rivi�res roulaient une eau claire (page 244). (D'apr�s une photographie.) 243 La ligne suit la vall�e des rivi�res (page 243). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 244 Comme toute l'activit� commerciale semble fr�le en face des eaux puissantes de la Volga! (page 248.) (D'apr�s une photographie de M. G. Cahen.) 245 Bachkirs sculpteurs. (D'apr�s une photographie de M. Paul Labb�.) 246 � la gare de Tch�liabinsk, toujours des �migrants (page 242). (D'apr�s une photographie de M. J. Legras.) 247 Une bonne d'enfants, avec son costume traditionnel (page 251). (D'apr�s une photographie de M. G. Cahen.) 248 Joie na�ve de vivre, et m�lancolie.--un petit march� du sud (page 250). (D'apr�s une photographie de M. G. Cahen.) 249 Un russe dans son v�tement d'hiver (page 249). (D'apr�s une photographie de M. G. Cahen.) 250 Dans tous les villages russes, une activit� humble, pauvre de moyens.--Marchands de poteries (page 248). (D'apr�s une photographie de M. G. Cahen.) 251 L�, au passage, un Kirghize sur son petit cheval (page 242). (D'apr�s une photographie de M. Thi�beaux.) 252 LUGANO, LA VILLE DES FRESQUES Par _M. GERSPACH_ Lugano: les quais offrent aux touristes une merveilleuse promenade. (Photographie Alinari.) 253 Porte de la cath�drale Saint-Laurent de Lugano (page 256). (Photographie Alinari.) 253 Le lac de Lugano dont les deux bras enserrent le promontoire de San Salvatore. (D'apr�s une photographie.) 254 La ville de Lugano descend en amphith��tre jusqu'aux rives de son lac. (Photographie Alinari.) 255 Lugano: faubourg de Castagnola. (D'apr�s une photographie.) 256 La cath�drale de Saint-Laurent: sa fa�ade est d�cor�e de figures de proph�tes et de m�daillons d'ap�tres (page 256). (Photographie Alinari.) 257 Saint-Roch: d�tail de la fresque de Luini � Sainte-Marie-des-Anges (Photographie Alinari.) 258 La passion: fresque de Luini � l'�glise Sainte-Marie-des-Anges (page 260). (Photographie Alinari) 259 Saint S�bastien: d�tail de la grande fresque de Luini � Sainte-Marie-des-Anges. (Photographie Alinari.) 260 La madone, l'enfant J�sus et Saint Jean, par Luini, �glise Sainte-Marie-des-Anges (page 260). (Photographie Alinari.) 261 La Sc�ne: fresque de Luini � l'�glise Sainte-Marie-des-Anges (page 260). 262 Lugano: le quai et le faubourg Paradiso. (Photographie Alinari.) 263 Lac de Lugano: viaduc du chemin de fer du Saint-Gothard. (D'apr�s une photographie.) 264 SHANGHA�, LA M�TROPOLE CHINOISE Par _M. �MILE DESCHAMPS_ Les quais sont anim�s par la population grouillante des Chinois (page 266). (D'apr�s une photographie.) 265 Acteurs du th��tre chinois. (D'apr�s une photographie.) 265 Plan de Shangha�. 266 Shangha� est sillonn�e de canaux qui, � mar�e basse, montrent une boue noire et mal odorante. (Photographie de Mlle H�l�ne de Harven.) 267 Panorama de Shangha�. (D'apr�s une photographie.) 268 Dans la ville chinoise, les �camelots� sont nombreux, qui d�bitent en plein vent des marchandises ou des l�gendes extraordinaires. (D'apr�s une photographie.) 269 Le poste de l'Ouest, un des quatre postes o� s'abrite la milice de la Concession fran�aise (page 272). (D'apr�s une photographie.) 270 La population ordinaire qui grouille dans les rues de la ville chinoise de Shangha� (page 268). 271 Les coolies conducteurs de brouettes attendent nonchalamment l'arriv�e du client (page 266). (Photographies de Mlle H. de Harven.) 271 Une maison de th� dans la cit� chinoise. (D'apr�s une photographie.) 272 Les brouettes, qui transportent marchandises ou indig�nes, ne peuvent circuler que dans les larges avenues des concessions (page 270). (D'apr�s une photographie.) 273 La prison de Shangha� se pr�sente sous l'aspect d'une grande cage, � forts barreaux de fer. (D'apr�s une photographie.) 274 Le parvis des temples dans la cit� est toujours un lieu de r�union tr�s fr�quent�. (D'apr�s une photographie.) 275 Les murs de la cit� chinoise, du c�t� de la Concession fran�aise. (D'apr�s une photographie.) 276 La navigation des sampans sur le Ouang-P�. (D'apr�s une photographie.) 277 Aiguille de la pagode de Long-Hoa. (D'apr�s une photographie.) 277 Rickshaws et brouettes sillonnent les ponts du Yang King-Pang. (D'apr�s une photographie.) 278 Dans Broadway, les boutiques alternent avec des magasins de belle apparence (page 282). 279 Les jeunes Chinois fl�nent au soleil dans leur Cit�. (Photographies de Mlle H. de Harven.) 279 Sur les quais du Yang-King-Pang s'�l�vent des b�timents, banques ou clubs, qui n'ont rien de chinois. (D'apr�s une photographie.) 280 Le quai de la Concession fran�aise pr�sente, � toute heure du jour, la plus grande animation. (D'apr�s une photographie.) 281 Hong-Hoa: pavillon qui surmonte l'entr�e de la pagode. (D'apr�s une photographie.) 282 �L'omnibus du pauvre� (wheel-barrow ou brouette) fait du deux � l'heure et co�te quelques centimes seulement. (D'apr�s une photographie.) 283 Une station de brouettes sur le Yang-King-Pang. (D'apr�s une photographie.) 284 Les barques s'entre-croisent et se choquent devant le quai chinois de Tou-Ka-Dou. (D'apr�s une photographie.) 285 Chinoises de Shangha�. (D'apr�s une photographie.) 286 Village chinois aux environs de Shangha�. (D'apr�s une photographie.) 287 Le charnier des enfants trouv�s (page 280). (D'apr�s une photographie.) 288 L'�DUCATION DES N�GRES AUX �TATS-UNIS Par _M. BARGY_ L'�cole maternelle de Hampton accueille et occupe les n�grillons des deux sexes. (D'apr�s une photographie.) 289 Institut Hampton: cours de travail manuel. (D'apr�s une photographie.) 289 Booker T. Washington, le leader de l'�ducation des n�gres aux �tats-Unis, fondateur de l'�cole de Tuskegee, en costume universitaire. (D'apr�s une photographie.) 290 Institut Hampton: le cours de ma�onnerie. (D'apr�s une photographie.) 291 Institut Hampton: le cours de laiterie. (D'apr�s une photographie.) 292 Institut Hampton: le cours d'�lectricit�. (D'apr�s une photographie.) 293 Institut Hampton: le cours de menuiserie. (D'apr�s une photographie.) 294 Le salut au drapeau ex�cut� par les n�grillons de l'Institut Hampton. (D'apr�s une photographie.) 295 Institut Hampton: le cours de chimie. (D'apr�s une photographie.) 296 Le basket ball dans les jardins de l'Institut Hampton. (D'apr�s une photographie.) 297 Institut Hampton: le cours de cosmographie. (D'apr�s une photographie.) 298 Institut Hampton: le cours de botanique. (D'apr�s une photographie.) 299 Institut Hampton: le cours de m�canique. (D'apr�s une photographie.) 300 � TRAVERS LA PERSE ORIENTALE Par _le Major PERCY MOLESWORTH SYKES_ _Consul g�n�ral de S. M. Britannique au Khorassan._ Une foule curieuse nous attendait sur les places de Mechhed. (D'apr�s une photographie.) 301 Un poney persan et sa charge ordinaire. (D'apr�s une photographie.) 301 Le plateau de l'Iran. Carte pour suivre le voyage de l'auteur, d'Astrabad � Kirman. 302 Les femmes persanes s'enveloppent la t�te et le corps d'amples �toffes. (D'apr�s une photographie.) 303 Paysage du Khorassan: un sol rocailleux et ravag�, une rivi�re presque � sec; au fond, des constructions � l'aspect de fortins. (D'apr�s une photographie.) 304 Le sanctuaire de Mechhed est parmi les plus riches et les plus visit�s de l'Asie. (D'apr�s une photographie.) 305 La cour principale du sanctuaire de Mechhed. (D'apr�s une photographie.) 306 Enfants nomades de la Perse orientale. (D'apr�s une photographie.) 307 Jeunes filles kurdes des bords de la mer Caspienne. (D'apr�s une photographie.) 308 Les pr�paratifs d'un campement dans le d�sert de Lout. (D'apr�s une photographie.) 309 Le d�sert de Lout n'est surpass�, en aridit�, par aucun autre de l'Asie. (D'apr�s une photographie.) 310 Avant d'arriver � Kirman, nous avions � traverser la cha�ne de Kouhpaia. (D'apr�s une photographie.) 311 Rien n'�gale la d�solation du d�sert de Lout. (D'apr�s une photographie.) 312 La communaut� Zoroastrienne de Kirman vint, en chemin, nous souhaiter la bienvenue. (D'apr�s une photographie.) 313 Un marchand de Kirman. (D'apr�s une photographie.) 313 Le �d�me de Djabalia�, ruine des environs de Kirman, ancien sanctuaire ou ancien tombeau. (D'apr�s une photographie.) 314 � Kirman: le jardin qui est lou� par le Consulat, se trouve � un mille au del� des remparts. (D'apr�s une photographie.) 315 Une avenue dans la partie ouest de Kirman. (D'apr�s une photographie.) 316 Les gardes indig�nes du Consulat anglais de Kirman. (D'apr�s une photographie.) 317 La plus ancienne mosqu�e de Kirman est celle dite Masdjid-i-Malik. (D'apr�s une photographie.) 318 Membres des cheikhis, secte qui en compte 7 000 dans la province de Kirman. (D'apr�s une photographie.) 319 La Masdjid Djami, construite en 1349, une des quatre-vingt-dix mosqu�es de Kirman. (D'apr�s une photographie.) 320 Dans la partie ouest de Kirman se trouve le Bagh-i-Zirisf, terrain de plaisance occup� par des jardins. (D'apr�s une photographie.) 321 Les environs de Kirman comptent quelques maisons de th�. (D'apr�s une photographie.) 322 Une �tour de la mort�, o� les Zoroastriens exposent les cadavres. (D'apr�s une photographie.) 323 Le fort dit Kala-i-Dukhtar ou fort de la Vierge, aux portes de Kirman. (D'apr�s une photographie.) 324 Le �Farma Farma�. (D'apr�s une photographie.) 325 Indig�nes du bourg d'Aptar, Baloutchistan. (D'apr�s une photographie.) 325 Carte du Makran. 326 Baloutches de Pip, village de deux cents maisons group�es autour d'un fort. (D'apr�s une photographie.) 327 Des forts abandonn�s rappellent l'ancienne puissance du Baloutchistan. (D'apr�s une photographie.) 328 Chameliers brahmanes du Baloutchistan. (D'apr�s une photographie.) 329 La passe de Fanoch, faisant communiquer la vall�e du m�me nom et la vall�e de Lachar. (D'apr�s une photographie.) 330 Musiciens ambulants du Baloutchistan. (D'apr�s une photographie.) 331 Une halte dans les montagnes du Makran. (D'apr�s une photographie.) 332 Baloutches du district de Sarhad. (D'apr�s une photographie.) 333 Un fortin sur les fronti�res du Baloutchistan. (D'apr�s une photographie.) 334 Dans les montagnes du Makran: � des collines d'argile succ�dent de rugueuses cha�nes calcaires. (D'apr�s une photographie.) 335 Bureau du t�l�graphe sur la c�te du Makran. (D'apr�s une photographie.) 336 L'oasis de Djalsk, qui s'�tend sur 10 kilom�tres carr�s, est remplie de palmiers-dattiers, et compte huit villages. (D'apr�s une photographie.) 337 Femme Parsi du Baloutchistan. (D'apr�s une photographie.) 337 Carte pour suivre les d�limitations de la fronti�re perso-baloutche. 338 Nous camp�mes � Fahradj, sur la route de Kouak, dans une palmeraie. (D'apr�s une photographie.) 339 C'est � Kouak que les commissaires anglais et persans s'�taient donn� rendez-vous. (D'apr�s une photographie.) 340 Le sanctuaire de Mahoun, notre premi�re �tape sur la route de Kouak. (D'apr�s une photographie.) 341 Cour int�rieure du sanctuaire de Mahoun. (D'apr�s une photographie.) 342 Le khan de K�lat et sa cour. (D'apr�s une photographie.) 343 Jardins du sanctuaire de Mahoun. (D'apr�s une photographie.) 344 Dans la vall�e de Kalagan, pr�s de l'oasis de Djalsk. (D'apr�s une photographie.) 345 Oasis de Djalsk: Des �difices en briques abritent les tombes d'une race de chefs disparue. (D'apr�s une photographie.) 346 Indig�nes de l'oasis de Pandjgour, � l'est de Kouak. (D'apr�s une photographie.) 347 Camp de la commission de d�limitation sur la fronti�re perso-baloutche. (D'apr�s une photographie.) 348 Campement de la commission des fronti�res perso-baloutches. (D'apr�s une photographie.) 349 Parsi de Yezd. (D'apr�s une photographie.) 349 Une s�ance d'arpentage dans le Seistan. (D'apr�s une photographie.) 350 Les commissaires persans de la d�limitation des fronti�res perso-baloutches. (D'apr�s une photographie.) 351 Le delta du Helmand. 352 Sculptures sassanides de Pers�polis. (D'apr�s une photographie.) 352 Un gouverneur persan et son �tat-major. (D'apr�s une photographie.) 353 La passe de Buzi. (D'apr�s une photographie.) 354 Le Gypsies du sud-est persan. 355 Sur la lagune du Helmand. (D'apr�s une photographie.) 356 Couple baloutche. (D'apr�s une photographie.) 357 Vue de Yezd, par o� nous pass�mes pour rentrer � Kirman. (D'apr�s une photographie.) 358 La colonne de Nadir s'�l�ve comme un phare dans le d�sert. (D'apr�s une photographie.) 359 Mosqu�e de Yezd. (D'apr�s une photographie.) 360 AUX RUINES D'ANGKOR Par _M. le Vicomte De MIRAMON-FARGUES_ Entre le sanctuaire et la seconde enceinte qui abrite sous ses vo�tes un peuple de divinit�s de pierre.... (D'apr�s une photographie.) 361 Embl�me d�coratif (art khmer). (D'apr�s une photographie.) 361 Porte d'entr�e de la cit� royale d'Angkor-Tom, dans la for�t. (D'apr�s une photographie.) 362 Ce grand village, c'est Siem-R�ap, capitale de la province. (D'apr�s une photographie) 363 Une chauss�e de pierre s'avance au milieu des �tangs. (D'apr�s une photographie.) 364 Par des escaliers invraisemblablement raides, on gravit la montagne sacr�e. (D'apr�s une photographie.) 365 Colonnades et galeries couvertes de bas-reliefs. (D'apr�s une photographie.) 366 La plus grande des deux enceintes mesure 2 kilom�tres de tour; c'est un long clo�tre. (D'apr�s une photographie.) 367 Trois d�mes h�rissent superbement la masse formidable du temple d'Angkor-Wat. (D'apr�s une photographie.) 367 Bas-relief du temple d'Angkor. (D'apr�s une photographie.) 368 La for�t a envahi le second �tage d'un palais khmer. (D'apr�s une photographie.) 369 Le gouverneur r�quisitionne pour nous des charrettes � boeufs. (D'apr�s une photographie.) 370 La jonque du deuxi�me roi, qui a, l'an dernier, succ�d� � Norodom. (D'apr�s une photographie.) 371 Le palais du roi, � Oudong-la-Superbe. (D'apr�s une photographie.) 371 Sculptures de l'art khmer. (D'apr�s une photographie.) 372 EN ROUMANIE Par _M. Th. HEBBELYNCK_ La petite ville de Petrozeny n'est gu�re originale; elle a, de plus, un aspect malpropre. (D'apr�s une photographie.) 373 Paysan des environs de Petrozeny et son fils. (D'apr�s une photographie.) 373 Carte de Roumanie pour suivre l'itin�raire de l'auteur. 374 Vendeuses au march� de Targu-Jiul. (D'apr�s une photographie.) 375 La nouvelle route de Valachie traverse les Carpathes et aboutit � Targu-Jiul. (D'apr�s une photographie.) 376 C'est aux environs d'Arad que pour la premi�re fois nous voyons des buffles domestiques. (D'apr�s une photographie.) 377 Montagnard roumain endimanch�. (Clich� Anerlich.) 378 Derri�re une haie de bois blanc s'�l�ve l'habitation modeste. (D'apr�s une photographie.) 379 Nous croisons des paysans roumains. (D'apr�s une photographie.) 379 Costume national de gala, roumain. (Clich� Cavallar.) 380 Dans les vicissitudes de leur triste existence, les tziganes ont conserv� leur type et leurs moeurs. (Photographie Anerlich.) 381 Un rencontre pr�s de Padavag d'immenses troupeaux de boeufs. (D'apr�s une photographie.) 382 Les femmes de Targu-Jiul ont des traits rudes et s�v�res, sous le linge blanc. (D'apr�s une photographie.) 383 En Roumanie, on ne voyage qu'en victoria. (D'apr�s une photographie.) 384 Dans la vall�e de l'Olt, les �castrinza� des femmes sont d�cor�es de paillettes multicolores. 385 Dans le village de Slanic. (D'apr�s une photographie.) 385 Roumaine du d�fil� de la Tour-Rouge. (D'apr�s une photographie.) 386 La petite ville d'Horezu est charmante et anim�e. (D'apr�s une photographie.) 387 La perle de Curtea, c'est cette superbe �glise blanche, scintillante sous ses coupoles dor�es. (D'apr�s une photographie.) 388 Une ferme pr�s du monast�re de Bistritza. (D'apr�s une photographie.) 389 Entr�e de l'�glise de Curtea. (D'apr�s une photographie.) 390 Les religieuses du monast�re d'Horezu portent le m�me costume que les moines. (D'apr�s une photographie.) 391 Devant l'entr�e de l'�glise se dresse le baptist�re de Curtea. (D'apr�s une photographie.) 392 Au march� de Campolung. (D'apr�s une photographie.) 393 L'excursion du d�fil� de Dimboviciora est le compl�ment oblig� d'un s�jour � Campolung. (D'apr�s une photographie.) 394 Dans le d�fil� de Dimboviciora. (D'apr�s des photographies.) 395 Dans les jardins du monast�re de Curtea. 396 Sina�a: le ch�teau royal, Castel Pel�s, sur la montagne du m�me nom. (D'apr�s une photographie.) 397 Un enfant des Carpathes. (D'apr�s une photographie.) 397 Une fabrique de ciment groupe autour d'elle le village de Campina. (D'apr�s une photographie.) 398 Vue int�rieure des mines de sel de Slanic. (D'apr�s une photographie.) 399 Entre Campina et Sina�a la route de voiture est des plus po�tiques. (D'apr�s une photographie.) 400 Un coin de Campina. (D'apr�s une photographie.) 401 Les villas de Sina�a. (D'apr�s une photographie.) 402 Vues de Bucarest: le boulevard Coltei. -- L'�glise du Spiritou Nou. -- Les constructions nouvelles du boulevard Coltei. -- L'�glise m�tropolitaine.--L'Universit�.--Le palais Stourdza. -- Un vieux couvent. -- (D'apr�s des photographies.) 403 Le monast�re de Sina�a se dresse derri�re les villas et les h�tels de la ville. (D'apr�s une photographie.) 404 Une des deux cours int�rieures du monast�re de Sina�a. (D'apr�s une photographie.) 405 Une demeure princi�re de Sina�a. (D'apr�s une photographie.) 406 Busteni (les villas, l'�glise), but d'excursion pour les habitants de Sina�a. (D'apr�s une photographie.) 407 Slanic: un wagon de sel. (D'apr�s une photographie.) 408 CROQUIS HOLLANDAIS Par _M. Lud. GEORGES HAM�N_ _Photographies de l'auteur._ � la kermesse. 409 Ces anciens, pour la plupart, ont une maigreur de bon aloi. 409 Des �boerin� bien prises en leurs justins marchent en roulant, un joug sur les �paules. 410 Par intervalles une femme sort avec des seaux; elle lave sa demeure de haut en bas. 410 Emplettes familiales. 411 Les m�nag�res sont l�, �galement calmes, lentes, avec leurs grosses jupes. 411 Jeune m�tay�re de Middelburg. 412 Middelburg: le faubourg qui prend le chemin du march� conduit � un pont. 412 Une m�re, songeuse, promenait son petit gar�on. 413 Une famille hollandaise au march� de Middelburg. 414 Le march� de Middelburg: consid�rations sur la grosseur des betteraves. 415 Des groupes d'anciens en culottes courtes, chapeaux marmites. 416 Un septuag�naire appuy� sur son petit-fils me sourit bonassement. 417 Roux en le d�cor roux, l'�clusier fumait sa pipe. 417 Le village de Zoutelande. 418 Les grandes voitures en forme de nacelle, recouvertes de b�ches blanches. 419 Aussi comme on l'aime, ce home. 420 Les filles de l'h�telier de Wemeldingen. 421 Il se campe pr�s de son cheval. 421 Je rencontre � l'or�e du village un couple minuscule. 422 La campagne hollandaise. 423 Environs de Westkapelle: deux femmes reviennent du �molen�. 423 Par tous les sentiers, des marmots se juch�rent. 424 Le p�re Kick symbolisait les g�n�rations des N�erlandais d�funts. 425 Wemeldingen: un moulin colossal domine les digues. 426 L'une entonna une chanson. 427 Les moutons broutent avec ardeur le long des canaux. 428 Famille hollandaise en voyage. 429 Ah! les moulins; leur nombre d�route l'esprit. 429 Les chariots enfonc�s dans les champs mar�cageux sont enlev�s par de forts chevaux. 430 La digue de Westkapelle. 431 Les �cluses ouvertes. 432 Les petits gar�ons r�dent par bandes, � grand bruit de sabots sonores.... 433 Jeune m�re � Marken. 433 Volendam, sur les bords du Zuiderzee, est le rendez-vous des peintres de tous les pays. 434 Avec leurs figures rondes, �panouies de contentement, les petites filles de Volendam font plaisir � voir. 435 Aux jours de lessive, les linges multicolores flottent partout. 436 Les jeunes filles de Volendam sont coiff�es du casque en dentelle, � forme de �salade� renvers�e. 437 Deux p�cheurs accroupis au soleil, � Volendam. 438 Une lessive consciencieuse. 439 Il y a des couples d'enfants ravissants, d'un type expressif. 440 Les femmes de Volendam sont moins claquemur�es en leur logis. 441 V�tu d'un pantalon d�mesur�, le p�cheur de Volendam a une allure personnelle. 442 Un commencement d'idylle � Marken. 443 Les petites filles sont charmantes. 444 ABYDOS dans les temps anciens et dans les temps modernes Par _M. E. AMELINEAU_ Le lac sacr� d'Osiris, situ� au sud-est de son temple, qui a �t� d�truit. (D'apr�s une photographie.) 445 S�ti Ier pr�sentant des offrandes de pain, l�gumes, etc. (D'apr�s une photographie.) 445 Une rue d'Abydos. (D'apr�s une photographie.) 446 Maison d'Abydos habit�e par l'auteur, pendant les trois premi�res ann�es. (D'apr�s une photographie.) 447 Le pr�tre-roi rendant hommage � S�ti Ier (chambre annexe de la deuxi�me salle d'Osiris). (D'apr�s une photographie.) 448 Thot pr�sentant le signe de la vie aux narines du roi S�ti Ier (chambre annexe de la deuxi�me salle d'Osiris). (D'apr�s une photographie.) 449 Le dieu Thot purifiant le roi S�ti Ier (chambre annexe de la deuxi�me salle d'Osiris, mur sud). (D'apr�s une photographie.) 450 Vue int�rieure du temple de Rams�s II. (D'apr�s une photographie.) 451 Perspective de la seconde salle hypostyle du temple de S�ti Ier. (D'apr�s une photographie.) 451 Temple de S�ti Ier, mur est, pris du mur nord. Salle due � Rams�s II. (D'apr�s une photographie.) 452 Temple de S�ti Ier, mur est, montrant des sc�nes diverses du culte. (D'apr�s une photographie.) 453 Table des rois S�ti Ier et Rams�s II, faisant des offrandes aux rois leurs pr�d�cesseurs. (D'apr�s une photographie.) 454 Vue g�n�rale du temple de S�ti Ier, prise de l'entr�e. (D'apr�s une photographie.) 455 Procession des victimes amen�es au sacrifice (temple de Rams�s II). (D'apr�s une photographie.) 456 VOYAGE DU PRINCE SCIPION BORGH�SE AUX MONTS C�LESTES Par _M. JULES BROCHEREL_ Le bazar de Tackhent s'�tale dans un quartier vieux et f�tide. (D'apr�s une photographie.) 457 Un Kozaque de Djarghess. (D'apr�s une photographie.) 457 Itin�raire de Tachkent � Prjevalsk. 458 Les marchands de pain de Prjevalsk. (D'apr�s une photographie.) 459 Un des trente-deux quartiers du bazar de Tachkent. (D'apr�s une photographie.) 460 Un contrefort montagneux borde la rive droite du �tchou�. (D'apr�s une photographie.) 461 Le bazar de Prjevalsk, principale �tape des caravaniers de Viernyi et de Kachgar. (D'apr�s une photographie.) 462 Couple russe de Prjevalsk. (D'apr�s une photographie.) 463 Arriv�e d'une caravane � Prjevalsk. (D'apr�s une photographie.) 464 Le chef des Kirghizes et sa petite famille. (D'apr�s une photographie.) 465 Notre djighite, sorte de garde et de policier. (D'apr�s une photographie.) 466 Le monument de Prjevalsky, � Prjevalsk. (D'apr�s une photographie.) 467 Des t�tes humaines, grossi�rement sculpt�es, monuments fun�raires des Nestoriens... (D'apr�s une photographie.) 467 Enfants kozaques sur des boeufs. (D'apr�s une photographie.) 468 Un de nos campements dans la montagne. (D'apr�s une photographie.) 469 Mont�e du col de Tomghent. (D'apr�s une photographie.) 469 Dans la vall�e de Kizil-Tao. (D'apr�s une photographie.) 470 Itin�raire du voyage aux Monts C�lestes. 470 La carabine de Zurbriggen intriguait fort les indig�nes. (D'apr�s une photographie.) 471 Au sud du col s'�levait une blanche pyramide de glace. (D'apr�s une photographie.) 472 La vall�e de Kizil-Tao. (D'apr�s une photographie.) 473 Le col de Karaguer, vall�e de Tomghent. (D'apr�s une photographie.) 474 Sur le col de Tomghent. (D'apr�s une photographie.) 475 J'�tais enchant� des aptitudes alpinistes de nos coursiers. (D'apr�s une photographie.) 475 Le plateau de Saridjass, peu tourment�, est pourvu d'une herbe suffisante pour les chevaux. (D'apr�s une photographie.) 476 Nous passons � gu� le Kizil-Sou. (D'apr�s des photographies.) 477 Panorama du massif du Khan-Tengri. (D'apr�s une photographie.) 478 Entr�e de la vall�e de Kachkateur. (D'apr�s une photographie.) 479 Nous baptis�mes Kachkateur-Tao, la pointe de 4 250 m�tres que nous avions escalad�e. (D'apr�s une photographie.) 479 La vall�e de Tomghent. (D'apr�s une photographie.) 480 Des Kirghizes d'Oustchiar �taient venus � notre rencontre. (D'apr�s une photographie.) 481 Kirghize joueur de fl�te. (D'apr�s une photographie.) 481 Le massif du Kizil-Tao. (D'apr�s une photographie.) 482 R�gion des Monts C�lestes. 482 Les Kirghizes m�nent au village une vie peu occup�e. (D'apr�s une photographie.) 483 Notre petite troupe s'aventure audacieusement sur la pente glac�e. (D'apr�s une photographie.) 484 Vall�e sup�rieure d'Inghiltchik. (D'apr�s une photographie.) 485 Vall�e de Kaende: l'eau d'un lac s'�coulait au milieu d'une prairie �maill�e de fleurs. (D'apr�s une photographie.) 486 Les femmes kirghizes d'Oustchiar se rang�rent, avec leurs enfants, sur notre passage. (D'apr�s une photographie.) 487 Le chirta� de Kaende. (D'apr�s une photographie.) 488 Nous salu�mes la vall�e de Kaende comme un coin de la terre des Alpes. (D'apr�s une photographie.) 489 Femmes mari�es de la vall�e de Kaende, avec leur prog�niture. (D'apr�s une photographie.) 490 L'�l�ment m�le de la colonie vint tout l'apr�s-midi voisiner dans notre campement. (D'apr�s une photographie.) 491 Un �aoul� kirghize. 492 Yeux brid�s, pommettes saillantes, nez �pat�, les femmes de Kaende sont de vilaines Kirghizes. (D'apr�s une photographie.) 493 Enfant kirghize. (D'apr�s une photographie.) 493 Kirghize dressant un aigle. (D'apr�s une photographie.) 494 Itin�raire du voyage aux Monts C�lestes. 494 Nous rencontr�mes sur la route d'Oustchiar un berger et son troupeau. (D'apr�s une photographie.) 495 Je photographiai les Kirghizes de Kaende, qui s'�taient, pour nous recevoir, assembl�s sur une �minence. (D'apr�s une photographie.) 496 Le glacier de Kaende. (D'apr�s une photographie.) 497 L'aiguille d'Oustchiar vue de Kaende. 498 Notre cabane au pied de l'aiguille d'Oustchiar. (D'apr�s des photographies.) 498 Kirghizes de Kaende. (D'apr�s une photographie.) 499 Le pic de Kaende s'�l�ve � 6 000 m�tres. (D'apr�s une photographie.) 500 La fille du chirta� (chef) de Kaende, fianc�e au kaltch� de la vall�e d'Irtach. (D'apr�s une photographie.) 501 Le kaltch� (chef) de la vall�e d'Irtach, l'heureux fianc� de la fille du chirta� de Kaende. (D'apr�s une photographie.) 502 Le glacier de Kaende. 503 Cheval kirghize au repos sur les flancs du Kaende. (D'apr�s des photographies.) 503 Retour des champs. (D'apr�s une photographie.) 504 Femmes kirghizes de la vall�e d'Irtach. (D'apr�s une photographie.) 505 Un chef de district dans la vall�e d'Irtach. (D'apr�s une photographie.) 505 Le pic du Kara-tach, vu d'Irtach, prend vaguement l'aspect d'une pyramide. (D'apr�s une photographie.) 506 Les caravaniers passent leur vie dans les Monts C�lestes, emmenant leur famille avec leurs marchandises. (D'apr�s une photographie.) 507 La vall�e de Zououka, par o� transitent les caravaniers de Viernyi � Kachgar. (D'apr�s une photographie.) 508 Le massif du Djoukoutchiak; au pied, le dangereux col du m�me nom, fr�quent� par les nomades qui se rendent � Prjevalsk. (D'apr�s une photographie.) 509 Le chaos des pics dans le Kara-Tao. (D'apr�s une photographie.) 510 �talon kirghize de la vall�e d'Irtach et son cavalier. (D'apr�s une photographie.) 511 V�hicule kirghize employ� dans la vall�e d'Irtach. (D'apr�s une photographie.) 511 Les roches pliss�es des environs de Slifkina, sur la route de Prjevalsk. (D'apr�s une photographie.) 512 Campement kirghize, pr�s de Slifkina. (D'apr�s une photographie.) 513 Femme kirghize tannant une peau. (D'apr�s une photographie.) 514 Les glaciers du Djoukoutchiak-Tao. (D'apr�s une photographie.) 515 Tombeau kirghize. (D'apr�s une photographie.) 516 L'ARCHIPEL DES FERO� Par _Mlle ANNA SEE_ �L'espoir des Fero� se rendant � l'�cole. (D'apr�s une photographie.) 517 Les enfants transportent la tourbe dans des hottes en bois. (D'apr�s une photographie.) 517 Thorshavn apparut, construite en amphith��tre au fond d'un petit golfe. 518 Les fermiers de Kirkeboe en habits de f�te. (D'apr�s une photographie.) 519 Les poneys fero�ens et leurs caisses � transporter la tourbe. (D'apr�s une photographie.) 520 Les d�nicheurs d'oiseaux se suspendent � des cordes arm�es d'un crampon. (D'apr�s une photographie.) 521 Des �lots isol�s, des falaises de basalte ruin�es par le heurt des vagues. (D'apr�s des photographies.) 522 On pousse vers la plage les cadavres des dauphins, qui ont environ 6 m�tres. (D'apr�s une photographie.) 523 Les femmes fero�ennes pr�parent la laine.... (D'apr�s une photographie.) 524 On sale les morues. (D'apr�s une photographie.) 525 Fero�en en costume de travail. (D'apr�s une photographie.) 526 Les femmes portent une robe en flanelle tiss�e avec la laine qu'elles ont card�e et fil�e. (D'apr�s une photographie.) 527 D�j� m�lancolique!... (D'apr�s une photographie.) 528 PONDICH�RY chef-lieu de l'Inde fran�aise Par _M. G. VERSCHUUR_ Groupe de Brahmanes �lecteurs fran�ais. (D'apr�s une photographie.) 529 Musicien indien de Pondich�ry. (D'apr�s une photographie.) 529 Les enfants ont une bonne petite figure et un costume peu compliqu�. (D'apr�s une photographie.) 530 La visite du march� est toujours une distraction utile pour le voyageur. (D'apr�s une photographie.) 531 Indienne en costume de f�te. (D'apr�s une photographie.) 532 Groupe de Brahmanes fran�ais. (D'apr�s une photographie.) 533 La pagode de Villenour, � quelques kilom�tres de Pondich�ry. (D'apr�s une photographie.) 534 Int�rieur de la pagode de Villenour. (D'apr�s une photographie.) 535 La Fontaine aux Bayad�res. (D'apr�s une photographie.) 536 Plusieurs rues de Pondich�ry sont larges et bien b�ties. (D'apr�s une photographie.) 537 �tang de la pagode de Villenour. (D'apr�s une photographie.) 538 Brahmanes fran�ais attendant la client�le dans un bazar. (D'apr�s une photographie.) 539 La statue de Dupleix � Pondich�ry. (D'apr�s une photographie.) 540 UNE PEUPLADE MALGACHE LES TANALA DE L'IKONGO Par _M. le Lieutenant ARDANT DU PICQ_ Les populations souhaitent la bienvenue � l'�tranger. (D'apr�s une photographie.) 541 Femme d'Ankarimbelo. (D'apr�s une photographie.) 541 Carte du pays des Tanala. 542 Les femmes tanala sont sveltes, �lanc�es. (D'apr�s une photographie.) 543 Panorama de Fort-Carnot. (D'apr�s une photographie.) 544 Groupe de Tanala dans la campagne de Milakisihy. (D'apr�s une photographie.) 545 Un partisan tanala tirant � la cible � Fort-Carnot. (D'apr�s une photographie.) 546 Enfants tanala. (D'apr�s une photographie.) 547 Les hommes, tous arm�s de la hache. (D'apr�s une photographie.) 548 Les cercueils sont faits d'un tronc d'arbre creus�, et recouverts d'un drap. (D'apr�s une photographie.) 549 Le battage du riz. (D'apr�s une photographie.) 550 Une halte de partisans dans la for�t. (D'apr�s une photographie.) 551 Femmes des environs de Fort-Carnot. (D'apr�s une photographie.) 552 Les Tanala au repos perdent toute leur �l�gance naturelle. (D'apr�s une photographie.) 553 Une jeune beaut� tanala. (D'apr�s une photographie.) 553 Le Tanala, maniant une sagaie, a le geste �l�gant et souple. (D'apr�s une photographie.) 554 Le chant du �e manenina�, � Iaborano. (D'apr�s une photographie.) 555 La rue principale � Sahasinaka. (D'apr�s une photographie.) 556 La danse est ex�cut�e par des hommes, quelquefois par des femmes. (D'apr�s une photographie.) 557 Un danseur botomaro. (D'apr�s une photographie.) 558 La danse, chez les Tanala, est expressive au plus haut degr�. (D'apr�s des photographies.) 559 Tapant � coups redoubl�s sur un long bambou, les Tanala en tirent une musique �trange. (D'apr�s une photographie.) 560 Femmes tanala tissant un lamba. (D'apr�s une photographie.) 561 Le village et le fort de Sahasinaka s'�l�vent sur les hauteurs qui bordent le Faraony. (D'apr�s une photographie.) 562 Un d�tachement d'infanterie coloniale traverse le Rienana. (D'apr�s une photographie.) 563 Profil et face de femmes tanala. (D'apr�s une photographie.) 564 LA R�GION DU BOU HEDMA (sud tunisien) Par _M. Ch. MAUMEN�_ Les murailles de Sfax, v�ritable d�cor d'op�ra.... (D'apr�s une photographie.) 565 Salem, le domestique arabe de l'auteur. (D'apr�s une photographie.) 565 Carte de la r�gion du Bou Hedma (sud tunisien). 566 Les sources chaudes de l'oued Hadedj sont sulfureuses. (D'apr�s une photographie.) 567 L'oued Hadedj, d'aspect si charmant, est un bourbier qui sue la fi�vre. (D'apr�s une photographie.) 568 Le cirque du Bou Hedma. (D'apr�s une photographie.) 569 L'oued Hadedj sort d'une �troite crevasse de la montagne. (D'apr�s une photographie.) 570 Manoubia est une petite paysanne d'une douzaine d'ann�es. (D'apr�s une photographie.) 571 Un puits dans le d�fil� de Touninn. (D'apr�s une photographie.) 571 Le ksar de Sakket abrite les Ouled bou Saad S�dentaires, qui cultivent oliviers et figuiers. (D'apr�s une photographie.) 572 De temps en temps la for�t de gommiers se r�v�le par un arbre. (D'apr�s une photographie.) 573 Le village de Mech; dans l'arri�re-plan, le Bou Hedma. (D'apr�s une photographie.) 574 Le Khrangat Touninn (d�file de Touninn), que traverse le chemin de Bir Saad � Sakket. (D'apr�s une photographie.) 575 Le puits de Bordj Saad. (D'apr�s une photographie.) 576 DE TOL�DE � GRENADE Par _Mme JANE DIEULAFOY_ Apr�s avoir crois� des boeufs superbes.... (D'apr�s une photographie.) 577 Femme castillane. (D'apr�s une photographie.) 577 On chemine � travers l'inextricable r�seau des ruelles silencieuses. (D apr�s une photographie.) 578 La rue du Commerce, � Tol�de. (D'apr�s une photographie.) 579 Un repr�sentant de la foule innombrable des mendiants de Tol�de. (D'apr�s une photographie.) 580 Dans des rues tortueuses s'ouvrent les entr�es monumentales d'anciens palais, tel que celui de la Sainte Hermandad. (Photographie Lacoste, � Madrid.) 581 Porte du vieux palais de Tol�de. (D'apr�s une photographie.) 582 Fi�re et isol�e comme un arc de triomphe, s'�l�ve la merveilleuse Puerta del Sol. (Photographie Lacoste, � Madrid.) 583 D�tail de sculpture mudejar dans le Transito. (D'apr�s une photographie.) 584 Ancienne sinagogue connue sous le nom de Santa Maria la Blanca. (Photographie Lacoste, � Madrid.) 585 Madril�ne. (D'apr�s une photographie.) 586 La porte de Visagra, construction massive remontant � l'�poque de Charles Quint. (Photographie Lacoste, � Madrid.) 587 Tympan mudejar. (D'apr�s une photographie.) 588 Des familles d'ouvriers ont �tabli leurs demeures pr�s de murailles solides. (D'apr�s une photographie.) 589 Castillane et S�villane. (D'apr�s une photographie.) 589 Isabelle de Portugal, par le Titien (Mus�e du Prado). (Photographie Lacoste, � Madrid.) 590 Le palais de Pierre le Cruel. (D'apr�s une photographie.) 591 Statue polychrome du proph�te �lie, dans l'�glise de Santo Tom� (auteur inconnu). (D'apr�s une photographie.) 592 Porte du palais de Pierre le Cruel. (D'apr�s une photographie.) 593 Portrait d'homme, par le Greco. (Photographie Hauser y Menet, � Madrid.) 594 La cath�drale de Tol�de. 595 Enterrement du comte d'Orgaz, par le Greco (�glise Santo Tom�). (D'apr�s une photographie.) 596 Le couvent de Santo Tom� conserve une tour en forme de minaret. (D'apr�s une photographie.) 597 Les �v�ques Mendoza et Xim�n�s. (D'apr�s une photographie.) 598 Salon de la prieure, au couvent de San Juan de la Penitencia. (D'apr�s une photographie.) 599 Prise de Melilla (cath�drale de Tol�de). (D'apr�s une photographie.) 600 C'est dans cette pauvre demeure que v�cut Cervant�s pendant son s�jour � Tol�de. (D'apr�s une photographie.) 601 Saint Fran�ois d'Assise, par Alonzo Cano, cath�drale de Tol�de. 601 Porte des Lions. (Photographie Lacoste, � Madrid.) 602 Le clo�tre de San Juan de los Reyes appara�t comme le morceau le plus pr�cieux et le plus fleuri de l'architecture gothique espagnole. (Photographie Lacoste, � Madrid.) 603 Ornements d'�glise, � Madrid. (D'apr�s une photographie.) 604 Porte due au ciseau de Berruguete, dans le clo�tre de la cath�drale de Tol�de. (Photographie Lacoste, � Madrid.) 605 Une torea. (D'apr�s une photographie.) 606 Vue int�rieure de l'�glise de San Juan de Los Reyes. (Photographie Lacoste, � Madrid.) 607 Une rue de Tol�de. (D'apr�s une photographie.) 608 Porte de l'h�pital de Santa Cruz. (Photographie Lacoste, � Madrid.) 609 Sur les bords du Tage. (Photographie Lacoste, � Madrid.) 610 Escalier de l'h�pital de Santa Cruz. (D'apr�s une photographie.) 611 D�tail du plafond de la cath�drale. (D'apr�s une photographie) 612 Pont Saint-Martin � Tol�de. (D'apr�s une photographie.) 613 Guitariste castillane. (D'apr�s une photographie.) 613 La �Casa consistorial�, h�tel de ville. (D'apr�s une photographie.) 614 Le �patio� des Templiers. (D'apr�s une photographie.) 615 Jeune femme de Cordoue avec la mantille en chenille l�g�re. (D'apr�s une photographie.) 616 Un coin de la Mosqu�e de Cordoue. (Photographie Lacoste, � Madrid.) 617 Chapelle de San Fernando, de style mudejar, �lev�e au centre de la Mosqu�e de Cordoue. (D'apr�s une photographie.) 618 La mosqu�e qui fait la c�l�brit� de Cordoue, avec ses dix-neuf galeries hypostyles, orient�es vers la Mecque. (Photographie Lacoste, � Madrid.) 619 D�tail de la chapelle de San Fernando. (D'apr�s une photographie.) 620 Vue ext�rieure de la Mosqu�e de Cordoue, avec l'�glise catholique �lev�e en 1523, malgr� les protestations des Cordouans. (D'apr�s une photographie.) 621 Statue de Gonzalve de Cordoue. (D'apr�s une photographie.) 622 Statue de do�a Maria Manrique, femme de Gonzalve de Cordoue. (D'apr�s une photographie.) 623 D�tail d'une porte de la mosqu�e. (D'apr�s une photographie.) 624 End of Project Gutenberg's Le Tour du Monde; Mont C�leste, by Various *** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK LE TOUR DU MONDE; MONT C�LESTE *** ***** This file should be named 30518-8.txt or 30518-8.zip ***** This and all associated files of various formats will be found in: http://www.gutenberg.org/3/0/5/1/30518/ Produced by Carlo Traverso, Christine P. Travers and the Online Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This file was produced from images generously made available by the Biblioth�que nationale de France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr) Updated editions will replace the previous one--the old editions will be renamed. 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INDEMNITY - You agree to indemnify and hold the Foundation, the trademark owner, any agent or employee of the Foundation, anyone providing copies of Project Gutenberg-tm electronic works in accordance with this agreement, and any volunteers associated with the production, promotion and distribution of Project Gutenberg-tm electronic works, harmless from all liability, costs and expenses, including legal fees, that arise directly or indirectly from any of the following which you do or cause to occur: (a) distribution of this or any Project Gutenberg-tm work, (b) alteration, modification, or additions or deletions to any Project Gutenberg-tm work, and (c) any Defect you cause. Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg-tm Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of electronic works in formats readable by the widest variety of computers including obsolete, old, middle-aged and new computers. It exists because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from people in all walks of life. Volunteers and financial support to provide volunteers with the assistance they need, are critical to reaching Project Gutenberg-tm's goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will remain freely available for generations to come. In 2001, the Project Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure and permanent future for Project Gutenberg-tm and future generations. To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4 and the Foundation web page at http://www.pglaf.org. Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit 501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at http://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent permitted by U.S. federal laws and your state's laws. The Foundation's principal office is located at 4557 Melan Dr. S. Fairbanks, AK, 99712., but its volunteers and employees are scattered throughout numerous locations. Its business office is located at 809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887, email business@pglaf.org. Email contact links and up to date contact information can be found at the Foundation's web site and official page at http://pglaf.org For additional contact information: Dr. Gregory B. Newby Chief Executive and Director gbnewby@pglaf.org Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide spread public support and donations to carry out its mission of increasing the number of public domain and licensed works that can be freely distributed in machine readable form accessible by the widest array of equipment including outdated equipment. Many small donations ($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt status with the IRS. The Foundation is committed to complying with the laws regulating charities and charitable donations in all 50 states of the United States. Compliance requirements are not uniform and it takes a considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up with these requirements. We do not solicit donations in locations where we have not received written confirmation of compliance. To SEND DONATIONS or determine the status of compliance for any particular state visit http://pglaf.org While we cannot and do not solicit contributions from states where we have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition against accepting unsolicited donations from donors in such states who approach us with offers to donate. International donations are gratefully accepted, but we cannot make any statements concerning tax treatment of donations received from outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff. Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation methods and addresses. Donations are accepted in a number of other ways including checks, online payments and credit card donations. To donate, please visit: http://pglaf.org/donate Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic works. Professor Michael S. Hart is the originator of the Project Gutenberg-tm concept of a library of electronic works that could be freely shared with anyone. For thirty years, he produced and distributed Project Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of volunteer support. Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed editions, all of which are confirmed as Public Domain in the U.S. unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily keep eBooks in compliance with any particular paper edition. Most people start at our Web site which has the main PG search facility: http://www.gutenberg.org This Web site includes information about Project Gutenberg-tm, including how to make donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks.